Archives Marguerite Audoux

Archives Marguerite Audoux


YELL, Michel

Auteur(s) : Garreau, Bernard-Marie

Dates1875-1951
Notice biographique
Voir aussi à IEHL, Jules et à MICHEL.

Michel Yell s'appelle en réalité Jules Iehl. Après avoir fréquenté le lycée de Troyes, avec Charles Chanvin (l'ami qui, avec Fargue, ne l'abandonnera jamais), il poursuit des études de droit qu'il mène tout en travaillant, pour assurer la subsistance d'une famille modeste. Il est ainsi employé, dans la lignée de son grand-père cheminot, dans une succursale de la Compagnie des Chemins de fer de l'Est, où il est chargé des « colis en souffrance » – ce qui fera dire à CharlesLouis Philippe que « Michel travaille dans la souffrance », plaisanterie qui se double d'une inconsciente prémonition pour qui connaît la laborieuse carrière littéraire à venir…
C'est précisément dans les années 1900 que le jeune Jules Iehl fait la connaissance, non seulement de CharlesLouis Philippe, mais aussi d'André Gide, dans des conditions qui ne nous sont pas précisément connues, mais qui s'expliquent fort bien par l'ambition littéraire de Iehl. C'est également à cette époque que Iehl s'éprend d'une certaine Yvonne, qui cache sous son métier de couturière des activités moins avouables dans le quartier des Halles. Le jeune homme, qui découvre avec désespoir la vérité, va se consoler auprès de la tante, Marguerite Audoux. C'est cette histoire que Iehl va raconter à Gide quelques années après. Ce Récit de Michel, consigné par Gide, sera édité en 1973, plus de soixante années plus tard, par Claude Martin, chez Ides et Calendes, à Neuchâtel.
Si c'est Yvonne qui, on l'aura compris, met en relation Michel Yell et Marguerite Audoux, c'est le jeune juriste frotté de littérature qui va faire connaître à la romancière en herbe les membres du futur Groupe de Carnetin.
Marguerite Audoux devient la maîtresse de Michel Yell vers 1904. C'est en 1912 qu'a lieu la difficile rupture.
Michel Yell a en effet autant de mal à « casser » qu'il en a à créer. Il promet même ce qu'il sait désormais impossible. Début mars 1911, Marguerite Audoux n'écrit‑elle pas à Valery Larbaud : « [Michel] attend que je sois disposée à m'unir à lui » (lettre 107), alors qu'en octobre, Larbaud écrit à Marcel Ray que « Iehl est fiancé à une fille des environs de Fronton[1] » ? Fargue pense que ce n'est pas sérieux et va essayer d'arranger les choses. Mais Michel Yell se marie avec Marie Duran le 18 mars 1912. Est‑il heureux ? Le sera‑t‑il ? Les quelques bribes de correspondance qui nous sont parvenues sont loin d'en témoigner. On connaît aussi les propos de Yell rapportés par Gide dans son Journal en date du 12 janvier 1902 : « [L]a seule chose qui puisse m'arriver de surprenant, c'est le bonheur[2] »...
Juge de paix à La loupe en 1908, et à Fronton en 1909, Yell poursuivra une carrière juridique dans l'Ariège, puis à Melle, dans les Deux‑Sèvres, et enfin sera Conseiller à la Cour de Poitiers en 1929. Il prend sa retraite en 1940.
Son œuvre, écrite laborieusement, avec une « suppliciante lenteur » (de son aveu même), se limite à deux romans : Cauët (Gallimard, 1912) et Le Déserteur, Commerce, n° XXII (hiver 1929), p. 47‑107. La première partie de Willerholz, « Féerie dramatique en trois tableaux » a été publiée dans le n° II de la même revue (p. 123‑157), avec une signature qui mêle le vrai nom et le pseudonyme : « Michel Iehl » (l'écrivain se prénomme en réalité « Jules, Michel »)
Il meurt accidentellement, renversé par une voiture, la même année que son ami Gide.

[1] Valery Larbaud – Marcel Ray, Correspondance (1899‑1937), Gallimard, 1980, tome II, p. 140.

[2] Gide (André), Journal, NRF, Bibliothèque de la Pléiade, édition de 1940, p. 115.

Notice créée par Bernard-Marie Garreau Notice créée le 17/01/2018 Dernière modification le 03/05/2024