Un jour, ils atteignirent une hauteur qui dominait les forêts épaisses de ce canton bien nommé et d’où l’on voyait les lacs de Sarnen et de Lungern. Le panorama était majestueux : de toutes parts, des forêts profondes, remuées par le vent, balançaient leurs énormes masses de verdure autour des lacs et autour des villages, qu’on voyait blanchir de loin en loin, et qui faisaient pitié au milieu de ces grandes œuvres de la nature. Les montagnes lointaines avaient changé en bleu le vert foncé de leurs végétations et fermaient l’horizon de leurs lignes sévères se mêlant au ciel. Le ciel était clair. C’était le soir, sur les cinq heures. Le croissant de la lune, comme un lambeau de nuage détaché par le vent, se montrait timidement entre deux sommets et épiait le moment où, le soleil ayant disparu, elle pourrait remplacer la pourpre et l’or du couchant par la blanche lumière de ses rayons argentés. En quelques endroits de l’horizon, des brouillards étendus se confondaient avec les nuages et avec le ciel ; on eût dit la mer. Une partie du lac de Sarnen reluisait au soleil ; l’autre était dans l’ombre et reproduisait les collines et les rochers qui l’entourent. Le silence était profond ; les rumeurs du vent dans le feuillage le rendaient plus profond encore.