163. Contemplations contemporaines 2è partie

Auteur(s) : Sassine, Williams

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Sassine, Williams, 163. Contemplations contemporaines 2è partie, 1995/05/01.
Claire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle).
Consulté le 20/04/2024 sur la plate-forme EMAN : https://eman-archives.org/francophone/items/show/3505

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Transcription

N° 163, 1er mai 1995 : « Contemplations contemporaines » 2è partie

Je revenais d’une école qui fêtait son saint patron : Saint Georges, martyr du 4è siècle, adoré toujours en Grèce et patron de l’Angleterre. Adossée à un cimetière et s’ouvrant sur la mer, elle donne la perspective de l’aventure humaine. D’ailleurs son doyen, Jean Faragué, le contestataire inoxydable, l’un des derniers survivants des différentes purges politiques du Pédégé, l’homme au regard spécialiste de l’évasion, semblait me dire : « c’est là-bas ..»

« Là-bas … » Était-ce la mer qui appelait ? Ou les enfants dans la cour qui retenaient par leur rire ? Dans un pays où les jeunes meurent avant 40 ans ou marchent courbés, c’était rassurant au Collège Sr Georges. Car un visage qui ne rit jamais est le témoin d’un cœur mauvais. Je regardais la mer, au cœur acariâtre et je pensais à mes clairs de lune devenus des cimetières, quand je me moulais dans mes amours.
Aujourd’hui, il est vrai que ce sont les capotes qui ont teint de clair de lune et les Amours à teinte d’occasion « peinturée ». Quant aux partis politiques, on joue à la veuve, toujours vierge, quêtant des idées à enterrer, déjà mortes d’ailleurs.

Les abeilles dans leurs danses, si rapides et apparemment si incohérentes, dessinent il paraît, des figures mathématiques précises. Et constituent, comme toute figure un langage. Il n’y a qu’à passer devant une mosquée, une cathédrale ou une école…De même, toutes les rencontres que fait un homme, fugaces ou marquantes, amenées par le hasard ou le besoin, expriment un discours bien construit, adressé à l’autre Ame pour la dresser, mais qui, au long de toute une vie, ne saisit que quelques mots sans suite. Ainsi vont notre « indépendance et notre « démocratie ». On se demande si « Mamadou et Bineta sont devenus grands ». Il me semble parfois saisir le sens de ce ballet humain autour de moi, deviner qu’on me parle à travers le mouvement des êtres qui s’approchent, s’immobilisent ou s’éloignent, brisant le mince fil qui lie au prochain. Mais nous ne pouvons pas renoncer à trouver un sens à notre existence. Il ne s’agit pas de savoir si l’on peut éviter de vivre dans ce monde, mais d’essayer de trouver un ordre humain dans ce monde.

Ne serions nous pas au seuil d’une période qu’on pourrait dénommer période extra-morale ? Tout, autour de nous, peut nous faire croire que ce qui nous vient à la conscience fait encore partie de la surface de sa « peau » qui, comme toute peau, cache bien plus de choses qu’elle n’en révèle : crise de la civilisation, de la culture, des valeurs éthiques dans leur ensemble. Mais où se situe l’origine de cette crise ? Ici, les interprétations peuvent diverger. L’Africain d’aujourd’hui souffre, dit-on, d’avoir perdu les valeurs de la tradition.

Et d’abord les valeurs religieuses. Il est fou d’avoir pensé que l’on pouvait tuer Dieu impunément, et que cette mort allait être notre accomplissement. Il y a 2000 ans que le dernier cri de martyr du Christ montait dans le silence du monde et ce cri, nous l’entendons encore. Les plus sourds d’entre nous peuvent regarder et voir tous les matins les mouroirs que sont devenus nos rues et nos hôpitaux. L’homme est-il mort ? Depuis des millénaires, dans sa vaine tentative de se dresser sur les deux pieds comme pour se rapprocher du ciel, il a déraciné bien des arbres plus grands que lui, libérant ainsi en même temps la clameur des peuples désespérés. Hors de Dieu, un humanisme véritable est-il possible ?

Bon, il était temps de passer à « l’Alliance Franco-Guinéenne » ; devenue un véritable centre culturel, le c… en moins. Quelqu’un dans le Allakabon qui m’amenait racontait : « Quand ma femme était à pieds, elle rentrait toujours avant moi à la maison. Mais depuis que je lui ai acheté une voiture, je ne la vois presque plus. Quand je lui pose des questions, elle me répond qu’il y avait des embouteillages. Hé kéla ! Femme bordelle, c’est embouteillé tout le temps…On prend la queue de tout. A Fakoudou ! Il paraît qu’on nous a botté au foot à Luanda. Je n’arrive pas à le croire. L’arbitre a dû tricher ou bien c’est parce qu’il faisait trop chaud et que le ballon était cubique. A moins que les Angolais aient aligné sur le terrain 100 joueurs. Sinon, qui peut battre notre « Fini National » ? A Fakoudou ! La prochaine fois on va gagner, si on joue dans « Erre Guinée » ou dans l’hélico de Fory Coco. On chen fout ! Quelle idée de classer les joueurs diaspos, alors qu’ils n’ont même pas le droit de voter. Qu’on les balance sans parachutes.

Bonne fête aux chômeurs qui travaillent!Tant pis pour les salariés en chaleur !

Communiqué Ceci et cela

Tous ceux qui n’ont rien à faire en ville, doivent rester chez eux.

Fory Coco et l’opposition n’aiment plus qu’on les imite

Les moutons égarés et volés sont convoqués

Par le minustre de l’insécurité, pour organiser

Leur « fête » de la Tabaski

Prière aux animaux de venir désarmés.

Les couteaux saisis sur les bandits sont déjà sur place

D’autre part les maladies sexuellement transmissibles

Sont priées de se faire identifier

Le plus tôt possible

Chez les putes les plus proches

La saison des pluies s’annonce et ces maladies

N’ont pas encore cotisé pour leur Barrage.

Quant aux poubelles,

Elles sont invitées à ne pas bouger

Les futurs ex-maires arrivent

Pour s’occuper de leur cas

C’est l’argent qui manque d’abord

Billet

« Un chat m’a conté »

- A Conakry on voit

- Des voitures premiers cris

- Des routes « derniers cris »

- Des épidémies qui téléphonent

- Des candidats à tout

- Des poubelles prêtes à tout

- Des partis : « Occasion peinturée »

- Des maires-mères loin de la mer

- Des coqs déréglés au réveil.

- Des bureaux vides

- Un prési absent

Quand on ne sait pas où aller

C’est la ville idéale

Par Williams Sassine

Description & analyse

Auteur de l'analyseDegon, Elisabeth

Contributeur(s)Degon, Elisabeth (collecte et saisie)

Éditeur(s) de la ficheDegon, Elisabeth

Auteur(s) de la transcriptionDegon, Elisabeth

Informations générales

LangueFrançais

CoteLe Lynx, n° 163

Présentation

Date1995/05/01

GenreDocumentation - Presse

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Éditeur de la ficheClaire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)

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Notice créée par Elisabeth Degon Notice créée le 30/07/2019 Dernière modification le 01/09/2022

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