Transcription Transcription des fichiers de la notice - <em>Mythologie</em>, Paris, 1627 - V, 08 : Des Satyres Conti, Natale 1627 chargé d'édition/chercheur Équipe Mythologia Projet Mythologia (CRIMEL, URCA ; IUF) ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle) PARIS
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1627 Fiche : Projet Mythologia (CRIMEL, URCA ; IUF) ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne Nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l’Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
Paris (France), BnF, NUMM-117380 - J-1943 (1-2)
Français

Des Satyres.

CHAPITRE VIII.

Genealogie des Satyres incertaine.IE n’ay point encore rencontré d’ancien autheur digne de creance, qui ait expoſé quelle eſt l’origine & la race des Satyres ; ny de quels parens ils ſont engendrez ; ny où, & quand ils ont commencé d’eſtre, ny pourquoy l’antiquité es a tenus pour Dieux, & confeſſe librement que ie n’en puis moy-meſme trouuer la cause. Toutefois ie ne laisseray d’expliquer ce que i’en ay peu apprendre. Il ne nous faut pas arreſter à l’opinion de ceux qui les font fils de Faune, ou de Saturne, veu qu’ils ne ſont fondez ſur aucune certaine raiſon. Pline au ſeptieſme liure, Chapitre ſecond de ſon histoire naturelle, dit qu’en la religion des Cartadules, qui eſt és montagnes des Indes Orientales, ſubiette au Leuant æquinoctial, on trouue des Satyres (animal ayant face d’homme, fort leger & viſte du pied) leſquels marchent quelquefois à quatre pieds, & quelquefois courent à deux comme ſeroit vn homme. Ils ſont ſi ſoudains, qu’à peine les peut-on prendre, s’ils ne ſont vieux ou malades. Pauſanias és Attiques dit qu’Eupheme partant de Carie pour prendre la routte d’Eſpagne, fut par fortune de mer pouſſé iuſques aux extremitez de la mer Oceane, où il trouua pluſieurs iſles deſertes : & que contraint par la tourmente, il entra dans l’vne d’icelles, nommee Satyride, & rencontra vne ſ ſorte de manans ſauuages, d’vn farouche & horrible regard, de poil roux, ayans des queuës entre les feſſes, peu moindres que celles des cheuaux.Satyres ; animaux laſcifs.Dés qu’ils apperceurent venir ces eſtrangers, ils coururent droit aux nauires, & ſans mot dire ſe ruans ſur les femmes qui eſtoient és vaiſſeaux, leur firent beaucoup de violence, ſi bien qu’à peine les purent-ils chaſſer à grands coups d’eſcorgees & baſtons. Alors les mariniers craignans vn plus grand outrage, leur abandonnerent vne Eſtrangere, qu’ils auoient en leur compagnie ; ſur laquelle ſe desbordans auec beaucoup de laſciueté & de petulance, ils ſe montrerent fort inſolens, & deſchargerent leur luxure ſur tous les creux de ſa perſonne. On diſoit les Satyres eſtre compagnons de Bacchus, auſſi bien que les Pans & les Silenes, & le Poëte Nilus les qualifie, aymans meſdiſance & opprobre. Or ils ont eſté nommez Satyres (ſelon aucuns) du mot Grec ſathé, ſignifiant les aiguillons & chatoüillemens de Venus. Auſſi ont-ils la reputation d’eſtre extremement enclins à paillardiſe, de là eſt né le prouerbe, plus paillard qu’vn Satyre. Quand ils venoient ſur l’aage on les appelloit Silenes, ſelon le dire de Pauſanias és Attiques. Mais l’enarrateur de Nicandre dit que ceux qu’on nomme Satyres, les anciens les ont appellez Silenes, du mot Grec ſilainein, ſignifiant meſdire. Neantmoins d’autres cuidoient que ce fuſſent Demons ou diables, qu’ils ent adoré comme Dieux. La couſtume eſtoit de leur offiir les premices des pommes & raiſins, comme teſmoigne Leonidas.Iſles des Satyres.Pomponius Mela eſcrit qu’au delà de la montagne d’Atlas en la Mauritanie, il y auoit des Iſles eſquelles de nuict on voyoit de la clarté & lumiere, où l’on oyoit auſſi des bruits de cymbales, fluſtes, fifres & tãbours, & cependant on n’y voyoit perſonne de iour : eſquelles on croyoit que les Satyres habitaſſent. En la nauigation de Hannon, Capitaine des Carthaginiens, qu’il fit par-delà les colomnes d’Hercule en Lybie, de laquelle eſtant de retour à Carthage il poſa l’hiſtoire au Temple de Saturne. Arrian teſmoigne qu’entre autres choſes eſtranges, ce qui s’enſuit eſtoit eſcrit : Iuſqu’à ce que nous arriuaſmes en vn grand golfe, que nos truchemens nous dirent eſtre nommé Corne du Veſpre où il y auoit vne autre Iſle, en laquelle entrez nous ne voyõs rien du long du iour ſinon qu’vne foreſt, mais de nuict paroiſſoient pluſieurs feux allumez, et oyons vne voix de fluſtes & fifres, et vn incroyable bruit de cymbales & de tambours ; dont nous euſmes grand peur. Ces monſtres eſtans quelquefois apparus aux hommes les plus groſſiers & timides, ſans cõsiderer qu’vne meſme nature ne peut eſtre maligne & diuine tout enſemble, prindrent pour Dieu tout ce qui leur apparoiſſoit d’admirable ou eſpouuenttable. Et pource que les Satyres auoient le bruit d’habiter és foreſts & montagnes, ils les mirent au rang des Dieux, afin qu’ils ne fiſſent aucun dommage aux haras & trouppeaux qu’ils pourroient rencontrer en leur chemin. Philippe Archiduc d’Auſtriche mena quant quant & luy deux Satyres en vie à Gennes l’an 1548. l’vn en aage d’vn ieune garçon ; l’autre en aage viril, ce qui montre aſſez que la race n’en eſt point encore perduë. Diſons conſequemment quelque choſe des Silenes.