Séance publique
M. d’Escouloubre
M. Hocquart
M. l’Abbé St-Jean
M. Carré
M. Poitevin
M. Gez
M. de Latresne
M. de Villeneuve
M. l’Archevêque
M. le Maire
M. Jamme
M. l’Abbé Jamme
M. Desazars
Procès-verbal de la séance publique du 3 mai 1806:
L’Académie a célébré sa fête du 3 mai. N'ayant pas d’ouvrage à couronner au premier instant, pour ainsi dire, de sa restauration, il manquait à la solennité de cette
La Galerie des Illustres où elle tient ses séances publiques ne pouvant pas être assez tôt réparée, le Maire de Toulouse avait mis à sa disposition la salle d’audience de l’Hôtel de la Mairie, beaucoup moins grande et qui ne peut pas contenir au-delà de trois cents personnes. Il avait fallu borner à ce nombre les billets d’entrée et laisser bien du monde dans les cours et sur la place voisine.
La séance commença à quatre heures. Les autorités constituées, les Sociétés Savantes, toutes les personnes considérables par leurs talents, leur rang et leur éducation y avait été invitées. On avait réservé des places distinguées pour les dames.
Le Modérateur de l’Académie, M. Jamme, qui avait obtenu du gouvernement qu’elle fut rétablie sur ses bases anciennes, ayant fait ordonner le silence, prononça un discours dont la première partie fut consacrée à célébrer la victoire qui a porté l’Empire français à un si haut degré de gloire et de puissance. Jamais auditoire ne fut plus attentif et plus prompt à saisir les traits d’éloquence et les rapprochements heureux qui lient au temps présent et les souvenirs de l’histoire et toutes les espérances que nous devons fonder sur le génie du héros qui nous gouverne.
L'Eloge de Clémence Isaure trouvait naturellement sa place après le tribut de louanges payé au génie réparateur qui a rétabli son culte. L'auteur y joignit la mention toujours agréable des anciens troubadours mainteneurs du Gai Savoir qui, tenant leurs séances dans un verger délicieux, associaient la joie de la poésie à celle qu’inspire le retour du printemps et avaient voulu que les prix qu’ils distribuaient fussent l’emblème de cette alliance.
L'Académie, quoiqu’elle n’eut point de prix à donner, n’a pas voulu négliger cette pieuse cérémonie. Elle avait fait bénir et déposer sur l’autel de la Daurade la couronne de roses dont la statue de Clémence Isaure est toujours parée le trois de mai et c’est cette couronne que les commissaires allèrent chercher, avec la pompe ordinaire, ayant une escorte d’hommes précédée d’un corps de musique militaire. Le peuple à qui le retour de cette fête rappelait tant d’agréables souvenirs, suivit les commissaires à l’église de la Daurade et, le cortège grossissant à chaque pas, cette église qui est vaste put à peine suffire pour contenir cette foule immense.
Quatre commissaires de la Fabrique reçurent à la porte de l’église et accompagnèrent dans le sanctuaire les commissaires de l’Académie qui se mirent à genoux sur le marchepied du maître-autel. M. l’Abbé Double, premier vicaire, en l’absence de M. le curé qui était malade, après un petit discours fort bien fait relatif à cette fête littéraire, nationale et religieuse, leur remit la corbeille proprement décorée où était placée la couronne de Clémence Isaure. Le Bedeau de l’Académie la reçut de leurs mains et la porta respectueusement marchand au-devant d’eux. À la porte de l’église, ils saluèrent les commissaires de la Fabrique et revinrent à l’Académie au bruit des fanfares.
Ils étaient allés à la Daurade par la rue des Balances; à leur retour ils passèrent par la rue de Clémence Isaure
Pendant que les commissaires s’en occupaient, la séance littéraire n’avait pas été interrompue. M.l’Abbé Jamme, l’un des Mainteneurs, lut un Hymne de sa composition en l’honneur de la Vierge, après avoir fait remarquer que l’ouvrage qui avait été couronné en 1324 et qui est la pièce la plus ancienne du Recueil de la Gaie Science, était aussi un Hymne à la Vierge. Le rapprochement de deux époques remarquables dans l’histoire de l’Académie parut faire plaisir et les vers de M. l’Abbé Jamme furent très applaudis.
M. de Latresne, Sous-Modérateur de l’Académie, commença alors la lecture de sa traduction du sixième livre de l’Énéide et cette lecture fut couverte d’applaudissements. L'arrivée des commissaires l’interrompit vers le milieu du chant.
Sur la table qui était devant le Modérateur était honorablement placé, suivant l’usage, le Registre de l’Académie qui contient l’histoire de l’Académie, depuis 1323 jusqu’en 1356. C'est sur ce Registre que fut placée la couronne de Clémence Isaure.
L'auditoire nombreux que M. de Latresne avait enchanté par la beauté de ses vers, de son organe et de son débit, parut craindre que la cérémonie du couronnement ne lui dérobât la seconde moitié de sa traduction du sixième livre de l’Énéide. On vit la joie renaître lorsqu’il reprit sa lecture. On l’écouta jusqu’au bout avec la même attention, interrompue seulement par de nombreux applaudissements qui se prolongèrent longtemps encore après qu’il eut fini.
La séance fut terminée par le couronnement de la statue de Clémence Isaure. Les paroles que M.Jamme lui adressa retentirent dans le cœur de tous les assistants qui s’en retournèrent pénétrés de cette douce joie qu’inspire l’amour des Lettres et que les Mainteneurs des Jeux Floraux, à l’exemple de leurs devanciers, ont toujours tâché d’entretenir dans une ville dont les habitants en général ont un goût naturel pour tout ce qui tient à la culture de l’esprit – [Signature] Jamme, Modérateur.