198. Bonne année. Même, quand, si…

Auteur(s) : Sassine, Williams

Les folios

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Sassine, Williams, 198. Bonne année. Même, quand, si…, 1996/01/01

Claire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)

Consulté le 29/08/2025 sur la plate-forme EMAN : https://eman-archives.org/francophone/items/show/3540

Texte de l'article

Transcription

N° 198, 1^erjanvier 1996 : Bonne année. Même, quand, si…

Je ne sais pas à qui souhaiter une bonne année. Au « Lynx », j’ai essayé l’an passé. Mais ça nous a porté malheur, puisque notre directeur a été condamné pour un malentendu orthographique. Au lieu d’écrire Mess ou Messe, il a parlé de Miss. Il a payé. Ce n’est pas grave ! Si le charmeur de serpents se fait mordre, à qui est-ce la faute ?

Nous n’avons pas été pendus. Ce n’est déjà pas mal ! Puisque nous sommes les seuls à avoir un « pont des pendus ». Au Nigeria, c’est autre chose.

Je ne sais pas à qui souhaiter la bonne année. Car mes souhaits portent malheur et malheureusement, j’aime tout le monde. Mais nous entrons dans l’année 96, une année où les fesses se feront dos (Oscar, débrouille toi, Hi ! Hi !)

Bon on va essayer ! Tous ceux qui vont rece-voir mes meilleurs vœux vont tomber. Je vais donner du boulot au marabout du quartier. Consultez ceux du minustre et de la dame au boa dormant et les autres.

On commence. Une année finit, une année comanche, comme disait Sékou, l’immortel quelle que soit notre loi fondamenteuse.

Bon !

Loulou l’Ancien va partir. C’est le vieux qui s’est fait voler sa bague au palais. Il est secrétaire sans secret à taire.

La Mine, le considérant des considérés, le coquelet de la Basse Cour Suprême.
Vovonne-la-Mamelle. Elle n’a plus de bonbon pour baratiner les gosses.

Mamie Jojo, minustre des « Journées fériées et payées ». Gentille mais inefficace.

René-La-Gomme, le minustre de l’insécu. Lui il cherche une ambassade. Je lui proposerai le Yemen, s’il sait où ça se trouve.

Saliflouflou, qui se mêle de ce qui ne le regarde pas. Pourtant il est à la justice, censée être aveugle. La caisse de Tunis 94, où elle est ?

Musique ! Comme le dirait l’océan de connaissances, fondu dans sa fondation. Fac. Mes encouragements, mon cher ! Je suis un des premiers abonnés de ton journal.

Le président venait de quitter la maison, après avoir pris des conseils comme d’habitude. Révélations ! Je dirige le gouvernement. Mégalomanie ou mythomanie ? Vous pouvez en discuter chers lecteurs, pendant que je m’avance vers le Nobel. Mais je voulais d’abord être un Noble, c’est à dire pouvoir expliquer que si je pense c’est pour ne pas suivre. Les blancs nous ont amené en bateau avec leur cartésianisme pendant trop longtemps. Le parallélisme asymétrique de Senghor prouve ce que j’avance.

Nous l’avons dit bien avant Monseigneur Sarah. L’homme n’est pas à sauver, mais à changer. Son sermon du 24 décembre nous prouve par son éloquence, et son fond, qu’il se soucie de la santé morale de notre société. Mais j’ai toujours remarqué que Monseigneur n’aime pas parler de Justice. Pourtant la Justice est la vérité en action. Malheur à la génération dont les juges doivent être jugés. Nos enfants ne veulent plus aller à l’école ou aux bureaux. Ils sont fatigués d’être bastonnés, comme leurs maitres.

Il est facile de s’asseoir sur ses fesses comme un marabout, pour prédire l’avenir.Un homme assis ne se fait pas mal en tombant. On peut dire autant de notre opposition. Si certains de nos lecteurs s’étonnent qu’on ne parle plus souvent de cette opposition, je répondrais que c’est parce qu’elle n’existe pas. A part l’honorable Doré et l’honorable Aliou Vé. Et peut-être aussi l’autre Banque Route, celui qui ne tendait pas la main. Quant aux etc…qu’aucun mur n’arrête pour se sauver, ni aucune campagne aérienne dans un pays, infiniment loin d’être classé parmi les premiers.

J’en parle parce que la démocratie chez nous, est une forme d’eucharistie, de cannibalisme, en clair. Jésus, autant que Mahomet, n’étaient pas des hommes comme nous. Depuis des milliers d’années, l’humanité à genoux ou debout, dans des gestes dérisoires, ne peut porter ni une croix, ni sa foi. Chantons avec cet enfant abandonné que j’ai rencontré.

Plus belle que la lune

Plus riche que la fortune

Je suis là et las

En Vérité sous vos pas

Mais qu’importe !

Puisque personne ne me porte

Mais je m’en fous

A Fakoudou !

Etre au Lynx

Ou être montré de l’index

That is the question

Quand on aime sa nation

Qui s’agrandit

Pendant que l’amour finit

Passer avec une inconnue

Une nuit blanche

Le comble du calculateur

Quand de capote en tilleul

On déclenche

Une peur qui a peur

Comme quand on veut être seul.

Moi j’étais assis, comme un coq déréglé ou une poule, ou un jambon en conseil de minustres. Nous avons le pays le plus maigre qui contient des personnalités les plus grosses du monde. Même nos dames. Nous vivons dans une société qui sans courant, choisit sans être élue. Nous retournons là à un monde qui a fabriqué le feu avant la religion, qui a inventé la poudre avant les étoiles. Les Chinois le savent qui dans leurs murailles, ne regardaient pas leur soleil tomber. Ce n’est que l’Occident qui a inventé le Sud en des conférences qui ne sont que des circonférences. J’en parle parce que ce sont les africains qui ont prouvé les premiers, que le mot, que le mal, que le monde est rond autant que la Mort. Les grands prophètes ont dû être Noirs pour pouvoir ressembler à leurs vérités : la nuit de leur tombe qui donne à la vie, sa lumière. Je parle de la lumière qui a fait pleurer le poids de la croix de Jésus : « Elie, Elie, Sabaleta-Galilée a poussé cet autre cri de douleur de sa foi ». « Pourtant, elle tourne. Oui, pourtant elle tourne. Je ne veux pas parler de notre démocratie. Il est facile d’accuser le voisin. C’est l’uranium du Niger qui fait exploser en Polynésie la bombe atomique de la France. Le Rwanda, le Burundi, le Zaïre, le Liberia, l’Ethiopie…Une Sociologie qui est devenue une leçon de choses pour enfants d’une classe surpeuplée, cherchant une humanité aussi reculante que l’horizon. De façon, ne croyant plus aux contes et aux comptes de leurs parents, nous cherchons des pieuvres pour embrasser les chers petits. Il paraît que l’essentiel est de faire semblant d’aimer. Le fonctionneur fait semblant. L’aviateur fait semblant. Le menuisier fait semblant. Le journaliste fait semblant. Le comédien, la pute, le politichien…Sauf le prési de notre Assemblée saladière. Quand il veut la sieste, il crie « silence ». L’autre prési attend les mardis pour se reposer. Il recrute ses minustres. D’après le volume de leurs ronflements. J’en connais au moins deux, qui peuvent être à 2 vitesses dans leur plaisir de repousser l’oxygène du pays. Les officiers, c’est autre chose, puisque j’en fais partie. A ma grande honte. A Fakoudou ! Je dois reconnaître que dans la catégorie, il existe des hommes et des femmes, devant qui on peut s’incliner comme on le fait devant la mer, la terre et le ciel. Ces hommes et ces femmes ne surveillent pas seulement le pays. Ils sont en état d’éveil permanent. Toutes nos considérations messieurs et mesdames. Adam et Eve qui sont nos premiers parents ont été gardiens. Quoi qu’il vous arrive, passez au Lynx, dans nos bureaux. Quand nous rions, nous nous tournons vers l’Est, parce que à l’Est, il n’existe aucun palais. Ceux qui ont essayé d’en construire sont devenus des fantômes. Je ne me tourne ni vers une opposition qui cherche son opposition, ni vers un pouvoir dont le représentant principal, m’aide à diriger mon pays trois fois par semaine. Je suis consulté. A partir de 2 heures du matin. Il voudrait bien nous rendre nos deux millions et poussières sans perdre la face ; pour le moment, Eldrine lit son conte dans le numéro précédent.

Quelqu’un racontait : « l’an passé, j’ai dit que je ne veux pas de vœux de bonne année. Ça porte malheur. Mais mon ex-femme est trop bête. Elle vient de m’envoyer une carte. Comme quoi, elle veut reprendre sa place parmi ses 6 coépouses et leurs 14 enfants et de la recevoir avec les 2 poupons qu’elle a fabriqués au village, avec un petit vendeur de cigarettes. Tout ça, c’est pour me souhaiter bonne année. Si vraiment cette année pouvait s’arrêter à minuit pile. Sans bouger. Pour ne pas qu’on me souhaite bonne année…En plus, je ne comprends pas pourquoi les animatrice de F « aime » ne tombent pas en grossesse. Une radio impuissante ?

Communiqué Ceci et Cela

Bonne santé aux

Morts

Mourants

Affamés

Fatigués

Soignants

Ce communiqué

Ne s’adresse

Qu’à ceux qui ne peuvent pas fuir le pays

Billet

« Un chat m’a Conté »

Il existe la peur

- de marcher
- de boire
- d’avoir du courant
- de voter

Mais ici nous avons l’angoisse de devenir démocrates

Hé Kélà !

Par Williams Sassine

Description & analyse

Auteur de l'analyseDegon, Elisabeth

Contributeur(s)Degon, Elisabeth (collecte et saisie)

Éditeur(s) de la ficheDegon, Elisabeth

Auteur(s) de la transcriptionDegon, Elisabeth

Informations générales

LangueFrançais

CoteLe Lynx, n° 198

Présentation

Date1996/01/01

GenreDocumentation - Presse

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Fiche : Elisabeh Degon, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes, CNRS-ENS ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l’Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)

Éditeur de la ficheClaire Riffard, équipe francophone, Institut des textes et manuscrits modernes (CNRS-ENS) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)

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Notice créée par Elisabeth Degon Notice créée le 30/07/2019 Dernière modification le 01/09/2022

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