Pourtant, qu’il est pittoresque, le chemin de ce cimetière dans un convoi d’après-midi ! Le vent du soir traverse les profondeurs vertes des manguiers en fleurs, des tamarins au léger feuillage jaune, découpé en fines dentelures, qu’on voit un peu partout. Il vous apporte du cimetière même des parfums bizarres, barbares, qu’on a un âcre plaisir à respirer. Rien de la pourriture, de la putréfaction banales. Ce sont des fleurs, des plantes qui, croissant là, sauvages, tumultueusement, dans ce sol privilégié, sous une action chimique intense, ont développé, dans ce laboratoire et comme sous la main experte d’un macabre parfumeur, des essences introuvables. La griserie qui s’en échappe favorise les plus fantastiques rêveries : dans le soir qui lentement descend, des souffles glissent derrière les tombes et vous invitent à causer… Au-devant de soi, surplombant le cimetière, plane la montagne aux lourdes frondaisons… Mais il ne faut pas se faire enterrer dans le soleil de midi quand on désire donner ces sensations-là à ses amis.