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Richmond, Lundi 23 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
J'attends l'heure de la poste avec une vive impatience. Je commence en attendant ma relation d’hier. J’ai vu Flahaut, Cetto, Kielmansegge. Tous les trois fort occupés et révoltés de la séance de Samedi à la Chambre basse. Lord John Russell faisant amende honorable à la Chambre pour avoir osé qualifier (dans une précédente séance) la révolution de Hongrie, d’insurrection. Palmerston appelant Lord Aberdeen an antiquated imbecility. Voilà les aménités qui se sont dites. Lord Palmerston a eu un complet triomphe comme de coutume, & il lui sera loisible de faire jusqu’au mois de février comme il l’entendra : il était en pleine gloire à son Dieu.
Le soir quelques personnes seulement car Lady Palmerston ne sachant pas si son mari serait encore ministre ce jour- là n’avait prié que quelques intimes. C’est ce qu’elle a dit elle-même à Cetto. Votre ambassadeur a fait la connaissance avec quelques diplomates. On ne trouve pas sa femme jolie. De lui, on dit qu'il est assez bien rappelant un peu M. G. de Beaumont. La princesse Metternich et Mad. de Flahaut ont eu hier une vive dispute à propos de la Hongrie. Mad. de Metternich est sortie de son salon et à dit à Flahaut qu’elle n’y rentrerait pas tant que Mad de [?]. y serait. Des témoins de cela ont été fort amusés & sont venus me raconter la scène. Cela a dû être drôle.
J’ai fait ma promenade en calèche avec Kielmansegge. J’ai été dîner chez Mad. Delmas. Madame de Caraman, Richard Metternich & & de la musique après le dîner. Mad. de Caraman joue du piano avec goût. Richard avec force. Le vieux aveugle grogne et voudrait renverser toute les constitutions du monde. Mad. Delmas occupée de mes yeux, de mon poulet. Enfin pleine de bonne grâce. Bonne femme. Voilà hier, et un ciel couvert l’air doux.
4 heures Lady Alice m’a interrompue et voici votre lettre de Lisieux. Vendredi & Samedi. Merci merci de tous les détails. Je n'ai fait encore que parcourir, je vais lire & relire. Paul Tolstoy m'écrit aussi deux mots pour me parler de vous. Comme il vous aime ! Excellent homme, je vais bien le remercier. Votre lettre, vos lettres vont faire mon seul, mon unique plaisir. Je vous en conjure point d’accidents dans notre correspondance. Dieu sait ce que je ne croirais pas si j’en manquais un seul jour. Adieu. Adieu dearest. Adieu. Il pleut, il fait laid mais j’ai votre lettre. Adieu encore, encore.
Richmond, Lundi 18 juin 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Lundi 5 heures
Hier les John Russell tous seuls copiant des vers de lord Byron. Il croit que l’assemblée va statuer quelque chose sur la situation du Président. Il ne sait quoi. Drouyn de Lhuys sera nommé ambassadeur ici. Dufaure a dit à Normanby. " Les soucis de tribune, c’est des bêtises ! Le pouvoir c’est tout, je l'ai, et je le garderai. " Mon Empereur mécontent de roi de Prusse. Voilà tout ce que j’ai relevé de la conversation hier. J’ai rencontré Duchâtel dans la rue. Delessert lui mande qu'on s’est fort battu à Lyon, on a tiré des forts. Cela a bien fini, & tout cela est bon. Je rentre, le temps est charmant, & la promenade avec vous serait plus charmante encore. Des visites. Adieu. Adieu.
Richmond, Lundi 16 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
J'ai beaucoup dormi mais je me sens encore plus fatiguée qu’hier et sans le moindre appétit. Deux cuillérées de bouillon viennent de me redonner des crampes. C’est bien ennuyeux mais qu’est-ce que ma santé à côté du malheur inévitable de votre départ ? Je ne me comprends pas, sans vous, sans la possibilité de vous revoir. le lendemain. Je reste hébétée quand je pense à cela, et j'y pense sans cesse !
Lady Alice Peel est venue un moment ce matin. Elle ne sait rien. La situation des Français à Rome me parait terrible. Comment cela finira-t-il ? Adieu que puis-je vous dire ? Je ne sais rien, et je ne trouve dans mon propre fond que misère, tristesse, désolation. Adieu. Adieu.
Richmond, Lundi 14 août 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
Midi
J’ai vu hier Lord Palmerston à Holland House. Il ne savait pas si l’armistice était ou non une conséquence de la médiation commune. Les courriers n’étant partis de Paris que Mardi dernier. Il me parait que ce n’est pas eux qui ont pu décider. On bavardait beaucoup là hier. La Lombardie à la Toscane. Voilà l’idée générale, dans tout cela voyons le dernier mot de l'Autriche. L’article du Moniteur est fort important. Évidemment chez vous on veut la paix, et on compte encore sur notre bon vouloir pour la république. L'Allemagne fait le plus gros, des embarras. Kielmannsegge me disait encore hier que les têtes y sont tout-à-fait renversées. Vous voyez que la France aussi se mêle d’arranger l'affaire des Duchés. L’entente entre Paris et Londres embrasse sans doute toutes les questions en litige. Le Manifeste du Prince de Linange serait bien plus critiqué s’il ne serait pas du frère de la Reine. Mais avec cela même, on en parle avec grande désapprobation. Je n’ai rien lu de plus fou & de plus bête. On dit que Strockmer la croit, c’est impossible. Il a plus d'esprit que cela.
Voilà de la pluie à verse. Quel climat, quelle tristesse. Comment iront les bains de mer avec cette pluie ? Et puis vous viendrez me dire qu'on n’a pas pu prendre les bains, qu'il faut donc prolonger. Je n’accepterai pas cela. Voilà votre lettre. Seul plaisir, seule ressource. Mais quand viendra le temps où nous ne songerons plus aux ressources ?
J'ai rencontré hier Dumon aussi à Holland house. Il songe beaucoup à s’établir à Brighton le mois prochain pour la mauvaise saison. Aggy va un peu mieux. Elle m’a écrit elle même. Je ne donne pas encore de rendez-vous à Pierre d’Aremberg car je n'ai rien décidé sur Tunbridge. J'attends toujours pour un appartement. Adieu, adieu. Comme c’est long.
Voici mes réponses de Tunbridge Wells. Pas d'appartement du tout. Tout est pris. Je reste donc ici. Cela va faire plaisir à Montebello, il est bien accoutumé à mon bavardage.
Richmond, Lundi 10 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Imaginez que je n’ai pas trouvé une seule minute hier pour vous écrire. Il faut commencer par dire que mes yeux me tracassent depuis quelques jours, j’ai écrit une longue lettre à l’Impératrice. J'avais une longue imagination et avec un agent, pour une maison pour Beauvale, un déjeuner chez la duchesse de Glocester. En rentrant de là, Morny & Harry Vane ; un bout de promenade, & le dîner, & la lampe, alors tout est fini comme occupation. Ces deux Messieurs sont partis ce matin. Morny reviendra d'Ecosse dans dix jours. Il me paraissait inquiet de l’opinion qui se produirait à propos de la lettre du Prince à M. Ney. Elle est certainement inconstitutionnelle, & très impérative. Si elle atteint son but il aura en raison. Les embarras de l’Autriche vont être bien grands. Quoiqu'on dise de la bonne intelligence entre les Empereurs, & leurs cabinets respectifs, cette affaire de Hongrie laissera un long ressentiment. Nous sommes vraiment trop puissants et l'effet moral de notre conduite dans les provinces autrichiennes tourne bien en défaveur de gouvernement. Ce n’est pas notre faute. Nous retirons notre dernier soldat ; Nous sommes irréprochables, c’est sans doute notre tort. L’Allemagne s’arrangera Je crois. Mais l’intérieur de l'Empire autrichien c'est une autre affaire. Lord John Russell est revenu. Je ne l’ai pas vu encore. Lord Beauvale me parait en train de se brouiller avec sa sœur, elle est partie. Le mari & le frère sont à Londres.
Savez-vous que Madame de Caraman est pour moi une vraie ressource. Elle a plus de fond qu’il n’y parait. La vieille princesse part un peu piquée. Elle croit que je ne lui trouve pas assez d'esprit. J'attends demain ici Lady Allice au Star. Elle n’a plus sa maison. Voici votre lettre, très intéressante. Une longue lettre d'Aberdeen Il avait passé trois jours chez la Reine. La reine ravie de nos soins les meilleurs sentiments longue conversation avec John Russell, dont il est assez content. J'y reviendrai, pour aujourd'hui je ne puis plus continuer. Mes pauvres yeux ! Adieu Adieu.
Richmond, Lundi 7 août 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
11 heures
J'ai été hier à Holland house. J'y ai rencontré assez de monde. Voici le butin. La France et l'Angleterre travaillent en commun à une médiation entre l’Autriche et Charles Albert. La France fera appuyer cela par une démonstration militaire, mais la guerre non. Ce qui préoccupe le plus la France & tout autant l'Angleterre, c'est l’Allemagne. Ni l'une et l’autre ne veulent de l'unité allemande. Surtout par lord Palmerston. Partout il prêche la réaction, & la fomente avec la même ardeur qu'il mettait à prêcher la révolution. Le mouvement en France est très vif, mais le Roi & le gouvernement comprennent. Quels insensés ! On ne sait pas comment se sera passée la journée d’hier. L’hommage. Peut être y aura-t-on renoncé. Le sentiment public à Hanovre mauvais. Le roi avait été soutenu d’abord chez lui, mais depuis comme aucun souverain ne l’a invité, on a perdu courage et on l’abandonne. On blâme beaucoup la fuite du Roi de Wurtemberg. Lui aussi est allé se divertir & se reposer avec une actrice. la grande Duchesse Olga dans le mouvement ! Est-il possible ? Kielmansegg affirme. Bunsen n’aura pas les Affaires étrangères à Francfort Mais il sera probablement nommé Ambassadeur du [?] ici. Et ici on est très décidé à ne pas reconnaitre la nouvelle Allemagne. En général à ajourner le plus possible toutes les reconnaissances. Etrange situation négocier avec des gens qu'on ne reconnait pas. Conclure des conversations peut être, avec la France & n’avoir aucune relation officielle. On dit qu'on pousse à la république à Vienne pour se ménager les droits d'aller y rétablir la monarchie à la tête de l'armée, alors seulement l'Empereur y rentrera. Far fetehd plan. Les bruits de Paris sont que Cavaignac ne tiendra pas longtemps. Après lui [Lamartine] & Thiers. Après ceux là Changarnier ramenant la Monarchie. L’échec de Goudchaux faisait du bruit, mais on ne dit pas cependant qu'il se retire. Toutes fois c’est le Ministre du dictateur battu. Parmi les choses que m’a dit Ellice j’ai oublié je crois de citer que c’est décidément Marast qui sera envoyé à Londres, si le National règne encore quand on nommera un ambassadeur.
2 heures
Je suis contente, mais seulement à demi contente. L'Ecosse à bas, bon. Mais pourquoi les bannir de ceux en Norfolk, et pourquoi pas près d'ici sur la côte méridionale. Je ne comprends pas. Je vous adresse toujours ici chez M. Boileau. Il faudra me dire où [?] & quand je dois changer d’adresse. Je vous plains de n’avoir pas vos journaux. Vous voyez que toute cette invention de voyage était mauvaise j'espère que l’accident de Pauline n’aura point de suite. Comment n’avez vous pas su dire non quand elle vous a demandé de la laisser monter à cheval ? Sachez bien qu’il n’y a pas un cheval bien dressé en Angleterre, de même qu'il n’y a pas un garçon ni une jeune fille qui ne soit très bon Cavalier. Et bien, excepté Guillaume je crois tout le reste du ménage très peu exercé. Melle Chabaud, je ne sais pas, peut-être, mettez-la à cheval. Je vous conjure donc de n’y pas monter. Sachez donc une fois m’accorder ce que je vous demande. Je m'en vais me mettre à penser à votre Cromer dont je n'ai jamais entendu parler. Je compte que vous vous y amusiez bien, que vous aurez soif de causerie. Enfin, c’est certainement mieux que l’Ecosse. Mais ce n’est pas si bien que vous auriez pu faire. J'ouvre mes journaux. Le National de Samedi ne m’est pas arrivé. je découpe le leading article du journal de hier dimanche. J'ai souligné, ce qui me parait Capital. On laisse à l’Autriche. la Vénétie. Adieu. Adieu. J’ai le cœur plus léger depuis qu’il n’y a plus d’Ecosse. Je voudrais l’avoir content . Cela viendra, quand vous viendrez. Adieu.
Richmond, Lundi 2 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Voici votre lettre, je vous renvoie celle de Darn. Curieuse chose que Thiers. Au fond j'aimerais assez que vous vous vissiez ici, à part mon intérêt de vous garder quelques jours de plus. Cela ne serait-il pas possible ? J’ai vu hier lord John. Les nouvelles de Paris ne sont pas bonnes. Dufaure est un empêchement. Normanby a mauvaise opinion de la boutique. Il avait causé avec tous ; président, ministres, journaux. Le socialisme règne d’une manière effrayante dans les provinces. Deux millions de Socialistes, prouvés par les votes. Sur Rome O. Barrot a dit à Normanby, qu’Oudinot avait outrepassé ou dénaturé ses instructions. Que Lesseps avait méconnu les siennes que de là provenaient tous les embarras, les contradictions. John Russell observe, que cela prouve seulement que les instructions n'étaient pas claires. Il est en grand blâme de tout cela, et il dit que cette affaire contribue grandement au mauvais esprit. qui règne en France. Lord John s'attend à un superbe discours de Peel aujourd’hui ou demain en faveur du gouvernement il m’a beaucoup parlé de Peel avec étonnement de sa conduite, comme nous en parlerions nous mêmes.
Midi, Je vous écris de bonne heure pour vous renvoyer Daru. Si j’attrape quel que chose je vous écrirai encore. En tout cas nous nous verrons demain. Adieu. Adieu. Adieu.
Richmond, le 31 décembre 1848, Louis-Philippe à François Guizot
Richmond, le 9 novembre 1848, Louis-Philippe à François Guizot
Mots-clés : Exil, France (1848-1852, 2e République), Réseau social et politique
Richmond, le 4 décembre 1848, Louis-Philippe à François Guizot
Richmond, Jeudi 28 septembre 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
4 heures
Ne venez pas demain. Je suis obligé d’aller en ville. J’irai vous soir. J’ai reçu une longue lettre de Lady Palmerston. Elle ne m’a pas l'air content des affaires. Elle dit que rien ne se terminera, & que les embarras s'accroissent. Je viens de déjeuner chez la duchesse de Cambridge. La princesse de Jarnac y vient sans cesse. Elle me semble une petite personne un peu légère, fort gaie. Elle veut acheter une terre, s’établir en Angleterre tout-à-fait. Elle ne croit plus du tout à son retour à Parme. Je trouve tout ce qui se passe à Paris triste, car cela promet d’être bien long. Je suis très découragée. Et voilà le choléra à Hull, trois personnes attaquées, toutes trois mortes. Il ne faut pas rester à Londres, pensez-y. Nous en causerons.
Samedi matin 10 heures.
J'avais laissé ma lettre pour la fermer au dernier moment. Je me suis trompée de 5 minutes, et la voilà encore je réponds à la vôtre reçue dans ce moment, je vous attends donc à dîner, c'est charmant. Et, cela vaut mieux, car me voilà prise pour le luncheon chez La Duchesse de H[ ?]. Il y a certainement quel qu'évènement à Holland house. Lequel ? A tantôt. Ma voiture sera au chemin de fer à 5 3/4. J’envoie Jean pour vous porter ceci. Adieu.
Le Times disait hier soir ces trois choses. Le vote pour la chambre unique sera rapporté. Thiers sera président. Cavaignac est entré dans l'Assemblée tenant Louis Bonaparte sous le bras.
Richmond, Jeudi 24 août 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
Je n’ai pas vu une âme hier, Je ne vous conseille donc pas de lire ma lettre si tant est que je parvienne à vous en faire une. J’ai quelque regret à dire que je trouve les explications du gouvernement Cavaignac sur l’Italie bonnes & dans de bons termes. Où prend-il tout cela ? Je lui trouve de la tenue, de la présence d’esprit, & même de l'esprit. J'en suis fâchée, mais il me parait qu’il se consolide comme votre pays est drôle ! Sous votre régime, si on avait abandonné l’Italie. Si on avait suspendu les journaux ! Ah mon Dieu, c'est vous qu’on aurait suspendu, et peut-être pendu.
Deux heures.
Voici votre lettre. Elle est très bien et je l'enverrai, malgré le pluriel. L'Angleterre ne mérite pas les mêmes éloges que nous. Car certainement elle ne peut pas faire la guerre. Je suis très fâchée de cette publication de la lettre de Lord Aberdeen. Voyez comme le Thiers le loue à vos dépens. Je voudrais bien voir les indiscrétions continuer, et trouver ses autres lettres publiées. Je suis un peu furieuse. Qui est le général Le Flô qu'on dit qui est envoyé à Pétersbourg ? Ne savez-vous quelque chose ? c'est fort adroit d'envoyer un militaire, un africain, peut-être une connaissance du Grand Duc Constantin. Mais enfin voilà donc la reconnaissance promise, puisque on y envoie quelqu’un ? Tout cela me dérange. A tout prendre les journaux d’hier et d’aujourd’hui me mettent de mauvaise humeur. La Duchesse de Montebello est partie pour l’Irlande. Je garde le mari, the better half. Adieu. Adieu. Ce sera un jour charmant que celui où je ne vous écrirai plus. C'est bien Samedi prochain que je vous verrai à Richmond. Adieu. Adieu.
Ne vous avisez pas de faire des courses en bateau même tout près du rivage. Adieu. Aujourd’hui 24 juste 6 mois depuis la chute de la Monarchie, & un jeudi aussi.
Richmond, Jeudi 23 août 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Quelle grande nouvelle ! Et comme je suis contente & fière. Convenez que nous avons bon air. Tout Richmond était en l'air hier, et radieux. La duchesse de Cambridge est accourue chez moi des plus joyeuses. Lady John Russell l’était fort peu. Elle a même très sincèrement avoué son regret. Et puis elle m’a dit " au moins nous ne nous sommes pas mêlés de ceci. " C’est tout juste pourquoi cela si bien été, et fini si vite. Elle n’a pas répliqué, je ne finirais pas si je vous disais tout ce que je vois au bout de cela. Et pour comment je suis persuadée que cela fait plaisir à l’Elysée, et aux bien pensants dans votre gouvernement. Vous verrez les fonds se relever partout. Ce qui remet sur jambes, un grand gouvernement donne de bonnes jambes à tous les autres. Dans tous les coins de l’Europe on se ressentira des coups que nous avons porter à la révolution. Melbourne est fou de joie. Quel dommage que les Palmerston ne soient pas ici, qui John soit en Ecosse !
Ma journée s’est dépensée hier comme toutes les autres en promenades visites, reçues, rendues, & jaserie, mais quelle charmante jaserie. Le cœur si content, c’est-à- dire, l’esprit content, car pour le cœur, il faut autre chose. Voici votre lettre. Ma question sur la sécurité à Paris ne porte que sur la rue. Peu m’importe le reste. Vous dites que la rue sera tranquille cela me suffit. J'aurais mieux aimé Boileau aîné que cadet. Quelle idée de se promener en Amérique ? Adieu. Adieu. Adieu. Oui il y a bien longtemps que nous nous disons adieu de si loin. Quand, quand, viendra le bonjour. Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 20 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
On mande de Paris à Lord Palmerston qu'en effet Thiers dit qu'il était sur le point d’accepter le Ministère mais la publication de la lettre à Ney lui a servi de prétexte pour reculer. Il donnera son appui à Louis Napoléon où à tout autre qui lui offre l'espoir de pouvoir dire jusqu'à son dernier jour qu’il n’a jamais servi une république. On va proposer de doubler le salaire du président. Si les légitimistes ne votent pas, on sera battu. Je vous redis ce qu'on sait ou ce que l’on croit le savoir ici. Je vous ai dit que Palmerston croit tout. à fait à l'Empire.
Vendredi 21 sept. J’ai vu hier matin van de Weyer, & Nicolay le soir. Le premier fort spirituel et charmé de l’article du Times avant hier qui donne sur les doigts à Lord. Palmerston à propos de la grande [?] de l’Empereur Nicolas. Du reste peu orienté, puisqu'il n’y a pas un ministre et pas une âme à Londres faisant un grand éloge du président, et pas indisposé pour l’Empire. Nicolay racontant un courrier de Varsovie arrivé hier matin, mais rien de plus que ce que je vous ai dit sur les derniers moments du grand duc. Le désespoir de l'Empereur. Nous faisons rentrer jusqu'au dernier soldat. L’Empereur d'Autriche voulait venir à Varsovie, la catastrophe du grand duc Michel l’a empêché. Peut être n'a-t- on pas été fâché à Vienne de l'empêchement et nous cela nous était fort égal. Le ton à Varsovie est de traiter tout cela dédaigneuse ment. Nous sommes venus nous avons montré notre force, & bonjour. Je médite ce matin une course à Claremont, le temps est fort laid, mais il faut avoir fait cela. C'est bien ennuyeux. Rabâchage pour rabâchage, celui du Roi est cependant plus gai et surtout moins long que celui de Metternich. Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 19 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Votre petit mot de chez Duchâtel m’a fait du bien. Je l'ai reçu chez lord Beauvale où je dînais. Je me suis mieux tenue que je ne l’avais espéré, et les convives m'ont épargné les phrases banales. Brougham a été très aimable. Ellice un peu endormi. Beauvale mange & ne dit pas un mot, il est charmé qu'on l’amuse et qu’on le laisse tranquille. Grand égoïste. Lord Aberdeen est resté longtemps chez moi avant dîner. Il est très décidé à venir à Paris en 9bre et s'en réjouit tout-à-fait, il vous aime tendrement. Il ne s’attend pas à la majorité demain, mais il voudrait une minorité très respectable.
Ellenborough ne vient pas. Il est malade à la campagne, il a écrit à Lord Brougham ( qui me l’a montré) une lettre très sage très sensée sur la discussion de demain. Lord Aberdeen de son côté a fait part à Lord Brougham de votre recommandation de ne rien dire qui peut gêner les mouvements de la diplomatie française en Italie, & Brougham m’a paru très résolu à observer cette recommandation. Nous verrons car c'est une créature si mobile. Il a vivement regretté de n’avoir pas su le jour de votre départ, il aurait beaucoup désiré causer avec vous avant le débat. Lady Palmerston lui a écrit deux autres lettres, bien aigres & bien inquiètes, il raconte cela fort drôlement.
Je ne suis pas contente de moi. Le malaise continue. Il faut que ce soit dans l'air, car Dieu sait que je me ménage. Le temps est froid. Le vent a soufflé cette nuit. Vous concevez que je n’ai pas dormi, je vous voyais malade en mer.
Midi.
Vous voilà donc en France ! Que c'est loin de moi. Je suis charmée de connaître le Val Richer. Je saurai où vous chercher. Vous aurez un grand plaisir à vous retrouver là, à retrouver vos arbres, votre pelouse, Vos sentiers. Tout cela reposera votre âme. Vous avez là tout le contentement intérieur, de la famille, de la propriété. Je vous manquerai c'est vrai, et je crois que je vous manquerai beaucoup, mais vous avez mille plaisirs que je n’ai pas. Et certes dans cette séparation je suis plus à plaindre que vous. Vous le sentez. Je voudrais me mieux porter et j'y prendrai de la peine, pour vous faire plaisir.
La Reine ayant décidé qu’elle ne viendrait plus à Londres, a reçu hier l’ambassadeur de France à Osborne. Simple présentation, après quoi il est revenu à Londres avec lord Palmerston. La reine a gardé quelques ministres à dîner, elle avait tenu conseil. Elle ne prorogera pas le parlement en personne. Son départ pour l’Irlande est fixé au 2 ou 3 août. Hier encore il m’a été dit de bien bonne source qu’elle est plus que jamais mécontente de Lord Palmerston et qu’elle le lui montre. Adieu. Adieu, mille fois. J’espère une lettre du Havre Samedi. Adieu encore & toujours.
Richmond, Jeudi 17 août 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
Une charmante lettre. Celle d'hier si charmante et élevée que je veux l'envoyer demain à l’Impératrice, telle quelle, par courrier. C'est le jeune Stakelberg qui est à Paris, & voici l’histoire. Il a été l’automne dernier à Alger. Il a fait un rapport qui a fort intéressé chez nous à la suite de cela on l’a nommé agent militaire à Paris, avant la révolution, ainsi auprès de vous. Quinze jours après, arrive la République, il n’a pas été révoqué, & réside maintenant à Paris dans cette capacité. Voici maintenant l’histoire de Kisseleff. Il a reçu l’ordre formel de quitter lui et toute l’ambassade. Il ne devait plus rester à Paris que Speis le consul général & Tolstoy qu’on attachait pour la forme au Consulat. Cet ordre de départ était signé par l’Empereur lui même il portait la date du 10 Mars. A l’époque où il parvient à Kisseleff, les révolutions de Vienne & de Berlin avaient eu lieu, & changeaient visiblement notre situation, puisqu'au lieu de nous tenir serrés avec nos alliés Autriche & Prusse comme nous le voulions & le désirions, nous restions absolument seuls. Kisseleff a représenté que, selon lui, cela modifiait tellement notre situation, qu'il regardait comme un devoir d’attendre, d’autant plus qu’entre les préparatifs de départ, les soucis à donner aux Russes, le bon effet que pourrait avoir encore sa première pour empêcher une trop vive explosion pour la Pologne. Il devait s’écouler peut- être 18 ou 20 jours. Que de nouveaux ordres pourraient lui arriver en conséquences de ces observations et qu’il attendrait jusqu'à une certaine date. Coup pour coup, il reçoit approbations de sa conduite & l’ordre de rester comme par le passé, mais en se dépouillant de son titre. Tout ceci m’a été conté hier par Tolstoy c’est fort bien expliqué et nous avons eu raison, & Kisseleff avait eu du courage. Tolstoy dit comme tout le monde qu'on veut la monarchie qu’on déteste la république. Mais voici la drôlerie, il y a une république et pas de républicains et on veut une monarchie seulement il manque un roi. Où le prendre ? Personne ne le dit.
Combien de choses nous aurions à nous dire ! J'ai un chagrin aujourd’hui. La Revue rétrospective nomme l’affaire de Mad. Danicau Philidor. Le nom y est. Evidemment on tient davantage car voici un renvoi.
Cette note si elle est étrangère à l’affaire, Petit ne l’est pas comme on le verra par son post-scriptum au trafic de places, et prouve que sous ce rapport il y avait résistance de la part de M. Lacave Laplagne à laisser faire de M. Guizot.
Adieu. Adieu.
Le temps ne s’arrange pas. Il est atroce, on a bien de la peine à ne pas être malade. Quand vous vous promenez prenez garde à la marée, ne vous laissez pas surprendre pas elle. J'ai peur de tout quand vous n'êtes pas sous mes yeux. Hier Lord Palmerston a donné à dîner à M. Beaumont. Les convives les Granville, les Shelburn, les Holland, les Janlyce, Henry Granville very well, mais dans tout cela le maitre de la maison aura manqué car à la longueur de la séance hier il est impossible qu'il ait dîné. Je n’ai pas lu encore la discussion. On la dit très curieuse. Je ne sais pas d’une manière positive si Naples a fait faire une déclaration. Mais ce que je sais pour sûr c’est qu’on a conseillé au roi de tenter l’expédition pour mettre la flotte Anglaise au défi de s'y opposer. A propos de Kisseleff, j'oubliais de vous dire que Normanby l'a mis en contact avec Cavaignac, & qu'il va quelques fois chez lui. Toujours très bien reçu ; mais privatly.
Richmond, Jeudi 13 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Jai vu hier lord John ; il me paraît parfaitement convaincu que vous allez à l’Empire. " Très préoccupée de Rome. Je lui ai lu votre lettre à ce sujet, il est fort approbatif, cependant j’ai cru voir qu’il ne regarde pas comme impossible de faire vivre la papauté avec un Parlement. Ce parlement ne s’occuperait pas des finances par exemple. Lord Minto était présent. Il a retrouvé dans votre lettre tout ce que Rossi lui avait montré, dans ce temps de votre correspondance. Très peu d'espoir du côté du Pape. Excellent homme, sans esprit. Enorme indignation de [?] de publier certain livre de Gioberti. Gioberti reçu par le pape avec tant de bonté, il y a un an encore. Enfin on voit un parti pris de réaction violente et cela amène à toute extrémité. Les français ne peuvent pas. reculer. Enorme embarras. Normanby a été à Champlatreux il y a rencontré Odilon Barrot. Le général français va nommer une commission de gouvernement à Rome, pour s'opposer aux cardinaux. Voilà tout John Russell hier.
J'oublie évidemment de l’inquiétude de cette réunion des mauvais esprits de tous les coins de l'Europe à Londres. Liaison intime et patente entre eux & les Chartistes. Travail pour révolutionner partout. Céphalonie n'inquiète pas beaucoup. Je voudrais que les anglais passassent par l'épreuve d’une insurrection. Comme ils y iraient rondement ! J’ai dîné hier chez lady Allice avec lord Somerton. Aujourd’hui l'on dîne chez moi. J’ai vu Mad. de Metternich. Son mari ne dit aucune opinion il est perplexe. Il ne croit pas que le pape cède. Evidemment Vienne a les Russes en horreur. On ne nous pardonne pas notre secours. Avez-vous remarqué la sécheresse de nos pièces officielles ? Exécution très froide de l’Autriche, ou pas d'exécution du tout. Je n’ai plus vu les Collaredo depuis quinze jours. Auparavant ils venaient au moins une fois la semaine, Metternich ne sait où aller, je crois que ce sera Bruxelles. 1 heure. Ni lettre, ni journaux ce matin. La malle n’est pas arrivée, peut être gros temps sur mer. Je ferme donc sans avoir eu mon plaisir. On me dit que lady Holland est partie en toute hâte de Paris pour venir trouver son mari malade du choléra à Holland house. Je saurai dans la journée si c’est vrai. Adieu. Adieu.
Le temps est à la pluie, beaucoup de vent, cela ne va pas à mes yeux. Adieu. On me dit que le duc de Bedford est devenu très protectionniste. Lord Palmerston avait auprès de Kossuth un commissaire appelle Wight. Je demanderai à John Russell s'il savait cela.
Richmond, Jeudi 12 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Votre question sur ma santé hier, ne m’a pas réussi. Je me suis réveillé les entrailles malades. Me voilà au régime, et un peu effrayée. Je suis sortie cependant. J’ai vu lord Beauvale, bien spirituel et sensé. Les Palmerston viennent passer la journée chez lui dimanche. Lord Brougham et Ellice y viennent Samedi. Je suis plus triste que de coutume aujourd’hui parce que je me sens malade. Avec de la santé on croit plus facilement à ce qui plait, à ce qu’on désire. Dans huit jours, avant même, comme je serai misérable ! Ah quelle tristesse que votre départ. Adieu. Adieu, à demain.
N'oubliez par lord Aberdeen Adieu. Voici Albrecht. C’est un peu dur. Il est trop tard pour que ma lettre parte ce soir pour Paris. Je me ravise, il sera temps encore, ainsi je ne puis plus vous consulter. 10 000 pour 6 ans. 11 000 pour 3 ans.
Richmond, Jeudi 11 octobre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Les paquets, les comptes, les adieux, voilà à quoi je suis occupée ici, & ce qui m'attend encore à Londres. Je suis fatiguée de ce présent et de ce futur, et je voudrais vous écrire longuement tout ce que je sais et je n’ai eu le temps ni les yeux. Lord Palmerston se vante que toutes ses dépêches à Pétersbourg, Constantinople, Vienne, & amiral Parker, sont des plus douces, & conciliantes pas un mot qui puisse nous blesser. Lord John m'a l’air tranquille. Il s’inquiète maintenant de Rome, du consulat français. La reine a été très fâchée de la résolution du Cabinet de soutenir la Turquie. Elle nous est très favorable, mais il a fallu céder. Collaredo m'a fait une longue visite hier. Très ouvert. Trés en blâme de la conduite ici mais parlant toujours de la querelle. avec la Russie sans y mêler l’Autriche, quoique Sturner ait agi comme Titoff. Nos diplomates ici blâment ces deux messieurs. Ils se seraient trop pressés. Au fond c’est seulement cela qui fait le bruit ici et l'embarras. Car le droit de l’Empereur est pleinement reconnu, il demande ce que les traités lui donnent le droit de demander. Et la porte ne veut pas répondre, elle envoie un extraordinaire pour expliquer l’opinion est générale que cela s’arrangera. Mon fils qui est venu hier a été très frappé de vos conjectures. On me presse bien d’aller à Brockett Hall. Les Palmerston y sont. Elle m'écrit que son mari fera tout pour me plaire. Beauvale est bien pressant aussi. Ce n’est pas possible. Le temps devient rude, il faut que je parte. Depuis lundi vous adresserez votre lettre à Boulogne. Je voudrais déjà avoir passé cette mer ! Adieu. Adieu. Adieu.
Un petit mot lundi à Londres aussi pour tous les cas. Il n’y a pas un mot de vrai au changement de Ministère à Vienne. Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 10 août 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
midi
Lord John était très préoccupé de l’Allemagne surtout. Qu’est-ce que veut dire cette immiscion dans les affaires d’Italie ? Cette guerre au Danemark ? Ces prétentions sur le Limbourg de quoi se mêle Francfort ? Mais ni nous, ni la France, ni la Russie, ni la Prusse probablement ne peuvent le permettre. Nous espérons dans Wessemberg qu'il ait un esprit sage. Quand au Pce de Linange sa nomination nous déplait fort. La Reine est très fâchée. Nous pouvons être dans le cas de faire très mauvais ménage avec son frère. Sur l’Italie, il m’a donné à entendre que la médiation de la France & de l'Angleterre aurait pour base l'Adige. Mais d’un côté il ne sait pas si l’Autriche voudra s’en contenter après les victoires de Radzki, de l’autre il ne me semblait pas très sûr de la France qui a proclamé l’indépendance de l’Italie toute entière. Ensuite, il me dit quoique Cavaignac & Bastide. parlent dans le meilleur sens, on n’est cependant jamais très sûr du même langage deux jours de suite. Enfin il n’était pas très stons en fait de confiance, mais certainement extrêmement anxious d’éviter la guerre. On va faire venir la Reine à Londres pour un conseil où on reconnaitra la république française, et elle recevra. Talleney. Il m’a dit, " et vous aussi vous avez dit que vous reconnaîtriez." Je n’en sais rien. Le Morning Chronicle annonce ce matin que Gustave de Beaumont est nommé ministre à Londres. Ce serait du Thiers n’est-ce pas ? Voici une lettre du duc de Noailles. Renvoyez la moi après l'avoir lue. Constantin m’écrit : " Si l'armée allemande entre dans le Lettland nous intervenons et la guerre en est la conséquence. Que fera la Prusse ? Se soumettra-t-elle à Francfort ? S’exposera-t-elle à voir ses provinces envahies par notre armée ? Ou se joindra-t-elle à nous qui seule pouvons la soutenir et la rendre à son honneur national. " Les réponses de Lord Lansdown à Stanley semblent équivalentes à l’aveu que la flotte anglaise s'opposera de force à l'envoi des troupes napolitaines, contre la seule ses réponses confirment aussi de tous points ce que Lady Holland vous avait dit. Quelle conduite ! Lisez le leading article du Times ce matin, admirable. Que de topics, sur lesquels nous aurions à parler à perte d’haleine. Quel dommage, quel dommage d’être si loin. Votre petit mot ce matin est bien court. J'espère mieux demain. J'ai déjeuné hier chez la duchesse de Gloucester, bonne femme. Adieu, adieu.
Richmond, Jeudi 9 août 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Ce que vous mande Piscatory est triste. Comme tout le monde dit de même, ce doit être la vérité attendue. J’ai eu hier quelques visites du voisinage. (à propos la vieille princesse si touchée de ce que vous lui adressez, que vite elle a envoyé chercher des fleurs, bouquets, plantes & & pour orner mon salon) le duc de Cambridge qui part aujourd’hui pour faire visite à son frère à Hanovre. Plus tard j’ai été dîner chez la duchesse de Glocester, rien que la famille royale et moi. J’ai regretté d’avoir accepté, car malgré mes barricades, mes yeux ont souffert de la lumière rien d’intéressant naturellement. A onze heures j'ai été dans mon lit. La duchesse de Cambridge se plaint et avec raison, de la duchesse d’Orléans qui ne lui a pas fait visite quoiqu’elle en ait fait aux autres membres de la famille. Cela fait un petit commérage qui les occupe. Sa fille de Meklembourg me plait chaque fois que je la rencontre. Le vieux Dennison M.P. frère de la. Marquise de Conyngham vient de mourir. Il laisse à lord Albert Conyngham, second fils de sa sœur toute sa fortune en terre et de plus deux millions de Livres, ce qui veut dire deux millions de Francs de rente. Vous avez vu lord Albert chez moi à Paris, pas grand-chose.
Voici votre lettre de Mardi. Toujours un nouveau bonheur quand j'aperçois votre petite lettre dans la grosse main de Jean. Quand aurai-je un autre bonheur que celui-là ? Adieu. Adieu. Je ménage mes yeux aujourd’hui, et je n’ai pas une nouvelle à vous donner ici on ne parle que de la reine et de l'Irlande. Il me semble que nos affaires vont cependant bien en Hongrie, Dieu merci. Adieu dearest Adieu. Comme vous êtes loin ! Adieu.
Richmond, Jeudi 7 septembre 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
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En attendant votre lettre qui me donnera de quoi répondre peut-être je n'ai absolument rien à vous dire. Montebello est parti un peu fâché lui-même. Moi je le sens beaucoup, je ne sais plus qui prendre, qui apprivoiser, pour 9 heures le soir. Voici une lettre de Mugendorf que vous me rendrez. Quelle idée de me faire attendre deux ou trois ans ! J'espère qu’il ne parle que de l’Allemagne et que les Français seront plus testés à la course. Je commence à m’impatienter beaucoup. J’ai vu hier Jumilhac, grand ami de Berryer. Plein d’espoir et de prudence
3 heures. Le diner de demain est just off. Ainsi vous viendrez dîner n’est-ce pas ? J’y compte tout-à-fait & ma voiture sera là pour vous prendre avant 6 heures. Je rentre d'un déjeuner chez La Duchesse de Gloucester, rien qu’une bonne femme et de bons grouse. Adieu, adieu. Je n’ai pas eu votre lettre encore. Londres est bien loin de Richmond. Adieu.
Mots-clés : Circulation épistolaire, Réseau social et politique
Richmond, Jeudi 7 juin 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Rien de nouveau. Ma lettre de Lady Holland renfermant seulement ceci. Le Président a dit dans son intimité la plus intime qu'il faisait ses paquets, & qu'au premier vote insolent ou récalcitrant de l'Assemblée il partirait pour l'Angleterre, laissant une lettre d’adieux à la France & charmé de ce débarrasser d’elle. Aberdeen était venu pendant que j’étais en ville J'ai manqué lord Lyndhurst aussi & Koller. Que faire ! Le soir chez Metternich, rien de nouveau. Je vous écris de bonne heure aussi, comme vous m'avez promis de le faire, afin que ma lettre vous parvienne dans la journée. Une lettre de Marion rempli d'esprit, mais sans un mot de nouvelle. Furieuse de [?] des bombardements annoncés. " Quel prix à payer pour le rapiècetage(sic) du pauvre. Lambeau qui reste de l’honneur français. " Adieu. Nous sommes bien loin l’un de l’autre. Pourquoi n'êtes-vous pas à Richmond & Marion avec ? Voilà des perfections auxquelles on n’atteint pas dans ce monde. Adieu.
Mots-clés : Absence, Politique (France), Réseau social et politique
Richmond, Jeudi 6 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Pourquoi n'avez-vous pas votre parapluie quand vous sortez pour une grande promenade ? C’est ridicule, et cela me fâche. Hier, jour d'orage, quoique toujours une température bien douce. Je fais toujours au moins trois promenades par jour. Toujours le parc, pas de choléra parmi les vaches et les daims. Je n'ai vu que mon fils hier matin, il n’avait rien de nouveau si non que le duc de Bordeau & la duchesse d'Orléans se sont manquées d'une heure à Cologne. Lord Harry Vane en vient & lui a couté cela. Voici ma correspondance. Il est de mode de dire que l'Autriche est désormais notre vassale. On ne réussira pas à nous brouiller. Je suis étonnée de n’avoir rien de Varsovie. Le grand duc au moins n’est pas mort, car voilà sa femme et sa fille qui sont allées le rejoindre. Bulwer m'écrit de Brighton. C'est là qu’il va rester jusqu'à son départ pour les Etats-Unis en octobre. Sa femme en adoration devant lui à ce que m'écrit Marion. Cette pauvre Marion, aucun espoir de Paris ! Voilà votre lettre. Une page sur l’Allemagne très curieuse, frappante & vraie. Metternich n’est pas accouché de sa feuille volante, elle s’est envolée. Je ne crois pas que vous y perdiez grand chose. Il me semble qu’il n'y a rien de nouveau dans le monde. Les journaux très vides ce matin, et ma lettre aussi. Je n'ai que la ressource d'une quantité d’adieux. Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 6 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Morny est venu hier. Je l'ai fait dîner avec moi et causer beaucoup. Grande affection pour le président, et l'opinion de lui qu'en a tout le monde, sans exagération. Le président ne veut rien hâter. Cela viendra de soi-même. Un changement dans le ministère est inévitable dés le retour de l’Assemblée. Molé & Thiers sont prêts et désirent le pouvoir. Barrot resterait garde des sceaux, Molé aff. étr., Thiers finances ou intérieur. Benoist, je ne me rappelle plus qui encore. Le président aime beaucoup Molé. Celui-ci & du courage beaucoup plus que Thiers, et au fond c’est le président qui n'était pas pressé de prendre celui-ci comme ministre. Grand discours éloge de Falloux, tout-à-fait premier personnage dans l’Intérieur & la confiance de tous. Montalembert aussi. Les légitimistes imbéciles et rendant tout difficile. Berger n’est pas de ce nombre. Broglie très compté & respecté mais pas très pratique. Piscatory faible. On avait tant dit de lui qu’il était cassant, qu'il s'est mis à joué le modéré, il fait cela gauchement avec exagération et on en rit. On rit surtout de la Redorte. L’un et l'autre ayant frisé le ministère se considèrent toujours comme candidats. Excellentes relations avec Kisselef. Grand éloge de celui-ci. Normanby une vacature qui ne quitte pas le président. Tout aussi ridicule que jamais Morny a essayé une explication de la conduite envers vous. Vous avez été mal informé. C'est par égard & amitié pour vous qu’il craignait que vous ne fussiez élu. Et certainement plus le temps coule & plus on voit que vous êtes le premier homme de votre pays. Is not the word this war the meaning.
Les Orléans parfaitement oubliés. Paris tranquille & charmant. Il va en Ecosse & retourne pour la rentrée de l'Assemblée. Je le verrai encore. J'ai eu une longue lettre de d’Impératrice, excellente, de [?], elle a voulu aller à Fall voir le tombeau de mon frère. Elle en revenait encore. Grande joie de nos victoires et elle me dit : " Palmerston va être bien affligé pour ses chers Hongrois, lui qui formait des vœux sincères pour nos défaites. " Cette lettre a été bien ouverte. J'espère que c’est en Angleterre. J'ai déjeuné hier chez la duchesse de Glocester. On serait charmé dans la famille royale que Claremont décampât et allât en Italie. On est fatigué de leur présence. La reine est de cet avis aussi. Cette reine vient de passer deux jours dans une petite chaumière isolée dans les Moors. Personne que son mari, une femme de chambre, un valet de pied & un marmiton & deux [ ?]. Le valet de pieds habillant le prince, les [?], & ramant le couple royal sur le lac. Une hutte composée de deux chambres pour le ménage un autre pour les domestiques pas d'habitation à 40 miles à la ronde. Elle écrit dans des extases de joie. C’est charmant d’être jeune. Voici mon petit billet de Metternich. Assez spirituel. Pas de grande feuille. Vous ne l'aurez jamais. Votre lettre m’arrive. Quelle idée que l’Empereur ait donné son portrait et celui de l’Impératrice à Lamoricière. C’est un conte. Mais Morny me dit qu'on le traite très bien. Adieu. Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 6 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
5 heures
Deux longues lettres de Constantin par Nicolay arrivé de Varsovie cette nuit. Le grand Duc Michel sans ressource. Paralysé du côté droit, la parole embarrassée. L’Empereur au désespoir, ne le quittant pas d’un instant. On était au 7eme jour. Sa femme était attendue à tout instant, on craignait qu’elle ne vint trop tard. On juge Lamoricière comme vous le jugez mais on est très content de son langage. Grande distance dans la manière de le traiter lui et ses collègues de Prusse & d'Autriche. Ceux-ci dans l’intimité, lui non, mais beaucoup de politesse. Au Te deum pour nos victoires l’Empereur s’est approché de lui & lui a dit. " général j’espère que c'est la fin de la lutte, de la même bataille commencée dans les rues de Paris et dont les premiers lauriers vous reviennent et à vos amis." Les Polonais sont furieux de voir des uniformes français dans le cortège de l’Empereur, ils montrent un grand éloignement pour Lamoricière et évitent de faire sa connaissance. Nous rendons tout aux Autrichiens jusqu'au dernier canon, nous ne nous réservons d’autres trophées que les étendards & drapeaux pris à l'en nemi par nos troupes. Cent drapeaux ont été entre autres envoyés à Moscou. c’est au général russe Grabbe que [ ?] va se rendre. Peterwardeim seul est réservé aux Autrichiens. Beaucoup de froid entre [ ?] et Haynau. On nous a ordonné de vaincre les Hongrois mais nous ne les haïssons pas. Haynau est haineux, & féroce, et ne voit dans ceux que se sont soumis à nous que des victimes qui échappent à la vengeance. (Cela me prouve que nous protégeons.) Grand embarras pour le gouvernement autrichien. La haine qu’il rencontre en Hongrie est extrême. Vous avez là à peu près tout. L'empereur très soucieux à propos de l’Allemagne.
Vendredi le 7 Septembre.
Nicolay est venu hier compléter les informations de Varsovie. Beaucoup de détails très curieux. Certainement la position de l’Autriche est critique. Les Hongrois nous adorent & la détestent, à nous tout le monde veut se rendre. Exemple : à Arad le Corps de Schlik 16 / m hommes se présente & somme la garnison de se rendre. Refus absolu. Jamais à un autrichien. Un escadron russe, un seul, se présente à la porte de la forteresse, On l’ouvre de nuit & on se rend à nom, à discrétion. Tout cela est bien humiliant & pénible à supporter aussi on nous déteste à Vienne mais les Empereurs vont à merveille ensemble. Ils se tutoient en s'écrivant, mon Empereur n'attend cela que la mort ou la guérison de son frère pour retourner à Pétersbourg. Il en est pressé, il est ennuyé de toute cette affaire, quoiqu’il en soit bien glorieux. Son chagrin est excessif. Il ne quitte pas Michel. Nous retirons toutes nos troupes de la Hongrie. Georgey est toujours à notre quartier général et très bien traité. On dit un homme très distingué de toutes façons. La tournure du général Lamoricière parait bien convenue, son entourage aussi. On le traite très poliment. Il y a de la bienveillance pour la France, avec un peu d’indifférence. " Qu’est-ce que cela nous fait ! " On vous sait gré d’avoir chassé nos mauvais sujets. Branicz, Goldwin & & Mad. Kalergi en est, vous l’avez prie poliment de s'en aller. Nicolay l'a vu à Berlin. Kossuth, Dembinsky, Massaro sont chez les Turcs. On est curieux de voir ce qu'ils vont en faire. On s’attend à les voir protégés par Stratford Canning.
Les journaux anglais disent que Lord Aberdeen est chez la reine. La dépêche de Palmerston est arrivée à Schvarsenky trois jours avant la soumission de Gorgey, cela a beaucoup fait rire. Je crois que je vous ai fait là tous mes commérages. Je demeure ici dans la partie haute de la maison, le coin, ce qui me donne même la vue de la Terrasse outre la belle vue de la rivière. Un bon appartement avec balcon, et tout-à-fait séparée du bruit. M. Fould me disait hier que selon ses nouvelles Thiers ne voulait à aucun prix être Ministre, c’est tout le contraire de ce qu'affirme Morny. Adieu, mes yeux me font un peu mal & j'écris trop. Votre lettre m’arrive. L'orage vous à donc cependant donné du rhume. Encore une fois où était le parapluie ? Adieu. Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 5 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Je n'ai encore vu personne aujourd’hui que lady Jersey. Je ne sais donc que les journaux. Une lettre d’Albrecht bonne. Il [?] & Kisseleff essaie de rattraper pour moi là rue St Honoré. Je désire ; mais je doute. Une fois à Rome, qu’allez- vous y faire, et d’abord quel drapeau arborerez- vous ? Que de complications à prévoir. Albrecht dit que les puissances doivent ménager la situation de la France et reconnaître qu’elle a rendu un grand service à l’Europe par cette triste campagne. C’est sans doute le dire de Kisseleff voilà pourquoi je cite. Metternich va toujours de même. Les forces s'en vont, c'est là le côté alarmant. L’appétit est parti aussi, il ne veut rien prendre. J’ai été interrompue par le duc de Beaufort & les Delmas. Ce n’est pas là où l’on trouve des nouvelles. Adieu, je vous attends donc demain à cinq heures. Ce sera bien court, c'est toujours trop court. Adieu.
Richmond, Jeudi 4 octobre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Je suis moins noire que hier sur Constantinople. Mon fils est venu me voir, il avait causé avec Brunnow. Vous avons demandé l'ex tradition de Bem, Dembinsky, Lamansky, à Vostorsky, tous quatre sujets russes. La lettre du traité nous y autorisait. La porte [?] Titoff suspend les relations. & reste. Voilà tout jusqu'ici. La Turquie nous envoie en ambassadeur pour expliquer. voyons ce que dira l’Empereur en attendant les prisonniers peuvent s'évader. Et l'affaire pourrait finir sans guerre. Cependant l’attitude de Stafford Canning ajoute à la complication. Il a fait venir la flotte devant les Dardanelles. Cela semble contrarier un peu le gouvernement. Je ne sais [?] que demain ce qu'on a décidé ici dans le [?] de Mardi. John est toujours à Woburne, grande contrariété. Les Anglais disent que l'Empereur est dans une disposition d'esprit très violente. Après tout d’où peuvent-ils savoir cela ? On n’a pas encore de ses nouvelles de Pétersbourg. & à Varsovie, l'Angleterre n'avait pas d’agent diplomatique. C’est toujours une bien grosse affaire. Metternich va crescendo en inquiétude, sans cependant croire possible qu’une guerre s'engage sur cela. L’Autriche a seulement. demandé qu'on éloignât Kossuth & consorts de la frontière. Mais pourquoi Sturner a-t-il fait comme Titoff, suspendu les relations ? Rien n’est expliqué, Collaredo n'a rien reçu de [ ?]. Brunnow se montre très serein & très confiant. Il a vu Palmerston mardi avant le Conseil. Je vais ce matin en ville pour mes yeux. Voilà donc votre Ministre chassé de Washington. Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 3 août 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
jeudi 2 heures
Les victoires de Radetzky m’enchantent. Que va faire votre gouvernement ? Je doute qu'il intervienne. Je crois à une médiation anglo-française. Nous verrons. J’ai vu hier Ellice. Il part demain pour St Andrews. Je ne veux donc pas répéter ce qu'il vous dira mieux que moi. Mais pour le cas où ma lettre vous arrive avant la-personne voici à peu près. Thiers de l’influence, mais pas de pouvoir. Cavaignac honnête homme continuant la politique de Lamartine déshonnête. Entre les mains du National comme son devancier. De l’ordre à Paris. Du respect pour Cavaignac. Grande envie de rester à toute éternité sous l’état de siège. Intimité contre le gouvernement avec Normanby. Celui-ci très prudent. Ayant même eu peur de voir Thiers. Ellice s’est chargé de cela, comme il s’est chargé de tout. Cela va sans dire. Son opinion est qu’il y aura guerre qu'il faut la guerre pour qu’il en ressorte en homme qui devienne le Bonaparte ou le monde. Thiers sera le Talleyrand de ce dénouement, mais jamais le principal. Je ne sais pas autre chose car je n’ai vu personne. Constantin me dit que l’indignation est générale à Berlin. On foule aux pieds la cocarde tricolore. Jamais l’armée ne voudra obéir à Francfort, nous verrons, & tout de suite. Le temps est affreux. Pluvieux & froid. Adieu, " que le jour me dure ". Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 2 août 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Votre lettre de Lundi me prouve que ma frayeur vous a bien effrayé aussi. Je me reproche de vous avoir tant dit sur cela. Aujourd’hui je suis très calme sans avoir de bonnes raisons de l’être. J’attends ce matin M. Guenaud de Mussy. Hier j’ai été faire mon luncheon à Ken. Les dames Cambridge toujours fort en train et aimables. Rien de nouveau à apprendre là. Dans le courant de la journée mes visiteurs ordinaires ; Crasalcovy, Delmas, & le soir chez Beauvale. Les Delmas vont s’établir dans 15 jours à Brighton, j'en suis très fâchée. Je crois que Les Metternich finiront par là aussi. & je crains que les Ellice n'imitent tout ce mauvais exemple. On a peur de Paris, d'une nouvelle alerte. On s’ennuie en Angleterre mais on y dort en sécurité. Tout cela est bien vrai & bien raisonable, et je sens que mon inquiétude sera grande à Paris. Cependant vous êtes en France. Je ne veux pas rester en Angleterre.
Il n'y a plus de quoi bavarder ici, calme plat. Plus de Parlement, la Reine en Irlande, la société débordée. Les journaux sont fort insipides. On devient marmotte. Si je ne causais un peu tous les jours avec Lord Beauvale je deviendrais parfaitement bête. Je n’étonne qu'il aie tant d'esprit, car il vit bien seul, et sa femme n'en a pas du tout. Je vous envoie toujours ma lettre avant d’avoir reçu la vôtre, c'est ennuyeux mais c’est plus sûr pour le sort de ma lettre. Ce changement provient du changement de domicile, il y a une grande demi-heure de perdue par la distance. Adieu. Adieu. Je ne vous ai rien dit, je n'ai rien à redire je n’aurais qu’à répéter ce que nous savons si bien par cœur dans le cœur. Adieu. Adieu.
Richmond, Jeudi 1er septembre 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
3 heures.
Et moi aussi je ne sais rien dire, aujourd’hui que nous sommes si près de demain. à demain donc à Putney bridge ; intra s'il pleut, extra, s'il ne pleut pas. Je suis bien contente de voir ce beau temps pour votre voyage. Adieu. Adieu.
Richmond, Dimanche le 19 août 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
J’ai dîné hier chez lord Beauvale avec les Palmerston. Nous faisons très bon ménage. Tout-à-fait de l’intimité sans beaucoup de sincérité, mais cela en a presque l'air.
Il n’avait pas de nouvelles hier seulement il croit savoir que le voyage de Schwarzenberg à Varsovie avait pour objet de se plaindre des lenteurs du Maréchal Paskowitz. Celui-ci se plaint à son tour que le gouvernement autrichien ne donne pas à manger à notre armée. Ce qu’il y a de vrai c’est que selon les lettres de Constantin on est mécontent chez nous du Maréchal, on dit que cela traîne, que nous laissons échapper l’ennemi quand tout ne va pas bien il y a toujours quelqu’un qu'on en amuse. En Transylvanie cela va mieux. [Bem] a été parfaite ment battu, c’est littéralement vrai, car outre que nous avons détruit un corps de 6000 hommes. Voici ce qui est arrivé. La calèche de [Bem] tombe en notre pouvoir on y trouve deux hommes. Le plus grand on le tue, l’autre était petit et si laid, qu'on se met à le fouetter, et lui, si agile qu'il parvient à s’évader au milieu des coups. C'était [Bem]. Constantin a lu avec Schwarzenberg les papiers trouvés dans cette calèche. C’était la correspondance de [Bem] avec Kossuth, très curieuse, & bonne à connaître. Constantin me dit que Lamoricière a été bien reçu mais il me dit cela froidement on l’a fait assister à un exercice de cavalerie, et il a dit qu’il n’avait jamais rêvé à une pareille merveille. Bon courtisan. Lord P. m’a dit que l’Autriche et la Russie seraient très empressées et très charmés de reconnaître l’Empire français. Il faut d'abord le faire.
4 heures
Longue visite de Lady Palmerston et curieuse conversation. Elle est venue pour me démontrer combien son mari avait raison en toutes choses, en dépit de ce que, public européen, public anglais, la presse toute entière, les collègues. même, la cour, étaient contre lui Curieux aveu. Alors sont venus les détails il est très autrichien & & très conservateur partout & & - C'est donc un homme bien calomnieux. - C’est cela. Horriblement calomnieux. Mais enfin après tout ce que je vous ai expliqué n’est-ce pas que j’ai fait quelque impression sur vous ? - Certainement vous m'avez convaincue que vous croyez très sincèrement à tout ce que vous me dites. - Mais ce que je vous dis est la vérité. - Je veux bien le croire, mais prenez de la peine pour détruire tout ce qu’on croit de contraire. Votre mari est puissant, puissant en actions, en paroles, en écriture. Et bien que tout ce qui vient de lui action, parole tout porte le cachet de ce que vous dites. On ne demande pas mieux que de voir lord Palmerston dans la bonne voie mais il faut le voir pour le croire, & aujourd’hui je vous déclare qu’on ne le croit pas & Voilà pour l'ensemble ; dans le détail ; - On accuse mon mari d'être personnel ? Personne n’est moins cela que lui. Il aime tout le monde, Il aimait beaucoup M. Guizot. (Comment voulez-vous ne pas rire ?) Enfin j’ai ri, j'ai écouté, je n’ai voulu ni disputer, ni discuter. Je me suis amusée, et je vous amuse. Au milieu de tous les bons principes, elle est convenue avec beaucoup de plaisir même que lord Palmerston était le roi des radicaux. Enfin c'était très drôle, et cela a duré une heure & demi.
Je rentre d'un luncheon chez la duchesse de Cambridge où j’ai trouvé Madame Rossy (?) La duchesse a rencontré avant hier la duchesse d’Orléans chez la reine douairière. Elle ne lui a pas plu du tout, Elle a surtout éte désappointée dans sa tournure. Elle ne lui trouve pas l’air grande dame, & elle lui a paru très laide. Elle a dit deux choses désobligeantes à sa fille la grande duchesse de Meklembourg. Manque de tout plutôt qu’intention, je suppose. Car alors ce serait grossier. La Reine douairière n’a pas longtemps à vivre.
Lundi 11 heures
Hier encore dîner chez Lord Beauvale avec les Palmerston point de nouvelle de la causerie rétrospective. Toujours énorme désir de voir en France une autre forme de gouvernement, et ferme conviction que cela doit arriver. J’ai vu hier matin lord John Russell un moment très occupé, il est parti ce matin pour rejoindre la reine en Ecosse. Mad de Caraman est [?] installée au Star & Garter. Elle veut absolument faire mon portrait, c’est bon s'il pleut, et une séance plus, pas possible. Van de Weyer est revenu hier de Bruxelles, il est mon voisin aussi à la porte du parc. Cela sera une ressource j'en ai beaucoup cet été. Encore interrompue par lady Palmerston. Mais c’est fini. Ils retournent à Londres aujourd’hui pour dîner chez C. Fox avec l’ambassadeur de France. Grande satisfaction de n'être mêlé en rien dans l’affaire de de Rome, en rien dans l’affaire de La Hongrie toutes les deux détestables et dont on ne peut pas comprendre le dénouement. Van de Weyer rapporte de Bruxelles la conviction que la France aura l’Empire Léopold, glorieux, heureux, fort aimé. On va lui offrir une couronne civique. Voici la poste. Votre lettre, une de Duchâtel, intéressante avec rien de nouveau cependant grande tranquillité. De la division et beaucoup dans le camps modéré. Thiers en grand discrédit. Molé un peu aussi. Il n'y a qu'un seul homme dont on attende quelque chose c'est Changarnier lui-même Duchâtel a été parfaitement traité à la douane. Du respect, de l’empressement Adieu, Adieu voici l'heure de fermer ma lettre et puis ma promenade. Vous avez là une grosse lettre. Adieu. Adieu. Je répondrai à la vôtre tantôt. God bless you dearest.
Richmond, Dimanche 30 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Je sais le fait que Schwarzenberg a enfin répondu à la dépêche de Lord Palmerston sur la Hongrie & que cette réponse est excellente. Je ne l’ai pas lue, j'en saurai peut-être davantage. Lord Aberdeen est très curieux de cela. Il ne cesse de m'écrire à ce sujet. Peel va passer quelques jours chez lui, & il tient à l’endoctriner. Peine perdue je crois. Le Pce Metternich est fort occupé de son départ. Dans 10 jours il s'embarque pour Ostende. Il est en bonne santé. M. de Hübner est ou sera nommé ministre à Paris. C'est le président lui-même qui l’a désiré. Ce Hübner est, dit Metternich un homme très intelligent, et de la bonne école. Mais il n’est ni plus ni moins que le gendre de M. Pilat, rédacteur des Oestereihisher [?] et fils naturel d'un ami de ce même Pilat. Ce n'est pas très aristocratique. Thom passe ministre en Suisse. Je le regretterai beaucoup à Paris. Morny est très occupé d’affaires à Londres. Il ne retourne pas encore à Paris. Ces affaires c'est des affaires d’argent. Je vous ai dit que Lord John est allé à Woburn pour huit. jours. Il y a maintenant près de deux mois qu’il n’a vu lord Palmerston. J’ai lieu de croire qu’ils sont assez froidement ensemble. A propos vous saviez César & Auguste avant Lord John, car il n'en a eu connaissance qu'il y a trois jours. C’est drôle. Je vous envoie un billet de Metternich, spirituel & sévère sur le journal des Débats. Je crois qu'en vous rendant compte de la conversation de M. Achille Fould je n’ai pas assez appuyé sur ce qu'il m’a dit de vous. Personne n’approche de votre talent, & vous êtes le seul homme en France qui ayez du courage. Infailliblement vous vous retrouverez là où vous devez être. Moi je dis que je vous prêche & que je désire [ ?] l'abstention, le repos. Il dit c’est impossible. Il fait beaucoup plus de cas de Molé que de Thiers.
4 heures. Voici Morny qui est venu passer une heure avec moi. Ses nouvelles de Paris sont qu’il peut considérer M. de Falloux comme hors du cabinet. Il le regretterait du reste toujours le même dire. On ne peut rien faire parce qu'on ne peut pas s’entendre sur la chose à faire. Si l'Empire On perd les légitimistes. On les perdrait peut-être même si on demandait la présidence pour 10 ans. Son opinion est qu’on restera comme on est, et que c'est là l'avis de tout le monde. Il m’a parlé très mal de Lamoricière de Drouyn de Lhuys, de tout le paquet qui tient de près ou de loin au paquet Cavaignac, Dufaure. Il croit que l’assemblée fera renvoyer & les préfets objectionnables. Il n’est pas prévu de retourner à Paris. Deux choses : il se dit charmé du Manifeste du pape. Après tout. Il a fait des concessions & il est meilleur juge que la France de la mesure des concessions. Et puis plainte de ce qu'on, nous russes par exemple, nous sommes trop polis pour la république. Nous avons par non rudesses contribué à la chute de la monarchie de juillet. Nous pourrions bien par nos bons procédés contribuer à la durée de la république. On était plus poli même pour Cavaignac que pour Louis Philippe. Morny voudrait que tout le monde se mêlât de décréditer cette forme de gouvernement.
1er octobre lundi. Voici l’étonnante nouvelle de la rupture entre la Russie & la porte ! Si cela est vrai c'est une bien grosse affaire. J’ai peine à y croire. Mais je crois certainement que Palmerston y pousse. Ah quel homme ! Je suis très préoccupée de cette grande nouvelle. Brunnow n’a pas bougé de Brighton depuis 6 semaines. Il ne cesse d'écrire et d’envoyer des courriers, mais il est là tout seul, il n’a pas vu une seule fois Lord Palmerston qu'est-ce qu'il écrit ? J’attends votre dernière lettre du Chateau de Broglie. Voici vos deux lettres, merci merci. Curieuses. Intéressantes. Je n’ai pas le temps d’y répondre il faut que ceci parte. Adieu. Adieu, adieu.
Richmond, Dimanche 29 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Ma journée a été plus calme hier. Si elle avait continué sur le ton de la veille, je ne crois pas que j'eusse été en état de vous en rendre compte aujourd’hui. Mad. Delmas, [Crasalcowy], les Beauvale, Brougham. Les Collaredo, tout cela m’a aidé à me calmer. Aujourd’hui j’attends M. Guenaud de Mussy. Je ferai ce qu’il me dira. Le choléra avait un peu diminué à Londres avant hier pour ici je n’en sais rien. Personne ne me dira plus la vérité, & je ne croirais pas aux bonnes nouvelles s’il y en avait. J’ai dîné chez Beauvale avec Brougham pas déconcerté du tout. Il m’a donné copie d’une lettre qu'il adresse à la reine. Lettre de remontrance & d'avertissements " Votre ministre tout en protestant qu'il veut l’existence de l'Autriche, prononce des paroles. sympathiques pour les Hongrois. Le lendemain la cité retentit de discours et de vœux pour les rebelles, encouragés par ce qui s’est dit à la chambre des Communes. Rappelez-vous que votre Empire se compose aussi de nationalités diverses que c'est s’attaquer à votre couronne que se liguer avec les Révolutions au dehors. " & & & Tout cela fort bien développé. Extraordinaire créature. & il commence sa lettre en s’appuyant sur son droit de conseiller de la Couronne & son droit d’une audience de la Reine, il préfère lui écrire plutôt que l’incommoder. Tout cela est en règle. J'ai une lettre d’Hélène. La grande Duchesse était retournée à Pétersbourg. Le duc de [Lench] devait la suivre par mer & puis s'embarquer de Peterhoff pour son grand voyage, qui pourrait bien cependant se borner au midi de l'Angleterre. Beaucoup de tendresses impériales pour moi. Votre lettre de jeudi est charmante. Hélas aujourd’hui, rien du tout. Je crois l'air sur la montagne meilleur, & si je reste ici j’ai l’assurance d’un appartement [?] que celui où je suis nichée maintenant. Ellice est parti pour l’Ecosse. Tout le monde quitte Londres. Lady Palmerston a eu hier une dernière soirée. On était curieux de savoir si on y rencontrerait le Prince de Canino. Je ne crois pas, mais Pulsky, bien sûr.
Lundi le 30 juillet
Guenaud de Mussy est venu. Il me plait beaucoup et d’abord il m’a fort rassuré, comme la famille royale arrive demain à Claremont, il a exploré tous les environs pour s'assurer de l’état sanitaire. A Richmond 2 cas. Au surplus toutes les raisons contre la maladie m'ont paru excellentes. Il reviendra me voir jeudi. Enfin! Il m’a calmée. Je me suis prévalue de votre nom. Il me parait qu'il vous est dévoué avec enthousiasme. Kielmansegge est venu hier. Il part pour le Hanovre. Il ne m'a rien dit de nouveau. J’ai vu lord John aussi. Il espérait que la paix allait se conclure avec le Piémont. Il m’a beaucoup parlé de Paris. Il a fort critiqué le discours du président à [?] et s'en est moqué. Moi je l'ai défendu, nous avons eu une petite discussion la dessus. Il est convenu cependant que le discours avait fait un bon effet à Paris. Et bien, c'est tout ce qu'il faut. Lord John est ravi de la fin de Palmerston. A propos, autre discussion sur Palmerston. A mon tour je me suis permis de critiquer et très fort les paroles grossières qu'il a adressées à Lord Aberdeen, et j’ai dit qu’un homme de bonne éducation ne se permettrait pas cela, et que lui Lord John depuis 35 ans qu’il est à la chambre n'a jamais adressé de semblables paroles à ses adversaires. En résumé que cette grossière épithète avait gâté son discours du reste habile. Il m’a donné raison, & sa femme aussi. C'était très drôle cette conversation. Elle vous aurait amusé. J’ai dîné chez Delmas. C'est de la distraction. J'en cherche, j'en ai besoin. Duchâtel vient me voir ce matin. Je crois qu'il part après-demain. Cela me fait de la peine ; mon seul lien avec la France. Je n’en causerai plus avec personne de compétent. Adieu. Adieu. J’essayerai de vous écrire par la poste de 4 heures. Vous me direz si la lettre vous arrive en même temps que celle-ci de 1 heure. Adieu. Adieu.
Richmond, Dimanche 23 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Voici le résumé du langage tenu à Berlin par M. de Persigny et évidement celui qu'il est chargé de tenir partout. La monarchie est la seule forme de gouvernement qui convienne à la France. Il y a maintenant deux partis, républicain & monarchique. Le premier se compose des plus mauvais éléments de la société. Il est en minorité. L’autre est puissant et considérable, grande majorité. Ce parti : 3 sections. Légitimistes, Orléanistes & Napoléoniens Les légitimistes comptent un grand parti religieux qui est plus catholique que Henri quinquiste, et la portion rurale de la France, [?] dans la noblesse est plus napoléonienne que Bourbonne. grand abime sépare la branche ainée, de la nation. C'est la révolution de 89 et la restauration par les baïonnettes étrangères. La branche cadette compte très peu d'adhérents. On déteste Louis Philippe, il n’avait de force que dans la bourgeoisie & celle-ci a passé en grande partie dans le camp napoléonien grande magie dans ce nom, et le prince peut à l'ombre de ce nom faire plus que tout autre pour la restauration de lord & d'un bon gouvernement. Sa bonne conduite lui a déjà rallié la majorité de la nation. Si Henry V venait à manquer, les légitimistes se rallieraient certainement autour du Prince plutôt que du comte de Paris. L'armée lui est entièrement dévouée. La noblesse sait très bien qu’il n'y a que lui qui puisse rétablir l'hérédité de la pairie , en même temps que les classes inférieures ont confiance en lui pour conserver une forme libérale de gouvernement. Ce qui a rendu le grand Napoléon impopulaire c’était la conscription. M. de Persigny [?] expose the parallel between the Ceasar & the Napoléon. Louis Napoléon would receive his uncle line as Julien. Ceasar was ultimatly replaned by Augustus. Copié textuellement. Deux fois déjà le Prince pouvait être proclamé Empereur, il a trouvé qu’il ne perdait rien à attendre. L’état actuel ne peut cependant pas durer. Un appel au peuple. établissait l’Empire, cela se serait fait maintenant, sans la circulaire de M. Dufaure ! Il a tout gâté. M. de Persigny a vu le roi & le Ministre des Affaires étrangères. L’un et l’autre se sont bornés à faire l’éloge de la bonne conduite du Prince. La conduite de la Prusse vis-à-vis de la France se règlera sur celle des autres puissances. Le but de M. de Persigny était de s’assurer de la reconnaissance de l’Empire. Je vous ai redit bien exactement ce qui vient de source. Le roi de Hollande reprend son naturel, il est violent, absurde, une espèce d'enragé. Cela pourra finir mal. L’Empereur Nicolas ne veut pas entendre parler de rivalité entre ses généraux & les Autrichiens. Nous avons à nous plaindre, et quand on se plaint, l’Empereur fait taire. Le Maréchal lui a écrit, pas de réponse, & lorsque le Maréchal a voulu lui en parler à son arrivée à Varsovie, l’Empereur lui a fermé la bouche. C'est de la bien bonne conduite. L'Empereur d’Autriche a envoyé à Petersbourg l’archiduc Léopold son cousin, pour remercier solennelle ment de l’assistance. On ne dira pas ceci à Vienne. Ils sont là pro fondement humiliés de notre secours. Que c'est petit !
J'ai eu hier pendant deux heures M. Kondratsky secrétaire d’ambassade ici, arrivé en courrier de la veille. Ses récits sont très curieux sur l'empereur, sur l’excès de la joie, et puis l’excès de la douleur. Douleur énorme, qui inquiète. Le voyage l’aura réuni, mais je suis impatiente des premières lettres de Pétersbourg.
Lundi le 24 sept. Hier dimanche, petite pluie fine tout le jour j'ai été déjeuner chez La duchesse de Glocester, et puis rendre enfin visite à Mad. Van de Meyer. J’y trouve une petite personne bien tournée, comme dans les boutiques élégantes de Paris, visage tartare, large & rond, très Russe, jolie. On me l’a présentée, c'était Mad Drouyn de Lhuys. Son mari est à la chasse en province. Elle dit qu’on dit autour d’elle qu’il y aura du bruit à Paris. Vous ai-je dit que Mad. Lamoricière est retournée à Paris. Son mari est allé à Pétersbourg. Les voyageurs de Varsovie disent que sa tournure n’est pas grand chose. Un peu français à cheval, et pas distingué à pied. Mais on est content de lui chez nous. Kisselef sera nommé ministre très prochainement. Hier John Russell. Il y a toujours quelque petit cous pi quant et utile dans le dialogue. Hier, réflexions sur la facilité dans le travail. Très bon quand On a connu [?]Lord John l’esprit simple et droit ; dangereux quand on a trop de goût a faire des affaires. Lord Palmerston a beaucoup de facilité. Incontestablement c'est fâcheux entre un ministre qui ferait trop peu, & un qui ferait trop, le premier is the safest. - I think you are right. It reminds me of Lord Grey who always said. Let a thing alone ; in dropping it, it minds sooner by itself.- - Trés vrai, en travaillant toute chose on ne fait quelque chose, et quelques fois une très mauvaise affaire. Voilà notre train de conversation. avez-vous lu la lettre de l’Empereur au comte Nesselrode ? Et le passage où il parle du conquérant ambitieux d'il y a 36 ans ? Cela ne promet pas beaucoup de faveur pour la [?] Je vous ai dit je crois que l’Empereur a donné à la fois son portrait à Nesselrode & Orloff. Faveur très rare et l’altesse à (Sernicheff, très rare aussi. Avec lui en voilà 6 dans l'Empire. Que de choses diverses je vous écris, & que de choses encore j'aurais à vous dire. Lord Normanby a déjeuné l'autre jour avec le président qui lui a raconté M. de Falloux. Il con naissait la lettre mais on a commis la faute de ne point le prévenir de sa publication. On est curieux de voir comment se prononcera la majorité de l’Assemblée sur l’affaire de Rome. Si elle reste unie pour soutenir le gouvernement. It is all safe, & je puis retourner à Paris, si elle se fractionne, il y aura du bruit et il vaudra mieux attendre qu’il soit passé. Je vous envoie une toute fraîche lettre de Lord Melbourne, si sensible (anglais) que je crois vraiment qu'elle vous frappera vous et le duc de Broglie. Lisez-la avec attention. Moi elle me paraît concluante. Lisez bien.
Midi. La poste de France n'arrivera que plus tard pas de lettres. Adieu. Adieu. Adieu
Mots-clés : Circulation épistolaire, Conditions matérielles de la correspondance, Conversation, Politique (Autriche), Politique (France), Politique (Internationale), Politique (Prusse), Politique (Russie), Portrait, Relation François-Dorothée (Politique), Réseau social et politique, Révolution française
Richmond, Dimanche 22 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Midi
J'ai vu hier Ellice. Il avait assisté à la séance vendredi. Brougham a été long, diffus, ennuyeux, sans effet. Le parti très mécontent de lui & disent qu’il les avait rendus à la Mallet, Aberdeen excellent, et Stanley encore plus, mais celui ci n’a commencé son discours qu’à 3 h. du matin ; les amis avaient sommeil, quelques uns sont partis, c'est ainsi que la minorité a été diminuée. En attendant le chiffre 12 a comblé de joie le ministère. Aberdeen a dit des vérités très dures. En parlant de Palmerston il a dit insanity, de Minto playing antics with [?] & & Je cherche en vain dans le Times ce qu'il a dit de vous. Je l'ai là dans le Chronicle. Ellice m’a dit qu'il a entendu ce passage, grand éloge. Il faut que je le trouve et vous l’envoie. On dit que Minto a été misérable, si misérable qu'on en était honteux pour lui.
Voilà donc le Pape proclamé. Et bien cette expédition tant critiquée et avec quelque raison, a un très beau dénouement. Et Oudinot doit être content. Tous les orateurs à la Chambre haute l'ont comblé de courage. Ce qui viendra après ? Dieu sait.
De Londres je n’ai vu qu’Ellice. Hier Madame Delmas est venue. J’ai été voir Mad. de Metternich. Elle est changée, ses cheveux sont même fort gris, elle est triste, quoique le mari soit très bien ; mais ils ne savent où aller. Ils finissent l’Angleterre, elle est trop chère. Bruxelles, mais c’est bien ennuyeux Je crois presque qu'ils se décident pour Paris au mois d'octobre. Ils essaieront au moins pendant quelques mois. J'ai été le soir chez Beauvale, avec mon Ellice. J’ai joué un peu de piano, et puis un peu Whist. A 10 heures dans mon lit. Voilà ce triste dimanche, sorte d’anticipation du tombeau. Dieu que cela est triste aujourd’hui. Il y a huit jours je vous attendais ! Ah que de bons moments finis ! Je me fais une grande pitié car je suis bien à plaindre.
J'écris aujourd’hui à Albrecht pour quelques arrangements, pas grand chose. Je vous en prie ne vous promener pas seul dans vos bois. J’ai mille terreurs pour vous. Je vous envoie cette lettre aujourd’hui. Vous me direz si elle vous arrive avant celle de Lundi ou en même temps. Dans ce dernier cas je ne ferais qu’une enveloppe pour les deux jours, à l’avenir. Car je vous promets bien une lettre tous les jours. Adieu. Adieu. Toujours ce fauteuil devant moi et vide. Comme c’est plus triste de rester que de partir. Adieu. Adieu mille fois et tendrement adieu.
5 heures dimanche. Flahaut sort de chez moi dans ce moment. Il me dit qu’à Carlton Gardens on est triomphant ; il y avait soirée hier après le dîner pour M. Drouin de Lhuys. Triomphe complet. Lord Palmerston s’était fait interpeller hier à le Chambre des Communes. Il a parlé de tout, de ses vœux pour les Hongrois ! De ses adversaires personnels, il a apellé Lord Aberdeen that antiquated imbecility. Cela vaut les gros mots de Mme de Metternich. J’ajoute ces sottises, pour avoir le prétexte de vous dire encore adieu.
Richmond, Dimanche 20 août 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
Je crois vraiment que j'ai fait une bêtise en envoyant à l’Impératrice votre lettre du 16. Ce que vous dites d’elle est charmant, mais vous mettez les révolutionnaires et les autocrates sur un même plan, vous parlez de timidité, d’excuses. Comment n’ai je pas été frappée de la pensée que cela ne devait pas être envoyé ! Tout cela m’est revenu depuis la lettre partie. Si l’Empereur est tout-à-fait heureux d’esprits, il trouvera que vous avez raison. Mais comme avant tout il a beaucoup d'orgueil et il est possible que cela ne fasse pas fortune du tout. Il faut songer à réparer & voici ce que je vous propose. Ecrivez très naturellement dans une lettre, où vous me parleriez de l’attitude des grands cabinets, deux mots sur le nôtre. Dites ce qui est vrai, que quand on est si grand on a quelque mérite à être si sage, si modéré. Enfin vous savez bien ce que vous pourriez dire qui serait dans la vérité & qui ferait plaisir. Je vous prie faites cela tout de suite afin que je l'aie ici au plus tard lundi, car j'ai ce soir là une occasion.
J'ai été hier soir chez Lord John, j’y ai trouvé M. de Beaumont. Lord Palmerston, qui était là aussi me l’a présenté. Je l’ai trouvé comme on me l’avait dit. Sa conversation m’a paru un peu lourde. Il dit les choses longuement. Il ne me fait pas l’effet d’un homme de beaucoup d'esprit, il est un peu naïf. Je lui ai fait un accueil poli. Sans empressement. Lui avait l’air charmé de causer. Le dialogue a duré plus d’une demi-heure. Moi en interrogations. Difficultés immenses. L'édifice fragile. Cavaignac très républicain. " Lamoricière républicain comme moi. " ! - Je vais donc supposer, Monsieur que vous ne l’êtes pas beaucoup ? Il a éludé en disant qu’avant tout & pour le moment il fallait soutenir sincèrement ce qui donnait de l’ordre.
Eloge encore de Lamoricière. Si on s’avise de bouger, il mitraillera tout, on veut en finir avec les tapages de la rue. Il croit beaucoup à cela tout de suite. Très pacifique, charmé des dispositions qu'il rencontre ici, fâché qu’on ait si brusquement renvoyé Tallenay. Il s'en est expliqué avec Cavaignac qui lui a dit qu'on ferait des contes absurdes sur une rencontre avec vous. D’abord qu'elle n’était pas vraie, & puis le fût-elle, Tallenay n’aurait fait que son devoir en vous montrant des égards. Lui Beaumont si le hasard le met sur votre chemin, ira non seulement à vous, mais vous vous tendrez la main si vous voulez la prendre, quoiqu’il ait été toujours votre adversaire politique. Tallenay aura Francfort. Je lui ai demandé des nouvelles [?]. Je l’ai vu à l'Assemblée. Voilà tout ce qu’il m'en a dit, & puis, que Thiers était particulièrement décidé, exécré, par les factions et les partis que certainement on en voulait à sa vie. Que celle de Cavaignac était sans cesse menacée. Il est retourné au passé pour déplorer, pleurer, l’aveuglement respectif, dit-il, eux, avoir ignoré qu'ils faisaient les affaires de la république, vous que le mal avait de si profondes racines. Je crois vous avoir dit tout Beaumont au total il n’a pas l'air d'un mauvais homme, au contraire. Et on aurait pu moins bien choisir.
Il y avait là Minto, que, je n'avais jamais vu. Bien pressé de causer avec moi de me raconter l’Italie comment il n’avait cessé d'y prêcher le bon accord des peuples avec les Princes disant beaucoup de mal du roi de Naples, un menteur. Je n’ai pas trouvé la mine des trois ministres très radieuse. La session ira jusqu'à la première dizaine de septembre. Montebello a eu hier une lettre de Paris de vendredi, dans laquelle on lui dit que le télégraphe venait d'annoncer une insurrection à Nîmes & à Montpellier aux cris de Henry V. Ce serait trop tôt.
C’est ennuyeux de penser que tout ce que je vous écris là ne peut partir que demain soir.
Lundi 21, midi
Bulwer et G. Greville sont venus me voir hier matin. Le premier ne m'a rien dit de bien nouveau il n’a vu littéralement personne à Paris que Normanby un moment, qui lui a dit beaucoup de mal de Lamartine maintenant après lui en avoir dit le plus grand bien au mois de Mai. Rien sur Paris. Seulement une observation : c'est que le peuple est poli, respectueux, dans les rien pour tout ce qui est au-dessus de lui, & que le bourgeois s'empresse de donner les titres ne parlant aux personnes qui en ont. Ainsi on n’avait jamais appelé Guiche autrement que Monsieur. Maintenant Monsieur le duc. Les classes se dessinent & y ont goût. Serait-il possible que le goût de l’égalité passât en France ? Cela me paraitrait la plus grande des révolutions. On parle beaucoup d’intrigues légitimistes. On craint qu’ils n’agissent trop tôt. Bulwer d'assez mauvaise humeur. Il voudrait Rome. Je lui ai ri au nez [?] mais enfin il me semble évident que si on ne lui donne pas quelque chose et du bon, il fera du mischief contre ceux qui lui refusent. Greville pas grand chose, d’ailleurs nous n'étions pas seuls. Il y avait Montebello qui est charmant mais qui ne remarque pas qu'on causerait plus à son aise sans lui. Comme le tact est une chose rare ! J'ai été à Holland house. Toute sortie de monde. Syracuse, Petrullo. Les Flahaut. Les Jersey. Dumon. Aubland. Beaucoup d’autres. On ne parle que d’Italie. De la médiation. Quel bon article dans la spectateur de Londres de Samedi ! Syracuse prétend que l’expédition est partie de Naples. Reste à voir si les Anglais se seront opposés au débarquement en Sicile. On dit que oui indubitablement Flahaut croit à propos de la médiation que Palmerston n’aura pas songé à prévoir le cas où l’Autriche se refuse rait à ce qu'on va lui demander. D’abord personne ne sait ce qu’on va lui demander. Et puis com ment s'engager sans être d’accord France & Angleterre sur ce qu'on fera au cas de refus ? Cela me paraitrait par trop étourdi. Tout le monde attend un événement à Paris, personne ne croit à du trop gros dans la rue, mais l'Assemblée qu'est-ce qui s’y passera ?
Morny est revenu, il ne dit rien que ce que dit tout le monde. L’Empereur a été reçu avec le plus vif enthousiasme à Vienne. Je répète 40 fois 50 fois par jour, pourquoi n’êtes-vous pas là pour causer de tout. Il y a tant et tant ! On parle de Beaumont. On trouve qu'il manque de mesure, & qu’il est de mauvais goût de montrer du dédain pour la République. Du reste ses manières ne déplaisent pas. Il a fort l’envie d'être poli.
2 heures. Merci de la bonne nouvelle. Le 2 ou 3 Septembre ! Comme je vais attendre cela, & compter les jours, les heures ! Voici une lettre intéressante renvoyez-la moi, je vous prie. Car je n’ai fait que la parcourir. Brignoles proteste officiellement contre l’armistice. Qu’est-ce que cela veut dire ? Le temps va de mal en pire. Aujourd’hui effroyable tempête & des torrents de plus. Hier un froid de Sibérie. Quel climat ! Adieu. Adieu. Je ne sais si je vous ai tout dit. Probablement non. Car il y a trop. Mais pour finir merci, merci de votre retour, n’allez pas changer ! Adieu, adieu.
Richmond, Dimanche 16 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
J'ai oublié de vous dire que Lord John parle beaucoup & fort mal de Radoviz. Il parait que c'est l'homme puissant au jourd’hui. Collaredo qui était chez moi hier le défend en disant qu'il fait son devoir de prussien, et qu’à ce point de vue sa conduite est habile et fera aboutir. Personne ne se fait une idée exacte de ce qui ressortira de ce travail en Allemagne, mais évidemment on s’arrange. Les deux grandes puissances s'entendront et la Prusse aura la part d’influence prépondérante qui lui revient. Je crois à deux portions nord & midi unies pas un lien fédéral. Le grand duc Michel était à l’agonie il y a huit jours. Le comte Nesselrode me l'écrit. Son désespoir pour sa femme, & le désespoir de l'Empereur pour son frère sont extrêmes. Cela jette un voile bien lugubre sur ce que devrait être les jours de Varsovie. L'Empereur ne quitte pas le lit de son frère.
Lundi 17. Sept Le journal m'annonce la mort du grand duc je suis sûre que sa femme a trouvé le moyen de se conduire très sottement à cette occasion. C'est une femme de beaucoup d’esprit avec pas l'ombre de tact et une absence de cœur complète. Lord John est malade, mais je le vois. Hier il me faisait l’éloge de Lord Aberdeen. Beaucoup pour moi. Développant tout son mérite politique, grandes vues. Vues générales. Homme plein de sens, de tenue & & & Vous entendez cela. Il approuvait seulement, dit-il, une bévue, le mariage espagnol. Comment bévue ? Mais s’il était resté le mariage ne se faisait pas. Et alors, les preuves. Il a tout écouté sans contester. ces conversations m’amusent & je crois lui aussi. Mais je pense que nous ne faisons pas grande impression l'un sur l’autre. La vieille princesse [Crasalcoviz] est partie ce matin, elle passe une semaine à Londres et puis Paris. Je regrette de voir disparaître une pièce d'une si petite réunion. A propos hier Lord John me faisait un grand éloge du Duc de Broglie, décidemment il l’aime, outre qu'il le respecte.
1 heure. Voici vos deux lettres de Broglie. Merci merci, & adieu bien vite, car lady Allice est là qui me prend mon temps ; elle part for good. Adieu. adieu.
Richmond, Dimanche 13 août 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
J'écris quoique ma lettre ne parte que demain. J’ai vu lord John hier. Ses nouvelles étaient, que le Roi de Sardaigne allait abdiquer : c'était le bruit de Turin le 7. Il a couru de vrais dangers à Milan. On voulait le brûler vif ou le massacrer. C’est par miracle & par ruse qu'il a échappé. On a tiré plusieurs fois sur le duc de Gènes. Lord John me semble plutôt applaudir à Radetsky que regretter ses succès. Il convient que la médiation est venue tard, puisque les Autrichiens sont rentrés chez eux il a l’air de trouver qui cela finit cette partie de l’affaire. L’archiduc Jean et Wessemberg ont dit que l’Autriche s'en tenait à ses premières offres l’Adige. Mais cela le disait avant les véritables succès. Il est douteux que cela lui suffise maintenant ; de plus Radetzky pourrait bien faire comme le général Wrangel, l’indépendant. John s’inquiète de ce que les Autrichiens sont entrés dans le Bolonais, cela, dit-il, peut compliquer de nouveau l’affaire. Quant au Piémont il se croit sur qu'ils n’y entreront pas. Le duc de Gènes n’a encore ni refusé ni accepté la Sicile. Gustave de Beaumont sera reçu par la reine Mardi à Londres. Il est Ministre. Normanby aura des lettres d’ambassadeurs spécial. Beaumont plait assez à lord John. Bunden revient ici. [?] s’en alla comme il était venu, ministre de Prusse. Le Manifeste du Prince de Linange est incroyable. Lord John n’en revient pas. Non plus que de l'incroyable confusion où se trouve toute cette Allemagne. Je ne suis pas de votre avis, je crois moi que l’Allemagne croule aussi, je veux dire l'unité. Vous voyez que personne n'en veut. C'est une fantasmagorie. Ici on y est plus opposé qu'à quoi que ce soit. Vous trouverez le Prince de Linange dans le Times d’hier. Saint-Aulaire m'écrit que Barante va publier un écrit qu'il a fait sur les circonstances actuelles. Je suis étonnée. Broglie est retenu dans son château par un gros accès de goutte. Albert a publié dans la Revue des deux mondes un article sur la diplomatie de la république. L'élection de Molé à Bordeaux est certaine. Voilà Saint Aulaire.
Richmond, Dimanche 10 juin 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Voici un mot de Metternich. Vous ne m'avez pas envoyé la revue, je n'ai absolument rien à lire, & ceci m’aurait aider à traverser un peu mieux le Dimanche. J’étais prié hier au soir chez Lord John, mais arrivée là à 9 1/2. J’ai attendu une demi-heure. On ne sortait pas de table, je les ai planté là, je n’ai donc vu personne, & je n'ai rien à vous raconter, sinon que je n'ai pas dormi cette nuit, & que j’ai fait mille plans dont pas un agréable ; c’est qu’il n’y a plus moyen pour moi de rien trouver, de rien rêver, qui me convienne, ou qui soit convenable. Triste destinée ! Je crois que le choléra dispensera des explications à l’Assemblée. Ils auront peur d’être pris de la maladie, on ne siègera pas. 3 heures. J’ai vu lord John un moment. Il ne fait pas l’éloge de Bugeaud, et dit sur lui à peu près ce que Piscatory m'écrit . Il affirme. que le gouvernement français nie qu’on soit convenu de quoi que ce soit à [Gach] Il déplore beaucoup l'attaque sur Rome, et il dit après que fera-t-on ni le Pape, ni les Romains ne veulent rien devoir aux Français. Réflexions générales sur ce qui se passe dans le monde, la faute c’est qu'on ne parvient pas à l’entendre sur aucune question. Voilà à peu près. Il fait aussi froid ici qu'à Pétersbourg. Adieu. Adieu.
Richmond, Dimanche 8 juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Le 8 juillet 9 1/2
J’ai passé une nuit blanche, je n’ai pas la force d’aller à Londres. Je vous en préviens bien vite. Pouvez-vous venir je vous ramènerai jusqu’à Putney plus tard. Venez le plus tôt que vous pourrez car je crains le monde le dimanche. Peut être dînerez- vous ici ? Adieu. Un mot de réponse.
Mots-clés : Relation François-Dorothée, Santé (Dorothée)
Richmond, Dimanche 7 octobre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Metternich ne peut pas croire que cela devienne la guerre. Il croit que la Turquie aura cédé moi, j’ai peur que non, et comme je ne puis concevoir que l'Empereur se rétracte s’il est vrai qu'il a dit, extradition ou guerre, il y aura la guerre. L’incertitude durera encore près de 3 semaines de Pétersbourg doit venir tout. Je n’ai pas vu encore John Russell, il n’est revenu d' Osborne que cette nuit. Je le verrai aujourd’hui. Sa femme est venue chez-moi, très vive. Le Globe est d'une insolence sans égale. Il appelle l'Empereur insane. je ne me fais au fond pas une idée bien claire de toute cette affaire. On la fait bien grosse ici. L’est-elle vraiment autant ? Tout est énigme. D'un côté Sturnier et Titoff agissent comme un seul homme. D’un autre côté comment. admettre que l’Autriche s'associe à nous pour aboutir peut être à la destruction de l'Empire Ottoman ? A Vienne personne n’est inquiet, on ne parle pas même de l'incident. Les l’étourderie ave laquelle on a engagé l’affaire de Rome c’est Toqueville qui rit. Les Palmerston restent à [?] chez L. Baauvale. On m'écit en confidence qu’ils ne peuvent pas rentrer chez eux. Ils seraient pour suivis, saisis pour dettes. Quelle situation ! Le 8 Longue conversation avec Lord John. Toute l’histoire telle que vous la connaissez. La porte ne refuse ni n'accorde. Elle attend les suites de l’envoi de Fuat Effendi. (mais lui permettra-t-on de passer la frontière ). Strattford Canning se vante de n’avoir pas voulu voir nos ministres, il regarde cela comme son devoir. Plaisant médiateur, et il appelle cela faire son devoir. Lord John est convenu que c’était singulier. Peut être ancienne rancune Et vous acceptez les conséquence de cette rancune ? Il a ri. La dépêche pour [Pétersbourg] n'est pas encore partie. Elle a été revue par tout le cabinet. Aucun ordre n’a encore été donné a L'amiral Parker. Mais à propos. On ordonne à Parker d’aller s’emparer de 2 petites îles voisines de 7 îles, en possession du Gouvernement grec. Mais on croit que le gouvernement n’a pas le droit de les posséder. On va donc les lui prendre. C’est impayable. fonds à Paris et à Londres ne se sont guère émus. Et cependant le langage ici dans tous les partis, dans tous les journaux est aussi menaçant que possible. Je suis curieuse de la conversation de Lord John. Voici un bout de lettre de Beauvale qui vous regarde. Il a bien de l’esprit. J'ai eu hier à dîner Lady Allice qui est venue passer quelques jours avec moi. Mad. de Caraman, lord Chelsea & Bulwer. Je n’avais pas vu celui-ci depuis 4 mois, il est près de son départ pour l'Amérique, pas très pressé pour son compte. Il revient de Paris, il a beaucoup causé avec M. de Toqueville. Il me le donne pour un homme de beaucoup d’esprit. Il rit de l’étourderie ave laquelle on a engagé l’affaire de Rome. C’est Toqueville qui rit. Les Palmerston restent à [?] chez L. Baauvale. On m'écit en confidence qu’ils ne peuvent pas rentrer chez eux. Ils seraient pour suivis, saisis pour dettes. Quelle situation ! Le 8 Longue conversation avec Lord John. Toute l’histoire telle que vous la connaissez. La porte ne refuse ni n'accorde. Elle attend les suites de l’envoi de Fuat Effendi. (mais lui pemettra-t-on de passer la frontière ). Strattford Canning se vante de n’avoir pas voulu voir nos ministres, il regarde cela comme son devoir. Plaisant médiateur, et il appelle cela faire son devoir. Lord John est convenu que c’était singulier. Peut être ancienne rancune Et vous acceptez les conséquence de cette rancune ? Il a ri. La dépêche pour [Pétersbourg] n'est pas encore partie. Elle a été revue par tout le cabinet. Aucun ordre n’a encore été donné à l'amiral Parker. Mais à propos. On ordonne à Parker d’aller s’emparer de 2 petites îles voisines de 7 îles, en possession du Gouvernement grec. Mais on croit que le gouvernement n’a pas le droit de les posséder. On va donc les lui prendre. C’est impayable. Mes pauvres yeux m'empêchent de vous donner le [?] de cette curieuse conversation. Au total j’ai trouvé l'humeur plus douce qu’elle n'était dans le billet, des plaisanteries sur Palmerston, mêlé de défiance. De l'espoir que l’affaire s'arrangera. Un peu de peur cependant. Enfin mélange. Pas le langage d'un premier ministre. Voici votre lettre de Vendredi. Celle de samedi viendra plus tard. Vous voyez que vous faites bien d'écrire tous les jours. Adieu. Adieu.
Nous n'avons par dit livrez-les ou la guerre. Au contraire les termes sont très convenables. [?]
Mots-clés : Circulation épistolaire, Conditions matérielles de la correspondance, Conversation, Diplomatie (Angleterre), Diplomatie (Russie), Femme (politique), Guerre, Politique (Autriche), Politique (Grèce), Politique (Internationale), Politique (Russie), Politique (Turquie), Portrait, Réception (Guizot), Réseau social et politique, Santé (Dorothée)
Richmond, Dimanche 5 août 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Mauvais dimanche, qui ne m’apporte rien, c’est si triste. Les Duchâtel sont encore venus me dire Adieu hier. Je me suis presque attendrie en leur disant Adieu. C'est mon dernier lien avec la France dans ce pays-ci et c'est de vos amis. Si nous nous retrouvons à Paris, je me propose bien de continuer cette connaissance. Ils partent ce soir. Samedi 11 ils seront à Paris. Les Paul de Ségur étaient encore venues les voir de Dieppe. Duchâtel avait été à Claremont avant hier. Grande préoccupation là du séjour de la duchesse de Bordeaux à Ems. Evidemment préparatifs de lignée. Cela les trouble beaucoup. La Duchesse d'Orléans veut toujours partir le 15. M. Fould est revenu me voir aussi et m’a gâté ma dernière demi-heure avec Duchâtel. Je ne le trouve pas plus beau à la seconde visite qu'à la première, mais dans ces temps de révolution j'essaie d’être polie. Le soir Beauvale & les Delmas, habitude qui durera tout le mois d'août encore. Après quoi tout le monde part. Je dîne aujourd’hui chez Beauvale avec les Palmerston.
4 heures
J'ai été faire mon luncheon chez La Duchese de Glocester. Bonne. vieille princesse, bien contente de me voir. De là j’ai été faire visite à lady John Russell. Je les trouve toujours seuls, et ayant l’air content de me voir. Nous n’avons guère parlé que de la France. Il désire l’Empire. Il désire quelque chose qui ait l’air de durer. Il dit que Changarmier n’attend qu'un signe & l’armée proclame l’Empereur. Mais ce signe, on ne le donne pas. Il me dit aussi que Molé rêve à la présidence pour lui-même. Cela, je ne l’avais pas encore entendu dire ! Lundi 6 août, onze heures Le dîner chez Beauvale était fort agréable. Lord Palmerston très naturel & amical. Sa femme ni l’un ni l’autre tout-à-fait, quoique elle est l'intention de le paraitre. J’ai fait quelques questions. La paix avec le Piémont n’est pas douteuse quoique pas faite encore. En Hongrie Paskévith a essuyé quelques revers. Georges est meilleur tacticien que lui. En le nommant L. Palmerston disait Gorgy au lieu de Georgy, ce qui m'a fait lui demander qui lui avait enseigné cette prononciation, il m’a répondu. Les Hongrois qui sont ici. Sur la France vif désir d'y voir une forme de gouvernement plus solide. " La constitution est tout ce qu'il y a de plus absurde, c’est comme fait exprès pour rendre tout impossible. On ne peut pas aller comme cela. Il ne dépend que de la volonté de Louis Bonaparte de changer cette situation. Qu'il dise un mot, Changarnier se charge de reste. Cela pouvait se faire le lendemain de la visite à Amiens. Cela peut se faire tous les jours. Une fois fait, la France sera trop contente. "
Enfin, cela est fort désiré ici et moi j'en suis. Avant de venir chez Beauvale les Palmerston avaient passé à Richmond Green. Ils se sont montrés chez Metternich avec Disraeli. Sans doute mutuelle surprise. A propos, Lord Palmerston m’a dit que Disraeli s’est vanté à elle d’avoir été très heureux & glorieux du succès de son mari, parce qu'il avait prédit à ses amis que des attaques sur lui ne pouvaient aboutir qu'à un triomphe. 100 membres de la Chambre des communes ont souscrit pour un portrait de Lord Palmerston qui sera offert à sa femme ! Et voilà ! J'attends la poste avec impatience. A propos serait-il question de vous nommer pour le Conseil général ? Qu'est-ce que cela voudrait dire ? J’ai bien envie que vous n'en soyez pas. Je n’aime pas vous savoir au milieu de ces mauvaises populations. Adieu. Adieu. Dearest Adieu.
Richmond, Dimanche 2 Septembre 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Richmond, dimanche 2 septembre 1849
Voilà les susceptibilités impériales apostoliques qui s'éveillent. C'est non seulement la phrase malheureuse de Paskévitz, « La Hongrie est aux pieds de Votre Majesté » mais de plus un dîner donné par le général Rüdiger à Görgey et les autres officiers supérieurs de l'armée hongroise. Ils étaient souriants à table, hongrois & russes, lorsqu'arrive un officier d'ordonnance de Haynau porteur d'une dépêche pour Rüdiger. Celui-ci l'invite à s'asseoir, il refuse en apercevant les uniformes hongrois. Rüdiger réplique que là où dîne un général russe, un lieutenant autrichien peut bien dîner. Le lieutenant persiste à ne pas s'asseoir auprès des rebelles, et sort.
Cela fait beaucoup de bruit à Vienne. On dit que Rüdiger a été réprimandé pour avoir été trop courtois. Görgey et tout son monde a été remis aux autorités autrichiennes. Ils sont tous enfermés dans des forteresses & seront jugés. Moi je d[?] Gorgey un peu. Après tout, c'est un vaillant homme, et je ne crois pas que l'Empereur puisse le laisser sacrifier. Beauvale me mande que L'Empereur prêche la clémence, qu'il est sur ce point en correspondance directe avec le jeune Empereur, & qu'il conseille de retirer la constitution de Stadion. Il y a bien à faire encore là !
Comme les radicaux vont faire mousser les petites rixes d'amour propre ! Palmerston sera charmé. Je sais cependant qu'avant-hier, à dîner chez Beauvale il était d'une humeur de dogue. Je ne sais pourquoi.
J'ai vu hier Metternich, il travaille encore à vous répondre. Ah, qu'il m'a ennuyée hier ! Et après bien de ravaudage, il me dit : « Il y a longtemps que je vis, et bien, je me souviens de chaque mot que j'ai dit, ou que j'ai écrit, depuis que je parle & que j'écris. » Ah bon Dieu !
Lundi le 3 septembre.
Voilà votre pauvre hôtesse morte. Cela vous aura fait de la peine. Elle était bien ridicule, mais c'est égal. Je n'ai vu hier que M. de Berg à Londres. (1er secrétaire de notre mission) Il est parfaitement bête. Je n'ai rien pu tirer de lui, sinon qu'il se croit un grand homme parce que son frère est aide de camp de l'Empereur. Je le connais, celui-là a de l'esprit.
J'ai vu la duchesse de Gloucester et toutes mes voisines chez moi le matin. Le soir chez Delmas. C'est de l'exercice de musique. Ce pauvre aveugle n'a peu ce plaisir, & je lui fais de grands plaisirs. Je crois la nouvelle de la mort du G.D Michel fausse.
1.heure. Voici votre lettre. Longue, intéressante. Mauvaise sur le choléra de Paris. Mais il est bien plus fort à Londres. M. de Mussy que j'ai vu hier va à Paris à la fin de ce mois. Ce serait bien là ce qui me conviendrait. Nous verrons.
Montebello est tout aussi vif que Dalmatie sur la nécessité d'une modification. Son Ministère, il l'est extrêmement aussi pour une autre forme de gouvernement, & se promet de faire du tapage en octobre. Nous verrons.
Mad. de Nesselrode avait deux ou 3 ans de moins que moi.
Adieu, adieu, la porte me presse. Adieu.
Richmond, Dimanche 1er octobre 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
6 heures
Malade cette nuit. Des crampes d’estomac, grande frayeur du Choléra. Le Médecin ce matin, qui me rassure, mais qui me défend de bouger & de manger. Me voilà donc dans ma chambre par un très beau temps.
Bulwer, C. Greville, Lord Holland. Le précieux. Sans nouvelles sur son compte. Attendant Paris ou Rome épousant quand il aura un poste, & disposé à convenir des arrangements que propose Lady C. Parlant très mal de la conduite de l'Angleterre dans toute l'Europe. C. Greville en grande critique aussi de Lord Palmerston, pas de nouvelle, ne sachant rien de Holland house. Enfin Lord Holland un peu embarrassé, disant que sa femme est malade d’un rhume de poitrine, qu'il ne sait pas s'il part, s'il ne part pas. Une grande incertitude ; tout son langage de nature à confirmer les soupçons autant qu'à les détruire. Je reste flottante. Je ne sais pas. Est-ce des embarras de fortune ? Impossible de rien démêler. En grande critique de lord Palmerston. Selon ces trois messieurs la Sicile est-ce qui lui fait le plus de tort. Labouchère est allé chez C. Greville pour gémir & se plaindre et interroger, car il ne comprend rien, et il trouve très mal.
La Reine a couru des dangers vendredi, une tempête effroyable. Elle a été jetée sur la côté. Elle revient par le chemin de fer. Voilà toutes mes nouvelles. Adieu. Je prendrai un bouillon, voilà tout. Adieu Adieu.
Le médecin dit que ce ne sera rien du tout. Je l'espère.
Richmond, Dimanche 1er octobre 1848, Dorothée de Lieven à François Guizot
9 heures Dimanche. 1er oct. 1848
Richmond, Dimanche 1er juillet 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Le voilà commencé ce vilain mois dans lequel doit commencer notre séparation. Ah que ce sera dur comme hier encore était charmant. Comment nous passer de cela ? Marion et Aggy sont revenues. Ellice a reçu une nouvelle lettre de Thiers hier matin. Il sera ici le 20 juillet avec tout son ménage. Le 10 août il veut être de retour à Paris. Il écrit en bonne humeur & bonne espérance. Il dit que la majorité est excellente. Ferme, décidée. Plus de batailles à craindre dans les rues. J’ai été chez Metternich hier soir. Il était bien, et de bonne humeur ; l’accident & l'inquiétude étaient passés.
4 heures
Je rentre d'une longue promenade à Hampton court. J’ai voulu montrer au moins les jardins à mes petites. Le temps est charmant. Vous auriez aimé cette course. Qu’apprendrons-nous demain ? 6 heures. Voici les Duchatel. Il faut fermer ceci. Adieu. Adieu. Adieu.
Mots-clés : Eloignement, Politique (France), Relation François-Dorothée
Richmond, le 18 mai 1858, M. de Boismilon à François Guizot
Mots-clés : Décès, Famille royale (France), France (1852-1870, Second Empire)
Retteringham Park, le 28 décembre 1848, François Guizot à Louis Vitet
Récit de la journée du 2 décembre 1851 par M. L. Vitet
Mots-clés : France (1848-1852, 2e République)