[B8v] Mais bien en feray la raison.
Point ne me trouvera si nice
Que de luy ne face justice:
Remedier je veulx au cas.
Comment
[bois]
Sa, mon conseil, plus que le pas!
Escoutez que je vous vueil dire:
Le cueur si me fend de grand yre
Tant que bien pres suis de la mort.
[C1r]
Deshonneur et grand villennie:
Je ne sçay se je le vous die
Et se secret me le tiendrez.
Ha, mon seigneur, et où direz
Vostre secret, sinon à nous?
Vous sçavez bien que sommes tous
À vostre noblesse obligez:
Pour nulle chose ne laissez
De nous dire vostre vouloir;
Mon frere, comme j’ay espoir,
Comme moy secret le tiendra.
Mon seigneur, point il n’adviendra
Que maintenez ung tel courroux.
Prenez vigueur et force en vous
Et faictes comme duc doibt faire:
Mais qu’il ne vous vueille desplaire,
Vostre faict à nous descouvrez.
Chers amys, puisque le voulez
De mot en mot le vous diray:
Jamais de tel cueur je n’aymay
Homme comme mon chevalier;
[C1v] Souvent l’avez bien peu cuyder
Au semblant que je luy monstroye:
Par mon baptesme plus j’aymoye
Que nul sur la terre vivant.
Pardonnez moy se j’en dy tant:
Il a faict trop grand mesprison
Envers moy, car par trahyson
Ma femme a voulu decepvoir
Pour sa compaignie avoir,
Faulcement et mauvaisement,
Par quoy je jure bon serment
Qu’en mon cueur j’en ay grand destresse:
Ma femme, la noble
Si m’a trestout le faict compté
Et de mot à mot racompté,
Comme tres saige et bien apprise,
Affin qu’elle ne fust reprise,
Car aussi le droict si le veult,
Helas,et se le cueur m’en deult,
Point n’en debvez avoir merveille:
N’est ce pas chose nompareille
Que celluy en qui me fioye
Et à qui tout mon cas disoye
M’a voulu decepvoir ainsi?
Il n’y a point ne ça ne cy:
[C2r] Par la raison mourir en doibt.
Ha, mon seigneur, pour Dieu ne soit!
Ne vueillez faire tel oultraige:
Se vous seroit trop grand dommaige
D’ung si beau chevalier destruyre;
Ayder luy debvez, non pas nuyre,
Car il est gratieulx et gent,
Honneste, courtoys, diligent,
De lignee bien renommee:
Toute en est vostre
Certainement je ne croy mie
Que pensé il ait telle follie
Que de ma dame requerir
De deshonneur: plus cher mourir
Il auroit, je vous certifie.
Il est doulx, plein de courtoysie,
Servy il vous a longuement
Des sa jeunesse honnestement
Sans point de nul reproche avoir.
Premierement vous fault sçavoir
Qu’il vous a juré loyaulté
Sans point vous faire faulceté,
Et que vostre honneur garderoit
En tous les lieux où il seroit.
[C2v] Par quoy monsieur ne debvez mye
Luy faire si tost villennie
Sans estre du cas informé:
Pour cruel vous seriez nommé
Se aucun mal luy voulez faire.
Le second conseiller
Bien congnoys que dictes au contraire
De tout vostre entendement,
Et bien parleriez autrement,
Se vous vouliez, pour tout certain:
Point ne fault querir si loingtain
Les passages que alleguez.
Vous sçavez bien que vous trouvez:
Qui est traystre à son seigneur
Doibt mourir à grand deshonneur
Sans nulle contradition;
Par quoy eschet pugnition
Au
Et se vous voulez soubstenir
Le contraire de ce que dis,
Je dy moy sans nulz contrediz
Que le voulez favoriser
Et son grand deshonneur priser.
Par quoy je dy à mon advis
Que l’homme en ung tel cas surpris
[C3r] Trop endurer mal ne pourroit,
Car qui tout vif l’escorcheroit
Des maulx ne souffreroit assez.
Pourtant doncques plus n’en parlez
Et ne soubstenez que raison.
Or venons à conclusion:
Plus attendre je ne pourroye
Se vengeance de luy n’avoye.
Voulez vous plus riens replicquer,
Ny autre raison appliquer
Qui soubstenez
Certes, mon seigneur droicturier,
Envers vous ne veulx contredire,
Mais mon advis si est de dire
Que cestuy certes luy veult mal.
Je parle amont et aval
Pour celluy qui n’est pas icy:
Je cuyde s’il sçavoit cecy
Que bien se sçauroit excuser
Du cas qu’on le veult accuser.
Il me semble que bon seroit
Qu’à vous venir on le feroit:
S’il y vient bon signe sera,
[C3v] S’il n’y vient adoncq apperra
Qu’il a devers vous aucun tort;
Meure s’il a gaigné la mort.
Quant par devant vous le verrez,
Tout vostre courroux luy direz:
S’il se excuse justement
Ayez y bon entendement,
Et s’il ne
Adoncq le pourrez accuser
À droict, et le faire mourir.
Par mon serment, j’ay grand plaisir
Que m’avez ainsi conseillé.
De ce cas suis esmerveillé:
Point je ne cuyde, par mon ame,
Qu’il ait pensé cestuy diffame,
Ne contre moy tel deshonneur
Qui suis son naturel seigneur.
Pourtant vostre conseil prendray:
Mon messaiger appelleray
Pour aller faire le messaige.
Comment