Lettre de Marguerite Audoux à Paul d’Aubuisson
Auteur(s) : Audoux, Marguerite
Description
- Paul d’Aubuisson (1906-1990) est l’aîné des trois petits‑neveux de Marguerite Audoux. C’est son fils adoptif préféré, celui qui jusqu’à sa mort veille sur la mémoire de la romancière, le flambeau ayant été repris par ses deux enfants, Geneviève et Philippe (à qui Bernard-Marie Garreau doit l’accès au fonds d’Aubuisson, qui se trouve à présent chez lui), ainsi que par son neveu Roger (fils de Roger). Une abondante correspondance entre Paul et sa mère adoptive s’inscrit dans le corpus des lettres familiales et familières (dont l’identifiant commence par le chiffre 0). B.-M. Garreau a rencontré paul d’Aubuisson en 1987, et réalisé plusieurs enregistrements de leurs entretiens.
- Roger et Maurice sont les frères cadets de Paul.
- André pourrait être le fils de Jeanne et Régis Gignoux.
- Amélie Perrier est l’une des meilleures amies de la romancière. Voir la carte postale (366) qu’elles coécrivent de l’Île-d’Yeu, Marguerite Audoux et elle, à la mère de Léon-Paul Fargue le 7 août 1933.
- La Suzanne de cette lettre, dont les autres occurrences sont assorties d’un incertain Gab[riel], n’a pu être identifiée. Sont à exclure, étant donné le contexte, Suzanne Werth et Suzanne de Bruyker.
- Menette est une amie qui apparaît régulièrement dans la correspondance Paul-Audoux. Les renseignements les moins imprécis sur cette femme se trouvent dans le Journal de Romain Rolland en date du 22 mars 1921, jour où il mentionne sa première rencontre avec Marguerite Audoux, accompagnée d’une autre femme, Madame Menet, plus jeune, couturière elle aussi. Un exemplaire de La Fiancée qui se trouve au Musée Marguerite Audoux de Sainte-Montaine contient un envoi à Emile et Henriette Menet. Il est donc plus que probable qu’il s’agisse de la même personne que celle mentionnée dans la présente lettre. ces transformations de patronymes sont monnaie courante rue Léopold‑Robert (la mère de Léon‑paul Fargue ne devient‑elle pas « Farguette » ?...).
- Vitali est une vieille voisine rue Léopold-Robert. Elle travaille dans un atelier de couture.
Texte
Samedi Soir
Oui, Paul, c'est entendu, tu pourras venir ici du 18 au 26 août. Par exemple, à part tes frères et André, je pense que beaucoup de nos amis seront encore absents. Les Tatu et les Menet surtout. Mais après tout si tu t'ennuies à Paris, il te sera facile d’écourter ta permission, sans doute.
J 'ai remis 150 frs à Amélie, qui a dû les mettre à la poste aujourd'hui. Tâche de faire sur cette somme l’économie de ton voyage pour venir.
Je suis rentrée le 25 au soir et Roger est venu dîner avec moi. J'avais apporté une bonne affaire de crevettes bouquet, et il s'est régalé. Il se réjouit de te voir bientôt. Demain dimanche, nous allons tous deux voir Maurice. Je dis tous deux car j'ai grande envie de voir la frimousse de ce petit, mais depuis mon retour j'ai très mal à la tête et s'il fait une grosse chaleur, il se peut que je reste à la maison. Aujourd'hui il a plu toute la journée, ce qui a bien rafraîchi le temps et me donne de l'espoir pour demain.
J'ai vu Suzanne, qui est très contente de ses vacances avec Gab. J'ai trouvé Menette beaucoup mieux, mais je ne suis pas très contente de son séjour à Quiberon où il y a toujours du vent et où la mer est dure. Enfin, elle m'a promis de se déplacer si elle n'y était pas bien. Combien elle aurait été mieux à Fromentine ! Espérons qu'il fera très chaud et que le vent ne sera pas froid, comme lorsque le temps est douteux.
Vitali continue à rigoler corme une petite fille. Elle a un visage recuit qui la change mais fait plaisir à voir. Une vraie Peau Rouge. Ah ! Elle a dû en raconter à son atelier !
Dans le train, au retour, alors que le train s'était arrêté en pleine campagne pour je ne sais quelle raison, elle s'est mise à la fenêtre et tout à coup elle m'a crié : « Viens voir, Marguerite, il y a du lilas plein le talus ! » Du lilas ? Tout le monde se précipite. « Mais non, Vitali, ce sont des ronces ! » « Des ronces ? » « Mais oui, Vitali, tu sais bien, des mûres ! » « Oh ! Marguerite, des mûres, moi qui les aime tant ! je voudrais en cueillir, c'est si bon ! » « Allons, reste tranquille ! tu ne peux pas les manger, puisqu’elles sont encore en fleur. » Tout le monde rigolait, et Vitali aussi fort que les autres.
Au revoir, mon fils, et à bientôt.
M.A.
Lieu(x) évoqué(s)Paris – Quiberon – Fromentine - Strasbourg
État génétiqueLes soulignements sont de la romancière.
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