La correspondance inédite du géomètre Gaspard Monge (1746-1818)

La correspondance inédite du géomètre Gaspard Monge (1746-1818)


1768-1772  : Lettres de Monge à son élève Dubreuil du Marchais


Auteurs : Monge, Gaspard

Présentation de la collection
  • COLLECTION EN CONSTRUCTION

    « L’esprit est un des feux de l’âme, et il en est de lui, à peu près, comme de ceux du corps. » [1] écrit Monge à son élève en 1769. Voilà qui exprime très clairement l'intensité avec laquelle le jeune Monge s’engage dans la recherche scientifique de 1768 à 1772 et le plaisir qu’il y éprouve.

    La richesse et la spécificité de la correspondance échangée entre le jeune professeur et son élève officier du Génie se manifestent au travers d’une mise en perspective avec les travaux scientifiques de la même période. Plus que de compléter l’image traditionnelle de Monge, pédagogue, paternel et mature, les lettres du jeune professeur à son élève éclairent un trait spécifique de la dynamique d’élaboration mathématique de Monge.

    Du Breuil du Marchais[2] est sans doute le premier correspondant scientifique de Monge. Ils se rencontrent en 1767 lorsque Du Breuil intègre l’École royale du Génie. Monge maintient le lien maître-élève au-delà du temps de la formation à l’école et de l’espace de l’École. En 1769, lorsque Dubreuil quitte l’École, Monge continue d’enseigner en décrivant ses travaux mathématiques et en les soumettant à son élève jusque dans une correspondance alors que le jeune officier a quitté l’École.

    Découvrir et lire les lettres inédites du géomètre Monge à un élève de l’École du Génie, c’est d’abord avoir accès à l’élaboration des axes et des principes de son œuvre mathématique et sans doute de son action publique. Les lettres adressées à du Marchais sont rédigées pendant une période dont René Taton souligne la valeur et la portée.[3] Une simple recherche de l’exploitation par Taton des lettres de Monge à du Marchais montre qu’elles sont citées dans les différents chapitres qui traitent de l’œuvre scientifique de Monge en « géométrie analytique »[4], en « géométrie infinitésimale »[5] et en « analyse mathématique »[6]. En effet, si les années Mézières sont le plus souvent associées à l’élaboration de la géométrie descriptive, cette dernière s’inscrit dans un dense réseau de recherches mathématiques.

    Cela indique non seulement la valeur documentaire de la correspondance mathématique produite par Monge pendant ces mêmes années, mais aussi la spécificité de ses premiers travaux dans lesquels il lie étroitement la géométrie pure, descriptive, infinitésimale, analytique et l’analyse.[7]


    De 1768 à 1770, Monge continue sa formation scientifique en menant une étude des lignes courbes, objet qui ne fait pas partie des Éléments de Mathématiques. Si Monge complète ainsi les connaissances acquises, pour son étude des objets géométriques, c’est pour former un enseignement destiné aux élèves de Mézières. Monge amorce une extension de l’application de l’analyse à la géométrie dans l’espace. Dans les lettres de la même période, il soumet à son élève des questions de géométrie et d’analyse infinitésimale.

    Pendant l’année 1771, le corpus de la correspondance mathématique de Monge n’est constitué que des lettres aux deux membres de l’Académie, une seule à d’Alembert et les autres à Condorcet.[8] Monge fait part aux deux académiciens de sa tentative d’adaptation aux surfaces du calcul des variations. Ces expérimentations d’application des méthodes infinitésimales se poursuivent et conduisent Monge à se confronter aux équations aux dérivées partielles.

    L’année 1772 marque un changement dans le ton de la correspondance. Lorsque Monge reprend sa correspondance avec son élève, il entreprend le récit de ses recherches en analyse de 1770 à 1771. Il expose sa démarche et ses résultats fort du succès de ses recherches. En effet, en septembre 1771 son étude des surfaces courbes l’a conduit à déterminer clairement d’une part, la relation qui existe entre ces équations et les surfaces définies par un même mode de génération et d’autre part, le rôle des équations aux dérivées partielles en théorie des surfaces. Cette relation se réalise au travers de l’établissement d’une classification. Monge montre que les équations aux dérivées partielles sont les expressions analytiques adéquates à la détermination des propriétés des surfaces courbes, propriétés pertinentes pour l’établissement d’une classification des lignes courbes. Enfin, en poursuivant l’étude de ses objets géométriques Monge parvient à préciser la nature des fonctions arbitraires qui entrent dans l’intégration des équations aux dérivées partielles.[9]

    Ainsi, avant d’obtenir un statut institutionnel à l’Académie des sciences de Paris, le jeune géomètre apporte des éléments sur la table d’une discussion qui, depuis près de vingt ans, oppose d’Alembert à D. Bernoulli, Euler et Lagrange.[10] L’étude des premières années de sa pratique scientifique qui mêle enseignement et recherche permet d’observer la mise en place d’un programme d’élaborations mathématiques précis et de rendre sensible le temps long de sa réalisation.

    La correspondance du jeune professeur à son élève manifeste les rapports dynamiques entre la transmission avec l’élaboration des connaissances et met en lumière non pas les usages du savoir mathématique dans une perspective pédagogique mais les usages d’un objectif pédagogique dans la constitution d’un savoir mathématique dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle en France. Cette correspondance montre la fidélité de Monge au principe acquis chez les Oratiens.

     

    [1] Monge à Dubreuil du Marchais Mézières, le 12 novembre 1769 (IX GM 1. 6/7).

    [2] On trouve plusieurs graphies du nom : « du Breuil » et « Du Breuil »dans les biographies de de Launay et d’Aubry. Taton utilise « du Marchais », comme Monge. Dans les États militaires, c’est « Dubreuil du Marchais » qui est utilisé. Il y a assez peu de renseignements relatifs à Dubreuil du Marchais. Si nous  ignorons sa date de naissance, nous savons qu’il est élève à Mézières jusqu’en 1768. Nous pouvons alors former l’hypothèse qu’il a entre deux et quatre ans de différence avec Monge. En rassemblant les informations contenues dans la correspondance et celles données par les États militaires de France, certains éléments peuvent être établis : en 1769, il est  officier dans le Régiment Royal des vaisseaux en garnison à Rouen au moins jusqu’en janvier 1770. Il figure dans l’État militaire de France pour l’année 1774, il est identifiable grâce à son grade de capitaine. Monge dans sa lettre de février 1772 le félicite pour sa promotion. C’est donc en 1771 qu’il passe capitaine. Dans l’État militaire de 1785 et de 1789, Dubreuil du Marchais est commandant dans le Régiment Royal des vaisseaux à Saint-Omer et décoré de l’ordre de Saint-Louis. Correspondances - Volume relié I, Fonds Monge, archives de l’École polytechnique.

    [3] TATON R. (1951), p. 19.

    [4] TATON R. (1951), pp. 101-147.

    [5] TATON R. (1951), pp. 148-240.

    [6] TATON R. (1951), pp. 277-304.

    [7] TATON R. (1981), “Gaspard Monge”, Dictionary scientific biography. S. B., pp. 469-478. "Monge, Gaspard." Complete Dictionary of Scientific Biography. 2008. Retrieved February 13, 2012 from Encyclopedia.com: http://www.encyclopedia.com/doc/1G2-2830903025.html.

    [8] Voir en annexe la table de la correspondance mathématique de 1768 à 1772.

    [9] TATON R. (1951), p. 184.

    [10] TATON R. (1951), pp. 182-184.

  • On trouve plusieurs graphies du nom : « du Breuil » et « Du Breuil »dans les biographies de de Launay et d’Aubry. Taton utilise « du Marchais », comme Monge. Dans les États militaires, c’est « Dubreuil du Marchais » qui est utilisé. Il y a assez peu de renseignements relatifs à Dubreuil du Marchais. Si nous ignorons sa date de naissance, nous savons qu’il est élève à Mézières jusqu’en 1768. Nous pouvons alors former l’hypothèse qu’il a entre deux et quatre ans de différence avec Monge. En rassemblant les informations contenues dans la correspondance et celles données par les États militaires de France, certains éléments peuvent être établis : en 1769, il est officier dans le Régiment Royal des vaisseaux en garnison à Rouen au moins jusqu’en janvier 1770. Il figure dans l’État militaire de France pour l’année 1774, il est identifiable grâce à son grade de capitaine. Monge dans sa lettre de février 1772 le félicite pour sa promotion. C’est donc en 1771 qu’il passe capitaine. Dans l’État militaire de 1785 et de 1789, Dubreuil du Marchais est commandant dans le Régiment Royal des vaisseaux à Saint-Omer et décoré de l’ordre de Saint-Louis. Correspondances - Volume relié I, Fonds Monge, archives de l’École polytechnique.

Auteur de la présentationDupond, Marie

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Fiche descriptive de la collection

AuteurMonge, Gaspard
Date(s)
  • 1768
  • 1772
GenreCorrespondance
LangueFrançais

CouvertureMézières (France)
ÉditeurMarie Dupond (UDPN/USPC); projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle).
Mentions légalesFiche : Marie Dupond (UDPN/USPC); projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Collection créée par Marie Dupond Collection créée le 11/09/2018 Dernière modification le 07/02/2022