Guizot épistolier

François Guizot épistolier :
Les correspondances académiques, politiques et diplomatiques d’un acteur du XIXe siècle


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Collection : 1849 ( 1er janvier - 18 juillet) : De la Démocratie en France, Guizot reprend la parole (1848-1849 : L'exil en Angleterre)

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Ketteringham. Park, Lundi 1 janvier 1849

Vous me manquez aujourd’hui plus encore que de coutume. Un nouvel an ne devrait pas pouvoir commencer sans vous. J'ai prié pour vous ce matin, pour nous, de tout mon cœur. De tout mon cœur, c’est la devise de mon hôte. Elle me plait. Toute cette famille me plait. Il y a du sang français, solidifié et point glacé par le sang anglais. Je suis sûr que je leur plais aussi. Beaucoup même. On se plait aussi, autour de moi. Mais la shyness est grande. Je suis bien aise de laisser mes enfants ici une semaine sans moi. Point de lettres de Londres ni par conséquent de Paris ce matin. J’enverrai chercher la poste à Wymondham à 5 heures celle qui sera partie de Londres aujourd’hui, à onze heures et demie. Je compte sur une lettre de vous. Je partirai demain à onze heures et demie. J’irai voir Duchâtel le soir après dîner. Voici un billet de lui que j'ai reçu hier. Pouvez- vous dicter à Marion un mot pour Lord et Lady Holland, afin d'avoir l'éclaircissement que le Roi désire ? Il a écrit par suite d'une lettre de vous où vous me parliez avec détails de la bonne grâce de Lord Holland dans son offre. Soyez tranquille sur la recommandation que me fait Duchâtel à la fin. J’y avais eu égard d'avance. Louis Bonaparte quelques mois plus tôt ou plus tard périra comme je le prévois depuis qu’il est question de lui, par l'impossibilité de se former un gouvernement et un parti de gouvernement sérieux. Pour tout le monde, sans exception, il n'est lui-même qu’un expédient. Cela paraîtra bientôt, et cela est mortel. Il faut être pris pour soi-même, et à titre définitif. Un grand pays peut être forcé, un jour, de se loger en hôtel garni. Il ne s'y établit pas. Les débuts du Cabinet Barrot sont pitoyables. Il n’aura que des débuts. Je crains qu’on n’arrive trop tôt à la dissolution de l'Assemblée actuelle. Je ne voudrais des élections que lorsque le parfum du nom Napoléon se sera dissipé dans le plein air. Flahaut triomphant ne m'étonne pas. Je lui trouvais depuis quelques mois, plus de bon sens que n'en comporte ce qu’il a d’esprit. Pourquoi pas lui ambassadeur à Londres. Mais Louis B. aimera mieux y laisser son cousin, qu’il ne peut garder à Paris sans danger. N'avez-vous aucune nouvelle de Pétersbourg ? Adieu. Adieu.
A après-demain. Votre dernière écriture est bien plus ferme. Ce n'est pas écrit sans voir. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Lundi 1er Janv.

8h du soir.

Je vous ai écrit ce matin moi-même. Le soir cela ne m’est pas possible. Mais je dicte deux mots parce que j’ai appris que la publication anglaise doit avoir lieu déjà le 5. Cela ne me parait guère convenable. Il me semble que vous pourriez attendre que votre écrit eût paru à Paris. Je viens de recevoir votre lettre d’hier. J’espère bien que vous ne vous laisserez pas enlever à votre repos. Je ne trouve pas le moment venu, pour aller affronter les intrigues. Laissez les autres barbotter dans leur gâchis. Il y a bien de la dignité à se tenir en dehors de tout cela et aucun moyen d’échapper à ces intrigues. Si vous vous présentez trop tôt. Ce sont des luttes qui ne vous vont pas. Mais nous causerons bien au long de tout cela et je me réjouis bien de mercredi. & & Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton lundi 1er janvier 1849, 11 heures

A vous ma première pensée, ma première parole. Voilà un bouquet qui m’arrive ce doit être de vous. Cela me touche & me plait. J’espère que c'est de vous & que personne d’autre ni s’avise de m'en m'en donner. Marion sans doute m'expliquera cela. Mes yeux vont mieux. Mais je les ménage extrêmement. Après-demain Quel plaisir. Voilà donc déjà un changement. dans le ministère. Je voudrais que Louis B. rendit la vie dure à tout le monde. S’il pouvait être déporté comme il se ferait honneur. Adieu, adieu. Il est de vous, merci, merci.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton le 2 janvier 1849
2 heures. Mardi

Je suis si heureuse en pensant à demain ! Cependant si vous aimez mieux rester un jour à Londres pour voir vos amis Duchatel & & Ne vous gênez pas, car selon votre lettre, la semaine est libre. Enfin faites comme cela vous arrange le mieux. Moi tout m’arrange, car enfin, vous viendrez, & je vous tiendrai. Je garde ici une lettre de Tansky curieuse comme détails de cour. Cela marche bien vite. Il y aura l’Empire. mais pour how long ? La mort de lord Auckland est un événement. Beauvale est mourant. Me yeux pas si bien qu'hier. Adieu. Adieu. A demain, adieu.
Aberdeen viendra certainement me voir cette semaine

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton, Mardi 2 Janv. 9 h du soir
Je vous ai écrit ce matin. Je réponds ce soir à votre lettre. Puisque vous voyez aujourd’hui Duchatel. Je vous attends bien surement demain. Lord Aberdeen sera ici vendredi. Il m'écrit de Drayton. Lord Beauvale est très mal.
Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton. Vendredi, 5 Janv. 1849

Je n’ai que le temps de vous dire que je suis arrivé. Je trouve en arrivant une foule de petites affaires pressées, toutes relatives à la publication de ma brochure. Elle paraîtra à Paris le mardi 9. Il faut qu'elle paraisse ici le même jour. Je n’ai pas une heure à perdre. Point d’accident. Peu froid. Pensant à vous. Achevez de guérir vos yeux. Je m’en suis allé bien malgré moi. Dites je vous prie à Lord Aberdeen combien je le regrette. Je compte que nous nous retrouverons à Brighton, non pas la semaine prochaine, mais dans la suivante. Rien dans mes lettres de Paris. J'extrairai demain le peu qu’il y a. On ne me parle que de mes affaires personnelles. Un seul fait est évident : tout le monde pense et dit que Louis Bonaparte n'est pas une solution. Ce n’est- pas encore ça. Adieu.. Adieu. A demain. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton vendredi le 5 Janv.

Je dicte parce que mes yeux me font bien mal ce soir Lord Aberdeen est là - bien en regret de vous avoir manqué, et tout en train de vous rencontrer ici les premiers jours de la semaine après la prochaine - fixez moi le jour pour que je le lui mande & Ellice est venu aussi. Lord John Russel n’adore pas Lord Palmerston. Tous les ministres pensent sur son compte ce que nous pensons. Il est possible que Normanby soit nommé à l'université. Mais il n’y a rien de décidé encore. Que dites-vous de l’amiral Luille ambassadeur ici ? Je crois me souvenir que Vous aviez bonne opinion de lui. Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton, samedi 6 Janv. 1849
Une heure

Je viens de passer ma matinée, avec Mrs Austin, et Mr. Murray à corriger des épreuves, à régler des détails de publication & Tout est long et difficile quand on veut que ce soit bien fait, et bien fait dans deux pays à la fois. Enfin, c’est fini. La brochure paraîtra décidement mardi prochain, à Londres et à Paris. Le Times a beaucoup insisté pour en avoir les prémices, et il en donnera un extrait lundi ou mardi. M. Murray s'en promet beaucoup de succès en Angleterre. Je n'ai vraiment rien de Paris. Pas le moindre fait et à peine quelques réflexions de Philippe de Ségur qui me promet sa voix pour le duc de Noailles à l'Académie. Génie ne me parle que de ma brochure. Il est évident que la crise ministérielle a un peu troublé tout le monde, ceux qui l’ont faite et ceux qui l’ont subie, et que personne, ne s’est soucié de pousser, quant à présent, la lutte plus loin. Il me semble même qu'on blâme Thiers de l'avoir commencée sitôt. J'ai vu ce matin un ancien député conservateur, M. de Marcillac, bon homme, sensé, et tranquille, qui n'a nulle envie que Louis Nap. dure mais qui trouve qu’on se presse trop de le faire tomber. Il m'a dit de plus, et ceci me chagrine que le maréchal Bugeaud avait été réellement fort malade et ne se remettait qu'à moitié. Il a un poumon en mauvais état. M. de Marcillac croit que les prochaines élections se feront fin de mars ou au commencement d’Avril, que beaucoup de conservateurs rentreront dans l’Assemblée et qu’elle sera beaucoup meilleure que celle-ci, mais que le parti républicain y sera encore fort, trop fort. Le parti n’est plus au pouvoir, et ne tardera pas à reprendre quelque faveur dans le bas de la société. Non comme république, mais comme opposition. Ségur est fort sombre. Sa lettre ne vaut pas la peine de vous être envoyée. Il y a plus de dissertation et d'Académie qu’il ne vous en faut. L’amiral Cécilla est un choix honnête. Il a du bon sens et du savoir-faire. Très étranger à la politique générale, il ne s'appliquera qu'à bien vivre avec Paris et avec Londres, et à les faire bien vivre ensemble. Il n’aura point d’idées et ne fera point d'affaires. On le regarde comme un excellent marin. Pourquoi vos yeux vous faisaient-ils mal hier soir, après une bonne nuit ? C'est l’approche de la neige. J’ai eu de l'humeur ce matin en la voyant. Je crois que Mardi de la semaine prochaine sera le jour qui me conviendra pour venir à Brighton. J’aimerais mieux lundi. Mais je ne suis pas sûr. Je vous l’écrirai positivement dans deux jours. Adieu. Adieu. Quel ennui de vous avoir quittée ! Mes amitiés à Marion. Voici un complet de M. Etienne Arago sur le nouveau ministère. L'assemblée est fort satisfaite Du ministère qu'on lui fait ; Elle n'avait qu'une buvette ; Elle a maintenant un Buffet.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton, Samedi 6. 2h.

Mes yeux ne me permettent vraiment pas. Mais vite deux mots pour ces deux choses ci. Narvaez demande la médiation de Léopold pour se raccommoder avec l'Angleterre. Il est fort à faire toutes les platitudes moins une seule. Jamais on ne permettra à Bulwer de remettre les pieds à Madrid même pour une heure et c'est précisément là ce qu'exige Palmerston. Palmerston est en querelle avec nous sur les Affaires d'Orient. Le voilà donc brouillé avec tout le monde.
Je veux dire adieu moi-même. Les médecins disent que cette petite reprise n'est rien. Adieu. Adieu. La Reine a [ ?] beaucoup d’éloignement de recevoir Napoléon B. c'est pour cela sans doute qu'on a nommé Luille.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton Dimanche 7 Janv 1849
9 heures

Voici du nouveau et du dessous de cartes. Nous avons été étonnés que les interpolations sur la retraite de M. de Malleville n’arrivassent pas. Les ministres et les patrons de Louis B. en ont été aussi étonnés que nous. Ils s’y attendaient. C'était de la gauche, des amis de Cavaignac, que l’attaque devait venir. Pourquoi point d’attaque ? Ils ont soupçonné quelque piège quelque intelligence entre la gauche de l’assemblée et le président de la République. Ils avaient raison. Les gens de la gauche, les républicains avaient fait dire au Président : « On se moque de vous ; on ne vous a ouvert la porte que pour vous jeter par la fenêtre. Les modérés ne veulent pas plus de vous que de nous. Ils veulent la Monarchie, le comte de Paris, Henri V. Venez à nous. Nous ne voulions pas de vous pour Président de la République. Mais nous voulons la République, et vous pour son président. puisque vous l'êtes. Avec nous vous aurez la majorité dans l'Assemblée, un cabinet qui sera vraiment à vous, non à des protestants ennemis, et de l'avenir." Le Président a écouté. Des pourparlers ont eu lieu. Rien n’était convenu mais tout était proposé. Le Général Cavaignac devait faire un discours d'adhésion au Président. Le rapprochement ainsi motivé et affiché, on se rapprochait en effet. Le Président gardait deux ou trois de ses ministres, ceux qu’il croit fidèles. Lacrosse à la marine, peut-être Drouyn de Lhuys aux Affaires Etrangères. Il renvoyait les autres, et prenait à leur place Dufaure, Vivien, Tourret, Billault. Le Gal Lamoricière rentrait à la guerre. Cavaignac remplaçait Bugeaud dans le commandement de l’armée des Alpes. Changarnier était réduit au com mandement de la garde nationale. Odilon Barrot se retirait dans la Vice Présidence de la République. L'alarme a été grande dans le camp modéré, parmi les patrons officiels de l'élection de Louis B, et de son Cabinet. Ils ont reconnu qu'avec les ministres actuels, le poste était mal gardé, et ne serait pas gardé longtemps. Ils se sont demandé s’ils ne devaient pas se résigner à prendre eux mêmes en main les affaires de la République et de son président. C'est l’avis du Mal Bugeaud. Il a insisté. M. Molé a douté. M. Thiers a rechigné. Les patrons en second, les journalistes du parti modéré qui ont poussé à l'élection de Louis B., se sont fâchés Véron et Emile Girardin sont allés trouver Thiers et lui ont déclaré que les choses ne pouvaient pas aller de le sorte que le nouveau gouvernement n’allait pas du tout qu’ils s'étaient, eux, engagés dans cette élection sur la parole à lui, comme chef du parti modéré que les chefs devaient conduire ; que, pour eux ils voulaient décidément savoir si c'était les chefs du parti modéré qui refusaient leur concours au Président, ou le Président qui ne voulait pas de leur concours; et qu'après s'être éclairés eux-mêmes à ce sujet, ils éclaireraient le public. Forte humeur et grand embarras de Thiers, Véron et Girardin ont annoncé qu'ils allaient faire la même démarche, auprès de M. Molé et du Mal Bugeaud. On en est là. Le Président entre deux selles, ses protecteurs au pied du mur, et les Républicains à l'assaut. On croit à un replâtrage, à quelque déclaration donnée, à quelque renfort apporté par les protecteurs au Président. On doute qu'ils prennent eux-mêmes la défense de la place. Mais il est clair que le Président ne se laissera pas mettre tout doucement à la porte et que les Républicains sont prêts à entrer pour le soutenir. On ne sortira pas de sitôt du gâchis, et tout le monde, protecteurs et protégés, s’y barbouillera, plus ou moins. Il paraît que tout en veillant à la sureté de la République, le général Cavaignac, est fort désabusé, sur son compte. Quelqu'un lui disait qu’il devait trouver la France bien ingrate ; il a répondu: « Non. On n’est pas ingrat, on me sait gré de ce que j’ai fait ; la France m’a tout, simplement déclaré qu’elle n’était pas républicaine.» A un autre, il a dit : « Je me suis trompé ; j'ai cru la France républicaine, ou disposée à le devenir ; elle ne l'est point. Louis Napoléon la croit Bonapartiste ; il se trompe comme moi ; elle ne l’est pas davantage. " Je vous envoie ceci pour le plaisir de Marion. Je suis bien aise que son héros ait du bon sens. J’aime le bon sens partout, même chez mes ennemis. J’ai passé hier ma soirée seul, au coin importante dans la législation réciproque de la France et de l'Angleterre, l'extradition réciproque des banqueroutiers frauduleux. " Vous ne savez peut-être pas que le fromage de Brie était une des grandes friandises de Lady Holland, et que M. de Talleyrand en ferait venir pour elle par le portefeuille, quand il voulait lui plaire Adieu. Adieu. Je ne fermerai ma lettre qu'à la fin de la matinée. J’irai à l' Athenaeum puis dîner chez Duchâtel. Adieu. G.

3 heures
Je sors pour faire deux visites. De là à l' Athenaeum. De la chez Duchâtel. Si j'apprends du nouveau, ce sera pour demain. En voilà assez pour aujourd’hui d'ailleurs, il n’y aura rien, aujourd’hui dimanche. Adieu. G. Une nouvelle lettre de Lady Jersey, insistant plus fort pour Middleton. J'élude toujours. Je n'ai ni le temps, ni le désir. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton le 7 janvier 2 heures

Pauvres yeux, mais il vous faut deux mots. Le roi ne tient pas sur votre compte un langage qui plaise à Lord Aberdeen. On rend justice à votre habileté votre droiture mais on se récrie sur votre impopularité. Le roi appuie sur cela beaucoup. Quand aux princes ils s’expriment très mal. Puisque le roi [?] comme cela à Lord Aberdeen il faut qu’il le dise bien plus à d’autres. Voici une lettre de Constantin. Le Constitutionnel nomme les visiteurs du jour de l'an. Que des députés. Ni Thiers ni Molé. Le premier a écrit son [?] tout, le second pas même cela.
8 h. du soir
Il faut que je dicte à cause le la lampe. Ma petite voisine au [?] douloureux a des nouvelles très fraîches de Paris. Pierre Bonaparte, et la Montagne commencent, à s'exercer quelqu’influence sur le président. Celui-ci tout-à-fait abandonné par Thiers, fort peu soutenu par Odilon Barrot qui ne le voit qu'aux heures de Conseil pourrait bien se laisser entrainer et donner déjà quelques indices de cela. Ainsi, à la réception du jour de l'an où il n'a presque parlé à personne. Il a fait un accueil très gracieux et très remarqué à M. Guinard chef de l’artillerie de la garde nationale République rouge tout- à-fait. Cet état de choses a commencé à donner de l’inquiétude - Thiers, Molé, Beaugrand, Changarnier Rémusat & se sont réunis et sont convenus qu’il fallait donner de l’appui au gouvernement sous peine de passer de nouveau à la lutte dans la rue et Rémusat a été député à Léon Faucher pour lui promettre sont ici sincères et actifs du parti modéré. On se dit à l'oreille que Bonaparte a l'habitude de boire. Voilà mes nouvelles d’aujourd’hui. Il parait qu'on est triste à la bourse à Paris Adieu, adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Lundi 8 Janvier 1849

Rien à vous dire du tout, beaucoup à attendre et de vous et des journaux. Mallak vous a-t-il rendu compte de sa conversation avec Thiers. Dites-moi, si c’est Lundi ou Mardi que vous viendrez afin que je fixe Lord Aberdeen. 8 h. du soir. Pas possible à la lumière. - Quelle intéressante lettre que celle que vous venez de m’écrire. La discussion de Samedi est des plus curieuses aussi. - Eh bien parmi tous les personnages celui qui me parait le plus à son aise c’est Louis Bonaparte. On l'a mis là, il faut bien qu'on le soutienne. J'ai assez idée que Thiers & Molé s’y mettront. Il me semble que parmi les ministres vous ne devez de procédés qu'à L. Lansdown. Celui-là a été vraiment poli pour vous. - Edition française absolument. Je ne comprendrais pas la convenance de l'envoyer à Lord Palmerston, et comme il pourrait y avoir impolitesse flagrante, à l’envoyer à Lord John. J' [?] pour Mais, il faut que vous vous borniez absolument si lord Lansdowne en fait de ministre. Quant aux Princes, en vérité vous en êtes meilleure juge que moi. Je ne leur veux pas beaucoup de bien depuis ce que je vous ai mandé hier L'adresse de Lady Alice est Livermere. Bury St Edmunds Norfolk. Je recommence. Quel curieux état de choses à Paris ! N'oubliez pas Marion quand Vous avez votre livre en Français.
Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton. Lundi 8 Janv. 1849

J'ai dîné hier chez Duchâtel. Il ne savait rien. Je lui ai appris la situation. Bien confirmée par ce que vous me dîtes des nouvelles de Mad. Rothschild. Cela ne finira pas, mais continuera par un replâtrage. Les modérés soigneront, et soutiendront, un peu mieux Louis B. Mais Thiers et Molé ne deviendront pas des ministres. Ils gagneront tant bien que mal la dissolution de l’Assemblée et les nouvelles élections. La Presse venue ce matin, commence son mouvement d'abandon, de L. B.. Elle deviendra légitimiste. Ellice dinait chez Duchâtel. Plus hostile que jamais à Lord Palmerston. Disant que Lord John n'a pas autre chose à faire que d'aller trouver Sir Robert Peel et de lui demander trois ou quatre ministres. Mais qu’il ne le fera pas. Ellice va à Paris à la fin du mois. Il a vous surement dit tout cela. Le Roi n’a qu'une idée, mais idée fixe. Se justifier du renvoi de son cabinet le 23 février. Mon impopularité est sa seule défense. Il faut qu’il ait du mérite à m'avoir soutenu si longtemps, et une excuse pour m'avoir enfin, abandonné. Je ne lui en veux pas, mais je me tiens pour averti. Quant aux Princes, ils disent ce qu’ils croient utile de dire pour plaire au parti qu’ils craignent et ce qu'au fond ils croient assez eux-mêmes. La politique des Journalistes ne descend pas seulement très bas. Elle monte très haut. Je ne m’y rangerai pas pour cela. Je n'ai qu’un malheur c’est que je ne vivrai pas encore cent ans. Dans cent ans, plutôt probablement, j’aurai trop raison.
Je vais à Richmond tout à l'heure. Je n'ai rien de Paris, ce matin. J’attends quelque chose dans la journée. Ménagez bien vos yeux, même avec moi. J’ai été charmé de voir fondre la neige. Voulez-vous que je vous renvoie la lettre de Constantin, ou que je vous la rapporte ? Adieu. Adieu. Adieu.
Voici la note des livres dont j'ai besoin et envie. Mais remarquez bien que je n'en sais pas les prix, et que je ne veux pas tout , et tout est cher. Les n°2 et 3 sont d'anciens ouvrages. Les n°1 et 4 des ouvrages nouveaux. Je les ai rangés dans l'ordre de leur intérêt pour moi.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Mardi le 9 Janvier 1849

N'oubliez pas C. Greville pour un exemplaire français, et Metternich. J’ai peur qu'on ne trouve votre écrit trop sublime & trop long. C'est là mon impression et vous savez que je suis le public. Après cela j'ai si envie qu'on vous trouve toujours bien et parfait que ma prétention peut me rendre injuste. J’ai relu ce que vous m’avez envoyé hier c’est très très curieux. Vous verrez que Bonaparte se tiendra. A propos lady Palmerston approuve fort sa lettre à Malleville ; je vous envoie la dernière partie, la seule où elle parle politique. Je vais m’occuper de vos livres. S'ils étaient [?] je vous promets de vous mettre au régime.
8h. du soir
Des lettres à Marion disent que L. B. se lève de table très gai. Que l’assemblée est dans un grand état de fraction et d'anarchie ; que M. d la Redorte veut renverser le président et que M. de [?] a renommé à la place qu'il demandait en faisant dire au Président qu'il réservait son cœur et son épée pour Henry V. Le Président ayant rencontré M. d’Alton Shu chez la princesse Belgiojoso lui a tourné le dos et est sorti. Longue visite de Metternich. Il compte que vous lui enverrez votre bonheur et il travaille d'avance à des observations. Gardez la lettre de Constantin jusqu’à vote arrivée ici. Quel article dans le Times contre Palmerston. Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton, Mardi 9 Janv. 1849
une heure

Quel ennui que vous soyez loin ! J’aurais tant à vous dire, et à discuter avec vous ! Pour le public et pour moi. Il n'y a pas moyen de tout écrire. C’est trop long et trop court. J’ai passé hier une heure et demie à Richmond. Une demie heure d’abord, chez la Reine. Assise dans un grand fauteuil, les jambes étendues et enveloppées. Encore maigre, mais le teint clair et reposé ; plutôt bonne mine de convalescente près d'être guérie. Sereine et pas gaie. Elle m'a beaucoup parlé de sa santé : « Je vais beaucoup mieux. M. de Mussy m’a sauvé la vie. Je suis encore bien faible. J’ai encore mal aux entrailles. J’ai encore les jambes un peu enflées. Je me promène tous les jours quand il ne pleut pas. Même quand il gèle. Amenez-moi vos filles, avant de retourner en France. Qui sait si je les reverrai ? " Très amicale. Elle m’a demandé si je me présenterai aux prochaines élections. J'ai dit que oui si la prochaine assemblée paraissait destinée à rétablir la Monarchie ; non si elle n'était destinée qu'à servir ou à tracasser la République. Elle a fort approuvé. Le Roi, aussi, qui était là. Il a insisté : " Vous avez bien raison, de n'être pas pressé. Quand on a été ce que vous avez été, quand on a votre talent, il faut se faire désirer, beaucoup désirer. Croyez- moi ; c'est un conseil d’ami. " J’ai accepté et remercié. Nous sommes sortis de chez la Reine. Une heure de tête-à-tête, dans le salon. D'abord les affaires privées. On n'a pas encore rendu les dots et les rentes des Princesses. Pourtant il croit qu'on va les rendre. Passy est bien. Il retourne probablement à Claremont à la fois de la semaine. Les ordres sont donnés. Toute la famille y retournera avec lui. Il le croit, sans en être bien sûr. Après, si on rend à Monseigneur le Duc d’Aumale une bonne partie de ses revenus, il pourrait bien prendre une maison à Richmond, ou à Brighton, quelque part pas loin de Londres. Mad. la Duchesse d’Aumale a grande envie d'être maîtresse de maison. L'essai qu'elle en a fait à Alger lui a beaucoup plu. La Princesse de Joinville soupire pour une visite au Brésil. Rien qu’une visite. Elle n’y voudrait pas rester. Mais pas même de visite à présent. Le Prince de Joinville doit rester. Il le sent lui-même. Il peut être utile à la France à sa famille. Il est populaire. Précisément à cause de ses défauts. Grand morceau contre la manie de la popularité. Tendres regrets aux prises avec le bon sens. Je voyais venir l'allusion. Il a repris la conversation de chez la Reine. Je ferai très bien d'attendre. Il faut laisser dissiper cette impopularité amassée contre moi. Je n’ai pas voulu laisser passer. - Sire, je serai populaire quand je voudrai. J’ai été très populaire sous la Restauration. - Ah oui, quand vous faisiez de l’opposition. - Précisément sire. Je l’aurais été encore sous le gouvernement du Roi, si j’avais voulu. C’est à servir le Roi et la bonne politique que je suis devenu impopulaire. Certainement; c'est comme moi. J’ai accepté l'honneur de l'assimilation.
Il avait envie de parler d'autre chose. J’ai insisté pour bien établir que j'étais impopulaire par mon fait de mon choix, pour la bonne cause qui était sa cause à lui et à sa famille ; qu’il avait toujours dépendu et qu’il dépendait toujours de moi d'être populaire, mais que je n’en avais nulle envie, que je ne tenais qu’à une seule chose, c’est qu’on sût bien que si je ne l'étais pas, c’est parce que je ne cherchais pas à l'être et non parce que je ne pouvais pas l'être & & Il m’a fort approuvé de très bonne grâce. Je ne connais pas d'homme qui s'embarrasse moins dans une conversation de ce qu’il a pu dire dans une autre. Le moment où il parle, la personne à qui il parle, sont tout pour lui. Privilège de Roi. Mêmes dispositions, et même langage à propos de Mad la Duchesse d'Orléans. Il en a reçu une longue lettre ces jours-ci. Raisonnable, plus raisonnable que les précédentes. Il s'occupe d'y répondre. Il a reçu pour le jour de l’an une très jolie et très sensée lettre du comte de Paris. Très sensée. Il espère bien que c'est l'enfant que l’a faite lui-même. On ne peut guère la lui avoir faite. Le Duc et la Duchesse de Montpensier sont toujours fort bien à Séville. Pourtant la Duchesse s’y ennuie un peu, et aurait envie de Madrid où la Reine sa sœur la désire toujours beaucoup. Le Duc promène sa femme de côté et d'autre pour l'amuser. Il ne se soucie pas de Madrid. Il y a trois semaines, on a cru la Duchesse grosse. C’était une erreur. Très bonnes nouvelles de Naples. Mais Lord Palmerston plus mauvais que jamais. Il prête en ce moment aux Siciliens des vaisseaux anglais, des officiers anglais, des munitions anglaises. Tout cela va partir, sous pavillon anglais pour la Méditerranée, comme un renfort de la flotte anglaise. Et une fois-là, on prendra le pavillon sicilien. J’ai trouvé que c'était bien fort. On affirme. Voilà Richmond. Paris serait plus long. Pour demain. Grande humeur de Molé de ce que je vais publier, de ce qu'on veut me lire à la prochaine assemblée. Grande intrigue pour l'empêcher. Déclaration de fraternité avec Thiers, tout en travaillant contre Thiers et la régence. C’est très long et très brouillé. Et toujours le même tempérament de haine féminine. A demain. Voici une lettre de Barante, et une correspondance de Paris dans l'Emancipation de Bruxelles. Elle a quelque valeur. Adieu. Adieu. Encore une fois, Brighton est bien loin. Adieu. G.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00055.jpg
Brompton Mercredi 10 Janv. 1849
une Heure

Pourquoi n’ai-je pas de lettre ce matin ? Ni la poste de 9 heures, ni celle de 11 heures, ne m'ont rien apporté. Je ne comprends pas pourquoi je n’ai pas de lettre. Si c'était vos yeux, Marion m’aurait écrit. Si c’était pis que vos yeux Marion m'aurait écrit aussi. Quelque bêtise de je ne sais qui ; un retard de dix minutes. Je suis très contrariée. Tout retard m'inquiète. J’espère bien avoir une lettre dans la journée. Lord Aberdeen est venu me voir hier. Il ne peut aller mardi à Brighton. Il est invité à Windsor précisément pour mardi jusqu’à Vendredi. Je ne le rencontrerai donc pas mardi. Ce sera pour une autre semaine. Nous avons beaucoup causé. Je l’ai trouvé en train et assez confiant : " Ou Lord Palmerston entraînera le Cabinet dans sa chute, ou le Cabinet laissera tomber Lord Palmerston." Il croit assez à des efforts tentés auprès de Peel pour obtenir qu’il donne ses amis. Il a vu hier Peel qui allait à Windsor. J’ai été assez surpris des perspectives à demi voilées que laissait entrevoir Lord Aberdeen. Mais je l'ai déjà vu ainsi. J’irai le chercher chez lui demain ou après demain.
Duchâtel sort de chez moi, m’apportant une lettre de Dumon assez sombre. La gauche a regagné du terrain auprès du président comme dans l’Assemblée. C’est la faute des Chefs du parti modéré qui ont démasqué beaucoup trop vite leurs batteries contre le président qu'ils avaient fait. On n'ira pas comme on est jusqu'aux élections. Ou Thiers, Molé et Bugeaud prendront le pouvoir, ou Cavaignac et des amis le reprendront. Du gré du président, qui paraît même pencher beaucoup plus vers ses adversaires électoraux que vers ses patrons gouvernementaux. Si cela arrive on retombera dans la nécessité des combats de rue et des coups d'Etat militaires ou populaires. Les Ministres actuels sont d’une malhabileté, d’une pusillanimité et d’une nullité choquantes. Léon Faucher a dit qu’il combattrait mon élection de tout son pouvoir : " C'est une réaction inacceptable. Notre cabinet est tout ce qui se peut en fait de réaction. " Molé, était allé le voir. Léon F. lui a fait dire qu’il ne pouvait le recevoir ayant à travailler. Molé a insisté. Léon F. l'a remis au lendemain, 8 heures du matin. Molé a répondu que c'était l'heure où il dormait le mieux. Voici les deux faits intéressants sur Molé. Il se dit dans la meilleure entente, dans la plus grande intimité avec Thiers : " Nous sommes deux frères. " Et il prêche Henri V et la fusion tandis que Thiers prêche la Régence. Il a beaucoup d'humeur de ce que je publie quelque chose et de ce que je veux me faire ou me laisser élire à l’Assemblée prochaine. Ce sont les deux résultats nets de deux conversations avec deux de mes plus sûrs amis. Voici un extrait d’une lettre qu'on me communique. C’est d’un homme d’esprit à un homme d’esprit. Je finis, comme j'ai commencé, par mon extrême ennui de n'avoir pas de lettre. Adieu. Adieu.

3 heures
Voilà ma lettre. Il n’y avait point de raison de retard. à la bonne heure. Je vais sortir tranquille pour aller voir C. Greville, qui m’a fait dire qu’il avait une cruelle attaque de goutte et ne pouvait sortir. Il a un exemplaire anglais et il en aura un français. J’attends le Français pour M. de Metternich. Au moment où on m’a remis votre lettre, M. le duc de Nemours est entré. Ce qui fait que je ne l'ai lue qu'au bout d’une demi heure. Très poli et amical. Visite sans motif que je sache. A moins que ce ne soit ma conversation d'avant hier à Richmond. Adieu, adieu. Un très bon adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Mercredi 10 Janv. 3 heures 1849

Votre dialogue avec le roi est très curieux. Je le ferai connaître à Aberdeen. A propos je lui donne rendez-vous pour Mercredi 17. Marion a reçu de très amusantes lettres de Paris de Mad. de la Redorte & de de Lamasellières. J'espère pouvoir les joindre ici. Montebello s'annonce pour demain. S’il est vrai que Rayneval soit envoyé à Pétersbourg, c'est bien fait & si Napoléon y va pour annoncer l’avènement c'est bien aussi. La ressemblance touchera. Quelle confusion à Paris ! Il me semble que les gros bonnets ne s’entendent pas entre eux. C’est égal ; Louis B. restera. Merci du Normanby il m’a amusé. 8 h. Le Pce Metternich croit savoir que les articles dans l'Assemblée nationale tablettes d'une révolution sont de M. de Romieu Avez-vous lu le discours de Ledru Rollin ? Moins la bêtise de l'Adriatique le discours est vif et assez habile.
Adieu. Adieu. On dit que Lord Clauricarde aura l'amirauté.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton. Jeudi 11 Janv. 1849

Je vous ai envoyé ce matin par le railway, quatre exemplaires de ma brochure. Vous, le Prince de Metternich, Marion et Lord Mahon. Aurez-vous la bonté de charger Jean de porter le dernier exemplaire ? Je n'ai reçu qu’hier l’édition française. Les journaux commencent à en parler. Vous serez contente des Débats et de l'Assemblée nationale. Voyez-vous celle-ci ? Avez-vous lu le Morning Chronicle ? Me voilà bien et dument aristocrate. Je suis frappé du tour de quelques uns des journaux anglais. Ils sont évidemment plus démocrates que moi. J’ai été hier chez C. Greville. Bien pris de goutte. Grands compliments. J’y ai trouvé, Lord Ellesmere, Henri Greville et un M. Stanley que je ne connais pas. Nous avons beaucoup causé, mais trop de monde. Rien n'est fini pour le remplacement de Lord Auckland. On croyait assez là à Lord Carlisle.
Je n'ai rien de Paris ce matin. Louis Nap. n’ira pas. Mais il ne s'en ira pas sitôt. Si j’avais à parier je parierais qu’il finira par se mettre entre les mains de Cavaignac et des Républicains. C’est contre son origine, mais c’est selon sa nature, et sa sureté. Je serais étonné si nous avions à traverser la phase de l’Empire. Je la crois usée d'avance par le décri de l'homme. Henri Greville avait hier des lettres de Paris qui m’en tarissaient pas sur les ridicules, et sur les quolibets dont il est l'objet, parmi le peuple comme plus haut. Certainement les gros bonnets modérés ne s’entendent. pas. Et plus ils iront, moins ils s’entendront. Au fond, ils ne veulent point la même chose. Ils sont comme le pays ; il n'y a que l’extrême danger qui les unisse Adieu. Adieu. Je vais chez Lord Aberdeen. J’ai je ne sais combien de billets à écrire. Nous aurons bien à causer mardi. Je vous rapporterai Lady P. et Contantin. Adieu Je persiste à croire que les tablettes d'une révolution sont de Capefigue.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Jeudi 11 Janvier, 1849

Voici une lettre qui vous plaira. Excellent homme moi je lui envoie aujourd’hui copie de votre dialogue avec le roi que je trouve charmante. Comme vous avez raison. Vous souvenez-vous les orages que vous souleviez quand vous faisiez l’éloge des Princes ? Comment ils sont venus tous trois un jour vous remercier de les avoir défendus ? Comment la reine pleurait en vous remerciant ? Je n’aime pas les rois tout ce que vous me dites de Paris est très curieux. Je suis bien aise que personne ne sache se conduire. Renvoyez-moi les deux lettres de Marion. Je vous écrirai encore le soir, s'il y a de quoi écrire. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton vendredi 12 janvier 1849

J'ai bien reçu votre paquet. Marion est glorieuse et touchée. J’ai envoyé les deux autres à leur adresse. Je suis contente de la mention que font les journaux. Le roi avait conté à Montebello sa conversation avec vous, mais sans y découvrir the point. J'ai raconté à Montebello qui est bien de votre avis. il est plein de sens. Plein des affaires de son pays. Il ne faut plus qu'un homme de courage, il croit encore que ce sera vous. Il veut avoir un bon entretien avec vous avant son départ. Il va à Paris le 25. Comme tout est mieux ! Je crois que le pays va devenir quelque chose, et que Paris ne sera plus seul la France. Que je voudrais jaser avec vous ! Montebello a fait la connaissance de Metternich qui a commencé par lui dire que l'homme est un substantif. Le peuple, un substantif & & Metternich travaillait déjà à des observations sur votre livre avant de l’avoir reçu. Rien que sur ce qu'il en avait lu dans les journaux anglais. Je voudrais bien que les petites [?] qui apparaissent à Aberdeen devinssent une lumière. Je doute. Voici une lettre que vous aviez oubliée sur ma table. Je vous envoie le National, bien vif, comme vous verrez. J’ai lu moi même votre 1er Chapitre. J’en suis toute charmée. Il faut lire soi-même ce que vous écrivez. Car on s’arrête à chaque sentence. Lu par un autre, même vous, cela perd. Il faut vous méditer enfin, je vous love et très justement.
Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton, 12 Janv.1849

Merci de m'avoir envoyé le billet de Lord Aberdeen. Certainement il me plaît beaucoup. Qu’y a-t-il de plus charmant que de la vraie amitié ? J'étais allé le voir hier et il m’avait laissé entrevoir ce qu’il vous a écrit. Je l'ai trouvé, sans qu’il en dît grand chose, très préoccupé de la situation d’ici. Il serait bien content, si Lord P. tombait aux trois quarts pour la bonne politique, un quart pour sa propre satisfaction. Au fond du cœur ; il l'espère un peu. Ce serait la petite pièce de la déroute qu'après leurs coup d’éclat de 1848, les révolutionnaires européens me paraissent destinés à subir en 1849. Flahault est venu me voir hier. Il venait chercher un exemplaire de ma démocratie. Nous sommes très bien ensemble. Bon langage sans effort, comme il arrive quand la conduite est bonne. Je ne crois pas qu'il aille à Paris. Il ne veut se montrer, à Louis B, ni malveillant, ni ami. Il m’a demandé deux ou trois fois, avec un peu de sollicitude : " Croyez- vous qu’il dure ? " J’ai toujours répondu que non. Il ne m’a pas paru qu’il en fût fâché. Je viens d'être interrompu par M. Hallam qui revient de Bowood. La mort de Lord Auckland a été un grand chagrin pour lord et lady Lansdowne. Ils ont prié la Reine de les dispenser d’aller à Windsor où ils étaient invités. Hallam croit à lord Normanby en remplacement de Lord Auckland, et à Bulwer à Paris. Grande joie pour Lady Bulwer, et sans doute aussi pour Lady Cowley. Même situation à Paris. Thiers et Molé font ce qu'ils peuvent pour hâter la dissolution de l'Assemblée. C’est leur seul moyen de sortir d’embarras. Nous verrons ce qu'aura été le débat. d’aujourd’hui. Je doute fort que la dissolution vienne assez vite pour que Thiers et Molé puissent se dispenser de prendre le pouvoir. La situation qu’ils ont faite à Louis B. et qu’ils se sont faite à eux-mêmes ne supporte ni une durée, ni une publicité un peu longue. Adieu. Adieu. Vous me direz si mon paquet de brochures vous est arrivé. Je me suis décidé à en envoyer une à chacun des Princes, quand même. J’aime mieux avoir tous les bons procédés. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Samedi 13 Janvier 1849

Le Prince Metternich a dit hier à Marion sa satisfaction de votre livre. Il venait de le lire. Il a dit : " Si M. Guizot n'avait jamais rien dit, rien fait, rien écrit de sa vie il y a là quatre pages qui suffisent pour immortaliser un homme. " Je ne sais quelles sont ces 4 pages. On me dit qu'on a vendu 20 mille exemplaires de la soit disante traduction de votre livre. Compilation de quelques uns de vos anciens écrits. Quelle fraude ! Le savez-vous ?
Mon fils est venu me voir hier. Louis B. écrit à d'Orsay tous les jours. Et lorsque après son joli appartement de King street. Il n’en peut plus. D’orsay lui avait beaucoup recommandé Bulwer. Louis B. l'a reçu & a beaucoup causé avec lui, et s’en dit très content. Je crois à sa nomination. à Paris. Sera-t-il content ! Paul me dit que jamais L. B. n'a bu en Angleterre. Je persiste à croire que Thiers sera obligé d'entrer au ministère. Adieu. Adieu, quel ennui que le dimanche. J’espère que ceci vous arrivera ce soir.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton, Samedi 13 Janv. 1849

Avant tout, ma joie pour vos yeux vous écrivez et vous lisez. Ménagez les bien et n'en parlons plus. Seconde joie. Vous approuvez. Je crois que vous avez raison. L'effet est grand à Paris. Un homme de mes amis, qui a beaucoup de sens et d’esprit d'affaires m'écrit le Mercredi soir, le jour même de la publication : " Votre libraire est dans une espèce de jubilation fébrile. On fait queue dans son magasin pour acheter votre brochure. Ce matin, à 10 heures, il en avait déjà vendu 5000 exemplaires. La première édition est complètement épuisée. Et le lendemain jeudi : " La 2° édition est épuisée. On tire la 3°. Le succès est immense. J’ai la conviction qu'aux prochaines élections, vous serez au nombre, des représentants de Paris. " Je souris et je doute. Mais il me paraît clair que l’effet que je désirais produire est produit. Nous verrons les conséquences. Je ne vous envoie pas les journaux, l'Univers, l’Evènement, le Siècle, & . Je vous apporterai mardi, ce qu’il y aura d’un peu remarquable. Je n'ai encore rien vu dans le National. Ce que vous m’envoyez contre Thiers est en effet bien vifs. La lutte sera rude, surtout après la victoire. De tout ceci le public sortira éclairé, et les partis ardents. Durer, là sera le problème. Pour le vainqueur, quelconque. Peel m'a écrit. Le Roi aussi. Tous deux très approbateurs, et assez réservés. Comme me souhaitant beaucoup de succès et ne se souciant guère de s’engager dans mon combat. Bien des gens, pas plus démocrates que moi s'étonnent de me voir attaquer si franchement la démocratie, le géant du jour, comme m'écrit Jarnac. Je me souviens d’un temps où l'on me trouvait démocrate. C’est une des grandes difficultés de notre temps que d'avoir à changer de position en changeant de dangers & d’ennemis. Je causerai à fond avec Montebello avant son départ. Je pense de lui autant de bien que vous. Je suis curieux du débat qui a commencé hier. Il me conviendrait que l'Assemblée constituante ne se séparât qu'à la fin de mars. Je doute qu'elle puisse vivre jusques là. Les Anglais ont bien de la peine à comprendre ces revirements d'opinion si soudains et si emportés. Je comprends qu'ils ne comprennent pas. Il faut être Français pour croire qu’on peut vivre en tournant si vite.
Je n'ai vu personne hier. J'aurai certaine ment d’ici à mardi des nouvelles de Génie. Il ne m'a pas écrit ces jours-ci. Il était trop occupé de mes affaires. Mardi sera charmant. Adieu. Adieu. Je ne puis vous dire le plaisir que me fait votre écriture. Je crois que je relis vos lettres plus souvent. Mes tendres amitiés à Marion. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Dimanche. 14 janvier 1849

Je suis charmée du succès de votre livre à Paris, moi j'avance à petit pas, & toujours avec satisfaction. Je n’ai pas vu Metternich depuis. Les lettres de Rothschild sont plutôt sombres. Rien de si grand selon eux que la discussion qui devait avoir lieu avant hier. Mad Demidoff a fait venir Thiers, scène très vive toute politique & morale. Après quoi elle l’a mis à la porte en recommandant, de ne jamais laisser entrer cette canaille. Stéphanie ne vient pas. 8 heures. Vous avez eu bien tort de me dire que mes yeux allaient, bien. Les voilà mal ce soir. Je n’ai point de nouvelles à vous dire. Lord Palmerston a la goutte au pied. J'espérais davantage. Triste Dimanche et je n’ai vu que le duc de Devonshire et les Rothschild. Il est arrivé des visites aux Metternich qui m'ont privée de Mad. M. Je me réjouis bien de Mardi. Adieu. Adieu. Je demande permission à la princesse de vous dire combien je vous remercie de votre bonté. M.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton. Dimanche 14 Janv. 1849

Je mettrai ceci à la poste à Londres en sortant de l’Athenaeum où j'irai à 4 heures. Vous l'aurez demain à 3 heures, je pense. Je ne veux pas que le Dimanche soit tout à fait stérile. J'ai pour le débat qui a dû finir hier plus de curiosité qu’il n’a d’importance. Il importe fort peu, en soi, que l'assemblée se dissolve le 4 ou le 30 mars. Or c'est entre ces deux temps qu’on hésite. Tout le monde est décidé ou résigné à la dissolution prochaine. Je ne me fais pas encore une idée claire de l'assemblée qui succédera. Je présume qu’elle sera encore très mêlée, et par conséquent, très orageuse. Orléanistes, légitimistes et républicains y seront forts. Et très acharnés en même temps que forts. La république rouge seule sera si je ne me trompe à peu près éliminée. Elle se remettra derrière la République tricolore, comme elle l’a fait de 1830 à 1848. Et la République tricolore acceptera de nouveau cette queue. On fera effort pour sortir du chaos. On n'en sortira pas d'un coup. Je vous assure qu’il y a bien à examiner s'il me convient de redescendre déjà dans la mêlée; car entrer dans l’Assemblée, c’est redescendre dans la mêlée. Peut-être vaudrait-il mieux, pour moi-même, et pour le moment décisif quand il viendra me tenir encore quelque temps à l'écart, sur la hauteur, disant mon avis aux combattants et sur les combattants. Nous en causerons. Je n'ai aucune lettre importante de Paris. Rien que des détails sur le succès de ma brochure. Je regarde la réconciliation et l’intimité active de Girardin et de Lamartine, comme un fait assez grave. Ce sont peut-être les deux hommes les plus mischievous parce que ce sont eux qui savent faire le plus de dupes parmi les honnêtes gens et les gens d'esprit badauds. J’ai une longue lettre de Brougham. En grands compliments sur ma brochure. Quelques observations, peu fondées, je crois. Evidemment décidé à être bien avec moi. Il compte quitter Cannes du 18 au 20. Il ne me dit pas s'il s’arrêtera à Paris en revenant. La tentative de conciliation du Roi Léopold entre l'Angleterre et l’Espagne a décidément échoué. Palmerston veut toujours un retour de Bulwer à Madrid. Narvaez ne veut pas. Et on ne veut pas à Madrid, renverser Narvaez. J’ai pourtant trouvé le Roi l’autre jour, peu en bienveillance et en confiance pour la Reine Christine. J’ai entrevu qu’elle insistait comme la Reine sa fille, pour que la Duchesse de Montpensier vint à Madrid, et qu'elle aussi ne serait peut-être pas fâchée que la Duchesse suivit les bons exemples. On est très susceptible à cet endroit. Vous n'avez pas d’idée du sentiment d'aversion et de dégoût que la corruption des cours de Madrid et de Naples a laissé dans le ménage qui y a assisté sans y prendre part. Adieu. Je ne vous écrirai pas demain. Mardi, à 2 heures J’espère qu’il fera aussi doux qu'aujourd’hui, et que je pourrai rester aussi frais qu’il vous conviendra. Adieu. Adieu G. Vous ne saurez qu’elles sont les quatre pages qui plaisent tant au Prince de Metternich. Si j'apprends quelque chose à l'Athenoeum je l’ajouterai à ma lettre.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton lundi 15 Janvier 1849

J'ai été très effrayée hier de mes yeux, heureusement aujourd’hui ils vont mieux. Je vois que l’assemblée va mieux aussi, et qu’elle consent à se dissoudre. Je serais assez curieuse de savoir ce qui s’est passé entre lord John & le parti Peel. En tout cas Si Palmerston ne devait pas être le prix de la coalition, je suis bien aise qu’elle n’ait pas eu lieu. Vous ne méritez guère cette lettre puisque la vôtre d’hier m'annonce cool [?] que vous ne m’en écrivez pas aujourd'hui. Bon sujet de querelle pour commencer demain. Adieu. Adieu. Cependant.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Jeudi 18 Janv. 8h. du soir

Comme il fait nuit, il faut bien que je dicte. Voici deux lettres pour vous et voici un billet du Prince Metternich. Renvoyez-moi, celui-ci tout de suite je vous prie, je veux le faire passer à Hélène. On m’a répété aujourd’hui que Lord Palmerston nie absolument qu'il sache le première mot de l'expédition de Toulon. Il l’a dit formelle ment à lord Ashley avant hier. C’est singulier. J’ai porté moi-même vos cartes chez Delmar. Je n'ai pas encore vu mine host. Très belle journée dont j'ai profité. J'ai eu la visite des élégantes de Brighton. Lord Harry Vane will [?] the address in the house of Commons.
Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton Jeudi 18 Janv. 1849
3 heures

Je trouve en arrivant de bonnes nouvelles de mes affaires électorales dans le Calvados. Mes amis conservateurs reprennent courage. Les légitimistes m'épousent chaudement. On me dit que bientôt les candidats qui essayaient de m'écarter viendront me prier de les aider. Tout cela me confirme dans la résolution convenue. Des nouvelles contraires produiraient le même effet. Voici une lettre de M. Vitet homme d’esprit, froid, juste et sagace. Vous verrez qu'il est sombre, même après le succès futur, s’il vient. Renvoyez-la moi, je vous prie. Point de nouvelles générales. Duchâtel est de retour de Belvain. Il vient de me renvoyer un livre. Je le verrai probablement demain. On a fait en Belgique une contrefaçon de ma Démocratie. Si petite qu'on l'envoie dans des lettres. pour 10 sous. Comment passe-ton si vite du plaisir au regret ? Une minute creuse un abyme. Adieu. Adieu. Ne vous fatiguez pas à lire.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Vendredi 19 Janvier 1849

Pas de lettre de vous pourquoi ? Faites moi le plaisir d'envoyer l’incluse à Barante par votre plus prochaine occasion. Elle pourrait même aller par la poste. Mes yeux sont tristes aujourd’hui, et le temps aussi, et moi aussi puisque je n’ai pas de lettre. Metternich est rentré chez lui l’autre jour, charmé de vous, mais surtout de lui même, et disant qu’il était sûr qu'il vous avait plu. ce sont ses filles qui ont dit cela à Marion. Je ne sais rien aujourd’hui. Je vois seulement. que les puissances catholiques font comme je le pensais. Adieu Adieu. M. Ellis voulait seulement vous amuser pendant une demi-heure. Je l'ai assuré qu'il avait parfaitement réussi. Il est très glorieux.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Vendredi 19 Janvier 1849 Brompton
Midi

Voici deux lettres venues hier ; l'une de mon libraire, l'autre de mon hôtesse. Lisez-les, je vous prie attentivement. J’espère que vous pourrez les lire vous-même sans trop de fatigue pour vos yeux deux grosses écritures. Je n'en persiste pas moins dans ma résolution. Plus j'y pense, plus je suis sûr que c’est la seule bonne. Mais il faut tout écouter. Evidemment le travail sera très actif contre moi. Quelles misères ! Si le bon sens et le courage de mes amis ne sont pas en état de les surmonter, ma présence pourrait bien me faire élire ; mais après l'élection, je serais affaibli de toute la peine que j'aurais prise moi-même pour mon succès. Je ne veux pas de cela ; il faut que j'arrive par une forte marée montante, ou que je me m'embarque pas. Je vais écrire dans ce sens à tout le monde. Renvoyez-moi tout de suite ces deux lettres. Je vous prie. Il doit être arrivé à Brighton encore des journaux pour moi. Le postman par excès de zèle, s'est obstiné à m'en envoyer là quelques uns, sans ordre. Cela cesse aujourd’hui.
Je suis frappé du silence de l'Assemblée et du peu de paroles des journaux sur l'expédition de Toulon. Je doute que l'affaire soit aussi avancée qu’on l'a dit d'abord. Cependant la nouvelle proclamation du Pape, que les Débats donnent ce matin est bien forte. C’est la guerre déclarée aux républicains romains, autant que le Pape peut faire la guerre. Il faut qu’il soit sûr d'être efficacement soutenu. Je n’ai encore vu personne ici. Je vous quitte pour écrire à Paris. J’ai trois ou quatre lettres à écrire. Et longues. Il ne me suffit pas de dire non. Il faut que je persuade ceux qui me demandent de dire oui. Si je ne les ramène pas à mon avis, ils n'auront pas de zèle, et il me faut leur joie. Adieu Adieu. Je n'ai pas encore, ma lettre de vous. J'espère bien qu’elle viendra dans la matinée. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Vendredi 19 Janv. 8h. du soir

Voilà enfin votre lettre, [?] ce qui vous en vaut une seconde. Je vous remercie des l'incluse. J'ai vu ce matin, Macauley, Mme de Metternich y était aussi, fort aise de le rencontrer, évidemment curieux des célébrités. Il a dit des drôles de choses. Je vois avec malice. Un trait contre les Jésuites, et puis trouvant que ce que le Pape aurait de mieux à faire, serait de venir à Paris, prendre une petite chambre au 4ème est une bonne cuisinière qui lui ferait une bonne soupe aux choux. De son côté Mme. de Metternich a posé un principe qu’il valait mieux voir tuer deux mille personnes que trancher la tête à un Roi. Voilà une matinée. Mme. de Metternich m'a beaucoup parlé du plaisir qu’avait eu son mari avant hier et m'a questionnée avec curiosité sur l'impression que vous aviez remporté de lui. Je lui ai dit ce qui convenait. Elle a repris " Combien il serait à désirer que les deux hommes se voient souvent. M. Guizot pourrait peut-être trouver de l'utilité dans la vieille expérience de mon mari. " Dans ce moment m'arrive le missive de Metternich. Je vous envoie tout le paquet. Répondez. Cela lui fera tant plaisir. Adieu, Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton. Samedi 20 Janv. 1849
une heure

Je reçois ce matin de mon hôtesse ces quatre lignes : " Je maintiens tout ce que contient ma lettre du 16. Cependant il y a, depuis 24 heures, beaucoup d’agitation dans le parti extrême. Les journaux de ce parti sont d’une telle violence que je vous engage à voir comment les choses vont se dessiner. Elle a pris peur du conseil qu’elle m’avait donné. Sa peur ne me fait pas grand chose et je ne la crois pas fondée. Mais plus j’y pense, plus je pense la même chose de son Conseil. Je viens d'écrire en détail à [?] les motifs qui me décident à rester ici. Je ne doute pas que vous me persistiez comme moi. Remerciez beaucoup, je vous prie, le Prince de Metternich de ses petites pages pleines de grandes vérités, à propos de l'article du Journal des Débats. Je n'y réponds pas, car je suis de son avis. Je n'ai qu'à le remercier, et à regretter qu’il ne vous ait pas donné tout à qu’il vous avait promis à propos de ma brochure. Sa conversation m'a plu infiniment mais point rassasiée. Je voudrais le voir. tous les jours. Je me figure que nous ne finirions jamais de causer, et que nous recommencerions toujours avec plaisir. J’en suis sûr pour moi. Je me promets deux heures, charmantes la semaine prochaine. Si vous pouvez trouver à Brighton le Siècle de mardi dernier 16, lisez-le et faites-le lire à M. de Metternich. L'article sur moi en vaut la peine. Vous y verrez quelle vive alarme j'ai causée. Je regrette de ne pouvoir vous l'envoyer. Je ferai partir par une occasion, très prochaine (lundi ou mardi) votre lettre à Barante. Rien d'ailleurs de Paris. Je me figure que l'expédition de Toulon pourrait bien faire long feu, comme celle du général Cavaignac. Le Président de la République sera bientôt aussi ridicule que la République. Sa liste de candidats pour la vice-Présidence est une bouffonnerie faite sans le savoir ; ce qu’il y a de pire. Adieu. Adieu.
Vous avez eu la bonté n’est-ce pas de remercier M. Ellice de son obligeante attention ? Ellice est venu me voir hier. Il part aujourd’hui pour Paris. Répétant toujours que Lord Palm est bien mal qu’il ne durera pas que ses collègues le disent comme lui, Ellice. Il confirme le dire de Lord Ashley que Lord Palm ne savait rien des préparatifs de Toulon. Le petit M. de Montherot disait hier que les Légitimistes étaient en hausse à Paris. Il racontait un calembour : l'Assemblée nationale veut la République, mais la France, en rit (Henri). Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Samedi 20 Janvier

Je vous renvoie les deux lettres. Je suis assez frappée de celle de votre hôtesse. Il faut d’abord savoir cependant si vous avez grande confiance dans son jugement, et puis quand même elle dirait vrai ; s’il ne vaudrait pas mieux risquer la non élection plutôt que d’aller se mettre dans cette mauvaise boutique. Voici Barante confirmant un peu les mauvaises dispositions à votre égard. Cavaigac a fait une longue visite à Mad. Rothschild. Elle s’est dit monarchiste ; il a dit que ce serait la reine infaillible de la France, qu’elle ne pouvait être sauvée que par la République qui était comme un malade de la fièvre auquel il faut du quinine pour le remettre. Le quinine est amer. On a administré à la France le remède dans toute son amertume mais ce remède la guérira. Il faut qu’elle soit république. Léon Faucher est entré un moment après, disant que la France ne se sent gouvernée qu’à présent. Duchatel n'y entendait rien. Maintenant les préfets sont contents parce qu'on leur donne des directions claires, précises. Bien glorieux bien satisfait. Avez-vous remarqué les convives chez Falloux ? Tous les partis entourant le président, ce que n'a jamais eu Louis Philippe. Adieu car c’est beaucoup pour [mes yeux] qui ne vont pas bien. Renvoyez-moi Barante, et envoyez lui ma lettre par la poste si elle n’est pas déjà partie par occasion. Ajoutez son N°. Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton Dimanche 21 Janv. 1849

Je ne me suis jamais accoutumé à cette date du 21 Janvier. J’étais si enfant que je n'en ai aucun souvenir personnel. Mais l'impression m'en reste profonde. Je suis bien près de l’avis de Madame de Metternich. On peut oublier le champ de bataille d’Eylau, non pas la place Louis XV. J’aime cent fois mieux courir le risque de la non élection que courir, ou avoir l’air de courir après l'élection. Je viens d’écrire dans ce sens au duc de Broglie. Il est à Paris très sombre. Dumon aussi. Ce que Barante vous écrit est vrai. J’ai une lettre de lui où il me dit la même chose, et toutes celles qu’on m’apporte les confirment. De sombres pronostics, et des intrigues pitoyables, il n’y a que cela. Ce que fera le pays en masse sera peut-être bon; et à de bons instincts. Ce que feront les individus isolés ceux dont nous savons les noms, sera mauvais ; ils sont plus aigris qu'éclairés. On croit que décidément l'assemblée n'assignera point de terme fixe pour son départ. Elle se contentera de réduire à trois ou quatre le nombre des lois organiques, et voudra faire celles-là ainsi que le budget ; ce qui pourra bien la conduire jusqu'au mois de juillet. Il y a autant de mécontentement que d’abattement, et vice versa. Le public trouve que les légitimistes se remuent beaucoup, et commence à s’en impatienter. On dit que le grand dîner de M. de Falloux a déplu. On dit cependant, en même temps, que depuis quelques jours, Thiers tourne à la fusion. Mais on ajoute que ce pourrait bien être uniquement un trick de quelques jours. Des Ministres actuels. Léon Faucher est le meilleur, le plus laborieux, et le plus sérieux. Il a donc raison d’être glorieux. Mais on dit aussi qu’il est désagréable, maussade, dur, impoli et détesté. Je vous répète les rapports de deux ou trois personnes que je viens de voir, entr'autres de Duchâtel qui est revenu hier au soir de Belvair, frappé de la splendeur, de l'ordre, de la froideur et de l’ennui. Il dit que s’il n’avait pas eu pour causer un peu, Lady Alice et M. Stafford O’Brien, il ne sait pas ce qu’il serait devenu. Le duc de Rutland était en effet malade. Tout s’est passé sans lui. Duchâtel l’a vu dans sa chambre la veille de son départ. Duchâtel a bien envie, aussi de prolonger son séjour à Londres jusqu'après les élections à moins qu'elles ne soient retardées jusqu'au mois de Juillet. Nous n'aurions, en ce cas, aucune raison de ne pas retourner, dans le cours de mars. Notre retour n'aurait aucun air électoral. Votre lettre pour Barante part aujourd'hui. J’ai effacé baron et mis l'adresse. Il est place Vendôme n°8. Je vous rapporterai la sienne samedi. Adieu. Adieu. J’aime bien les longues lettres mais ne fatiguez pas vos yeux. Adieu G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Dimanche 21 Janvier 1849

Hier longue séance de Metternich. Texte- question de non intervention. Je lui ai fait quelques compléments sur sa lucidité, Il m’a dit " je reprendrai cela avec M. Guizot." Il est très occupé de vous. Je lui ai envoyé ce matin ce que vous me dites de lui. Le commerce d'esprit va devenir très vif. Votre hôtesse a donc peu les impressions des femmes sont mobiles, ce n’est jamais elles qu'il faut écouter. Votre parti est pris et je crois que c’est le bon, quoique ce soit aussi mon opinion. Pourquoi n'écrivez-vous pas sur cela à Broglie ? Voici une lettre amusante de Bulwer. Copie car l'original est trop confus. Envoyez la de ma part à lord Aberdeen ; elle pourra l’amuser. Voici Metternich répondant à votre lettre. J’avais effacé dans celle-ci le nom de Génie. Pour tout le reste nul inconvénient. Adieu. Je profite encore du jour pour vous le dire, & je ne crois pas que la soirée ne vaille quoique ce soit à ajouter. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton lundi le 22 Janvier 1849

J’ai dicté ce que j’ai retenu d’une lettre reçue hier par la petite Rothschild. Elle dinait hier chez moi. On lui écrit pas courrier. Je ne sais rien aujourd’hui. On a des postes chez vous. Les livres que vous m'avez demandés. Dites-moi si c'est cela, s'ils vous conviennent, car ce n'est qu’à cette condition que j’ai dit que je les prendrais. 8h. J'ai été interrompue et puis la promenade et puis Metternich et puis tout le monde. Je ne puis continuer qu’à présent pas conséquent. C'est Marion qui écrit. Mme le Rothschild mande encore à sa fille ce matin que tous vos amis vous conseillent, de ne pas aller [ ?] de votre élection puis d’attendre qu’elle vienne vous chercher comme une réparation. Vous voyez que c'est de tous les côtes le même air. Cela doit être vrai. Lady Palmerston vient demain pour deux jours. Collondo est nommé ambassadeur ici. Lady Palmerston dit que le Pape est mal conseillé. Il ne veut per mettre à aucune puissance de se mêler de ses affaires. Sa lutte d'excommunication a produit un détestable effet à Lord Palmerston grille d'impatience de se défendre et la chambre des communes. Voilà tout ce que Lady Ashley est venue me raconter ce matin. Renvoyez-moi je vous prie la lettre de Barante. Metternich dit, qu'on le sommera encore de rendre-compte en Allemagne. Adieu. Adieu

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton Lundi 22 Janv. 1849

Voici une preuve qui vous amusera de l'effet de ma brochure en France. Je ne l'ai point fait envoyer à M. Molé et elle ne lui a point été envoyée de ma part. J’ai la liste des personnes à qui j'ai ordonné de l'adresser et à qui elle a été effectivement adressée. M. Molé n’y est pas du tout. Mais il lui a convenu de supposer ce point de départ, et j'ai reçu de lui ce matin la lettre dont je vous envoie copie. Je ne veux pas faire courir à l'original les hasards de la poste. Je vous l'apporterai Samedi. Rappelez-vous la conversation de lui que je vous ai lue il y a quelques jours et riez toute seule. Je lui répondrai très simplement, et poliment, sans un mot qui démente ni qui accepte son point de départ, et en me félicitant que nous soyons d’un seul et même parti. J'enverrai au Duc de Broglie copie de la lettre de Molé et de la mienne. Je veux qu’il y ait à Paris, un de mes amis qui soit au courant. Et je compterai là un ami de plus, que je tâcherai de garder et dont je me garderai toujours.
La lettre de Bulwer est très jolie. Vraiment jolie pour le tour, en même temps que spirituelle au fond. Je vais l'envoyer à Lord Aberdeen Lui avez-vous écrit et viendra-t-il à Brighton dimanche ? Cela me divertira de lui montrer la lettre de M. Molé. Je me promets un vrai plaisir samedi de la lecture du Prince de Metternich, et j'espère que la lecture ne supprimera pas tout à fait la conversation. Je veux les deux. Je viens de voir un homme parti hier matin de Paris. Un vrai bourgeois de Paris, intelligent, bavard sensé, léger, moqueur, et prenant son plaisir à flâner à travers les événements comme sur les boulevards. Il regrette Cavaignac qui, dit-il, aurait, de gré ou de force, enterré plutôt la République. Il ne croit pas que l'Assemblée se dissolve sitôt. Il rit de Louis Bonaparte, et ne se soucie pas beaucoup qu’on le renverse." Il ne peut pas nous faire grand bien, dit-il ; mais tant qu’il est là, personne ne nous fera grand mal." Par goût, il est régentiste et n'y croit guères. Par raison, il voudrait être légitimiste, et n'en peut pas venir à bout. Il m'a assez amusé, comme type de Paris. Charmant Paris, dit Bulwer. Voici l’article du Siècle. Gardez-le moi, je vous prie. Je ne veux pas le perdre. C’est un article intelligent. J’ai écrit hier au Duc de Broglie. Et ce matin à mon hôtesse. D'après ce que m'a dit hier Duchâtel, le Duc de Broglie est déjà de mon avis sur le moment de mon retour. Quant au jugement de mon hôtesse je ne la connais pas assez pour le bien évaluer ; mais je le crois bon jusqu’à 5 pieds de haut, et de peu de valeur au-dessus. C’est le cas de bien des gens. On voit selon sa taille. Adieu. Adieu. Nous venons d'avoir un violent orage, et voilà un beau soleil. Je vais me promener un peu. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Mardi 23 janvier 1849

C’est fort drôle Molé ! C’est bien confus Paris. Que je suis aise que vous n'y soyez pas ! Nous croyons que tout allait languir jusqu’à la nouvelle assemblée, et c’est tout juste main tenant que cela devient le plus mêlé et le plus curieux. Aberdeen me mande qu'il sera ici samedi Et dimanche. C’est trop. D’ici là il retourne encore a Drayton ; c’est pour quelque chose. Le seule est très remarquable ! Très bien je vous regarde. Je vous ai dit que Metternich croit encore à de grands coups en Allemagne. Je crois aussi que partout, à la fois le parti vaincu cherchera à se relever. Il y aura encore bien du trouble, de bien mauvais moments. J’ai peur d’aller à Paris. Ce sera des ennuis et pire peut être. Qui peut savoir ?

8 h du soir. Lady Palmerston est venue troubler ma conversation avec les Metternich. Ils m'ont laissée discrètement et elle m’est restée jusqu’à encore dîner. Le mari est rétabli. Il était au conseil de Cabinet aujourd’hui. M. de [?] est venu dire que l’expédition de Toulon était faite pour imposer aux Autrichiens et les empêcher de s'occuper des affaires. du Pape. Le pape est un sot. Quelle bêtise d'avoir quitté Rome. Ce qu’il y a de mieux à faire, c’est d'y rentrer tout de suite Le conseil anglais à Rome écrit cela. Donc c’est in faillible. Au lieu de cela le Pape s’obstine à rester à Rome sous l’influence de ce vilain jésuite le Roi de Naples. Lord Normanby dit que les légitimistes se conduisent sottement. Ils sont trop pressés. Thiers veut absolument la régence. La situation devient plus mauvaise tous les jours. On aurait cru que l'avènement de Président ramènerait la prospérité du commerce. On s’est trompé, on se plaint, on accuse Thiers et les autres grands hommes, de se tenir à l’écart, tandis que s'ils se mettraient à l'œuvre, la confiance au rait pu renaître. Louis Bonaparte n’est pas du tout bête, mais on l'abandonne, et tout va au diable. Voilà le résumé. Adieu. Adieu, adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton Mardi 23 Janv. 1849

Voici une lettre du Maréchal Bugeaud qui me plaît, malgré un fond de mauvaise humeur, et qui vous plaira. J’ai reçu hier, par deux occasions de Paris et de Lisieux, un déluge de lettres. Piscatory, Mornay, Jayr, Cuvillier Fleury, Plichon & &. Je vous apporterai samedi, celles que je ne vous envoie pas. Pour votre amusement, je joins à la lettre du Maréchal celle de mon hôtesse qui ne contient pas grand chose mais qui vous fera rire. Plus votre lettre de Barante. Mes lettres de Lisieux sont bonnes quant à mon élection. Non que cela doive aller tout seul. J'aurai contre moi, les Républicains les Bonapartistes, des bêtes et des poltrons. Mais mes amis et tout le gros du parti conservateur sont décidés, en train, et se promettent de gagner la bataille, pour peu que les légitimistes les aident. Et les légitimistes promettent de les aider tout haut, Tout ce qui m’arrive me confirme dans ma résolution. C'est l’avis très décidé de Piscatory, à la vérité un peu piqué de son échec électoral à Tours et plus noir que jamais. " J’aurai besoin de le voir, me dit-il, pour croire que dans notre plat pays, il y ait des gens assez braves ou plutôt assez de gens braves pour vous assurer une majorité." Vos extraits des lettres de Mad. Rothschild sont très intéressants. Je crois de plus en plus à la prolongation de l'Assemblée. On grognera, on criera, on finira peut-être par la chasser violemment ; mais on ne commencera pas par là, et en attendant elle durera. C’est tout ce qu’elle veut, par peur et pour argent. J’ai eu tout à l'heure, de bon lieu, des nouvelles du cabinet d’ici. L'orage grossit contre Lord Palmerston. Le vent de Windsor souffle fort. Lord John est troublé. Il y a un cabinet council ce matin. On y parlera beaucoup d'affaires Etrangères. C’est Lord Palmerston qui a essayé de persuader à les collègues que l'expédition de Toulon avait pour but la Sicile, contre Naples. Il voulait. couvrir ainsi sa propre politique. Quelques uns l'ont vraiment cru. Cela tombe et Palmerston baisse. Il a raison de souhaiter le Parlement. Je ne sais si la toile levée lui sera bonne mais l’entracte ne lui vaut rien. Adieu. Que de choses nous nous dirions si nous nous voyions tous les jours? Adieu. Adieu. G. P.S. Mes livres sont arrivés ce matin. En très bon état; les vieux comme les neufs. C’est parfaitement ce que je désirais. Merci et Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton le 24 Janvier 1849

Mercredi Vos lettres sont intéressantes Bugeaud est un peu cross. Votre hôtesse me rappelle Mad. de Sévigné trouvant si bon air à Louis 14 qui lui avait adressé la parole à un spectacle à Versailles. Rien ce matin. Je reverrai Lady Palmerston. Elle critique Thiers. Il veut la régence. Il devrait plutôt aider le Président. Lord Brougham doit être arrivé hier à Londres. Il viendra sans doute ici. N'avez-vous donc pas entendre parler de Thiers depuis votre livre et sur votre livre ?

8 h. Lady Palmerston m’est restée bien longtemps. Si longtemps que j'ai à peine, le temps d’ajouter deux mots. Rien de nouveau. Lord Palmerston terrassera des adversaires. Il fera taire toutes les trompettes de le Europe. C'est vrai que rien n’a été fait, que rien n’aboutit. Mais la Sicile est à la veille de l'arranger. Et quand à la Lombardie, ni les Autrichiens veulent la garder, cela ne regarde pas l'Angleterre. Lord Palmerston croit qu’ils ont tort, mais ce n’est qu’une opinion lord Aberdeen est très monté et parle beaucoup contre son mari. Brunow est à Drayton. Il est venu le dire à Lord Palmerston en riant. Peel est toujours seul, il n’a pas un homme. Les Peelistes ont bien envie d'entrer aux affaires, mais ils n'ont pu de chef. Au demeurant tout va très bien. Les Holland se sont raccommodés. Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton Mercredi 24 Janv. 1849

Il m’est venu ce matin une bonne occasion pour Paris et j'ai écrit quatorze lettres, grandes ou petites. C’est un grand ennui. Mais je réponds à tout le monde. Il y a telle lettre insignifiante qui, un jour, à son prix. Je crois aussi à de mauvais moments encore dans Paris, et je suis bien aise de n'y pas être. Toutes les nouvelles sont dans ce sens. On m'annonce pour ces jours-ci des lettres détaillées. J'en aurai quelqu'une avant samedi. Louis B. ne peut ni s'établir ni tomber sans bruit. Je persiste à croire qu’avant de tomber, il essaiera et de la République rouge et de l'Empire. Il faut qu’on ait essayé de tout. Pour la première fois, les journaux légitimistes commencent à attaquer. Thiers au nom de la question entre Henry V et la Régence. Lisez l’article ci-joint que je trouve dans l'opinion publique. C’est très grave. Et je crois que c’est absurde à eux. Ils n'ont nul intérêt à faire vider la question d'avance. Il pourraient, un jour, avoir la nécessité pour eux. Le débat préliminaire sera toujours contre eux. L’esprit de parti à tout à la fois des lumières et des aveuglements inconcevables. Je doute que cela finisse sans guerre civile. Et je ne sais pas comment la guerre civile finira. Je suis curieux de savoir si le Constitutionnel relèvera ce gant. L'expédition de Toulon, n'en sortira pas. Et le Pape a raison de rester à rade tant que les Puissances catholiques y compris l’Autriche, ne se seront pas accordées pour le ramener toutes ensemble à Civita Vecchia. Sa présence là, sous une telle escorte, ferait tomber la révolution de Rome. Je conviens que cela ne ferait pas les affaires de Lord Palmerston. Il lui vaudrait mieux que le Pape fût à Rome, impuissant et toujours menacé. Décidément Lord Palmerston est un vieillard. Il ne comprend rien à ce qui se passe et ne sait plus penser et faire que ce qu'il a pensé et fait jadis. Je suis frappé du retour de Lord Aberdeen chez Sir Robert Peel. Certainement il y a quelque chose. On commence à dire assez haut que la Reine se plaint tout haut de Lord Palmerston et s'en inquiète. Savez-vous ce que dit Barante du dîner de M. de Falloux ? " Nous avons eu le banquet du Châteaurouge ; ceci est le banquet du Châteaublanc." Et Dupin après le vote des 48 000 fr. ; pour M. Boulay de la Meurthe, vice président de la République : " 48 est donc le calibre de notre boulet. " J’ai reçu hier un billet pressant de Lady Holland, me priant, au nom de Lord Holland d’aller dîner aujourd'hui à Holland-House. J'y vais. Je serai charmé que Holland House reprît. Je vous dirai les physionomies. Adieu. Adieu. Je voudrais bien que nous fussions seuls quelques heures de Samedi à Lundi. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton 25 janvier 1849

Votre lettre ce matin est très intéressante. Moi aussi j’ai bien appétit de causeries avec vous. Nous en aurons à peine. Ne pourriez-vous pas rester encore Lundi ? Que ce serait charmant ! Si vous trouvez trop dur de rester un jour de plus avec moi, voulez-vous ne venir que dimanche cela me déplaira, mais j’aime mieux le Lundi seul que le Samedi divisé. Ou bien encore persistons dans le samedi et voyons comment nous nous en tirerons. Je serai équitable et je ne vous demanderai que l’ordinaire, si cet ordinaire suffit. J’ai idée que ceci sera votre dernière course à Brighton vous pourriez la faire plus longue. Constantin m'écrit que le Roi de Prusse refusera décidément l'Empire, il veut avant tout rester avec ses deux vieux alliés ; il est inébranlable sur ce point.
8 h. du soir. Longue visite encore de lady Palmerston. Grande joie de la réduction dans l’armée et la flotte, en France son en train de désirer L. Bonaparte for ever. Avec les Orléans il y a trop de jeunes mauvaises têtes. Avec les légitimistes trop de vieilles perruques L.B. et l'Empire. C’est ce qu’il y a de mieux. Elle part demain matin pours Londres. Le Prince d'Orange qui vient d'arriver est invité à Windsor avec [?] Ld Palmerston ne l’est pas. C'est fort. Adieu. Adieu. à Samedi Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton jeudi 25 janv 1849

Très petit dîner hier à Holland house. Plus petit même qu’il ne devait être. Macaulay était engaged. Lady Malet dans son lit. Rien que Brougham arrivé la veille et moi avec un peintre et un inconnu (de moi du moins) qui vivent dans la maison. Pourtant le dîner a été agréable. Bonne conversation animée, sur toutes choses. J’ai fait des frais. Je voulais que Holland house parût agréable à ses maîtres. J’ai fait des frais aussi pour Lady Holland, pour lui donner bon air aux yeux de son mari. Elle s'en est aperçue et m'en a su gré. Le ménage a l’apparence convenable. Ils vont passer deux ou trois mois à Paris. Puis ils reviendront à Holland-House quand le parc sera vert et le jardin en fleurs. Lord Holland aime la verdure et les fleurs. Je ne le savais pai si champêtre ! Lady Holland part la première, lundi ou mardi. Elle vous demande vos commissions, vos lettres, vos ordres. Je les lui rapporterai lundi. Elle ne partira certainement pas avant mardi. Elle se chargera de tout ce que vous voudrez, lettres, affaires ; d'inspecter votre appartement, vos gens, vos meubles. Elle est reconnaissante et voudrait l'être encore plus. Elle ira samedi à Claremont prendre les ordres du Roi, et de la Reine. Lord Holland a eu une attaque de goutte effroyable. Il est changé, et se traine avec peine. Lord Brougham en train, bon enfant ; très noir sur Paris. Racontant toujours Arago, encore plus noir que lui. Croyant au progrès et pas au succès des légitimistes. Il n’a pas vu Thiers, ni Broglie. Il a dîné chez Molé, avec Cousin, Mignet, Dupin. Son grand ami du moment, c'est le Roi des Würtemberg, le plus spirituel des Rois, peut-être des hommes. Pas un fait à retenir de tout ce qu’il a dit. Je viens de voir un membre de l'Assemblée nationale un ancien conservateur progressiste, qui repart ce soir, M. Sallandrouze. Celui-là croit au succès des légitimistes. C'était un des suivants de Henri de Castellane. Vous vous rappelez peut-être son nom. Il est bien honteux du passé, bien abattu sous le présent. Grand manufacturier Tapis d’Aubusson. Lord Aberdeen vient de me renvoyer de Drayton. Manor, la lettre de Bulwer. Il me dit qu’il sera samedi et dimanche à Brighton, et me propose de me mener Dimanche entendre un very good preacher. Je me laisserai mener. J’ai une longue et curieuse lettre de Dumon. Je vous l’apporterai. Point de fait nouveau. Une bonne appréciation de la situation. M. Sallandronze a reçu ce matin la nouvelle de la formation probable d’un ministre Lamartine, Billault, Emile Girardin. Je n'y crois pas. J'en aurais presque envie, pour user encore cela. Adieu. Adieu. A après-demain. Mais je vous écrirai encore demain. Adieu G.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton. Vendredi 26 Janv. 1849

Il n'y a pas moyen de me donner lundi. Béhier arrive de Paris. Dimanche soir ou lundi matin. Il ne vient que pour deux jours. Il m’apportera beaucoup de choses. J'ai besoin d'être ici lundi. Je viendrai donc demain à Brighton, selon notre premier plan. J'espère que nous réussirons à causer, un peu seuls. Vous me direz quand vous comptez revenir. J’aime bien Brighton et j'en garderai un bon souvenir. J’aimerai mieux Londres. Duchâtel sort d’ici. Mêmes nouvelles que les miennes. Misérable état des affaires. L'Assemblée veut non seulement durer, mais faire faire les élections par des Ministres à elle. Et si cela arrivait, si les ministres appartenaient à la République et non à la réaction, les élections, s'en ressentiraient beaucoup. Louis B. est encore le drapeau de l’ordre, la population n'en est pas encore à faire les élections en opposition à son ministère. L'Assemblée veut aussi faire elle-même, le budget de 1849 se promettant de se rendre populaire par des réductions d'impôts et de paralyser l'administration entre les mains de ses adversaires. Tout ce qu'il y a de plus personnel et de plus petit ; les personnes étant très petites. Pas une ombre d’idée ou de sentiment public. Dumon dit : " On ne fait plus de politique en France ; il n’y a plus que des intrigues de couloir. " L'Etat intérieur du Cabinet ici se révèle. On en parle partout. C'est sur le discours de la couronne que l’embarras éclate. On ne réussit pas à se mettre d'accord sur ce qu’on dira de l'Italie et de l’Espagne. Il me revient qu'hier Lord Palm. était pris d’un vif retour de goutte, suite de la vive contrariété. Je dîne aujourd’hui chez le Ld. Holland. Il est plus que vous ne croyez au courant de toutes choses. Adieu. Adieu. A demain 2 heures. J’aime bien la veille. C'est le lendemain qui est mauvais. Enfin, bientôt il n'y aura plus de lendemain. Adieu. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton, Vendredi 26 8 h. du soir

Toute une journée prise sans aucun moyen de vous dire un mot. Au reste nous allons vous voir. C'est bien littéralement à quoi nous allons être réduits. Vous voyez que nous nous verrons et que nous ne causerons pas. Metternich s'est déjà tenu en haleine aujourd'hui. Il m'est resté trois heures. Je ne sais rien. Je serai charmée qu’Emile Girardin fut ministre. Il verra ce que c’est, et on en aura fini de lui.
Outre mes yeux j'ai à vous annoncer un pied malade. De sorte que me voilà bien arrangée. Marion a eu une lettre de son oncle. Je trouve tout bien mêlé. On ne s’entend pas. Je ne crois pas au succès des Monarchistes des deux couleurs. Je croirait bientôt plutôt à l’Empire. Au reste vous verrez sa lettre. Mme Roger écrit tristement. Elle ne croit pas trop à la sincérité du Président et malgré des protestations. aux modérés, elle le croit très coupable de s'en aller à la gauche et même à la rouge. Adieu. Adieu. Je suis triste de penser à ces deux jours ce sera un supplice donnez-moi un bonjour. En attendant bonsoir Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton Lundi 29 Janv. 1849
3 heures

Je ne trouve rien en arrivant. que Duchâtel qui n’avait pas même vu le Morning Chronicle et à qui j’en ai appris les nouvelles. Il avait des lettres de vendredi soir, fort noires ; craignant la défection, sinon la trahison du Président. Il a déjà mangé son revenu de l'armée. Il a déjà des dettes. Les Montagnards lui promettent de l'argent. Parmi les modérés, quelques uns paraissaient intimidés. Paris ne demande pas la dissolution de l’assemblée, aussi ardemment que les Provinces. Cependant l'opposition au président fait des progrès rapides. Même le salon de Mad. Lehon est un salon d'opposition. Morny approuve. Il a écrit Vendredi à Flahault, Trés noir aussi. Voilà les journaux. Rien que le détail des faits que nous savons. Je ne les ai pas encore lus. Vous les aurez dans une heure. Aucune lettre directe ne m'arrive. J'en aurai probablement d’indirectes dans la matinée.
Béhier n'est pas arrivé. Point de lettres de lui. Evidemment Paris est, ou s'attend à être sans dessus-dessous. Je crains la pusillanimité. Adieu. Adieu.
Une journée charmante hier si quelque chose m’arrive, et que je sais encore à temps, vous l’aurez. Adieu, adieu dearest. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Lundi 29 Janvier
Midi

Puisque le bill contre les Clubs a été porté au nom du Président ne s’en suit il pas que l'impeachement. contre les ministres à propos de ce bill atteint le Président aussi ? Voilà ce que ma sagacité à découvert un moment après votre départ. J'ai découvert aussi que je reste bien triste mais confiante. Cela vous convient-il ? 8h. du soir Mes yeux sont bien irrités. Evidemment cet orgueil m’a fait beaucoup de mal. Quels imbéciles. C'est du médecin que je parle. Metternich avait une lettre de Paris très inquiète sur ce qui peut se passer. dans les rues. Il faut que je vous dise ce qu’affirme Marion. C'est que Billault est tout-à-fait Empire. Comme je suis curieuse de la journée d'aujourd’hui. Un arrangement, un compromis, me parait impossible Les journaux anglais annoncent positivement une réduction de l'armée. Vous souvenez-vous de ce que me disait hier Lord Aberdeen. Adieu. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton. Mardi 30 Janv.1849
9 heures

Voici ma lettre pour Humboldt Ayez la bonté de la lui envoyer par Constantin que je remercie d'avance de la peine que je lui donne. Voici de plus, dans la lettre de Humboldt, la phrase que je voulais montrer au Prince de Metternich qui ne pense probablement trop bien de la politique de notre savant confrère. Il faut rendre justice. « Nous lisons... votre démocratie. Vous avez sondé des plaies dont nous souffrons également davantage encore, parce que nous avons, avec beaucoup de métaphysique, aucun sens pratique, parlant sans cesse de l’unité des races et nous séparant individuellement en atomes qui se repoussent, et désirent fonder un pouvoir central qui rendra impossible de gouverner dans chaque partie de la confédération. " Ce n’est pas mal résumé. Je n'ai rien reçu hier que cette lettre de l'élection d’une Assemblée nouvelle qui fera Louis B. Empereur. Cavaignac disait ces jours-ci : " Ne croyez pas, messieurs, que vous nous ferez avaler la Monarchie comme nous vous avons fait avaler la République. - Général, vous en serez dispensé ; vous serez tué. " Le Prince de Joinville et le duc d’Aumale sortent de chez moi. Me racontant tout ce qu'ils ont appris. En train pour eux-mêmes, empressés pour moi. Se répandant en compliments sur ma bonne fortune dans le sort d'Odilon Barrot. Quelques retours sur le passé. " La bataille morale avait été perdue le Mercredi 23 quand le Cabinet est tombé. Elle ne pouvait pas être regagné le jeudi 24 février, par [?] général." C’est ce que dit M. le Prince de Joinville. La Reine toujours très faible Pas plus mal, mais pas mieux. Le Ld Chomel est venu avant-hier et repart ce soir. Il n’a pas d’inquiétude imminente. La Reine est très découragée.
3 heures 1/2
J’ai été interrompu par Charles Greville. Bien boiteux. Rien de nouveau ici. Plein de Paris. Adieu. Adieu. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Mardi 30 Janvier 1839(sic)

Les yeux vont un peu mieux, mais ils sont toujours irrités et moi je le suis beaucoup contre mes médecins. Je suis bien curieuse. Tansky écrit qu'on va à l'Empire. Lui même n'a aucun doute. Le croyez-vous ? Du reste sa lettre ne dit rien que nous ne sachions. J'ai dicté une longue lettre à l'Impératrice.
8 h. du soir Lord Brougham est venu et m’est resté 3h. au moins. Il a vu Lady Holland revenant de Claremont. Elle croit la reine mourante. J'ai vu la 2nd édition du Times racontant la journée d'hier à Paris et la promenade à cheval du président. Il n'a qu’à faire tout juste le contraire de ce qu'a fait Louis Philippe : garder son ministère et exposer sa personne et sa cause est gagnée. Vous savez que je le protège. Je serai charmée de le voir se bien conduire. Voici ce que Schwarzenberg a dit à lord Ponsonby. " Je n'envoie pas un archiduc à Londres parce que je ne peux pas exposer un Prince de la maison impériale à rencontrer l'ennemi acharné de l’entente. Voici votre lettre. Et voici la copie de celle de M Armand, ami d' Odillon Barrot. Je vous pris de me renvoyer celle- ci tout de suite. L'intérêt commence à la 3ème page. Adieu. Adieu.
Vous voyez bien que Beyer était une pauvre raison de me quitter ! Adieu.
La mission de Neumann à [?] avait pour objet d’obtenir que la France fût toute seule une expédition pour rétablir le Pape à Rome. L'Autriche ne l'a pas voulu, mais elle demande à son tour à la France de laisser faire cela au Roi de Naples, et que la France et l'Autriche regardent et restent l'arme au bras. Le cabinet prussien a adressé une circulaire à tous les agents diplomatiques, pour déclarer son intime alliance avec l'Autriche et la résolution. de refuser l’Empire. Tout ce que je vous dis là vient de source.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Brompton, mercredi 31 Janv. 1849
9 heures

Hier à 6 heures, j’ai eu enfin des lettres. Je vous en envoie trois ; le duc de Broglie, M. d’Haussonville, et une troisième, très petite écriture, que je vous prie, cependant de lire vous-même, et vous seule. Elle est courte. Vous y trouverez l'explication de la lettre de Molé. Mon premier mouvement a été d'être fort contrarié, cependant, à tout prendre, je crois qu’il vaut mieux que ce qui est arrivé soit arrivé. C’est un embarras de moins dans les situations. Je gronderai et je pardonnerai. J’avais bien fait de recommander, aux deux ou trois personnes à qui j'en avais parlé de ne rien dire du petit subterfuge de M. Molé. La lettre du duc de Broglie est écrite avant la crise et ne roule guères que sur ce qui me touche. Très noire et desponding sur la situation générale. M. d’Haussonville un peu moins. Le séance d’hier aura été décisive si le débat a fini. Ou la reculade de l'Assemblée, ou l'expulsion de l’Assemblée, ou le reculade du Président devant l’Assemblée, il faut qu'une de ces trois choses là arrive. Je crois à la première. C'est ce que m'indique le vent de Paris. Je trouve que les grands préparatifs militaires du Cabinet ont plus l’air d’un acte d’intimidation que d’un prélude de combat. Duchâtel est venu dîner hier avec moi. Il avait des lettres aussi dans ce sens-là. Et sombres aussi. Si l'Assemblée recule, nous aurons les élections fin de mars. Si le Président expulse l’Assemblée et fait des élections, la prochaine assemblée le fera Empereur. Si le Président recule et livre son cabinet, la crise se prolongera, et la prochaine assemblée qui viendra je ne sais quand, chassera le Président et la République. Voilà le résumé de nos conversations. Mais encore une fois, je crois à la reculade de l’Assemblée. Pendant de l'abdication du 24 Février. La poste arrive et ne m'apporte rien de Paris. Ni lettres, ni journaux. Je les aurai à 3 heures. Merci de la lettre de M. Armand. Intéressante. Je vous la renvoie. Renvoyez-moi je vous prie, tout de suite mes trois lettres de Paris. Les Princes quoi qu’ils m'aient dit le contraire sont ; au fond, de l’avis de Lady Holland, et croient leur mère très malade. Cela perce dans leurs paroles. Je sais positivement de ce matin, que Chomel est parti hier au soir très inquiet. Point de lésion organique nulle part ; mais un dépérissement général, lent, progressif. Chomel dit que cela a commencé à la mort du Duc d'Orléans. Le Roi n’est pas très inquiet. Il ne ne veut pas l'être et on ne veut pas qu’il le soit. S’il l’était, il ferait un mal énorme à la Reine par son agitation ses explosions de tous les moments. Elle a surtout besoin de repos. J’irai samedi à Claremont.

Une heure
Voilà le Daily News. L’Assemblée a en effet reculé. Et sur le rapport Grevy et sur la loi des Clubs. Bien petite majorité qui ouvre la porte à toutes sortes d’amendements et de transactions. Mais enfin toute crise ajournée, et très probablement l'assemblée se dissoudra dans le cours du mois de mars, et les élections se feront en avril. Je ne rentrerai qu'après. Gabriel Delassort sort de chez moi. Arrivé avant-hier soir, il repart Samedi. Rien de plus que ce que nous savons. Ne croyant pas au succès des légitimistes. On passera par l'Empire. Ni lui, ni son fière ne veulent être élus à la prochaine assemblée. Il m'a lu deux lettres venues hier de sa femme et de son frère. Adieu. Adieu. On doit m'apporter aujourd’hui la circulaire Prussienne. God bless your eyes ! Adieu, Adieu. G.
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