119. Je passais avec un passé

Auteur(s) : Sassine, Williams

Les folios

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Sassine, Williams, 119. Je passais avec un passé, 1994/06/27

Claire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)

Consulté le 02/08/2025 sur la plate-forme EMAN : https://eman-archives.org/francophone/items/show/3461

Texte de l'article

Transcription

N° 119, 27 juin 1994 : « je passais avec un passé »

Sékou Touré avait promis le bonheur. On a vu seulement son bonheur. Il était tellement heureux de vivre au pays, qu’il s’en est allé mourir ailleurs. Qui est c… ? La courte maladie a pris l’avion avec lui.

Diarra, le lion en papier, est venu en rugissant : « Ceux qui sont dehors, peuvent entrer. Mais attention !... » Lui on l’a ligoté devant la télé pendant qu’il chantait « Hé Kéla ».

Son vieux compère, Fory Coco, lui, n’a rien promis. Sauf qu’il ne volerait pas, avec ou sans Erre Guinée. On connaît la suite puisqu’on a le type sur le dos pour 5 ans. Une suite sans suite. Il faut reconnaître que s’il n’est pas beau, il est gentil. La preuve, on peut tout dire de lui, et il ne sait pas lire. Un de ses ministres qui se dit écrivain n’a jamais écrit. Rien ! Où est le problème ? Nous avons des solutions. Un peu trop. Ailleurs, ce n’est pas pareil. Ils se battent pour trouver des solutions. Nous, on cherche les problèmes, pour essayer de démarrer. Le président ne sait même pas quoi faire de son gouvernement. Alors, il le garde. On ne sait jamais. Il pourrait former un gouvernement plus incapable encore. Pour un autre « Tunis 94 », on cherche, il paraît, des basketteurs infirmes. Même si on sera « battu », on ne sera pas « humilié » ! Le problème de nos fameux « spécialistes » des problèmes africains, c’est qu’en général ils confondent profondeur et surface, arbres et horizons. Les uns peuvent cacher les autres. Tout humblement pour voir le monde, on peut rester couchés. A Fakoudou !

Pour nous repérer, il n’est pas besoin de créer des anniversaires, ou d’organiser des journées de ceci, de chat. Il s’agit d’abord de dire merde à ceux qui vous empêchent de colorier l’intérieur de votre tête. Le monde est triste, sans rêves et le rêne (sic:rêve?)n’est accordé qu’à ceux qui « voyagent ». Mais la pauvreté n'est pas un vice. La pauvereté est une vis. Elle empêche de sortir de soi-même, de rencontrer l’autre. Alors que la terre a été faite ronde, pour voir l’autre, et un jour revenir chez soi, pour dire « j’ai vu », avant que la vue ne s’éteigne. Dieu a dit au commencement de tout « que la lumière soit, et la lumière fut », il a tenu ses promesses.

Mais…en avril 84, on nous a fait d’autres promesses évidemment, ceux qui nous ont tout promis à l’époque, ne sont pas des dieux. Loin s’en faut ! Ils ne sont pas des Saint-Paul capables de partager leur dernier manteau. Ils ne sont pas des Christ capables de porter une croix jusqu’au Golgotha, entouré de cris de haine, sans oublier les derniers gestes de Ponce Pilate. Qu’on se lave les mains. Soit ! Mais qu’on se lave aussi les pieds pour ne pas oublier d’où on vient. On lave tout un corps avant qu’on ne l’enterre. Parce que sous terre il n’y a que des vermines qui mangeront la dernière saleté restée. Il n’y a pas de cadeau dans la vie ! Ceux qui nous ont gouverné et autres qui nous gouvernent aujourd’hui, doivent savoir que le vent tourne. Et le vent tourne parce qu’il n’a pas autre chose à faire. Il fait son boulot contrairement à d’autres responsables…Le cas du Rwanda est à côté. Personne n’intervient. Alors qu’au Liberia on a dépensé de l’argent et surtout des hommes. Pour rien pratiquement. Une défaite de plus, ce n’est pas grave. Les derniers de la classe des Nations Unis que nous sommes, nous en avons l’habitude, parce que nous ne voulons pas être dérangés.

Aujourd’hui, il paraît qu’il y a trop d’étrangers, que le banditisme a augmenté, etc. C’est toujours notre «premier» ministre qui l’affirme. C’est lui-même qui nous assurait que tous ces bandits là étaient nos frères. Il n’y a pas longtemps.

Je passais. Aliou Vé, le renard de RND, atten-dait un taxi ou son heure ? Son bureau, à Poly avait mué comme une peau de serpent. Des écailles de peinture partout. Mais on sait avaler les couleuvres de son ministre.

Je passais. Notre Ma-calée des affaires sociales infirmes, assurait que le mois de juin est le mois de l’enfance. On venait d’exposer nos vieux artistes au Palais du Peuple pour quelques sous. Une façon de les enterrer définitivement. Pourquoi ne pas organiser une autre méga-sottise pour les enfants ? Même les petits commencent à faire partie du passé.

Je passais. Le président devait aller à Tunis. La circulation était encore bloquée. Pourquoi ne prend-il pas son hélico et nous laisser circuler pour être à l’heure à nos rendez-vous ? La rubrique « circulation et actualité » devrait s’en occuper. Retourner à ce moment à Tunis, après que tout le monde nous a bottés ! Il faut le faire. J’espère que dans l’avion présidentiel, il y aura notre « Fini National ». M. le président, ne ratez pas votre pénalty là-bas.

De toute façon on chen fout ! Oscar, dessine-moi un pays immobile que le gouvernementeur cherche à pousser. Où ?

Je passais avec un autre passé.

Williams Sassine

Billet

« Un chat m’a conté »

Mois de l’enfance

Mois des infirmes

Mois des chômeurs

Mois de l’opposition

Mois des malades agonisants

Mois de carême

Mois des voleurs

Mois des morts

Mois de l’Enelgui

Mois de …mois de

Lecteurs et lectrices

Complétez jusqu’à 12

L’année sera complète

Et le gouvernement sera un peu OQP

Pour une fois…

Sassine

Description & analyse

Auteur de l'analyseDegon, Elisabeth

Contributeur(s)Degon, Elisabeth (collecte et saisie)

Éditeur(s) de la ficheDegon, Elisabeth

Auteur(s) de la transcriptionDegon, Elisabeth

Informations générales

LangueFrançais

CoteLe Lynx, n° 119

Présentation

Date1994/06/27

GenreDocumentation - Presse

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Éditeur de la ficheClaire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)

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Notice créée par Elisabeth Degon Notice créée le 30/07/2019 Dernière modification le 01/09/2022

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