Archives Marguerite Audoux

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Lettre de Marguerite Audoux à Paul d'Aubuisson

Auteur(s) : Audoux, Marguerite

Description
- Paul d’Aubuisson (1906-1990) est l’aîné des trois petits-neveux de Marguerite Audoux. C’est son fils adoptif préféré, celui qui jusqu’à sa mort veille sur la mémoire de la romancière, le flambeau ayant été repris par ses deux enfants, Geneviève et Philippe (à qui Bernard-Marie Garreau doit l’accès au fonds d’Aubuisson, qui se trouve à présent chez lui), ainsi que par son neveu Roger (fils de Roger). Une abondante correspondance entre Paul et sa mère adoptive s’inscrit dans le corpus des lettres familiales et familières (dont l’identifiant commence par le chiffre 0). B.-M. Garreau a rencontré Paul d’Aubuisson en 1987, et réalisé plusieurs enregistrements de leurs entretiens.
- Madeleine, les Coulon, Turbé, ex-Sadoul et Jacques sont  apparemment des habitants de l'Île-Dieu, ou des personnes en relation avec ce lieu. 
Texte
                                                                  10 juillet 1933
Mon Paul,
La pension dont tu parles est très bien, d'après Madeleine, qui le tient des Coulon, et je crois qu'il serait difficile de trouver l'équivalent à la Meule. Toutes les chambres sont occupées pour l'instant et les gens ne veulent pas s'engager si longtemps à l'avance, ne sachant pas s'ils seront libres. Il y a bien, en effet, un restaurant à la Meule, mais les repas y coûtent plus de 10 frs. Entre 13 et 14, je crois. D'autre part, il n'y a ni fruits ni laitages à la Meule, tout va au Port [à Port-Joinville]. Ma propriétaire, qui a une vache, veut bien, par gentillesse, me céder un bol de lait une fois par semaine, mais c'est tout. La vie devient de plus en plus difficile ici. Comme partout, du reste.
Il y a encore l’Hôtel des Voyageurs, un peu moins cher que Turbé, mais pas moins de 30 francs, plus la chambre, naturellement. Tu pourras toujours voir lorsque tu seras là. Tu ne seras pas, je pense, lié par un contrat à ta pension de famille. Sauf avis contraire, je crois tout de même que c'est là que tu seras le mieux.
Le bateau a un peu augmenté son passage : 18 frs. Et ce n'est plus la Grive, qui est morte, ainsi que meurent les Grives quand elles sont trop vieilles. Nous avons maintenant deux bateaux. La Ville-de-Saint-Nazaire et La France. Saint-Nazaire plus rapide, et France plus stable par grosse mer, parce que ce bateau est beaucoup plus grand que l'autre.
Ma brave concierge avait dû faire une trop longue station chez ex-Sadoul, ce qui lui avait fait perdre la mémoire, car le matin même de mon départ, je lui ai dit que Jacques lui payerait mon terme en même temps que le sien, c'est-à-dire le 13 au lieu du 15, ainsi qu'elle le demandait. Je lui aurais bien payé à elle-même, mais elle n'avait pas la quittance. Et ch’ai bas gonviance.
Tu trouveras bien du changement à Port-Joinville. Plus de belles voiles orange, rien que des barques à moteur. Ce n'est plus le joli port aux couleurs fraîches et variées, c'est un port, et voilà tout ! L’île reste la même, un peu desséchée cependant, car les pluies y ont manqué toute cette arrière-saison.
Je crois que c'est tout,
Et je t'embrasse bien tendrement.
                                                                          Ta tante,
                                                                       M. Audoux

P.S. Si tu as quelque chose à me demander, adresse tes lettres :
              Les Mûriers
              La Meule
              Île d'Yeu
              Vendée
Lieu(x) évoqué(s)Paris, La Meule, Port-Joinville, Saint-Nazaire
État génétique- Le bateau a un peu augmenté son passage : 18 francs (son passage est ajouté dans un V dans l'interligne supérieur)
- Dans le P.S., deux endroits biffés au moment de l'écriture
- Les soulignements sont de l'épistolière.
Notice créée par Bernard-Marie Garreau Notice créée le 01/03/2025 Dernière modification le 14/03/2025