Chronique assassine, 1992

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1992, année charnière dans l’histoire politique de la Guinée.

Après la prise de pouvoir par la junte militaire le 3 avril 1984 et l’accès à la présidence de Lansana Conté, il faut attendre quelques temps pour avancer les principes d’une nouvelle gouvernance dans le sillage des profondes mutations internationales des années 90.

On assiste à la mise en place du Conseil Transitoire de Redressement National, composé de civils et de militaires,  chargé d’élaborer une nouvelle constitution qui aboutit en décembre 1990 à la « Loi fondamentale ».

Cette loi énonce les grands fondements de la gouvernance, établit le régime présidentiel, adopte les principes de la liberté d’expression, de la liberté d’entreprise et instaure le multipartisme.

La mise au point des textes législatifs prendra effet dans le courant de 1991 et la presse prépare ses publications, une centaine de titres vont paraître, dont le journal satirique « le Lynx », créé par Souleymane Diallo et son équipe de journalistes rentrés au pays dans la foulée de ces nouvelles dispositions.

Le 1^er numéro du Lynx paraît le 7 février 1992. Williams Sassine est sollicité rapidement pour collaborer comme rédacteur du journal. Il va créer la « Chronique Assassine » à partir du N° 4 du 16 mars 1992 et deviendra rapidement un pilier de l’information satirique.

Dans les premières contributions, un journaliste interview un militaire convaincu de la force incontournable du nouveau pouvoir. Il s’exprime sans retenue dans le langage « petit militaire » qu’il gardera tout au long de la série « Mémoire d’une histoire désarmée », ce langage parfois obscur. Les militaires prennent leur revanche sur les civils avec le mépris des gagnants, comme si c’était leur tour légitime de gouverner, avec un Président (non élu), comme Sassine le répète à l’envi.

Parmi les grands évènements de l’année 1992, abondamment commentés, on peut noter la visite du Pape en février 1992.  Elle a marqué les esprits, puisque pendant deux jours, les Guinéens auront l’eau et l’électricité à volonté et cela tient du miracle. En Juin, une délégation guinéenne accompagnera le Président au sommet de Rio pour la Conférence des Nations Unies pour l’Environnement et le développement durable, suivie du sommet de l’OUA à Dakar. Ces rencontres sont l’objet d’analyses internationales et le rappel encore de la pauvreté du pays, de la dégradation de l’environnement, des poubelles et ordures – avec tous les sens qu’on peut donner à ce terme -, de la saleté environnante et du manque d’hygiène.

La préparation de l’élection présidentielle, première du genre en Guinée, prévue en décembre, finalement reportée à l’année suivante, fait l’objet de nombreux commentaires. Le multipartisme étant décidé, Sassine tient ses lecteurs informés de la création foisonnante des partis. Il cite régulièrement la liste des présidents inamovibles en Afrique qui se succèdent à eux-mêmes.

Williams Sassine est très discret sur sa vie, l’invitation à une résidence d’écriture au Festival de Limoges en octobre 1991 lui permet d’engager des nouveaux contacts, c’est ainsi qu’il est invité à Montréal en avril 1992 où il ne s’attarde pas, suffisamment pour évoquer le Canada dans ses écrits, notamment l’avance de la Guinée en fuseau horaire.