À partir de ce point, le lac, jusque-là étroit et encaissé entre des hauteurs à pic dans le poétique pays d’Uri, s’ouvre tout à coup, s’élargit, se rétrécit entre les deux pointes formant canal après Gersau, se rouvre encore plus large après le passage, s’étend au loin entre les rives les plus variées, du canton de Schwitz au canton d’Underwald, et dessine en lignes grandioses l’imposant tableau de ses quatre baies profondes : celle de Weggis, celle qui porte Lucerne, celle de Kussnacht et celle qui, creusant dans les terres à la manière des eaux d’Uri, entre dans Underwald jusqu’à Alpnach. À travers la brume qui voilait les bords opposés à l’approche du soir, on voyait serpenter dans le lointain la route tortueuse et pittoresque qui longe le pied des rochers, au bord d’une eau bleue et murmurante, depuis Alpnach jusqu’aux campagnes en plat pays des environs de Lucerne.
Le crépuscule s’éteignit enfin et, de suite après, la lune émergea des hauts sommets et jeta gracieusement sur toute cette mer, sur toutes ces villes, sur tous ces caps, sur toutes ces montagnes, sur les murs blancs de tous ces châteaux, sa lumière tranquille et recueillie.