Guizot épistolier

François Guizot épistolier :
Les correspondances académiques, politiques et diplomatiques d’un acteur du XIXe siècle


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Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mardi 2 octobre 1849

Plus je pense à Constantinople & plus je suis épouvantée. Si l'affaire ne s’arrange pas tout de suite, c’est la guerre générale. Que vais-je devenir alors ? Je pourrai rester ni en Angleterre ni en France. J’irai à Naples, mais quelle saison ! Ah, quand comment, nous reverrons-nous ? Quelle destinée ! J’ai vu Metternich hier. Je voulais avoir l’avis d’un esprit sensé. Il ne croyait pas. D'abord pas aux faits tels que les donnent les journaux, et puis, fussent-ils vrais, il croyait que la porte reculerait. Moi j’ai peur que non. J’ai vu aussi Morny & Flahaut revenant de Londres où la nouvelle avait produit un effet immense. Morny dit : si cela est et si l'Angleterre s'en mêle, tenez pour certain que nous en sommes aussi. Le parti est près de faire comme l'Angleterre. Flahaut ajoute. & soyez sûre que dans ce cas là la Prusse soutient la France & l'Angleterre contre l’Autriche et la Russie. Il peut avoir raison. Les journaux Anglais ce matin sont à la guerre, ils poussent l'Angleterre à soutenir la Porte. Nous sommes honnis. En vérité je n'ai jamais été si troublée pour mon compte et je ne puis penser à autre chose. Tout ce que vous me dites sur Paris, tout en me donnant du souci, ne m’empêcherait pas de m’y rendre. Mais en tous cas, & surtout vu la grave complication qui menace le monde, j’attendrai encore huit ou dix jours avant de me décider. La saison avance cependant, le temps devient laid. Même pour le court voyage à Paris c’est une petite difficulté, que serait-ce s'il s’agit d'un autre voyage ?
Décidément il y a du froid entre Lord John & Palmerston. Celui-ci est venu le chercher le jour même où l’autre était parti pour Woburn, en sorte qu’ils ne se sont pas vus, & Palmerston est retourné chez Beauvale où il est établi avec sa femme. à ma connaissance ces deux messieurs ne se sont point rencontrés depuis plus de 6 semaines mais je crois vous avoir déjà dit cela Van de Weyer est venu chez moi hier. Il va passer deux mois à Brighton. Aussi peu amoureux de Lord Palmerston que tout autre. A propos Collaredo veut quitter. Il ne peut pas supporter les rapports avec lord Palmerston. Avez- vous lu un décente note de celui-ci à Naples ? & la réponse de Naples, excellente. Et à propos encore, avez-vous lu ce que M de Chateaubriand dit de moi dans son Outre tombe. Et encore,la Révolution du 24 février par M. Dunoyer. Van de Weyer vient de me la donner et me fait de cela un grand éloge. Voici votre lettre. Adieu, Adieu. Je ne pense qu'à vous & à Constantinople Adieu.

Auteur : Mirbel, Lizinska Aimée Zoé de (1796-1849)
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Je ne puis vous envoyer la lettre à l'occasion de laquelle celle-ci a été copiée ou pour mieux dire composée. Mme de Damrémont (chose fort singulière) excepté la correspondance de son mari, n'a jamais gardé une seule lettre de qui que ce soit ; elle les brûle toutes presque immédiatement, et la revue rétrospective ne s'enrichira pas de ses dépouilles. Mme de Charnailles sa fille a l'habitude contraire et voilà comment elle possédait la lettre de son frère.
Mais la mère et la fille m'ont dit n'avoir jamis reçu une lettre pareille à celle-ci. Jamais il n'a fait de pareilles tartines politiques. Ce style n'est pas le sien. A cette époque M. Damrémont avait moins de 20 ans. Ce n'est pas la correspondance d'un homme de cet âge. Moi qui souvent entends lire ses lettres aucunes ne ressemeblent à celle-là et aujourd'hui ou les opinions d'opposition qui y sont exprimées pourraient lui être favorables, Mme de Damrémont la renie comme ayant été pensée par son fils. Il est évident que le mauvais vouloir qui se manifeste dans l'autre lettre où sa probité est attaquée l'aura poursuivie dans celle-ci ne lui prêtent un esprit d'opposition dont la connaissance devait entraver sa carrière. 
M. de Damrémont va quitter le Brésil. 

Auteur : Hugo, Charles-Mélanie-Abel Hugo (1826-1871)
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Dimanche 19 août 1849

Monsieur,

Votre nom en France a ému les coeurs généreux et les les esprits indépendants. Vous avez dû recevoir des témoignages d'haute et profonde sympathie. Ils ont fait plus d'honneur encore à ceux qui les ont apportés qu'à celui qui les a reçus.
Je veux être de ceux qui pourront un jour s'honorer d'avoir salué votre retour dans votre patrie. Ce n'est pas ici une adhésion politique ; je ne méconnais pas les distances. C'est une adhésion qui vient du cœur. Je vous ai vu rentrer en France avec joie, avec une joie sincère et je tenais à vous le dire. Je voulais être ainsi de ceux qui n'ont pas attendu pour vous féliciter que la faveur publique vous soit revenue. car les hommes comme vous sont rares dans les siècles et dans les nations, et le pays se sentira bientôt porté vers vous. A votre tour, Monsieur, vous lui ferez passer le détroit. Les électeurs du 13 mai n'ont pas [révisé] votre nom, ils l'ont réservé. Tous ce qui vous illustre appartient plus encore à la France qu'à vous. Si vous l'aimez, elle vous admire. Elle vous est nécessaire comme patrie, vous lui êtes nécessaire comme citoyen.
Recevez, Monsieur, l'assurance de ma haute considération et de mon admiration dévouée.
Charles Hugo

Auteur : Royer-Collard, Hippolyte (1802-1850)
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Maintenant que votre voix vient de se faire entendre jusqu'au milieu de nous, et que vous nous avez parlé, non plus comme la première fois en philosophe et en publiciste, mais en citoyen actif, peut à venir combattre comme nous et avec nous, avec l'éloquence de votre parole et l'autorité de vos conseils pour la cause de la civilisation attaquée de toute part [...] Nous avons été heureux d'y retrouver cette élévation de vues, ce beau langage, qui nous semblaient perdus en France depuis plus d'un an. La netteté de votre position et votre courageuse franchise, ressortent avec éclat, à côté des ambages de M. Duchatel, de ses hésitations, de ses déclarations à double sens, & j'ajouterai, de son style inqualifiable. Si vous deviez rester à Londres, et du haut de votre exil volontaire, juger publiquement l'état présent de notre pays, lui expliquer les causes et les résultats de cette situation & enseigner au monde les moyens d'arriver à la solution d'un problème qui semble insoluble, je ne trouverai jamais assez d'approbation, assez d'éloges, assez d'admiration, pour ce noble rôle que vous vous feriez au milieu de cette tristesse des temps. [...]
Je crois, peut-être je me trompe, mais enfin je crois fermement que l'état de la France n'est pas précisément celui que vous supposez. Quelqu'un qui n'a pas vécu depuis un an au milieu de nous, et qui n'a pas vu de près et par lui-même ce qui s'est passé, ne saurait imaginer que le prodigieux changement se sont accomplis en si peu de temps dans ses esprits. Tout ce que vous dites de l'aversion générale pour la République et de l'impossibilité de s'établir en France et de prendre au sérieux ce mode de gouvernement a été vrai pendant les premiers mois qui ont suivi la Révolution de février ; mais il n'en est plsu de même aujourd'hui. Je n'ai, en ce qui me concerne, aucun goût pour la République mais en m'arrêtant avec une impartialité à l'observation sérieuse des faits, je me permettrai de dire que l'immense majorité de la France, (c'est Paris que j'appelle la France, parce que Paris est tout ; le reste se soumet) ne voudrait maintenant accepter aucune autre forme de gouvernement que la République. La Monarchie, il faut le reconnaître, est tombée dans le mépris ; quelle sécurité peut inspirer un gouvernement qui s'écroule devant un banquet qu'on ne peut pas même s'exécuter, qui ne peut compter ni sur la population, ni sur la Garde Nationale dont l'existence est peut-être incompatible avec la sienne, ni sur l'armée qui est travaillée par les fausses doctrines, qui vit nécessairement avec le peuple, & qui, chaque jour, devient de plus en plus, sinon ennemie du moins incertaine et hésitante ? 
Ce n'est point la République qu'on ne redoute maintenant, c'est les Républicains, c'est à dire les faubourgs et une centaine d'hommes.
[...]

Auteur : Lemoine, John Emile (1815-1892)
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J'ai bien regretté, Monsieur, d'avoir quitté l'Angleterre au moment où vous y arrivait la nouvelle de votre délivrance. J'aurais voulu être des premiers à vous féliciter, et assister à la joie que ce souffle venu de la patrie a dû répandre autour de votre foyer. Cette petite cage mélodieuse de Brompton où gazouillaient dès l'aurore vos chers oiseaux doit se réveiller plus matinal encore et plus joyeuse depuis qu'elle n'est plus suspendue aux saules de l'exil [...].
Vous m'avez toujours permis d'être vrai devant vous ; je dirai donc que je crains qu'à notre tour nous ne jouions en ce moment le jeu de la force et du hasard. Je vois presque tout notre parti engagé dans cette voie et je ne sais où elle nous mène. Vous m'avez dit que vous vouliez user du privilège de la proscription ; tout ce qui se fait ici vous donne raison et ne peut que vous engager à vous réserver. Je ne puis m'empêcher de prévoir le jour où, avec l'esprit et avec la liberté, vous serez appelé à combattre ce parti de matérialistes et de soldats qui vont nous entraîner à sa suite. Pour moi, j'ai aussi mon privilège, celui de l'obscurité ; et j'en use pour m'abstenir.
Si je voyais distinctement la vérité, je ne m'abstiendrais pas. Mais dans ce désordre universel, je ne vois que le mal, et si j'entrevois le bien, c'est encore à travers le mal. J'attends la lumière.
Ce que je sais le mieux, et ce dont vous ne doutez pas, c'est que nul n'a plus que moi partagé le bonheur qu'a dû vous causer la fin de votre exil. Veuillez en recevoir encore, et pour vous, et pour tout ce qui respire, prie, et travaille autour de vous, mes félicitations les plus sincères avec l'hommage de mon dévouement et de mon respect.
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