172. Botter ou voter. Tant pis pour les idées !

Auteur(s) : Sassine, Williams

Les folios

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N° 172, 3 juillet 1995 : Botter ou voter. Tant pis pour les idées !

On va voter ! On va voter ! Moi, je vais vous voter ! Vous croyez que je vais laisser ma belle place sans tricher. Des gens comme ça, qui viennent nous dire qu’il faut voter. Je vais leur apprendre à voter moi. A Fakoudou ! Avec Sékou, on ne votait pas assez. Je vais réparer chat !

On va voter pour sortir de la maison, voter pour traverser les rues, voter pour boire, voter pour se raser…Moi je ne suis pas pressé. Je ne vote pas, je botte ! Ils appellent des gens bizarres qui n’ont rien à faire, pour venir nous observer. Même s’ils faisaient débarquer tous les chinois pour voter à leur place, je gagnerai. Allah Nana ! A Fakoudou !

On raconte que je ne sais pas parler et que je n’ai rien construit, sauf le petit pont minable de Taouyah. Mais l’ancien président qui savait causer, qu’est-ce qu’il a fait à part le Palais du peuple et le palais des Nations. Voter or not voter, c’est ça le problème ! Vous voyez je peux parler english. C’est chez les portugais que j’ai appris tout chat. Par exemple je ne tire jamais en face, mais par derrière. L’opposition oublie chat ! Débrouiller n’est pas voler. Erre Guinée en sait quelque chose.

Démocratie ! Démocratie ! Traduisez moi ce mot dans une langue du pays. Alors restez tranquilles ! Sinon, j’ai des bottes, je suis né pour gagner. Si j’avais joué dans notre « Fini National », on aurait remporté toutes les coupes du monde. A Fakoudou ! Comment notre équipe nationale peut gagner avec la diaspourrie dedans ? Ce sont des gens qui aiment trop l’argent. Et ils veulent voter. Je dis non ! Moi l’argent ne me dit rien, parce que je n’ai besoin de rien. J’ai des cochons, des chevaux, des voitures, un hélico, des minustres riches, une famille à l’aise. Après, l’opposition raconte partout, que tous les citoyens sont malheureux. Je sais qu’elle organise des prières pour que Dieu me fasse coup d’état. Mais c’est Allah lui-même qui a fait de moi le patron du pays. Je suis prêt à botter celui qui n’est pas d’accord. La fête est finie ! Même celle des enfants. On leur a distribué des bonbons pendant tout ce mois. A présent je vous autorise de les botter, pour que leurs bonbons aient un goût plus sucré l’an prochain. Quant aux journalistes pervertis qui ne communiquent à l’étranger que des mauvaises nouvelles du pays…des histoires, qu’ils sachent que nous nous portions bien avant l’arrivée de l’opposition dias-pourrie. Wallahi !

Je sortis de mon cauchemar, grâce à la piqûre d’un moustique. On prétend que les peuples heureux n’ont pas d’histoire. Mais les peuples qui n’ont pas de journalistes francs tireurs et de créateurs contestataires sont plus que malheureux : asphyxiés, trahis. Chez nous et un peu partout sur le continent, la tératologie ou étude des monstres est abandonnée, quoique pouvant éclairer un des aspects de la biologie.

L’âme humaine aime le jour. Il lui arrive aussi d’aimer la nuit, avec une égale ardeur, et cet amour peut conduire les hommes comme les sociétés à des actions criminelles et désastreuses qui défient apparemment la raison. Nous vivons une période où la réalité n’a pas de dignité. Auguste Comte écrivait : « Entre l’homme et le monde, il faut l’humanité ». De l’autre côté de l’océan, d’autres gros tuyaux de la morale courante, pensent que ce qui nous arrive, arrive à tout homme abandonné à la libre poussée de ses instincts.

Etrange explication. Comme si certains intel-lectuels voulaient réduire notre histoire contemporaine à une leçon d’histoire primaire sur les mauvais instincts. De même, très peu d’entre eux, virent dans le ciel hitlérien, la substitution de la croix gammée à la croix du Christ, la négation pure et simple des Évangiles. D’ailleurs la croix gammée dans sa forme, n’est-elle pas la croix du Christ aux extrémités cassées ? Je pense à cette image, en pensant à cette « démocratie » remise dans les mains des Lucifériens. Notre démocratie semble avoir été inventée par des vainqueurs qui ont besoin de cacher leur vide. Mais le vide aspire. Ces vainqueurs du moment ont une destinée d’oignons. Chaque jour perdant une pelure, ils disparaissent sans laisser un noyau à planter.

Une femme racontait : mon mari est parti en guerre depuis deux ans. J’ai peur ! Je crois que je suis en grossesse. Quand il va revenir, il croira que je l’ai trompé. Pourtant je ne vois que son jumeau. Nous les femmes, on souffre ».

Communiqué Ceci et cela

Le PIP a plaisir d’annoncer

- Qu’il a tout fait pour gagner

- Qu’il a gagné

- La prochaine fois, il conseille son opposition qu’il aime bien

- D’élever des mille pattes pour les faire voter

Nous reprenons ce communiqué à l’intention des sourds.

Billet

« Un chat m’a Conté »

Après Bernard Nanga

Youssouf Guèye

Moussa Diabaté

Mimouni

Cheick Anta Diop

Birago Diop

C’est le tour d’un autre ami

Sony Labou Tansi, prénommé Marcel.

Il est vrai que ce sont les meilleurs qui s’en vont les premiers.

Une consolation pour le salaud que je suis.

Paix à son âme

Par Williams Sassine

Description & analyse

Auteur de l'analyseDegon, Elisabeth

Contributeur(s)Degon, Elisabeth (collecte et saisie)

Éditeur(s) de la ficheDegon, Elisabeth

Auteur(s) de la transcriptionDegon, Elisabeth

Informations générales

LangueFrançais

CoteLe Lynx, n° 172

Présentation

Date1995/07/03

GenreDocumentation - Presse

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Avec l'aimable autorisation des ayants-droits
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Fiche : Elisabeh Degon, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes, CNRS-ENS ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l’Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)

Éditeur de la ficheClaire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)

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Notice créée par Elisabeth Degon Notice créée le 30/07/2019 Dernière modification le 01/09/2022

172. Botter ou voter. Tant pis pour les idées !

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