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N° 61, 3 mai 1993 : « Réponse ouverte de Lan-chat-na à la lettre fermée»

Chers tous. Le Lynx là m’a écrit l’autre jour pour dire tout et tout. Mais c’est quoi, je n’ai pas compris ! Je suis d’accord, je ne suis pas président élu mais chef. Alors où est le problème ? Je suis venu avec des solutions parce qu’il n’y a pas de problèmes. Il y a des présidents qui n’ont que des problèmes. Pour moi chat va.

Chers toutes, si le prix de l’œuf a monté, est-ce que c’est moi qui vais au marché, hein ? Est-ce que je suis une poule, hein ? Moi, ce sont les cochons que j’élève et qui m’intéressent. Alors ? Regardez le Liberia ! Est-ce qu’on peut découper quelqu’un, un ancien président comme chat ? Vous êtes mères de famille. Est-ce que je mens ? Hein !

Moi je n’ai jamais menti. Pour les élections, c’est sérieux. C’est pour chat que vous attendrez tant que je serai chef. Ils vont se fatiguer ceux qui se disent opposants et tout chat. Quand ils seront pauvres, on votera parce que le pays est pauvre. Demandez à « plateau ». Je crois que c’est comme chat que mon ministre du plan s’appelle en réalité. J’oublie parfois son nom, parce qu’il est devenu très gros maintenant.

Bon ! Maintenant c’est à vous les étudiants que je m’adresse, même si vous n’avez pas d’adresse. Est-ce que moi-même j’ai une adresse ? De toute façon si chat ne va pas, je déménage. C’est ce que je vous conseille quand les bérets rouges viendront vous prendre une nuit. Mais qu’est-ce que vous voulez ? J’avais le choix de prendre un ministre gros ou petit. Est-ce que votre ministre ne fait pas le poids ? Je le pèse tous les jours. Et je suis content de lui. Il grossit en jour en jour. Et vous n’êtes pas contents. Adé aah !

Maintenant pour les paysans. Attendez, je voulais dire quelque chose d’important…Mais chat va me revenir. C’est Gomez qui m’embrouille. Lui, il sait baratiner…Ha ! Chat me revient un peu. Donc je voulais parler de nos parents paysans. Quand il y a la pluie, ils insultent le ciel. Et quand il n’y a pas d’eau, ils m’insultent. Quand tout va bien, ils insultent les routes et les prix. Adé aah ! Est-ce que c’est un pays chat hein ? C’est pour cela que l’autre est parti mourir dehors, complètement découragé.

Mais moi, billahi je m’en fous ! Les chômeurs n’ont qu’à défiler. Moi j’ai du travail. Regardez moi à la télé au début des conseils de mes ministres. Est-ce que je ne serre pas la main de tous ces gens-là ? Cela me prend du temps ! Après je dois entendre leurs propositions sur des projets. De grandes propositions pour notre petit pays. Je ne connais pas bien le français, mais si je parle en soussou, on crie. On dit qu’il est rachiste. Il est ceci, il est cela. Alors je m’en fous maintenant ! Un jour je vous parlerai en chinois et quand vous allez encore applaudir, certains vont dire encore, c’est ceci, c’est cela. De toute façon, où est le problème ?

S’il n’y a pas de problème, moi quand même j’en ai. Je ne sais pas s’il faut partir ou rester ? Si je pars, on dit il a fui. Et si je reste, c’est plus grave, on dit ça va pas. Adé aah ! Qui peut me donner conseil dans la salle-là ? Vous pouvez parler en toute liberté. Je ne suis pas comme certains de mes ministres qui menacent les journalistes. Ça ne fait rien…Vous poserez vos conseils plus tard afin que je les étudie correctement. Parce que si j’étudie un dossier, on raconte que je suis lent et ceci et cela. Alors si je n’étudiais pas, qu’est-ce qu’on dirait ? Ce pays-là vraiment, est-ce que c’est un pays ? Hein ?

Le jour où vous trouverez un bon président wallahi je voterai pour moi-même ! Un jour il y aura huit millions de présidents ici. Chat, c’est la faute de Gomez ! Quand je lui demande combien on est ? Il rigole et cherche un autre recensement. Mais il a raison un peu. Parce que comment reconnaître un libérien, un léonais, un sénégalais, un malien, tout chat là ? On vend des cartes d’identité partout. Je suis au courant. Même quand on coupe le courant. Moi j’ai mon groupe.

Bon ! Je vous aime tous les enfants. Vous serez chômeurs, mais ne vous découragez pas. Le chômage, c’est bon. Ça apprend où chercher. Et puis on se débrouille. Est-ce que débrouiller c’est euh…Le pays est très riche. Et la vie est un combat. D’ailleurs pour vivre ici, c’est une lutte permanente. Vous voyez ? Ne croyez pas que je ne pense pas. Je pense ! Donc je pense tout le temps. C’est un blanc qui l’a dit. On dit qu’il s’appelle Descartes. Moi aussi je sais jouer aux cartes, même au damier. Je sais lire et écrire en plus. Alors ce n’est pas bon de trop parler. J’ai voulu essayer une fois et j’ai dit « wo fatara ». Et chat n’a pas marché ! Mais en attendant, je reste. On se reverra une autre fois. Transmettez mes salutations aux journalistes du « Lynx » et à tous leurs collègues. Merci

Williams Sassine

Description & analyse

Auteur de l'analyseDegon, Elisabeth

Contributeur(s)Degon, Elisabeth (collecte et saisie)

Éditeur(s) de la ficheDegon, Elisabeth

Auteur(s) de la transcriptionDegon, Elisabeth

Informations générales

LangueFrançais

CoteLe Lynx, n° 61

Présentation

Date1993/05/03

GenreDocumentation - Presse

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Fiche : Elisabeh Degon, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes, CNRS-ENS ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l’Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)

Éditeur de la ficheClaire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)

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Notice créée par Elisabeth Degon Notice créée le 30/07/2019 Dernière modification le 01/09/2022

61. Réponse ouverte de Lan-chat-na à la lettre fermée

Auteur(s) : Sassine, Williams

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