Ce texte est un extrait de l'article publié en 2023 dans les Annales de Bourgogne : Lémonon-Waxin, Isabelle, et Cécile Robin. « Victorine de Chastenay au temps des révolutions : une savante, des archives, une édition numérique », Annales de Bourgogne, vol. 95, no. 2, 2023, pp. 97-114. https://doi-org.inshs.bib.cnrs.fr/10.3917/anbo.232.0097

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Fille d’Érard Louis Guy, comte de Chastenay de Lanty (1748-1830), et de Catherine Louise d'Herbouville (1751-1831), Louise Marie Victoire dite Victorine de Chastenay de Lanty (1771-1855) appartient à une ancienne famille noble bourguignonne établie à Essarois depuis le xviie siècle. Élevée à Paris avec son frère Henri, né en 1772, elle reçoit une éducation très soignée - identique à celle de son frère, chose rare à l’époque - et côtoie la noblesse parisienne et les intellectuels que ses parents reçoivent dans leur salon, malgré une situation financière délicate. Elle étudie pendant quelques temps auprès de Félicité du Crest, comtesse de Genlis (1746-1830) - la préceptrice des enfants du duc d’Orléans - dont elle juge le goût « assez médiocre » et « les maîtres en tout genre [..] de second ordre », mais développe auprès d’elle une amitié avec le futur Louis-Philippe (1773-185) de la maison princière d’Orléans. Reçue chanoinesse du chapitre d’Épinal à quinze ans, elle demeure célibataire et conserve le titre de « Madame » que lui confère cet état tout au long de sa vie. Après les tumultes de la Révolution qui menacent directement la famille mais la laissent indemne, Victorine de Chastenay publie quelques traductions de l’anglais comme Le Village abandonné de l’écrivain Oliver Goldsmith (1797) ou Les mystères d’Udolphe de la romancière Ann Radcliffe (1797-1798). Puis, elle devient une autrice à part entière avec Le calendrier de Flore en 1802-1803, qui est suivi par plusieurs ouvrages historiques [1]. Sous le Directoire, le Consulat puis l’Empire, Victorine de Chastenay côtoie des personnalités politiques et savantes à l’exemple de Joseph Fouché (1759-1820), Paul Barras (1755-1829), François Arago (1786-1853), Georges Cuvier (1769-1832) ou encore Antoine-Isaac Silvestre de Sacy (1758-1838). À ses visites mondaines, succèdent ses participations aux cours publics d’histoire naturelle au Collège de France et d’astronomie à l’Observatoire de Paris, elles-mêmes rythmées par de longues heures dédiées à la lecture et l’écriture.

Tout au long de sa vie, elle consacre de longues heures à développer son approche encyclopédique des savoirs au travers de milliers de notes manuscrites de lectures et de cours publics ou privés, de correspondances, d’écrits du for intérieur, de recherches généalogiques, de brouillons et de compositions diverses (théâtre, poésie, listes, pensées, citations, chansons). Une petite partie de ses manuscrits lui servira d’ailleurs à rédiger ses Mémoires qui seront publiés à titre posthume en 1897.

[1] Chastenay (Victorine), Du génie des peuples anciens, ou tableau historique et littéraire du développement de l’esprit humain chez les peuples anciens..., Paris, Maradan, 1808 ou encore Chastenay (Victorine), Les Chevaliers normands, en Italie et en Sicile : et considérations générales sur l’histoire de la chevalerie, et particulièrement sur celle de la chevalerie en France, Paris, Maradan, 1816.