Transcription Transcription des fichiers de la notice - Jean-Baptiste André Godin à François Cantagrel, 16 mars 1853 Godin, Jean-Baptiste André (1817-1888) 1853-03-16 chargé d'édition/chercheur Équipe du projet FamiliLettres (Familistère de Guise - CNAM) & Projet EMAN (UMR Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle) PARIS
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1853-03-16 Familistère de Guise et Bibliothèque centrale du CNAM ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR).
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Godin indique à Cantagrel qu'il a oublié son adresse et qu'il lui fait remettre sa lettre par son associé qui lui livrera une cuisinière. Il lui annonce qu'il revient de Paris où il a pris connaissance de sa lettre sur les essais phalanstériens d'Amérique, confrontés aux difficultés de réalisation du travail attrayant. Godin juge que les premiers disciples de Fourier ont négligé l'étude des questions pratiques ; leur bonne opinion des hommes pour entrer dans la voie du travail attrayant n'est pas plus fondée que leur croyance en la vertu du suffrage universel en 1848. Godin explique que la grande industrie tend à un résultat opposé à celui du travail attrayant car elle procède par la division des tâches à l'infini pour assujettir l'individu. Il confie à Cantagrel que la constitution d'un ménage sociétaire présente de l'intérêt, qu'il ne croit pas à une réalisation phalanstérienne en France et qu'il pourrait concentrer ses efforts à la réalisation « à côté de mon établissement [d']une cité ouvrière dans laquelle un véritable confortable serait accordé à mes ouvriers eu égard à l'état dans lequel ils vivent ». Godin demande à Cantagrel s'il peut lui expédier deux tonneaux de vin ordinaire. Français Godin indique à Cantagrel qu'il a oublié son adresse et qu'il lui fait remettre sa lettre par son associé qui lui livrera une cuisinière. Il lui annonce qu'il revient de Paris où il a pris connaissance de sa lettre sur les essais phalanstériens d'Amérique, confrontés aux difficultés de réalisation du travail attrayant. Godin juge que les premiers disciples de Fourier ont négligé l'étude des questions pratiques ; leur bonne opinion des hommes pour entrer dans la voie du travail attrayant n'est pas plus fondée que leur croyance en la vertu du suffrage universel en 1848. Godin explique que la grande industrie tend à un résultat opposé à celui du travail attrayant car elle procède par la division des tâches à l'infini pour assujettir l'individu. Il confie à Cantagrel que la constitution d'un ménage sociétaire présente de l'intérêt, qu'il ne croit pas à une réalisation phalanstérienne en France et qu'il pourrait concentrer ses efforts à la réalisation « à côté de mon établissement [d']une cité ouvrière dans laquelle un véritable confortable serait accordé à mes ouvriers eu égard à l'état dans lequel ils vivent ». Godin demande à Cantagrel s'il peut lui expédier deux tonneaux de vin ordinaire.

À M. Cantagrel

Le 16 Mars 1853

Mon cher ami,

Privé de votre adresse que j'ai oubliée, cette lettre vous sera remise par les soins de mon associé, qui vous délivrera la cuisinière que vous choisirez.

J'arrive de Paris où j'avais déjà appris ce que votre lettre contient sur les essais Phalanstériens d'Amérique. C'est une nouvelle preuve des difficultés à surmonter pour arriver à la réalisation du travail attrayant, grâve [sic] question dont les premiers disciples de Fourier même ont fait trop bon marché et dont le côté pratique a trop échappé à leurs études. Il se pourrait bien qu'imbus d'idées théoriques dont l'évidence des vérités qu'elles contiennent ne peut nous laisser décourager, nous n'en soyons pas moins destinés à reconnaître un peu tard que notre bonne opinion des hommes pour entrer dans la voie du travail attrayant ne soit pas plus fondée qu'elle ne l'était en 48 sur l'usage qu'ils ont fait du suffrage universel.

Le travail attrayant ne sera possible que là où les aptitudes seront assez étendues chez tous les individus pour qu'elles puissent s'exercer avec distinction et utilité dans un grand nombre de branches diverses du travail en général. La grande industrie qui s'organise à pas de géant en ce moment dans le monde civilisé tend précisément à un résultat contraire. Le travail s'y divise à l'infini mais pour assujétir [sic] l'individu à un détail exclusif et le priver de connaissances plus étendues.

S'il est une considération qui puisse militer en faveur de cet état de chose ce ne pourrait être que la facilité qu'il procurera pour la constitution du ménage sociétaire c'est-à-dire de la vie en commun. Cela m'amène à vous dire que depuis que j'ai été obligé de refouler si profondément mes espérances de réalisation Phalanstériennes en France, en vue de laquelle je n'aurais pas voulu éparpiller le peu de force et de concours que je pouvais lui accorder, je me suis déjà bien demandé des fois si ma position ne me permettait pas de réaliser à côté de mon établissement une cité ouvrière dans laquelle un véritable confortable serait accordé à mes ouvriers eu égard à l'état dans lequel ils vivent.

Ceci est à l'état d'étude, une autre fois je vous en dirai davantage.

Êtes-vous en mesure de m'expédier du vin de qualité ordinaire satisfaisante ? Je n'ai pas eu le temps de m'en entendre avec vous dernièrement. Je pourrais en prendre deux pièces.

Tout à vous d'amitié