[1] Monge entame la lettre à sa fille sur le même ton qu’elle. Le 8 messidor an IV [26 juin 1796]. Louise écrit à son père : « Tu nous dis de t’écrire dans ta dernière [lettre n°9], mon cher papa, et tu oublies de nous dire où, ce qui est fort mal […][.] » Louise n’est pas d’un tempérament facile. Cela apparaît aussi dans une lettre lorsqu’elle cherche à justifier la brièveté de ses lettres le 26 thermidor an IV [13 août 1796] : « Il est cependant ennuyeux, mon cher papa, de toujours t’écrire sans que tu reçoives jamais de nos nouvelles. Je t’assure que cela rétrécit très fort mes idées. Dans mes premières lettres je te faisais de grandes narrations de nos victoires mais comme je pourrais tout aussi bien perdre mon temps aujourd’hui qu’à l’ordinaire je me bornerai à te dire en deux mots que je t’aime de tout mon cœur. » Le caractère de Louise est ce que qui la distingue de sa sœur Émilie comme Catherine le souligne alors qu’elle en donne des nouvelles à son père le 27 thermidor an IV [14 août 1796] : « Elle est plus aimable à mon égard, c’est une autre tournure que ma chère Émilie ; mais qui a bien son mérite. » Marey fait un portrait de Louise en soulignant la force de ses liens avec son père dans sa lettre de Nuits le 15 prairial an V [3 juin 1797] : « Il ne me reste plus qu’à vous parler d’un objet bien cher à votre cœur de votre chère Louise qui ne réclame qui ne voit qui ne respire que son papa. Il n’est pas dans mon caractère de flatter qui que ce soit en dépend de la vérité, mais je puis vous dire sans craindre de vous donner de la vanité que vous avez de charmants enfants qui vous sont bien attachés. Deux fruits de l’excellente éducation que vous leur avez donné. Louise a quelques irrégularités de caractère très bien rachetées par une sensibilité exquise et mille autres qualités, [elle] est une des intéressantes citoyennes que je connais. Nous sommes en correspondance suivie au sujet de quelques disputes polémiques qui [ ? ] entre nous ; elle soutient sa cause avec toute la grâce et l’esprit imaginable et j’ai beaucoup de plaisir à m’entretenir avec elle. » Voir les lettres n°4 et 14. Louise, elle-même, affirme son goût pour la politique. Voir la lettre n°118.
[2] Louise écrit le 8 messidor [an IV] [26 juin 1796]. « Il est arrivé ici depuis huit jours un lougre de quatorze canons à deux mats qui fait l’admiration de tout Paris, il est chargé de farine et vient de Rouen. Nous supposons qu’on l’a fait descendre jusqu’ici pour montrer aux Parisiens ce que c’est qu’un bâtiment à deux mats car il n’est d’aucune nécessité d’être armé sur la Seine de quatorze canons, d’avoir des voiles et des mâts pour être traîné par des chevaux et des ancres et amarré au garde-fou d’un pont. » Louise cherche à maintenir dans sa correspondance le type d’échange que son père aime entretenir avec elle.
[3] Pierre-Alexandre-Laurent FORFAIT (1752-1807), ingénieur-hydrographe de marine. En 1794, il étudie et réalise une péniche à voile, destinée à ravitailler Paris, munie d'une mâture rabattable. Il est membre de l'Institut national en février 1796, et produit un « Mémoire sur la navigation de la Seine ». La même année il est chargé par le Directoire d’explorer le cours de la Seine depuis Le Havre jusqu’à Paris afin d’examiner la possibilité de remonter avec des navires d’une certaine dimension, possibilité qu’il prouva en venant mouiller au bas du Pont Royal. En tant qu’examinateur et ministre de la marine, Monge doit bien connaître les travaux de l’ingénieur. Monge précise à sa fille les qualités de cette nouvelle forme de navire, en définissant clairement son objet et sa spécificité. Cette lettre permet d’apprécier la nature pédagogique des échanges entre Monge et sa fille Louise. Chez Monge se confondent le père et le professeur. Sur ses rapports avec les enfants et les jeunes gens, voir les lettres n°9, 13, 14, 48, 171 et 173.
[4] Voir la lettre n°19. Pierre-Louis ROEDERER (1754-1835) achète en janvier 1795 la moitié des actions du journal à Corancez pour la somme de 73 000 francs. Roederer en reste propriétaire jusqu’en 1811. C’est d’ailleurs grâce à un prêt de Bonaparte que Roederer effectue son acquisition. (CHAPPEY J.-L. (2003), « Pierre-Louis Roederer et la presse sous le Directoire et le Consulat : l'opinion publique et les enjeux d'une politique éditoriale. In: Annales historiques de la Révolution française. N°334, pp. 1-21. p. 1. Voir aussi LENTZ T. (1994), « La presse républicaine modérée sous la Convention thermidorienne et le Directoire : Pierre-Louis Roederer, animateur et propriétaire du Journal de Paris et du Journal d’économie publique », Revue historique, CCXCII/2, pp. 297-313.)
[5] Louise joue de la harpe. Voir la lettre n°4. Elle écrit à son père le 8 messidor [an IV] [26 juin 1796] : « […] j’ai une commission très intéressante à te donner, qui est de me rapporter des cordes de Naples [.] L’Italie et Naples principalement, [sont] fort renommée[s]pour les cordes de harpe et mon oncle m’a chargée de te dire de m’en rapporter depuis la plus grosse jusqu’à la plus fine tant rouge, que bleue, et blanche. ». Voir les lettres n°39, 66, 81 et 95.
[6] Nicolas-Joseph MAREY (1760-1818) et Émilie MONGE (1778-1867).