Archives Marguerite Audoux

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Lettre de Hugues Lapaire à Marguerite Audoux

Auteur(s) : Lapaire, Hugues

Description
  • Natif de Sancoins, comme Marguerite Audoux, Hugues Lapaire (1869‑1967) a d'autres points communs avec la romancière : à cinq ans, il est orphelin de père et de mère, et doit aller habiter, avec sa sœur aveugle, chez les grands‑parents maternels à la « maison au perron » (titre d'une œuvre autobiographique), sise faubourg de Nevers (aujourd'hui rue Maurice‑Lucas), la même rue que celle où Marguerite Audoux vécut ses premières années. Rétif à l'institution scolaire, il claque la porte du lycée, mais s'inscrit néanmoins dans une boîte à bachot qui lui permet d'avoir son diplôme et de suivre en Sorbonne des études de lettres égayées par une vie estudiantine mouvementée. On retrouve le fervent régionaliste aussi bien chez l'écrivain que chez le journaliste, qui n'hésite d'ailleurs pas – et ses écrits sur Marguerite Audoux le prouvent – à instiller sa propre fantaisie dans la réalité des faits.

    Notons en effet qu'Hugues Lapaire est l'auteur d'un article paru dans Le Berrichon de Paris du 16 septembre 1912. Ces lignes seront réutilisées, pour la partie consacrée à la romancière, dans les Portraits berrichons précités. La page 220 laisse apparaître les deux mêmes erreurs que dans l'article : Francis Jourdain devient Frantz Jourdain (le père du premier), et, à propos de la fin de l'épisode solognot, l'éviction de la ferme de Berrué (à cause de l'idylle entre Henry Dejoulx et la bergère) est ainsi transformée : « Elle est mince et très délicate, aussi les braves gens chez qui elle se trouve en condition ne peuvent la garder. Elle retourne à l'Hôpital, où elle reste jusqu'à dix‑huit ans, époque où elle vient à Paris. » Dans les pages suivantes, d'autres évocations trahissent la veine poétique du journaliste qui relate les affres de la création allant jusqu'à la tentation du suicide (p. 221), ou encore (p. 225) un dialogue peu vraisemblable, dans le fond et la forme, avec André Gide :
    « Le maharajah de la Nouvelle Revue française a daigné gravir ses six étages ! ce personnage lui parut gonflé de prétention. Il lui dit sur un ton assez désagréable :
    ‑ Vous avez de la chance que l'on vous fasse passer par le grand escalier !
    ‑ Vous eussiez préféré, monsieur, lui répondit‑elle, que je prisse l'escalier de service ? Je ne suis pas assez reluisante à vos yeux, sans doute, pour me permettre le même chemin que vous ? Si cela vous offusque, tant pis ! Toute fille du peuple que je suis, je prends le grand escalier ! »


  • Critique laudative de L'Atelier de Marie-Claire
Texte

Paris 7 juin [19]20

Chère amie,

La lecture de votre beau livre[1] a, si je puis dire, continué mon admiration.
L'observation rigoureuse de « petits riens » mettent [sic] une intensité incroyable de vie et de couleur dans votre récit. Vos images sont autant de trouvailles charmantes et portent bien la marque de Marie‑Claire. Ah ! la belle réplique à ceux qui vous accusaient de n'avoir pas écrit le premier livre[2] !
Dépouillé de toute littérature, ce roman est bien la vie dans sa criante vérité.
Encore toutes mes félicitations, chère amie, et l'assurance de ma bonne affection.

Hugues Lapaire

64, rue Claude Bernard

[1] L'Atelier de Marie‑Claire
[2] Alain‑Fournier écrit en effet à Péguy : « [U]ne des dames de la Vie heureuse répand le bruit imbécile que ce n'est pas Marguerite Audoux qui a fait son livre. Et les dix‑neuf autres dindes en sont tout effarouchées. » (Alain‑Fournier – Charles Péguy, Correspondance 1910‑1914, Fayard, 1973, p. 30).

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Notice créée par Bernard-Marie Garreau Notice créée le 17/12/2017 Dernière modification le 03/05/2024