Transcription Transcription des fichiers de la notice - Une chercheuse, pp. 2-3 Janvier, Louis-Joseph 1888 chargé d'édition/chercheur Boraso, Silvia (éd.) Silvia Boraso, Université Ca' Foscari et Université Paris Est Créteil ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle) PARIS
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1888 Fiche : Silvia Boraso, Université Ca' Foscari et Université Paris Est Créteil ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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Au lieu d’aller immédiatement vers le lit, Fanny regarda au loin dans l’horizon. Déjà le soleil poudrait d’or les cimes des arbres feuillus, pénétrait dans les bosquets touffus, zébrait de bandes rouges, orangées ou jaunâtres les gazons et prés fleuris qui s’étendaient par les vals et les collines ; déjà, sa lumière blanchissait les rubans de route qui se déroulaient par la plaine en serpentant et zigzaguant à l’infini. La Marne ondulait lentement entre ses bordures de roseaux et ses saulaies, léchant amoureusement ses rives plates pendant que la brume légère née de ses eaux s’évaporait dans l’air irisé du matin fleurissant. Les premières odeurs du foin coupé la veille s’exhalaient des tas laissés dans la prairie et montaient aux narines de la chambrière, lui soufflant des désirs comme si elle eût été de ces femmes cultivées pour lesquelles la nature est comme une complice parce qu’elles en subissent la poésie et qu’elles en comprennent les mystères.

Une abeille vint frôler sa joue fraîchement couverte d’un œil de poudre de riz odorante.

-Oh ! la vilaine bête, fit-elle, en cherchant à lui donner une chiquenaude.

L’abeille était déjà loin.

Elle se pencha à la fenêtre pour la voir voleter sous l’azur. Son attention en fut détournée par une chanson que chantaient des faneurs. Ils débouchaient d’un chemin creux, se rendant en troupe à leurs travaux. Sur un rythme berceur, l’un d’eux lançait à pleine voix une villanelle rustique dont tous les autres répétaient en chœur le joyeux refrain.