Robinson finit par avoir fait son île.
Je réponds à tel ennui, tel besoin, agacement, par l'image de circonstances où je serais inaccessible : ainsi l'image d'une île dorée où rien ne me pourrait parvenir que ce qui me plairait, surtout par le souvenir !
Ou plutôt : d'abord je la ferme complètement, mon île. Ensuite je vois des inconvénients à cette perfection insulaire et je laisse pénétrer – mais seulement tels jours – à telle heure – quelques nouvelles, amis, livres… C'est la mémoire qui m'a fourni mon île – mémoire déformable, pliable à mon besoin du moment. A mon ennui, j'ai fait correspondre sa négation. J'ai ajouté à cette négation quelques conditions positives, positivement désirées : la mer, – le sud – etc. En niant et en désirant de la sorte, s'est formé un rébus, une énigme – dont le mot est une image particulière. Je pourrais dessiner cette île sur la mer. Note que cette île où tu serais, tu l'imagines vue du large, conique, dorée, blonde . . . Quelle mixture ! – Pourquoi faut-il qu'un fantôme de ce genre réponde à ces besoins ? Besoins ? – Le mot est un peu étroit. Car – je réponds aussi à telle paix, plénitude – par l'image de mauvais moments, par des prévisions funestes, un horrible mélange…