73. Le poids d’une fleur

Auteur(s) : Sassine, Williams

Les folios

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Sassine, Williams, 73. Le poids d’une fleur, 1993/08/09

Claire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)

Consulté le 03/08/2025 sur la plate-forme EMAN : https://eman-archives.org/francophone/items/show/3417

Texte de l'article

Transcription

N° 73, 9 août 1993 : Le poids d’une fleur

Je n’avais rien à faire, comme Fory Coco. Lui il avait l’avantage de posséder une avion, une espèce d’oiseau toujours orientée vers le sud. Son pilote favori, spécialiste en Cross-Country, ne rêvait que de faire atterrir un jour le général dans son interminable plantation, au sud des cochons de notre ex futur président.

La mouche qui aime bourdonner dans ma tête commença à se réveiller. Je frappai sur mon front plusieurs fois pour permettre à l’insecte de creuser, mais en silence, mon incomparable cervelle anti-rouille, imperméabilise contre une démocratie à plumes de canards mouillés.

Margot la baleine, tirait un cochon. Hier nous n’avons pas fêté le retour de notre frère qui a fait Abidjan.

Je me souvenais à peine ; comme Lansana avec ses promesses de 1984.

Le cochon ressemblait à la plupart des mem-bres du gouvernement, gros, vilain, grognon, un peu plus poilu en haut que John Le Chauve des AE, gras comme Tolno, aussi croyant en son sort que Tidjane du Vatican, avec le neutre budgétaire de Yans. La glisse, la bouche d’un Gomez, le prophète du passé…

Le cochon a quelque chose de bon, c’est que tout est bon en lui. Même ses petits yeux jaunes délavés, me donnent envie de le décorer. Fory Coco lui aussi les adore. Un point commun entre lui et moi. Mais je ne comprends pas encore, comment au quartier Sampil, on peut acheter le cochon qu’on désire. Est-ce un coup publicitaire du PUP. Parce que officiellement, les chevaux sont à Kindia, les cochons à Gbantama, les déflatés à Conakry I. Mais comme un choral (sic : coral) coûte plus cher qu’un cochon et qu’un déflaté vaut moins cher que le reste, laissons les se défiler. Le vrai défilé c’est pour le 2 octobre, Fory Coco arrive à lire son discours de la veille.

J’imagine un peu la cérémonie. Gomez circu-lant et criant « nettoyez » le cendrier qui a tapé l’allocution.

Il ne faut pas plus de 5 lignes par page, sinon on est foutus…

Il est toujours facile de voir Gomez, quelque part, dans la position de « penseur de Rodin » pacédorisée (sic).

Pour le Libéria, il n’a qu’à dire que chat est en train de s’arranger pour les élections. Il faut attendre un peu. Il pleut et l’opposition n’a pas assez de parapluies, en plus les cartes d’électeurs seront mouillées. Après il y aura l’harmattan saboteur de la haute Guinée. Les étudiants vont raconter ensuite dans les poubelles que tout sent mauvais, que Tolno est un tonneau percé, qu’Aïcha conseille à son patron d’aller passer son brevet à Madina…Quant à Yans-la-gliss l’homme qui ne boit pas, ne fume pas, ne croque pas, ne marche pas, ne rigole pas, ne pleure pas, ne mange pas, ne dort pas, ne connaît pas où va seul le saint Père. L’incarnation cravatée avec moi il y a un peu plus de trente ans, autrement cratée (sic) aujourd’hui par sa monnaie qui ne connaît pas, qui ne sait rien, surtout quand on fait semblant de la brûler sous les yeux d’un copain au Lycée…

Il y avait d’autres choses probablement dans la petite tête du gros Gomez. J’ai rarement connu un ministre important avec une grosse tête. Regardez « plat tô » ou Fory Coco, chat flotte en haut, sous leur bonnet ou leur képi. Les dames ont leurs foulards très gros au sommet, quand leur président clopin-clopin (sic) fait semblant de voler avec « erre Guinée ».

Comme le dit le « Lynx » quand il ne peut pas voler plus haut que chat. Mais redescendons si chat donne le vertige.

C’est à cet instant précis qu’on me présenta Capi. Il avait 20 ans à peu près à « R Guinée », totalisant 5 heures de vol au total, un record pour une compagnie qui ne vole qu’elle même.

Le reste du temps « Capi » volait au-dessus de la clôture de son abri ; des atterrissages plutôt ratés si on essayait de compter les cicatrices au front ou ailleurs. Il racontait qu’il avait même copiloté un jour un général. Chat ne devait pas être notre Fory Coco, puisqu’apparemment il était encore vivant.

L’autre problème avec « Capi » c’était la fin de mois ; il trouvait qu’on ne méritait pas un salaire, donc il dépensait plus que le pape, il vouait en même temps une espèce d’amour serpentin envers tout le bâtiment du Ministère du Plan et des Finances, qu’il rêvait de déposer sur le mont « Kakoulima », pour éviter d’éventuelles agressions.

Donc pour revenir en arrière comme les discours et les promesses des chefs en fin d’année, on coupa le courant (dans le quartier parler d’Enelgui, équivaut à une injure. D’ailleurs chez les Thomas (sic : Toma), le « Gui » est vindicatif (sic) d’un totem. Alors à quand un …GUI à la tête d’Enelgui pour ne plus se faire d’illusions) ?

Bon, je ferme les parenthèses. C’est la période des vacances. Bravo pour ceux qui ont eu leurs diplômes. Quand aux autres, ils ont plus encore de mérite quand on est vraiment intelligents, on ne passe pas d’examens, on fait travailler les autres.

D’ailleurs un avion chat ne sert à rien, vint me confirmer « Capi » le pilote. C’est comme un gouvernement. C’est vrai qu’on a même pas un chef de gouvernement, dit quelqu’un. En tout cas le dernier type qui a fait le travail là, a été ligoté devant télé.

Pas de politique ici, hein ? fit Marco Polo.

La pluie recommençait. Marguerite la baleine fit circuler les saletés qui se déposaient. Je souhaitai qu’on ne parlerait pas des maires. Dieu merci, on les oublia. De toute façon, ils n’avaient pas besoin de nous pour être réélus, même pas de mon chien à la queue coupée qui adorait pisser près des poubelles. Aujourd’hui, l’animal est mort de « courte maladie » les membres brisés, probablement par un chat.

Bon, si on ne parle pas politique, on fait quoi hein ? Au temps de PDG…
Dis donc, je dis pas de politique. Ni RTG, ni PUP, ni PRP, ni…

Bon dans ce cas, je fous le camp, annonça Django. Mais il pleut. C’est bizarre.
Vous êtes témoins, n’est-ce pas ? reprit Marco. J’ai dit pas de politique.

- Pour la pluie aussi, c’est politique ?

- En tout cas, au temps de Sékou, il ne pleuvait pas comme chat aujourd’hui.

Je me levai. Faire un article dans ces conditions équivalait à organiser des élections le lendemain. Peut-être qu’en me cassant une jambe à la porte de ma maison, des idées me viendraient. Pour une fois que j’avais besoin de Yans la gliss, il ne viendrait pas comme si Marguerite la baleine, lisait dans ma tête vide, j’entendis au niveau des genoux, quand elle vint se poser dessus, un bruit sec de branches cassées.

Je faisais l’expérience de Fory Coco, quand le pouvoir s’est assis sur lui.

Williams Sassine

Billet

« Chat ne va pas ...Dieu merci… »

Il paraît que ça s’arrange. Au Libéria. En Somalie. En ex-Yougoslavie. En Ethiopie. En Sierra Leone. En Afrique du Sud.

Heureusement que quelqu’un a glissé du gombo sous les pieds du « franc » français. Sinon, mon pauvre « billet » devenu périodique sans période, n’aurait pas cette souplesse du chat peureux des souris.

Ne cherchez pas à comprendre, Oscar vous fera un dessin.

Description & analyse

Auteur de l'analyseDegon, Elisabeth

Contributeur(s)Degon, Elisabeth (collecte et saisie)

Éditeur(s) de la ficheDegon, Elisabeth

Auteur(s) de la transcriptionDegon, Elisabeth

Informations générales

LangueFrançais

CoteLe Lynx, n° 73

Présentation

Date1993/08/09

GenreDocumentation - Presse

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Fiche : Elisabeh Degon, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes, CNRS-ENS ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l’Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)

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Notice créée par Elisabeth Degon Notice créée le 30/07/2019 Dernière modification le 01/09/2022

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