Transcription Transcription des fichiers de la notice - <em>Mythologie</em>, Paris, 1627 - V, 05 : Des Isthmiens Conti, Natale 1627 chargé d'édition/chercheur Équipe Mythologia Projet Mythologia (CRIMEL, URCA ; IUF) ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle) PARIS
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1627 Fiche : Projet Mythologia (CRIMEL, URCA ; IUF) ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l’Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
Paris (France), BnF, NUMM-117380 - J-1943 (1-2)
Français

Des ieux Isthmiens.

CHAPITRE V.

Inſtitution des ieux Iſthmiens. CES ieux s’exhiboient en l’Iſthme ou deſtroit de Corinthe, qui ſepare la Moree de la terre ferme de Grece. Plutarque en la vie de Theſee eſcrit qu’il inſtitua ces combats, afin que comme les Grecs celebroient la ſolemniteé des Olympiens en l’honneur de Iupiter par l’ordonnance d’Hercule, ils celebraſſent auſſi les Iſthmiens par ſon inſtitution à l’honneur de Neptun. Car ceux qu’on ſolemniſoit au meſme deſtroit, ſe faiſoient la nuict, & auoient pluſtoſt apparence ou forme de Sacrifice & de myſtere, que de ieux de feſte publique : leſquels Siſyphe fils d’Æole eſtablit ayant recõnu le corps de Melicerte ſon parent ; & fit cet honneur-là au fils d’Athamas. Toutefois aucuns veulent dire que ces ieux Iſthmiques furent inuentez à l’honneur & memoire de Scyron, nottable voleur & bandoulier, qui faiſant ſa retraitte en des rochers & barricaues prés de Megare, exerçoit toutes ſortes de cruautez enuers les paſſans : & que Theſee les commanda en expiation de ſa mort, parce qu’il eſtoit ſon couſin, fils de Caneth & de Henioche fille de Pithee ſon grand pere maternel. Les autres eſcriuent que ce fut à cauſe de Sinnis Procuſte fils de Neptun mis à mort par Theſee : les autres en alleguent diuerſes raiſons conſentans toutefois qu’ils ſont de l’inuention de Theſee, lequel ordonna, notamment aux Corinthiens de donner à ceux qui viendroient d’Athenes pour veoir l’esbatement des ieux, au plus honorable endroit du parc & pourpris où ſe faiſoit la feſte, autant de place que pourroit couurir la voile du nauire ſur lequel ils ſeroient venus. Ils furent nommez Iſthmiques de ce deſtroit de la Moree nommé Iſthme, à l’emboucheure duquel on les ſolemniſoit tous les cinq ans prés du temple de Neptun. Neantmoins le Poëte Archias dit qu’ils ſe faiſoient non à l’honneur de Neptun ; mais ſeulement de Palemon, autrement dict Melicerte :

La Grece a quatre ieux, tous quatre conſacrez, Deux aux Dieux immortels, deux aux humains ſacrez. De Pin, de Pommes, d’Ache, & de verd Oliuier, En laßis les treſſent pour les ſalarier. Iupiter, Apollon, Melicerte Archemore. Eſdits esbats le chef des vainqueurs on decore

Le prix des Iſthmiens eſtoit ordinairement vn chappeau de branchage de Pin gentiment cordonné. Palme ſymbole de victoire.Et combien qu’en tous les ſuſdicts exercices on donnaſt aux vainqueurs des guirlandes faites des ſuſdites ramees ; toutefois la couſtume eſtoit par tout de leur bailler en main vn rameau de Palme en s’en retournant, comme dit Pauſanias en l’Eſtat d’Arcadie. Prix des ieux Iſthmiẽs.On y faiſoit tant d’honneur aux vainqueurs, & leurs Compatriotes les accueilloyent auec tant de ioye & de reſioüiſſance, qu’ils les enleuoient, & les portoient à force de bras l’eſpace de pluſieurs lieuës ſans qu’ils touchaſſent en terre : & n’entroieut pas dans leur ville par les portes ordinaires comme les autres : mais on leur faiſoit vn pont à la haſte par lequel ils entroient en grande pompe & magnificence par deſſus les murailles ; & leurs noms eſtoient aux deſpens du commun grauez en la place publicque en des colomnes. Or Theſee arriué à Delos fut le premier qui fit tels ieux de prix, y propoſant vne branche de palme pour le vainqueur, comme dit Plutarque. Voyez liur. 8. chap. 1.Les autres maintiennent que tels ieux ne furent pas inſtituez pour le ſujet ſuſdit, mais bien pour l’amour du corps de Melicerte trouué en ce deſtroit ſans ſepulture, & content ainſi toute l’hiſtoire. Learche & Melicerte furent fils d’Ino & d’Athamas : & Athamas forcené tua Learche que ſa mere ietta dans vne chaudiere d’eau boüillante, & elle auſſi tranſportee de ſon eſprit craignant la furie d’Athamas, s’enfuyant par la montagne de Gerane qui eſtoit en la contree des Megariens, ſe precipita finalement d’vne roche nommee Moluris en la mer auec Melicerte. Ino fut faite l’vne des Nymphes Nereides, dicte Leucothee ; & Melicerte fut transformé en vn Dieu nommé Palæmon. Depuis les Nereides apparurent dançans à Siſyphe Roy de Corinthe, qui vid le corps de Melicerte porté par vn Dauphin ; & luy firent commandement de faire cele- brer les ieux Iſthmiens à l’honneur dudit Melicerte. Les autres diſent que le corps de Melicerte emporté en l’Iſthme demeura ſans eſtre enſeuely ; & que pour cette cauſe la peſte s’engendra au pays, pour laquelle faire ceſſer, demandans l’auis de l’Oracle, ils eurent reſponſe qu’il n’y auoit point d’autre remede à leur mal, que de faire les funerailles de Melicerte, & inſtituer à ſon honneur vn tournoy & iouſte funebre. Ce que les Corinthiens ayans pratiqué quelque temps, puis diſcontinué, la peſte les ſaiſit derechef : auſquels l’Oracle reſpondit pour la ſeconde fois, qu’il falloit continuer à perpetuité l’honneur qu’ils auoyent commencé de faire à l’Heros Melicerte, & y propoſer pour prix du jeu l’ache, herbe funebre. Puis apres fut ordonné que l’on couronneroit de Pin les vainqueurs, à cauſe de l’affinité qu’il a auec la mer. Ainſi doncques le corps de Melicerte fut pris & enſeuely à Schœnunte par Amphimache & Donacir Corinthiens. Cependant Muſee en vn liure qu’il a faict de ces jeux, dit qu’on ſouloit celebrer deux ſortes de jeux en ce deſtroit ; l’vn en l’honneur de Neptun, l’autre de Melicerte. Les Grecs auoient encores d’autres manieres de jeux & ſpectacles, comme les Hydrophores à Athenes : & d’autres nations propoſoient d’autres prix, comme les Sicyoniens és jeux Pythiques donnoient aux vainqueurs des phioles d’argent : à Pellene, ville d’Achaïe le prix de la feſte Theoxene (en laquelle on faiſoit vn general Sacrifice à tous les Dieux) ou Mercuriale, ſelon d’autres, eſtoit vn habillement. A Ægine le prix des Poëtes qui auoyent chanté de plus beaux airs en faueur de Dionyſe, eſtoit vne aumaille : & cette ſolemnité s’appelloit Amphorite. Mais pource qu’elles n’eſtoient pas fort illuſtres, & que les Autheurs en font peu de mention, ie croy que vous auez dequoy vous contenter de ce que deſſus. Nous pourſuiurons donc le reſte qui ſert à noſtre œuure entrepriſe.