Présentation de la collection
Noël, François, Alfred Madier de Montjau © Assemblée nationale
Joseph-Paulin Madier de Montjau (1785-1865)
Député de 1831 à 1837, né à Bourg-Saint-Andéol (Généralité de Monpellier) le 11 février 1785, mort au Pré-Saint-Gervais (Seine) le 10 mai 1865, fils de Noël Joseph Madier de Montjau (1755-1830) qui fut député du tiers aux Etats généraux et de Catherine-Agathe Julien, il étudia le droit, fut reçu avocat en 1809, et fut nommé par Napoléon auditeur au conseil d'Etat (1810), puis inspecteur général des droits réunis (1811). En 1813, il entra à la cour impériale de Nîmes avec le titre de conseiller.
Lors de la Restauration, il dut aux opinions qu'il manifesta et surtout à celles qu'avait manifestées son père, d'être maintenu en fonctions par le gouvernement royal, et nommé (1818) chevalier de la Légion d'honneur.
En 1819, il adressa à la Chambre des députés une pétition dans laquelle il dénonçait les actes violents de la réaction dans le Midi et signalait un gouvernement occulte qui tendait à dominer l'administration pour ramener l'ancien régime. Cette initiative lui créa, dans le parti « constitutionnel », une réputation de libéralisme, d'énergie et d'intégrité. La pétition de M. Madier de Montjau eut en son temps un grand retentissement, tant à cause de la situation de son auteur qu'en raison des débats passionnés qu'elle excita dans le parlement : le magistrat fut, pour l'avoir signée, traduit devant la Cour de cassation, qui le censura parce qu'il s'était refusé à révéler les noms des individus coupables des excès dénoncés.
Candidat du parti libéral, il fut élu le 23 juin 1830, député du 1er arrondissement de l'Aude (Castelnaudary), par 273 voix (526 votants, 587 inscrits). Il ne prit part à aucune des réunions des députés, se prononça après la victoire pour l'établissement de la monarchie nouvelle, et prit place dans la majorité conservatrice.
Nommé procureur général à Lyon, il dut se représenter le 21 octobre, devant ses électeurs, qui le renommèrent député par 294 voix (403 votants, 592 inscrits), contre 76 à M. Teisseire-Dejean. Les premiers actes législatifs de M. Madier de Montjau furent de protéger le maintien du régime de la magistrature et de soutenir la proposition tendant à insérer dans la Charte que la religion catholique était professée par la majorité des Français.
Ami de Dupin, il suivit en général les inspirations de cet homme politique, fut désigné par la Chambre pour soutenir l'accusation contre les ex-ministres de Charles X, et se représenta, au renouvellement du 5 juillet 1831, dans le 4e collège de l'Ardèche (Largentière), qui le nomma par 54 voix (99 votants, 150 inscrits), contre 41 à M. Fournery. Ce 4e collège était de création récente.
M. Madier de Montjau fut appelé, la même année (décembre), aux fonctions de conseiller à la Cour de cassation, continua de se faire remarquer à la Chambre par la vivacité de ses opinions conservatrices, demanda le secret pour le vote sur l'hérédité de la pairie, et se montra favorable à l'état de siège. « Un des discours les plus remarquables de M. Madier, écrivait ironiquement la Biographie des hommes du jour, est celui qu'il prononça à l'occasion de la destitution de M. Dubois (de la Loire-Inférieure). Il monta à la tribune, courba sa tête dans ses mains jusque sur le marbre, et après être resté quelques instants immobile dans le recueillement le plus profond, se relevant de toute sa hauteur, il commença ainsi :
« À la première nouvelle de l'événement (On rit) qui a mis l'agitation dans toute la Chambre, je me suis imposé la loi de dire mon opinion; mais comme j'ai craint les dangers de l'improvisation, je viens vous demander la permission de lire un discours écrit. » (Rire universel.)
« Il tira alors de sa poche un fort épais manuscrit et continua : « Une opposition obstinée est toujours déplacée; elle est coupable chez un fonctionnaire... L'opposition des fonctionnaires publics doit être secrète. (Vive interruption.) Laissez-moi continuer la lecture de mon manuscrit. Les fonctionnaires peuvent combattre les ministres dans leurs votes, mais non à la tribune. (Oh ! oh !) Je soutiens qu'un député fonctionnaire ne doit jamais se trouver parmi les orateurs du gouvernement. (Rumeur.) Laissez-moi continuer la lecture de mon manuscrit. »
Les rires et les interruptions furent si énergiques que Madier descendit de la tribune sans pouvoir terminer la lecture de son manuscrit. L'hilarité fut telle qu'il fallut longtemps pour rétablir le calme. »
Lors de la loi sur les associations, il combattit les amendements de l'opposition; puis il parla sur les pensions militaires. M. Madier de Montjau, à qui les journaux du temps reprochaient vivement de négliger ses fonctions de conseiller à la Cour de cassation, au point que le président de la section des requêtes avait dû dénoncer au garde des sceaux les absences de son subordonné, montrait plus de zèle, à en croire le biographe cité plus haut, dans l'accomplissement de « négociations diplomatiques, fort difficiles et d'un genre tout à fait relevé. On cite entre autres la glorieuse mission dont il fut chargé par M. Thiers, ministre de l'Intérieur, auprès du père de l'excellence lilliputienne. Ce bon M. Thiers père avait fait trembler son fils par son indécente prétention de vouloir assister aux noces du ministre avec la belle demoiselle Dosne, sinon il refusait son autorisation. Aux grands maux les grands remèdes. M. Madier de Montjau fut appelé, et négocia l'acquisition de cette autorisation avec un talent et une adresse dignes de M. de Talleyrand : aussi fut-il une seconde fois chargé d'éloigner le digne M. Thiers de Paris. Cette fois, il en coûta un peu plus cher ; mais il y a des circonstances où il faut savoir faire des sacrifices, et pour le ministre de l'Intérieur, il n'y en a pas de pire que la présence de son cher papa à Paris. »
M. Madier de Montjau se représenta sans succès aux élections générales de 1834. Mais son concurrent heureux, M. Mathieu, retenu par la maladie, ne s'étant pas rendu assez vite à son poste, la Chambre lui accorda un délai pour justifier de son éligibilité, et le surlendemain, avant d'avoir pu connaître la réponse de l'intéressé, elle annula l'élection. Cette mesure permit à M. Madier de Montjau de se représenter, le 22 septembre, dans le même collège: il fut alors élu, sans contestation, par 84 voix (89 votants, 165 inscrits). Il reprit sa place au centre et vota comme précédemment avec le ministère, tout en se montrant peu assidu aux séances de la Chambre. « Le jour d'un vote important, le ministère, craignant la paresse de son fidèle, lui fit écrire par M. Fulchiron pour l'engager à être plus exact. M. Madier de Montjau se trouva fort heureux de ce billet, il s'empressa de l'adresser au président de la cour de Cassation pour se dispenser de siéger, et il répondit à M. Fulchiron que ses occupations au palais l'empêcheraient de se rendre à la Chambre avant quatre heures. La chronique dit que M. Madier de Montjau ne se leva ce jour-là qu'à trois heures et demie. » (Biographie des hommes du jour.)
Lors de la discussion de la loi de 1835 contre la presse, le député de Largentière prit le premier la parole. Il attaqua Lamartine, éleva la voix contre les « carlistes » et les républicains, fit l'éloge de la Chambre des pairs comme juridiction politique et donna son assentiment aux mesures préventives préparées.
Il quitta en 1837 la vie parlementaire, mais non la politique. Converti subitement à l'opposition, il prit la plume en 1841, pour signaler au pays les tendances réactionnaires du pouvoir, déclarant qu'il se repentait de les avoir encouragées par ses votes ; il pencha alors vers le parti légitimiste, et qualifia le gouvernement de Juillet « d'épouvantable abus de pouvoir. » Rédacteur de l'Esprit public (1846), organe des oppositions réunies, il attaqua jusqu'en 1848 le gouvernement de Louis-Philippe, ne se rallia pas à la République en février, et, pour protester contre les atteintes portées par le gouvernement provisoire au principe de l'inamovibilité des juges, se démit avec éclat de sa charge de conseiller à la cour suprême. Dès lors il vécut dans la retraite.
En 1849, il adressa au Mémorial Bordelais une lettre dans laquelle il regrettait la part qu'il avait prise à l'établissement de la royauté de Juillet. Arrêté un moment à la suite du coup d'Etat, il fut presque aussitôt relâché. Il se fixa alors auprès de Paris et mourut en 1865.
On a de lui :
- Pétition adressée à la Chambre des députés par Madier de Montjau, suivie de considérations constitutionnelles par A. Jay (1820) ;
- Réponse de M. Madier aux insultes de la Quotidienne ;
- Lettre de M. Madier de Montjau à M. le comte de Portalis, ministre de la Justice (1820) ;
- Lettre à M. Lainé (1820) ;
- Lettre à M. Pasquier, ministre des Affaires étrangères (1820) ;
- Du gouvernement occulte, de ses agents et de ses actes (1820) ;
- Plaidoyer et réplique de M. Madier de Montjau, suivis des conclusions et de l'arrêt (1820).
Noël, François, Alfred Madier de Montjau © Assemblée nationale
Joseph-Paulin Madier de Montjau (1785-1865)
Député de 1831 à 1837, né à Bourg-Saint-Andéol (Généralité de Monpellier) le 11 février 1785, mort au Pré-Saint-Gervais (Seine) le 10 mai 1865, fils de Noël Joseph Madier de Montjau (1755-1830) qui fut député du tiers aux Etats généraux et de Catherine-Agathe Julien, il étudia le droit, fut reçu avocat en 1809, et fut nommé par Napoléon auditeur au conseil d'Etat (1810), puis inspecteur général des droits réunis (1811). En 1813, il entra à la cour impériale de Nîmes avec le titre de conseiller.
Lors de la Restauration, il dut aux opinions qu'il manifesta et surtout à celles qu'avait manifestées son père, d'être maintenu en fonctions par le gouvernement royal, et nommé (1818) chevalier de la Légion d'honneur.
En 1819, il adressa à la Chambre des députés une pétition dans laquelle il dénonçait les actes violents de la réaction dans le Midi et signalait un gouvernement occulte qui tendait à dominer l'administration pour ramener l'ancien régime. Cette initiative lui créa, dans le parti « constitutionnel », une réputation de libéralisme, d'énergie et d'intégrité. La pétition de M. Madier de Montjau eut en son temps un grand retentissement, tant à cause de la situation de son auteur qu'en raison des débats passionnés qu'elle excita dans le parlement : le magistrat fut, pour l'avoir signée, traduit devant la Cour de cassation, qui le censura parce qu'il s'était refusé à révéler les noms des individus coupables des excès dénoncés.
Candidat du parti libéral, il fut élu le 23 juin 1830, député du 1er arrondissement de l'Aude (Castelnaudary), par 273 voix (526 votants, 587 inscrits). Il ne prit part à aucune des réunions des députés, se prononça après la victoire pour l'établissement de la monarchie nouvelle, et prit place dans la majorité conservatrice.
Nommé procureur général à Lyon, il dut se représenter le 21 octobre, devant ses électeurs, qui le renommèrent député par 294 voix (403 votants, 592 inscrits), contre 76 à M. Teisseire-Dejean. Les premiers actes législatifs de M. Madier de Montjau furent de protéger le maintien du régime de la magistrature et de soutenir la proposition tendant à insérer dans la Charte que la religion catholique était professée par la majorité des Français.
Ami de Dupin, il suivit en général les inspirations de cet homme politique, fut désigné par la Chambre pour soutenir l'accusation contre les ex-ministres de Charles X, et se représenta, au renouvellement du 5 juillet 1831, dans le 4e collège de l'Ardèche (Largentière), qui le nomma par 54 voix (99 votants, 150 inscrits), contre 41 à M. Fournery. Ce 4e collège était de création récente.
M. Madier de Montjau fut appelé, la même année (décembre), aux fonctions de conseiller à la Cour de cassation, continua de se faire remarquer à la Chambre par la vivacité de ses opinions conservatrices, demanda le secret pour le vote sur l'hérédité de la pairie, et se montra favorable à l'état de siège. « Un des discours les plus remarquables de M. Madier, écrivait ironiquement la Biographie des hommes du jour, est celui qu'il prononça à l'occasion de la destitution de M. Dubois (de la Loire-Inférieure). Il monta à la tribune, courba sa tête dans ses mains jusque sur le marbre, et après être resté quelques instants immobile dans le recueillement le plus profond, se relevant de toute sa hauteur, il commença ainsi :
« À la première nouvelle de l'événement (On rit) qui a mis l'agitation dans toute la Chambre, je me suis imposé la loi de dire mon opinion; mais comme j'ai craint les dangers de l'improvisation, je viens vous demander la permission de lire un discours écrit. » (Rire universel.)
« Il tira alors de sa poche un fort épais manuscrit et continua : « Une opposition obstinée est toujours déplacée; elle est coupable chez un fonctionnaire... L'opposition des fonctionnaires publics doit être secrète. (Vive interruption.) Laissez-moi continuer la lecture de mon manuscrit. Les fonctionnaires peuvent combattre les ministres dans leurs votes, mais non à la tribune. (Oh ! oh !) Je soutiens qu'un député fonctionnaire ne doit jamais se trouver parmi les orateurs du gouvernement. (Rumeur.) Laissez-moi continuer la lecture de mon manuscrit. »
Les rires et les interruptions furent si énergiques que Madier descendit de la tribune sans pouvoir terminer la lecture de son manuscrit. L'hilarité fut telle qu'il fallut longtemps pour rétablir le calme. »
Lors de la loi sur les associations, il combattit les amendements de l'opposition; puis il parla sur les pensions militaires. M. Madier de Montjau, à qui les journaux du temps reprochaient vivement de négliger ses fonctions de conseiller à la Cour de cassation, au point que le président de la section des requêtes avait dû dénoncer au garde des sceaux les absences de son subordonné, montrait plus de zèle, à en croire le biographe cité plus haut, dans l'accomplissement de « négociations diplomatiques, fort difficiles et d'un genre tout à fait relevé. On cite entre autres la glorieuse mission dont il fut chargé par M. Thiers, ministre de l'Intérieur, auprès du père de l'excellence lilliputienne. Ce bon M. Thiers père avait fait trembler son fils par son indécente prétention de vouloir assister aux noces du ministre avec la belle demoiselle Dosne, sinon il refusait son autorisation. Aux grands maux les grands remèdes. M. Madier de Montjau fut appelé, et négocia l'acquisition de cette autorisation avec un talent et une adresse dignes de M. de Talleyrand : aussi fut-il une seconde fois chargé d'éloigner le digne M. Thiers de Paris. Cette fois, il en coûta un peu plus cher ; mais il y a des circonstances où il faut savoir faire des sacrifices, et pour le ministre de l'Intérieur, il n'y en a pas de pire que la présence de son cher papa à Paris. »
M. Madier de Montjau se représenta sans succès aux élections générales de 1834. Mais son concurrent heureux, M. Mathieu, retenu par la maladie, ne s'étant pas rendu assez vite à son poste, la Chambre lui accorda un délai pour justifier de son éligibilité, et le surlendemain, avant d'avoir pu connaître la réponse de l'intéressé, elle annula l'élection. Cette mesure permit à M. Madier de Montjau de se représenter, le 22 septembre, dans le même collège: il fut alors élu, sans contestation, par 84 voix (89 votants, 165 inscrits). Il reprit sa place au centre et vota comme précédemment avec le ministère, tout en se montrant peu assidu aux séances de la Chambre. « Le jour d'un vote important, le ministère, craignant la paresse de son fidèle, lui fit écrire par M. Fulchiron pour l'engager à être plus exact. M. Madier de Montjau se trouva fort heureux de ce billet, il s'empressa de l'adresser au président de la cour de Cassation pour se dispenser de siéger, et il répondit à M. Fulchiron que ses occupations au palais l'empêcheraient de se rendre à la Chambre avant quatre heures. La chronique dit que M. Madier de Montjau ne se leva ce jour-là qu'à trois heures et demie. » (Biographie des hommes du jour.)
Lors de la discussion de la loi de 1835 contre la presse, le député de Largentière prit le premier la parole. Il attaqua Lamartine, éleva la voix contre les « carlistes » et les républicains, fit l'éloge de la Chambre des pairs comme juridiction politique et donna son assentiment aux mesures préventives préparées.
Il quitta en 1837 la vie parlementaire, mais non la politique. Converti subitement à l'opposition, il prit la plume en 1841, pour signaler au pays les tendances réactionnaires du pouvoir, déclarant qu'il se repentait de les avoir encouragées par ses votes ; il pencha alors vers le parti légitimiste, et qualifia le gouvernement de Juillet « d'épouvantable abus de pouvoir. » Rédacteur de l'Esprit public (1846), organe des oppositions réunies, il attaqua jusqu'en 1848 le gouvernement de Louis-Philippe, ne se rallia pas à la République en février, et, pour protester contre les atteintes portées par le gouvernement provisoire au principe de l'inamovibilité des juges, se démit avec éclat de sa charge de conseiller à la cour suprême. Dès lors il vécut dans la retraite.
En 1849, il adressa au Mémorial Bordelais une lettre dans laquelle il regrettait la part qu'il avait prise à l'établissement de la royauté de Juillet. Arrêté un moment à la suite du coup d'Etat, il fut presque aussitôt relâché. Il se fixa alors auprès de Paris et mourut en 1865.
On a de lui :
- Pétition adressée à la Chambre des députés par Madier de Montjau, suivie de considérations constitutionnelles par A. Jay (1820) ;
- Réponse de M. Madier aux insultes de la Quotidienne ;
- Lettre de M. Madier de Montjau à M. le comte de Portalis, ministre de la Justice (1820) ;
- Lettre à M. Lainé (1820) ;
- Lettre à M. Pasquier, ministre des Affaires étrangères (1820) ;
- Du gouvernement occulte, de ses agents et de ses actes (1820) ;
- Plaidoyer et réplique de M. Madier de Montjau, suivis des conclusions et de l'arrêt (1820).
Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)
Jacques, Charles Dupont de l'Eure © Assemblée nationale
Jacques-Charles Dupont de l'Eure (1767-1855)
Député aux Cinq-Cents, de 1813 à 1815, représentant aux Cent-Jours, député de 1819 à 1830, ministre, député de 1830 à 1848, membre du gouvernement provisoire, représentant en 1848, né au Neubourg ( Généralité d'Alençon, France) le 27 février 1767, mort à Rouge-Perriers (Eure) le 2 mars 1855, il était fils de Pierre-Nicolas Dupont, marchand au Neubourg, et de Marthe Anson.
Il étudia le droit sous la direction du célèbre avocat Férey, son parent, et fut reçu, en 1789, avocat au parlement de Normandie. Ses concitoyens l'élurent officier municipal du Neubourg (27 février 1792), le jour anniversaire de ses 25 ans. Administrateur du district de Louviers (30 brumaire an 11), juge au tribunal civil de cette ville (28 nivôse suivant), il redevint administrateur du district (21 germinal), fut nommé, en l'an V, substitut du commissaire du Directoire exécutif près le tribunal de l'Eure, puis, en l'an VI, accusateur public près le tribunal criminel de l'Eure.
Le 25 germinal an VI, il fut élu député de l'Eure au Conseil des Cinq-Cents par 306 voix sur 374 votants; il ne joua dans cette assemblée qu'un rôle effacé, se montra favorable au coup d'Etat de brumaire, et fut nommé, par le gouvernement consulaire de l'an VIII, conseiller au tribunal d'appel de Rouen, où il ne resta que peu de temps ayant été appelé aux fonctions de président du tribunal criminel de l'Eure.
Membre de la Légion d'honneur (25 prairial an XII), il montra dans ses fonctions de magistrat une courageuse indépendance vis-à-vis des exigences du gouvernement impérial, notamment dans le procès intenté à une famille noble, qu'on voulait impliquer dans la chouannerie, et dont son arrêt attesta l'innocence (11 mars 1809). Napoléon le créa cependant chevalier de l'Empire le 26 avril 1810, et, lors de la réorganisation des tribunaux, lui donna (1811) un siège de conseiller à la cour impériale de Rouen, puis (1812) de président de chambre à la même cour.
Deux fois élu candidat au Corps législatif par le collège de l'Eure, il n'y fut admis, par le suffrage du Sénat conservateur, que le 6 janvier 1813. Vice-président de la Chambre à la première Restauration, il fit substituer aux formules de serment plus ou moins féodales de l'ancien régime, le serment de « fidélité au roi et à la Charte », et fut nommé, par Louis XVIII, officier de la Légion d'honneur (28 décembre 1814).
Le 9 mai 1815, aux Cent-Jours, le collège de département de l'Eure l'élut représentant par 87 voix sur 91 votants. Il fut élu second vice-président de la Chambre, et se mit à la tête de l'opposition contre un retour possible de Napoléon aux idées absolutistes.
Après Waterloo, il fit insérer dans la déclaration du 4 juillet 1815 que « la France ne reconnaîtrait d'autre gouvernement que celui qui lui garantirait, par des institutions librement consenties, l'égalité devant la loi, la liberté individuelle, la liberté de la presse et des cultes, le jury, l'abolition de toute noblesse héréditaire, l'inviolabilité des domaines nationaux, et tous les grands résultats de la Révolution ». Le lendemain, il demanda qu'une députation de la Chambre allât porter cette déclaration aux souverains alliés. La motion fut votée, et il fut désigné pour faire partie de cette mission, que les événements ne permirent pas d'accomplir. Cette attitude l'empêcha d'être élu député à la Chambre introuvable de 1815, mais, après la dissolution, il se porta candidat dans l'Eure ; le gouvernement le fit exclure du conseil général de ce département: le collège de département ne put se constituer en nombre suffisant, et ce ne fut que l'année suivante que Dupont de l'Eure fut élu député de l'Eure (20 septembre 1817), au collège de département, par 601 voix sur 963 votants et 2 073 inscrits.
Il prit place dans l'opposition constitutionnelle, dénonça l'arbitraire des ministres, défendit la cause des membres de la Légion d'honneur, réclama une rigoureuse économie dans les finances, demanda la réduction des gros traitements, à commencer par les ministres, soutint la loi sur le recrutement, réclama l'attribution des délits de presse au jury, protesta contre l'inégalité de solde entre les Suisses de la garde du roi et l'armée, et combattit la motion Barthélemy portant modification de la loi électorale. En 1818, le ministère omit son nom dans les nouveaux cadres de la magistrature ; il le destituait ainsi de ses fonctions de président à la cour de Rouen. Béranger le vengea de cette mesure par sa chanson : le Trembleur, et ses compatriotes lui offrirent en 1824 le domaine du Hom, près Beaumont-le-Roger (Eure), acquis par souscription, pour lui permettre de payer le cens exigé par la loi électorale. Dans la session de 1820, Dupont de l'Eure figura brillamment dans la discussion des modifications à apporter à l'art. 361 du Code d'instruction criminelle sur le jury, et combattit énergiquement le projet relatif à la censure des journaux.
Il siégea sans interruption à la Chambre des députés sous la Restauration, successivement réélu :
- le 4 novembre 1820, dans le 2e arrondissement électoral de l'Eure (Pont-Audemer), par 301 voix sur 540 votants et 734 inscrits ;
- le 2 août 1824, dans le 1er arrondissement de Paris, en remplacement du général Foy qui avait opté pour Vervins, par 622 voix sur 1 215 votants, contre 553 voix a M. Lebrun et 22 à M. Delalot (il avait échoué le 25 février précédent, à Pont-Audemer, avec 127 voix contre 254 à M. Lizot, élu ;
- le 17 novembre 1827, dans le 1er arrondissement de Paris, par 1 094 voix sur 1 306 votants, contre 173 voix à M. Lebrun, candidat ministériel ; le même jour, il était également élu dans le 2e arrondissement électoral de l'Eure (Pont-Audemer), par 321 voix sur 434 votants et 538 inscrits, contre 96 voix à M. Le Pésant de Bois-Guilbert, et dans le 3e arrondissement (Bernay) par 228 voix sur 348 votants et 398 inscrits, contre 96 voix à M. Auguste Le Prevost.
Dupont de l'Eure, qui fut constamment aux premiers rangs de l'opposition libérale durant ces diverses législatures, combattit le ministère Polignac et fut des 221.
Réélu, le 12 juillet 1830, à Bernay, par 236 voix sur 330 votants et 372 inscrits, contre 87 voix à M. Mallard de la Varende, il était à Rouge-Perriers, près du Neubourg, au moment où furent promulguées les Ordonnances. Il accourut à Paris, hésita un moment entre la République et la branche cadette, mais suivit enfin La Fayette et Laffitte, et, en qualité de garde des Sceaux nommé par le nouveau pouvoir, reçut le serment prêté par Louis-Philippe dans la séance du 9 août 1830. L'accord dura peu entre le nouveau ministre et le nouveau roi ; l'extrême franchise de Dupont de l'Eure se pliait mal aux exigences de la politique d'alors ; il profita de la démission envoyée par le général La Fayette pour remettre la sienne (17 octobre 1830), protestant en même temps contre l'ajournement de la loi électorale. Il passa alors à l'opposition, et fut réélu, le 5 juillet 1831, par 198 voix sur 246 votants et 428 inscrits, contre 23 voix à M. Prétavoine. La mort tragique du jeune Dulong (Voy. ce nom), son parent, et, a-t-on dit, son fils naturel (30 janvier 1834), le plongea dans une telle douleur qu'il ne parut plus à la Chambre, et envoya sa démission de député ; mais les électeurs du 7e collège de l'Eure (Brionne) lui renouvelèrent son mandat le 21 juin 1834, par 165 voix sur 285 votants et 414 inscrits, contre 118 voix à M. Bioche, et Dupont de l'Eure vint reprendre, dans l'opposition de gauche, son siège qui lui fut successivement maintenu :
- aux élections du 4 novembre 1837, par 283 voix sur 336 votants et 506 inscrits ;
- le 2 mars 1839, par 354 voix sur 365 votants
- le 9 juillet 1842, par 260 voix sur 516 votants et 649 inscrits, contre 232 voix à M. de Salvandy (le même jour, dans le 6e collège (Pont-Audemer), il avait échoué avec 223 voix contre 336 à M. Hébert, élu) ;
- le 1er août 1846, par 299 voix sur 325 votants et 628 inscrits, contre 20 voix à M. Lefebvre-Duruflé (le même jour, il échouait dans le 1er collège avec 232 voix contre 339 à M. de Salvandy, élu, et dans le 6e collège, avec 172 voix contre 421 à M. Hébert, élu).
Il prit une part active, en 1847, à la campagne des banquets réformistes, et présida, le 12 décembre, au Neubourg, un banquet qui fit du bruit.
À la séance de la Chambre du 24 février 1848, après l'envahissement de l'Assemblée, il fut porté au fauteuil, et présida à la proclamation de la République : il avait quatre-vingt-un ans. Le même jour, il fut nommé membre du gouvernement provisoire, puis président provisoire du Conseil des ministres.
Jacques, Charles Dupont de l'Eure © Assemblée nationale
Jacques-Charles Dupont de l'Eure (1767-1855)
Député aux Cinq-Cents, de 1813 à 1815, représentant aux Cent-Jours, député de 1819 à 1830, ministre, député de 1830 à 1848, membre du gouvernement provisoire, représentant en 1848, né au Neubourg ( Généralité d'Alençon, France) le 27 février 1767, mort à Rouge-Perriers (Eure) le 2 mars 1855, il était fils de Pierre-Nicolas Dupont, marchand au Neubourg, et de Marthe Anson.
Il étudia le droit sous la direction du célèbre avocat Férey, son parent, et fut reçu, en 1789, avocat au parlement de Normandie. Ses concitoyens l'élurent officier municipal du Neubourg (27 février 1792), le jour anniversaire de ses 25 ans. Administrateur du district de Louviers (30 brumaire an 11), juge au tribunal civil de cette ville (28 nivôse suivant), il redevint administrateur du district (21 germinal), fut nommé, en l'an V, substitut du commissaire du Directoire exécutif près le tribunal de l'Eure, puis, en l'an VI, accusateur public près le tribunal criminel de l'Eure.
Le 25 germinal an VI, il fut élu député de l'Eure au Conseil des Cinq-Cents par 306 voix sur 374 votants; il ne joua dans cette assemblée qu'un rôle effacé, se montra favorable au coup d'Etat de brumaire, et fut nommé, par le gouvernement consulaire de l'an VIII, conseiller au tribunal d'appel de Rouen, où il ne resta que peu de temps ayant été appelé aux fonctions de président du tribunal criminel de l'Eure.
Membre de la Légion d'honneur (25 prairial an XII), il montra dans ses fonctions de magistrat une courageuse indépendance vis-à-vis des exigences du gouvernement impérial, notamment dans le procès intenté à une famille noble, qu'on voulait impliquer dans la chouannerie, et dont son arrêt attesta l'innocence (11 mars 1809). Napoléon le créa cependant chevalier de l'Empire le 26 avril 1810, et, lors de la réorganisation des tribunaux, lui donna (1811) un siège de conseiller à la cour impériale de Rouen, puis (1812) de président de chambre à la même cour.
Deux fois élu candidat au Corps législatif par le collège de l'Eure, il n'y fut admis, par le suffrage du Sénat conservateur, que le 6 janvier 1813. Vice-président de la Chambre à la première Restauration, il fit substituer aux formules de serment plus ou moins féodales de l'ancien régime, le serment de « fidélité au roi et à la Charte », et fut nommé, par Louis XVIII, officier de la Légion d'honneur (28 décembre 1814).
Le 9 mai 1815, aux Cent-Jours, le collège de département de l'Eure l'élut représentant par 87 voix sur 91 votants. Il fut élu second vice-président de la Chambre, et se mit à la tête de l'opposition contre un retour possible de Napoléon aux idées absolutistes.
Après Waterloo, il fit insérer dans la déclaration du 4 juillet 1815 que « la France ne reconnaîtrait d'autre gouvernement que celui qui lui garantirait, par des institutions librement consenties, l'égalité devant la loi, la liberté individuelle, la liberté de la presse et des cultes, le jury, l'abolition de toute noblesse héréditaire, l'inviolabilité des domaines nationaux, et tous les grands résultats de la Révolution ». Le lendemain, il demanda qu'une députation de la Chambre allât porter cette déclaration aux souverains alliés. La motion fut votée, et il fut désigné pour faire partie de cette mission, que les événements ne permirent pas d'accomplir. Cette attitude l'empêcha d'être élu député à la Chambre introuvable de 1815, mais, après la dissolution, il se porta candidat dans l'Eure ; le gouvernement le fit exclure du conseil général de ce département: le collège de département ne put se constituer en nombre suffisant, et ce ne fut que l'année suivante que Dupont de l'Eure fut élu député de l'Eure (20 septembre 1817), au collège de département, par 601 voix sur 963 votants et 2 073 inscrits.
Il prit place dans l'opposition constitutionnelle, dénonça l'arbitraire des ministres, défendit la cause des membres de la Légion d'honneur, réclama une rigoureuse économie dans les finances, demanda la réduction des gros traitements, à commencer par les ministres, soutint la loi sur le recrutement, réclama l'attribution des délits de presse au jury, protesta contre l'inégalité de solde entre les Suisses de la garde du roi et l'armée, et combattit la motion Barthélemy portant modification de la loi électorale. En 1818, le ministère omit son nom dans les nouveaux cadres de la magistrature ; il le destituait ainsi de ses fonctions de président à la cour de Rouen. Béranger le vengea de cette mesure par sa chanson : le Trembleur, et ses compatriotes lui offrirent en 1824 le domaine du Hom, près Beaumont-le-Roger (Eure), acquis par souscription, pour lui permettre de payer le cens exigé par la loi électorale. Dans la session de 1820, Dupont de l'Eure figura brillamment dans la discussion des modifications à apporter à l'art. 361 du Code d'instruction criminelle sur le jury, et combattit énergiquement le projet relatif à la censure des journaux.
Il siégea sans interruption à la Chambre des députés sous la Restauration, successivement réélu :
- le 4 novembre 1820, dans le 2e arrondissement électoral de l'Eure (Pont-Audemer), par 301 voix sur 540 votants et 734 inscrits ;
- le 2 août 1824, dans le 1er arrondissement de Paris, en remplacement du général Foy qui avait opté pour Vervins, par 622 voix sur 1 215 votants, contre 553 voix a M. Lebrun et 22 à M. Delalot (il avait échoué le 25 février précédent, à Pont-Audemer, avec 127 voix contre 254 à M. Lizot, élu ;
- le 17 novembre 1827, dans le 1er arrondissement de Paris, par 1 094 voix sur 1 306 votants, contre 173 voix à M. Lebrun, candidat ministériel ; le même jour, il était également élu dans le 2e arrondissement électoral de l'Eure (Pont-Audemer), par 321 voix sur 434 votants et 538 inscrits, contre 96 voix à M. Le Pésant de Bois-Guilbert, et dans le 3e arrondissement (Bernay) par 228 voix sur 348 votants et 398 inscrits, contre 96 voix à M. Auguste Le Prevost.
Dupont de l'Eure, qui fut constamment aux premiers rangs de l'opposition libérale durant ces diverses législatures, combattit le ministère Polignac et fut des 221.
Réélu, le 12 juillet 1830, à Bernay, par 236 voix sur 330 votants et 372 inscrits, contre 87 voix à M. Mallard de la Varende, il était à Rouge-Perriers, près du Neubourg, au moment où furent promulguées les Ordonnances. Il accourut à Paris, hésita un moment entre la République et la branche cadette, mais suivit enfin La Fayette et Laffitte, et, en qualité de garde des Sceaux nommé par le nouveau pouvoir, reçut le serment prêté par Louis-Philippe dans la séance du 9 août 1830. L'accord dura peu entre le nouveau ministre et le nouveau roi ; l'extrême franchise de Dupont de l'Eure se pliait mal aux exigences de la politique d'alors ; il profita de la démission envoyée par le général La Fayette pour remettre la sienne (17 octobre 1830), protestant en même temps contre l'ajournement de la loi électorale. Il passa alors à l'opposition, et fut réélu, le 5 juillet 1831, par 198 voix sur 246 votants et 428 inscrits, contre 23 voix à M. Prétavoine. La mort tragique du jeune Dulong (Voy. ce nom), son parent, et, a-t-on dit, son fils naturel (30 janvier 1834), le plongea dans une telle douleur qu'il ne parut plus à la Chambre, et envoya sa démission de député ; mais les électeurs du 7e collège de l'Eure (Brionne) lui renouvelèrent son mandat le 21 juin 1834, par 165 voix sur 285 votants et 414 inscrits, contre 118 voix à M. Bioche, et Dupont de l'Eure vint reprendre, dans l'opposition de gauche, son siège qui lui fut successivement maintenu :
- aux élections du 4 novembre 1837, par 283 voix sur 336 votants et 506 inscrits ;
- le 2 mars 1839, par 354 voix sur 365 votants
- le 9 juillet 1842, par 260 voix sur 516 votants et 649 inscrits, contre 232 voix à M. de Salvandy (le même jour, dans le 6e collège (Pont-Audemer), il avait échoué avec 223 voix contre 336 à M. Hébert, élu) ;
- le 1er août 1846, par 299 voix sur 325 votants et 628 inscrits, contre 20 voix à M. Lefebvre-Duruflé (le même jour, il échouait dans le 1er collège avec 232 voix contre 339 à M. de Salvandy, élu, et dans le 6e collège, avec 172 voix contre 421 à M. Hébert, élu).
Il prit une part active, en 1847, à la campagne des banquets réformistes, et présida, le 12 décembre, au Neubourg, un banquet qui fit du bruit.
À la séance de la Chambre du 24 février 1848, après l'envahissement de l'Assemblée, il fut porté au fauteuil, et présida à la proclamation de la République : il avait quatre-vingt-un ans. Le même jour, il fut nommé membre du gouvernement provisoire, puis président provisoire du Conseil des ministres.
Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)
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Fiche descriptive de la collection
Auteur
- Dupont de l'Eure, Jacques-Charles (1767-1855)
- Madier de Montjau, Joseph-Paulin (1785-1865)
Mots-clés
- Collège de France
- Décès
- Famille Guizot
- France (1814-1830, Restauration)
GenreCorrespondance
LangueFrançais
Source42 AP 140_22
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