Thresors de la Renaissance

Trésor de l’histoire des langues de cet univers


Auteur(s) : Duret, Claude

Généralités

Titre long de la première édition identifiée (ou autre édition)Thresor de l’histoire des langues de cest univers. Contenant les origines, beautés, perfections, decadences, mutations, changemens, conversions, & ruines des langues [liste des langues en 4 colonnes]. Par M. Claude Duret Bourbonnois, president à Moulins. Nous avons adjousté deux indices : l’un des chapitres ; l’autre des principales matieres de tout ce Thresor (Mathieu Berjon, 1613)
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Date de la première publication de l'œuvre1613

Transcription et analyse des péritextes

Transcription des péritextes de toutes les éditions
  • A Tres illustre haut et redouté seigneur Maurice de Nassau, né prince d’Orange, marquis de la Vere et de Flessinghe, Comte de Nassau, de Catzenellebogen, Vianden, Dyetz, Meurs, &c. Seigneur de S. VVyt, Daesbourg, de la ville de Grave et pays de Cuyc, Monster, &c. Gouverneur, Capitaine, & Admiral general de Geldre, Hollande, Zeelande, Utrect, et Overyssel. [Société Caldorienne, 1619]
    C’est à vostre Excellence (grand Prince) à qui ce Thresor des langues de l’Univers, doibt estre premierement presenté, puis que vous estes aujourd’huy l’un d’entre les Chrestiens qui luy peut donner un tres asseuré sauf conduict pour le faire bien recevoir en son utilité aux plus eslongnées nations de la terre, pour qui il a esté dressé principalement : afin que les differents characteres (desquels il est rempli) & intelligence de leurs escritures, une nation puisse avec plus de facilité communiquer avec l’autre, en ce qui concerne la societé humaine, et principalement le thresor du S. Evangile de nostre Seigneur Jesus-Christ en ces derniers siecles et extremité des temps. Mais quelle nation pourrait-on choisir au monde qui soit aujourd’huy plus capable de prattiquer les instructions des langues Orientales contenues dans ce thresor que le peuple Hollandois ? qui sous l’heureuse conduitte de vostre excellence desployent leurs bannieres triomphantes & victorieuses sur mer et sur terre par vostre valeur, & bon heur jusques aux extremitez de la terre, et regions les plus esloignées. C’est donc à bon droict (mon Seigneur) que ce premier exemplaire est presenté à vostre Excellence, afin que d’icelle il reçoive son passepartout de vostre faveur, si elle le juge utile au public, pour estre non seulement bien receu des Hollandois : mais aussi pour estre par eux transporté en toutes nations où les langues diverses qui s’y trouvent contenues sont en usage : et où les characteres cy representez peuvent servir pour exprimer leurs conceptions par escrit, et faire entendre les vertus, magnanimité de courage, et valeur de vostre Excellence, pour servir à l’avancement de la gloire du Tout puissant, et au culte de la religion Chrestienne en ces pays la : comme aussi à l’heureuse mémoire de l’aucteur de ce livre, feu Monsieur le President Duret, de Molins en Bourbonnais, reputé entre les Doctes de ce temps, qui pour servir au public en l’assemblage de ce Thresor (apres plusieurs autres œuvres par luy mises en lumiere) a employé son labeur jusques aux derniers jours de sa vie, qui par le vouloir de Dieu luy ayant esté couppée au milieu de sa course n’y a peu mettre la derniere main pour le polir davantage, ains tel qu’il est, le laissa et recommanda à Mademoiselle (* 2 r°) Florimonde Berger sa femme, l’honneur et la vertu de sa famille ; et digne de tout merite, qui le m’ayant consigné entre mains pour le faire imprimer à mes gens, avec pouvoir à celuy d’entre les Princes que je croirois avoir sa protection pour agreable, pour luy faire voir le jour sous sa faveur, j’ay prins la hardiesse de le presenter & dedier à vostre excellence, sous l’espoir que j’ay eu qu’estant Prince benin, & amateur tant des lettres que des armes, recevriez de bon œil ceste œuvre diversifiée, non seulement de characteres : mais des plus signalées et remarquables histoires de l’Univers, en la corruption des langues, changement et progrez d’icelles par la valeur des grands Princes et Capitaines des siecles passez, et pour luy tesmoigner aussi par ce petit Thresor, la bonne volonté, et le zele que j’ay d’estre cognu de vostre Excellence,
    Le très-humble et très-affectionné serviteur, Pyramus de Candole. (* 2 v°)
  • [Privilège] [Société Caldorienne, 1619]
    Loys par la grace de Dieu Roy de France & de Navarre, A nos amez & feaux Conseillers les gens tenans nos Cours de Parlements de Paris, Thoulouze, Rouen, Bourdeaux, Dijon, Aix, Grenoble, & Bretaigne : Baillifs, Prevosts, Seneschaux ou leurs Lieutenans, & à tous autres nos Justiciers & Officiers qu’il appartiendra, Salut. Nostre bien amé Pyramus de Candole marchand Libraire, nous a fait remonstrer que despuis peu de temps en çà, il a recouvert un livre intitulé le Thresor des Langues, composé par Claude Duret, luy vivant nostre Conseiller, & President au siege Presidial de Moulins en Bourbonnois, lequel livre pour estre digne de lumiere, & d’estre communiqué au public, il desireroit faire imprimer : mais d’autant qu’il craint qu’apres s’estre constitué en frais pour subvenir à ladicte impression, ou aucuns Libraires, ou Imprimeurs de cestuy nostre Royaume viendroyent à faire le semblable : il fut frustré du fruict qu’il en espere, il nous a tres-humblement supplié luy vouloir permettre la vente & debite desdicts livres en cestuy nostre Royaume avec deffenses à tous Libraires ou Imprimeurs, d’iceux vendre ny imprimer sans son adveu & consentement, & pour cest effect luy octroyer nos lettres à ce necessaires. A ces causes nous inclinans à la priere & supplication dudict de Candole, à celuy avons permis  & ottroyé, permettons & ottroyons par ces presentes, qu’apres avoir fait imprimer le susdict livre, il le puisse faire vendre & distribuer en cestuy nostre Royaume, pays & terres de nostre obeyssance, par tels Marchands, Libraires ou Imprimeurs, ou tels autres que bon luy semblera, sans qu’auncuns autres desdicts Libraires ou Imprimeurs puissent de six ans entiers & consecutifs, à conter du jour que sera parachevée ladicte impression, imprimer, vendre ny debiter lesdicts livres sans l’expresse permission dudict de Candole, à peine de confiscation de tous les exemplaires qui s’en trouveront, de tous despens, dommages & interests, & de cinq cens livres d’amende. Si vous mandons, & à chacun de vous enjoignons, chacun endroit soy, que de nostre presente permission, privilege & ottry, ensemble du contenu en iceluy, vous faictes, souffrez, laissez jouyr & user ledict de Candole, soit veufve ou heritiers, durant ledict temps plainement & paisiblement sans souffrir qu’il luy soit mis ou donné aucun empeschement au contraire : car tel est nostre bon plaisir ; nonobstant quelconques edicts, ordonnances, mandements, defenses des lettres à ce contraires.
    Donné à Paris le neufiesme jour de May, l’an de grace mille six cens treze : & de nostre regne le troisieme.
    Par le Roy en son Conseil, Signé Derdin.
    Collationné sur l’original. (* 3 r°)
  • Indice alphabétique des noms, diction et matieres principales amplement declarées en ce Volume de l’Origine des Langues de l’Univers. [7 pages]
  • Nobilissimo viro domino Claudio Duret Molinensis Senatus Præsidi dignissimo, Claudius Faydeau Canonicus Theologus, & magnus Pœnitentarius Archiepiscopalis Ecclesiæ Bituricensis, à Deo pacis, pacem precatur. [Société Caldorienne, 1619]
    Quemadmodum Regina Saba inaudita discendi cupiditate, & præclara Regis Samomonis fama Hierusalem (urbem perfecti decoris & gaudium universæ terræ) appulit[1], ut incredibilem ejus sapientiam attentè audiret, admirabilem scientià perfectè cognosceret, & singularem amicitiam sibi intimè conciliaret : cùmque in laboriosa peregrinatione multos exantlaret labores, & in aliena terra versata fuisset. Regem Salomonem audivit, congnovit, conciliavit, atque fœlices cos, qui semper in conspectu ejus astarent, prædicavit : magna dicendi gratia Deum unicè populum Israel diligere[2], & illum conservare velle pronunciavit, quὁd Regem Salomonem (ut judicia faceret, & Justitiam exercertet) collocavit[3] : sic ego incredibili legendi aviditate, & eximia nominis tui celebritate (ampllissime Præfes) in urbem Molinensem (urbem fidelem & judicii plenam) patriam dulcissimam, & locum nativitatis meæ jucundissimum proficisci desideravi, ut uberrimum sapientiæ, scientiæ, & amicitiæ tuæ fructum tempestivè demeterem & perciperem : tum verὁ beatos illos, qui tua eximia præsentia fruuntur, dicerem, & cum egregia centurionis humilitate declararem Dominum (qui orbem terrarum in justitia, & populos in æquitate judicabit[4]) vehementer amare Molinensem populum, & mirilabiter custodire cum te (vir onatissime) ad summum & altissimim Præsidiis officium vocavit, vocatum Moysis mansuetudine cohonestavit[5], Danielis cognitione celebravit[6], & Samuelis æquitate illustravit, ad jura (quæ sunt civitatis vincula) declaranda[7], & justo judicio judicanda designavit[8]. Quid ergo ? non possum tuam sapientiam in lingua ; doctrinam in sermone, & confirmationem in opere justitiæ, quin maximis laudibus efferam, & fœlices eos qui tua amicitia decorantur, proclamem. Num hunc tuum Thesaurum omnium ferè linguarum tanto studio ac labore ab omnibus scientiarum recondissimis mysteriis conquisitum tantáque industria elaboratum atque dispositum prædicem, atque in omnium sæculorum memoriam propagando commemorem ? ex quo diversas linguarum figuras, dissimiles nationum mores, multiplices populorum leges, graves Doctorum sententias, præclara (* 5 v°) Magistratuum exempla, provida Gubernatorum consilia, & illustria Principum facta tanquam ex ditissimis Indorum sodinis aurum purissimum ervere atque commotus est, ut ipsum diligentius perlustrare, atque accuratè animi acie perserutatum, atque din noctùque perlectum approbare non dubitat)verim : Approbationem meam tibi non ingratam (ut spero) mittendam esse censui, mitto itaque finémque facio, & Dominum omnium rerum Creatorem enixè rogo, ut te diu incolumem & sanum conservet, fuísque cœlestibus donis exornet : Deus enim est qui neque herba neque malagmate, sed sermone omnia fanat, & gratiam sanitatum singulari sua bonitate elargitur.
    Avarici Biturigum die. 2. Junii 1607. (* 5 v°)

    [1] 2. Cor. 13. 3. Reg. 10. 2. Paral. 9. Matth. 12. Tim. 2.
    [2] 2. Para. 9.
    [3] Esaia 1.
    [4] Luc 7. Psal. 97.
    [5] Num. 12.
    [6] Dan. 2.
    [7] 1. Reg. 16. Deut. 16.
    [8] Eccles. 4. 11. 48.
  • Approbation. [Société Caldorienne, 1619]
    Je Claude Feydeau Docteur en Theologie & droit Canon, Chanoine Theologal & grand Penitencier en l’Eglise Archiepiscopale de Bourges, certifie avoir veu & leu ce Thresor des Langues composé par Noble Claude Duret President au siege Presidial de Molins en Bourbonnois, & n’ay trouvé chose contraire à la religion Catholique, partant j’ay jugé digne d’estre imprimé, comme estant utile & necessaire pour monstrer & enseigner l’antiquité, dignité & variété des langues.
    Faict à Bourges ce 2. Juin 1607.
    Claude Feydeau. (f° * 5 v°).
  • Preface de Claude Feydeau docteur en Theologie, et droict Canon, doyen en l’Eglise Collegiale nostre Dame de Molins, sur le Thresor des Langues, composé par noble Claude Duret President au siege Presidial de Molins en Bourbonnois. [Société Caldorienne, 1619]
    Si le pere de l’eloquence Romaine appelle l’histoire tesmoin des temps, lumiere de verité, vie de la memoire, maistresse de la vie, et messagere de l’antiquité[1]. Il me sera encore loisible de nommer ce Thresor des langues (composé par Noble Claude Duret President au siege Presidial de Molins en Bourbonnais) de ses beaux tiltres d’honneur & de louange[2]. Car en 1. lieu est tesmoin des temps de guerre, & des temps de paix[3], & faict entrer en la cognoissance du Createur de toute cette machine ronde, qui change les temps, transporte les royaumes, & les establit, donne aux sages la sapience, la science à ceux qui entendent la discipline, & descouvre les choses profondes & cachées : En 2. lieu n’est il pas lumiere de verité, puis qu’il la declare plus douce que le miel, et plus forte que le Lyon, disant avec le docte Zorobabel qu’elle surmonte toute chose, & n’a acception de personne, & reprenant ceux qui en detournent leurs oreilles, & s’addonnent aux fables[4] : En 3. lieu l’on peut dire qu’il est vie de la memoire, quand il descrit les œuvres magnifiques du Seigneur, qui a fait toutes choses en sapience, duquel la grandeur remplit le ciel & la terre : En 4. lieu il se peut appeler maistre de la vie, pource qu’il enseigne le sentier qui nous y conduit[5], & nous destourne du chemin large, par lequel nous nous glissons à une damnation eternelle. En 5. lieu il est le messager de l’antiquité, en ce qu’il met en avant la sapience qui est ez anciens[6], & la prudence qui se treuve en plusieurs années, pour renoncer (comme dict l’Apostre) à l’infidelité & desirs mondains, & vivre en ce monde sobrement, justement, & pieusement[7], attendants la bienheureuse esperance & l’advenement de gloire du grand Dieu qui rendra à un chacun selon ses œuvres : Or je souhaite (amy Lecteur) te diviser ceste Preface en trois parties, & te representer en icelle l’utilité, necessité & excellence des trois plus nobles langues qui soyent, & t’attirer à fouiller ce précieux et rare Thresor des langues. Je commenceray doncques par la premiere partie à discourir de leur utilité principale recognue en tout le monde, & non sans grand mystere, puis qu’elles ont esté dediées & consacrées sur le titre de la triomphante Croix du Redempteur : afin que toute langue confesse que Jesus-Christ est en la gloire de Dieu le Pere[8]. Ce titre de la Croix fut escrit par Pilate en Hebrieu, en Grec et en Latin : en Hebrieu (¶ 2 r°) pour les Juifs qui s’appuyoyent en la loy, & se glorifioyent en Dieu, en Grec pour les Grecs, qui cerchoyent la sapience & doctrine[9] : en Latin pour la renommée des Romains[10], qui estoyent forts & puissants en toute la terre. L’utilité de ces trois langues se monstre en l’Eglise[11] (colomne & appuy de verité) laquelle s’en sert en explication des sainctes lettres, celebration des mysteres, consolation des fidelles, & reduction des desvoyez[12]. Je passe sous silence la superbe edification de Babel, cause de sa confusion des langues, & ne desire discourir de ceste humble congregation qui en la montagne de Syon fut remplie des douces halenées du sainct Esprit[13] pour parler & entendre toutes sortes de langages : afin de me porter à la deuxieme partie qui declare la necessité de ces trois langues, esquelles sont descrittes les sacrées pages du vieil & nouveau Testament, & représentées les sentences admirables des docteurs qui ont excellé en Hebrieu, en Grec, & en Latin. La diversité d’icelles se voit en la propriété des belles dictions, diversité d’excellentes interpretations, & energie de sentences notables, lesquelles leur sont propres & particulieres pour enseigner, delecter, & esmouvoir[14] celuy, qui met son Thresor és  commandements du Souverain, desracine la zizanie des vices, & jetter la semence des vertus[15], despouiller le vieil homme avec ses faicts, & vestir le nouveau[16], lequel se renouvelle en la cognoissance de l’image de celuy qui l’a creé : Reste à traicter de leur excellence (qui est la troisiesme partie) qui reluit en ce qu’elles ont esté conservées par la providence de Dieu qui est le Seigneur des sciences[17] : de Jesus-Christ en qui sont cachez tous les thresors de sapience & de la science[18] : & du sainct Esprit, qui a donné diversitez de  langues, & l’interpretation d’icelles, qui a illuminé les Apostres pour parler en divers langages les choses magnifiques de Dieu[19], dont ceux qui habitoyent en Parthe, Mede, Judée, Mesopotamie, Cappadoce, Ponte, Asie, Phrygie, Pamphilie, Egypte, Lybie, Rome, Crete, & Arabie estoyent tous estonnez, & s’esmerveilloyent disants l’un à l’autre que veut dire cecy ? Mais qui seroit celuy qui pourroit reciter l’excellence de ces trois langues usitées en l’Eglise (qui est l’espouse de l’agneau[20]) pour exposer l’escriture divinement inspirée[21], qui est profitable à enseigner, à corriger, à convaincre, & à instruire à justice, pour annoncer entre les Gentils les richesses incomprehensibles de Jesus-Christ[22], & pour mettre en evidence à tous quelle est la communcation du secret qui estoit caché de tout temps en Dieu qui a tout crée. Et où pourra on trover un homme si docte & si disert[23] qui se promette d’expliquer l’excellence de la langue Hebraique pleine de mysteres en laquelle Moyse a escrit la loy[24], les Prophetes ont delaissé les Oracles divins, David a composé les Pseaumes, Salomon a mis en lumiere ses livres, Esdras a redigé en mémoire les histoires & Chroniques que le S. Esprit vouloit estre cognues & enregistrées, S. Matthieu a proposé la doctrine Evangelique ; & Jesus mesme, qui est la voye, la verité & la vie[25], entrant en la Synagogue au jour du Sabbath selon la coustume[26], & se levant pour lire les Oracles Prophetiques d’Esaïe couchée en langue Hebraique, a exposé les plus grands mysteres de la Philosophie Chrestienne. Pour ce qui est de la langue Grecque, il est difficile de raconter son excellence, d’autant qu’elle a une grande (¶ 2 v°) force & energie en ses syllabes, parolles, sentences, figures, metaphores, & allegories, qui ne se peuvent avec tant de grace applicquer ailleurs, comme en leur propre origine : & qu’ainsi ne soit, celuy qui desire enseigner en doctrine doit avoir l’intelligence de la langue Grecque[27], qui a donné la science à Platon, la subtilité à Aristote, l’eloquence à Demosthene, le langage coulant à Isocrate, & la gravité à Eschines. Quant à l’excellence de la langue Latine, elle reluit clairement ez livres de ce grand orateur Ciceron, de Saluste, de Jules Cæsar, & autres qui ont aydé, maintenu, conservé & illustré leurs villes, faisants cognoistre les vices des meschants[28] pour les fuir comme des pestes contagieuses, & mettants en avant la pieté des bons pour suivre leurs vestiges[29], & courri apres le suave odeur de leurs vertus[30]. Je conclurray ceste mesme preface par la mesme louange des 3. langues, que je leur ay attribuée au commencement : & diray d’avantage que cest excellent Thresor des langues faict recognoistre son excellence tant en sa matiere, qu’en sa forme, & aussi en l’autheur : En sa matiere laquelle represente les figures & characteres de plusieurs langues, les mœurs des nations les plus celebres, les belles & anciennes loix des peuples, les remarquables sentences des doctes, les memorables exemples des Magistrats, les grands conseils des Capitaines, les honorables entreprises des Princes[31], pour ne se trop eslever en prosperité[32], roidir & fortifier contre les efforts de l’adversité. En la forme, laquelle est comme une excellente peinture, qui nous met devant les yeux les choses dignes d’estre enregistrées par Esdras scribe de la loy[33], dignes d’estre prononcées en la chaire de David le plus sage des Princes[34], d’estre conservées dans le magnifique palais d’Assuerus[35] pour contempler les histoires anciennes & admirer les Chroniques nouvelles avec un bel ordre, bonne methode, facile disposition, & admirable artifice. En l’autheur qui a gardé les parolles honnestes & bon conseil de Jethro[36] pour la bonne conduite du peuple qui a resemblé à un autre Gamaliel docteur de la loy, honorable à tout le peuple, qui a esté comme un autre Helie le chariot d’Israel, & le conducteur de l’equité, qui a visité les orphelins, & consolé les veusves en leurs afflictions[37] : bref qui s’est monstré en toutes choses pour patron des bonnes œuvres en doctrine, integrité, & gravité des mœurs, qui à l’exemple d’Ezechias[38] a faict ce qui estoit bon, droict, & veritable en la presence de Dieu, auquel à l’imitation du Prophete Royal[39] avec une ferme foy il y a tousjours recouru en son affliction ; & recongnoissant qu’en bref comme homme mortel, il devoit laisser le tabernacle de son corps[40], & bruslant d’un semblable desir à celuy de l’Apostre qui demandoit avec tant d’ardeur[41] d’estre delivré de ceste obscure prison pour estre avec Jesus Christ, au dernier periode de sa vie[42], il luy a recommandé devotement son ame[43] par les mesmes parolles desquelles il se servit en l’arbre de la croix pour recommander son ame à Dieu son pere[44] : Considerant d’ailleurs (selon le Sage)[45] que la femme diligente est une couronne à son mary[46], & que celuy qui a trouvé une bonne femme, il a trouvé un bien sur l’asseurance de ceste divine sentence[47], il a recommandé l’impression de ce Thresor des Langues à Damoyselle Florimonde Bergier sa femme, laquelle il aymoit comme soy mesme[48], remarquant en ses parolles & actions la prudence de Sarra, vigilance de Rebecca, pieté d’Anne, dexterité d’Abigail, fidelité de Judith, & liberalité de Thabita, la vertu & force de ceste piteuse recommendation l’a exi- (¶ 3 r°)tée à faire imprimer ce beau Thresor des langues, qui est utile, necessaire & excellent[49] pour sçavoir les figures & characteres de plusieurs langues, apprendre les coustumes & mœurs des peuples, & cognoistre les loix & ordonnances des Princes de la terre. Parquoy (amy lecteur) je te prie d’affectionner, conserver, & diligemment feuilleter ce livre, à l’exemple de Ruth Moabite[50] recueillir les espics d’histoires remarquables, que ce sage moissonneur, noble Claude Duret President au siege Presigial de Molins en Bourbonnois a laissé dans ce Thresor à la posterité[51] pour l’utilité, edification, exhoratation, & consolation de ceux, qui par une saincte curiosité y voudront fouiller.
    De Molins en Bourbonnois ce 2. Mars 1612. (¶ 3 v°)

    [1] Cic. Lib. 2. de Oratore & lib. 2. de finibus.
    [2] Eccl. 1.
    [3] 1. Gen. 1 & 14. Dan.2.
    [4] Judic. 14. 3. Esdr. 3. Tim. 4.
    [5] Psalm. 103. Matt. 7. Job. 12.
    [6] Ti. 2.
    [7] Psalm. 61.
    [8] Matth. 27. Phil. 2. Johan. 19.
    [9] Rom. 2.
    [10] 1. Cor. 12.
    [11] 1. Mach. 6.
    [12] Tim. 3.
    [13] Act. 2.
    [14] Eccl. 29.
    [15] Matth. 13.
    [16] Coloss. 3.
    [17] 1. Reg. 2.
    [18] Coloss. 2, 1. Cor. 12.
    [19] Act. 2.
    [20] Apoc. 21.
    [21] Tim. 3.
    [22] Ion. I.
    [23] Soph. 3. Joh. 5.
    [24] Act. 22.
    [25] Joh. 14.
    [26] Luc. 4.
    [27] Rom. II.
    [28] Cant. I. 2.4.
    [29] Ezec. 20.
    [30] 2. Cor. 2.
    [31] Ex. 2. & 13.
    [32] 2. Mac. 7.
    [33] Esd. 8.
    [34] 2. ReG. 23.
    [35] Esth. 6.
    [36] Ex. 18.
    [37] 4. Reg. 2.
    [38] Jacobi 1.
    [39] Tit. 2.
    [40] Eccl. 48.
    [41] Psal. 4. 12. 41.
    [42] 2. Pet. 1.
    [43] 2. Cor. 5.
    [44] Rom. 7.
    [45] Phil. 1.
    [46] Prov. 12. & 18.
    [47] Ephes. 5.
    [48] Gen. 21. & 24.
    [49] Jud. 8, Act. 9.
    [50] Ruth. 2.
    [51] 2. Cor. 14.
  • Clarissimo viro domino Claudio Duret Senatus Molinensis Præsidi mertissimo, Claudius Feydeau sacræ & Juris Canonici Doctor, in collegiata B. Mariæ Ecclesia Decanus à Deo pacis, pacem sempiternam in omni loco precatur. [Société Caldorienne, 1619]
    Quantum quidem judicare ex minimo scientiæ talento[1] possum præclara Delphicæ columnæ videtur inscribenda S. Jacobi sententia[2], qua pronunciat Deum superbis resistere[3], humilibus autem dare gratiam[4] : & illud ipsum in arrogantibus turris Babel ædificatoribus perspicuè palam fit, quos prepotens ille rerum omnium effector Deus miscuit & turbavit : contrà quàm humiles turris David fabricatores pulchra linguarum distinctione Deus, scientiarum dominus collegit & recreavit, replevitque ; Apostolos Spiritu sancto, & cœperunt loqui variis linguis[5]. Quid ? vas electionis S. Paulus[6] (qui gloriosum Domini nomen corá gentibus, regibus & filiis Israel portavit) linguarum genera inter amplissima & nobilissima Dei dona proponit & extollit. Nunc in florentissima urbe Molinensi, suavissima mihi patria, te (amplissime : Pręses) honore prævenio, in oculo sancto saluto[7], & quantum possum in cælum tollo : nimirum illud intelligo te, qui ex universo scientiarum omnium horto non unum aliquem (ut plerique) surculum defregisses[8], sed quantam nemo messem fecisses, animum tamen dulcissimo illo Apostoli flore delectasse[9], non plus sapere quàm oportet sapere, sed sapere ad sobrietatem sic instituisse, ut transversum à moderationis linea unguem nunquam deflecteres : cujus sapientiæ cum impressa in omni vita non leviter extant vestigia, tum in linguarum abs te posteritati data historia, in qua varias literarum figuras, antiquas nationum consuetudines, eximias populorum leges, fructuosas Doctorum sententias, utilia Magistratuum exempla, necessaria gubernatorum consilia, & insigna Principum facta describis, explanas, illustras, expressa sunt ad memoriam sæculis omnibus consequentem. Quὁ fit, ut te legationem publicæ voluntatis obiens (ornatissime Præses) obsecrem, ut fine ulla interposita moratuam egregiam linguarum historiam typis tradas, qui enim ?
    Ante fores stantem dubitas admittere fama.
    Patere me his ad te Martialis poetæverbis uti, (¶ 3 v°)
    Post te victuræ, per te quoque vivere chartæ
    Incipiant, cineri gloria sera venir.
    Neque timeas, quæso, malevolos Semei filios[10], & exitiosos Alchimi socios, qui linguas suas, ut gladium exacuunt[11], intendut arcum, rem amaram, ut in occultis immaculatum sagittent[12], & contra diserta & fructuosa doctissimorum virorum scripta candidis doctorum  suffragiis approbata sini judicio & modo loquuntur, dente Theovino rodunt, carpere didicerunt non fructum capere, & Momi lingua calumniantur. Nec mirum videri debet, in novissimis diebus (ut Apostolus clamat & testatur[13]) sunt homines ingrati, scelesti, sine affectione, criminatores. Novus Asinius Pollio lacteo Livianæ dictionis flumini Patavinitatem in os, ipse ferreo ore objecit : Arsitarchus Ciceronis hoc est eloquentiæ ipsius orationes obelis nefariè confixit ? præbuit se idem nihilo secius Homeromastigem perfrictæ frontis nebulonem. Et in hoc frequentissimo terrarum orbis theatro, in quo primas ferè partes improbitas agit (ut qui in maligno est positus)[14] nulla reperiuntur eloquentissimorum virorum monumenta quantumvis summo ingenio perfecta, singulari industria elaborata, maximis vigiliis elucubrata, facili prudentium doctrina plena, quæ non maledica obtrectatorum spongia detergantur. Enimvero obstrectatores, qui libros incredibili eloquentia, & varia eruditione ajiciunt[15], fallacem Cayphæ linguam, perniciosum Pilati calamum, & versutum Herodis animum ostendunt[16]. Quare finem scribendi facio, venerando Sancti Johannis consilio munitus[17], detractores homicidas appello, & in regno Dei partem non habere pronuncio, gravissimoque Sancti Pauli Judicio fultus detractores[18], Deo odibiles esse affirmo, atque clarissimo Davidis exemplo detrahentes secretὁ proximo suo persequor. Pergo porrὁ, & maximam detractorum insaniam cum Democrito rideo, inauditam petulantiam cum Heraclito lacrymis prosequor, cum Hieremia deploro & lamentor, & cum Sancto Guillelmo antiquissimæ & celeberrimæ urbis Bituricensis Archiepiscopo dignissimo horrenda detractionis vitia sic fugio, aspernor, abhorreo, ut si in detractores incidam, aut verba detractoria mutem, aut ne calumniari & pollui videar, statim discedam. Quapropter (ornatissime Præses) eximio Sapientis consilio obtemptera[19]. Sepi aures tuas spinis, & linguam nequam noli audire[20] : linguam verὁ sapientium esse sanitatem ante oculos propone : ita planè, sicus Judas Machabæs petulantissimam Nicanonos linguam scidit[21], & avibus cœli dari jussit : tu (æquissime Præses) linguam fallacem, quæ non amat veritatem, & os lubricum quod operatur ruinas finde[22], & bestiis terræ proiice, os pravum remove, quo detrahentia labia procul à te habeas. Id ad extremum te vehemneter etiam atque hortor, quod ingressus es curriculum gloriæ sempiternum urge, age ad metas, interim quod mearum est partium id ardentissimis à Deo precibus contendam (¶ 3 v°) sibi honorifica, tuis expetita, Reip. bonisque omnibus salutaria, te digna.
    Longus colus det fila : veni numerosior avo,
    Huic atas Pylio.
    Quo enim annorum hoc meritorum extabit in rem literariam in civilem, adeoque major in omnem seges & copia. Ex Bibliotheca Feydea Molinensi die 2. Maij 1609. (¶ 4 r°)

    [1] 2. Thess. 3. Matth. 25.
    [2] Jacob. 4.
    [3] Genes.II.
    [4] Cant. 4.
    [5] Act. 2.
    [6] Act. 9.
    [7] I. Cor. 12, Rom. 12.
    [8] 2. Cor. 13.
    [9] Rom. 12.
    [10] 2. Reg. 16.
    [11] I. Mach. 7.
    [12] Psalm. 63.
    [13] 2. Tim. 3.
    [14] I. Joh. 5.
    [15] Matth. 26.
    [16] Luc.23. Marc. 6. Joh. 8.
    [17] Joh. 8.
    [18] I. Ro. 1. & 12.
    [19] Eccl. 28.
    [20] Prov. 12.
    [21] 2. Mach. 15.
    [22] Prov. 26.
  • A Madamoiselle Florimonde Bergier. [Société Caldorienne, 1619]
    Madamoiselle, combien que vous ayez grande occasion de pleurer continuellement (selon la vaine doctrine des enfans de ce monde) la mort de feu vostre bien aimé mary, Noble Claud Duret, Seigneur de Villaigues, & Peilleraud, Conseiller du Roy, President de Bourbonnois, qui est entré au chemin de toute chair par la mort amere[1] qui l’a separé de vostre compagnie le 17. Septembre 1611. ce neantmoins (selon la certaine science des enfans de Dieu) vous devez vous resjouyr en la divine bonté[2] qui a tiré son ame hors de ceste terre corporelle pour louer son sainct Nom[3], & qui l’a appellé de ceste terre tenebreuse & couverte de l’obscurité de la mort pour jouyr des biens admirables en la terre des vivants[4]. Consolez vous en la resurrection des morts, ayant ceste ferme croyance que son corps corruptible & mortel sera vestu d’incorruption & immortalité, & qu’il ne viendra point en condemnation, mais passera de mort corporelle à la vie eternelle. Remarquez je vous prie que la mort luy a servi d’arche[5] pour se sauver des vagues & tempestes qui sont terribles & espouventables[6] en la mer de ce monde, & le faire arrester sur la divine montagne d’Armenie : considerez d’avantage que la mort lui a esté envoyée pour eschelle à monter au ciel[7], afin de contempler la majesté ineffable de Dieu, & pour chariot à le conduire en la gloire celeste[8], & posseder l’heritage incorruptible[9], qui ne se peut contaminer, ne flestrir que Dieu luy a conservé és cieux[10]. Voyant donc que la grande tristesse accabloit[11], & comme un ver & tigne, rongeoit & gastoit vostre cœur tout desolé du Trespas de Noble Claude Duret President de Molins en Bourbonnois (qui estoit le pere des Orphelins, & le juge des vefves[12]) auquel apres Dieu, vous aviez vostre parfaicte affection : ayant crainte que ne soyez engloutie de trop grande tristesse, j’ay dressé ceste oraison funebre tant pour chasser tristesse loin de vous, laquelle (suivant (¶¶ 1 r°) l’oracle divin[13]) en a tué plusieurs, & n’y a point d’utilité en elle : que pour vous consoler selon le talent qui m’a esté communiqué par ce grand pere de Famille, de qui procedent tous biens. Sur quoy je le prieray de tout mon cœur[14], que comme (selon le dire du Prophete[15]) il oste les larmes de toute face[16], ainsi il luy plaise les essuyer de vos yeux[17], changer vos pleurs en joye[18], & vous environner de liesse[19], & donner accomplissement de vos bons desirs[20] qui est le meilleur argument par lequel je puisse tesmoigner que je suis tousjours,
    Mademoiselle
    Vostre humble serviteur Claude Faydeau Doyen en l’Eglise Collegiale nostre Dame de Molins.
    De Molins ce 3. Septembre 1611. (¶¶ 1 v°)

    [1] 2. Reg. 2. 1. Reg. 15.
    [2] Job. 1.
    [3] Psalm. 142. Joh. 10.
    [4] Psal. Ç6. (sic)
    [5] Joh. 5.
    [6] Gen. 8.
    [7] Gen. 28.
    [8] 4. Reg. 2.
    [9] 1. Pet. 1.
    [10] Prov. 25.
    [11] Psal. 67.
    [12] 2. Cor. 2.
    [13] Eccl. 31.
    [14] Eccl. 31.
    [15] Matt. 25.
    [16] Psal. 118.
    [17] Jacob. 1.
    [18] Esai. 25.
    [19] Apoc. 7.
    [20] Psal. 28.
  • [Oraison funebre sur le trespas de noble Claude Duret Seigneur de Villaigues et Peillerault, Conseiller du Roy, President au siege Presidial de Molins en Bourbonnois, faicte par Claude Faydeau Docteur en Theologie & droict Canon, Doyen en l’Eglise Collegiale nostre Dame de Molins.] (5 pages et demi] [Société Caldorienne, 1619]

Topoï dans les péritextes
  • auteur en moissonneur
  • fouiller le trésor
  • présentation du trésor au dédicataire
  • utilité
Collection créée par Anne Réach-Ngô Collection créée le 26/01/2017 Dernière modification le 04/08/2021