Guizot épistolier

François Guizot épistolier :
Les correspondances académiques, politiques et diplomatiques d’un acteur du XIXe siècle


Votre recherche dans le corpus : 139 résultats dans 5493 notices du site.
Collection : 1849 ( 1er janvier - 18 juillet) : De la Démocratie en France, Guizot reprend la parole (1848-1849 : L'exil en Angleterre)

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00199.jpg
West Molesey Mardi 6 février 1849

Je ne puis partir d’ici qu'à 4 heures. Je ne sais si j’arriverai à Brompton assez tôt pour le poste. Je ne veux pas qu'une lettre vous manque. Après-demain, à 2 heures nous serons ensemble. J’ai reçu hier au moment où je partais un billet de Lord Aberdeen qui me dit : « Have you any thought of going to Brighton in the course of some days ? I should be very glad, if possible, to meet you there, whenever it may be. " Je lui réponds pour l'engager à être à Brighton vendredi 9, entre 2 et 4 heures. Nous aurons ainsi notre journée préalable. Cela vous convient-il ? Bonne conversation ici. Et utile pour l'avenir. Car je persiste à croire à un avenir. Je trouverai, en arrivant ce soir à Londres, des nouvelles de la journée d’hier à Paris. Le Morning Chronicle m'a fait dire qu’il m’enverrait à midi et demie les nouvelles de la veille, toutes les fois qu’elles auraient quelque importance. Adieu. Adieu. Dans tous les cas, je vous écrirai demain matin de Brompton. Je trouverai votre lettre aujourd'hui en y arrivant. Il n’y avait pas moyen de me la faire envoyer ici. Adieu, Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00195.jpg
West Molesey Lundi 5 fév. 1849
9 heures et demie

Le Roi nous a retenus très longtemps à Claremont. J’ai tout juste le temps de tenir ma parole. Rien de nouveau dans la conversation. Il ne savait rien. La Reine n’est point bien quoiqu'un peu moins faible. J’ai causé avec le médecin. On a aperçu un commencement, d'infiltration d'eau dans les entrailles. On lui met depuis hier des vésicatoires. M. de Mussy est très inquiet. Le Roi ne veut pas l'être et je crois vous avoir déjà dit qu'on ne veut pas qu’il le soit. Les Princes à Londres, sauf le duc et la duchesse de Nemours qui se promenaient dans le parc. Je n’ai vu le Roi seul que deux minutes, Croker était là tout le temps. Adieu. Adieu. Paris est bien chaud. Je dis plus que jamais que deux mois pareils sont impossibles. Ou un autre Cabinet, ou l'expulsion de l’Assemblée. Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00324.jpg
Richmond vendredi le 29 Juin Midi.

Votre lettre est bien touchante et tendre et m’a bien touchée. Oui, je suis plus triste que vous, cela tient à nos caractères, j'espère moins et je suis si seule ! Il est si impossible de deviner ce qui peut nous arriver à l’un et à l’autre ? La seule chose sûre, c'est la séparation et pour assez de temps. Comment voulez-vous que je ne pleure pas ?
Je viens de recevoir une lettre d’[?] que je vous montrerai. Il est probable que la grande Duchesse Marie viendra passer 3 semaines en Angleterre. Cela peut se croiser avec mon voyage à Paris, il faudrait y renoncer, le retarder. Albrecht veut absolument que je prenne l’entresol place Vendôme. Je ne veux pas me lier. C’est bien bas, il me semble que je dormirais mal. Je veux choisir moi-même.
Je crois que Marion & Aggy reviendront ici demain. Elles vont aujourd’hui en ville. Les parents sont doux & charmés qu'elles s'amusent. Quand je me couche elles vont chez les Metternich, là elles chantent & dansent jusqu’à minuit. Moi je me sens bien lasse et nervous. Je vais ce matin. à un déjeuner chez lady Douglas, j’y verrai du monde, et cela ne m'amuse pas. Les jours vont se presser, se passer. Et le terrible jour arrivera. Quel néant pour moi ! Alors, comme je trouverai doux d'être à Richmond, vous à Brompton, sans nous voir. Qu’est-ce que cela fait ? On se sent près l'un de l’autre, on peut se voir dans une heure. Toute la différence du possible à l’impossible. Ah que je suis triste. Adieu. Adieu, & demain adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00299.jpg
Richmond Vendredi le 22 juin
6 heures

Je me sens toute malade aujourd’hui. Accidents d'entrailles. J’ai été cependant en ville. J’ai vu lady Palmerston plus anti autrichien que jamais et anti russe aussi à ce qu'il me semble. Sur la France des doutes, un répit voilà tout, enfin ce que nous disons. La duchesse de Sutherland a perdu hier une petite fille charmante, cela aura sans doute dérangé votre matinée. Le temps est ravissant, mais je ne suis pas en train d'en profiter. Voici un mot de Lady Holland Personne n'est venu me voir aujourd’hui, et je ne compte pas sortir ce soir. Hier j’ai trouvé un Cambridge chez Metternich. On dansait. Grand Dieu quel tapage ! Je n’y ai pas tenu plus de 20 minutes. Adieu. J'ai besoin de repos. J'ai des maux de reins assez forts. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00304.jpg
Richmond Samedi 23 juin 1849
5 heures

Par une succession d’accidents trop longs à raconter j’ai été retenue à Londres jusqu’à 3 1/2. Il était trop tard pour aller chez vous, d’ailleurs c’est toujours si court & si gêné ! Jai vu Lord Holland. Il blâme le mouvement réactionnaire. on fait la guerre à la république rouge. Il faut la réprimer mais pas la battre. Enfin il est opposition. Pas de nouvelles. Viendrez-vous demain ? Vous me le direz sans doute aujourd’hui. Je me presse, j’arrive, & je crains que ma lettre n’arrive à la poste trop tard vu le Samedi. Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00279.jpg
Richmond Samedi 11 heures
le 16 Juin

J’ai dormi, je m'étais couchée le cœur content & réveillée de même. Je trouve que demain est loin ! Voici une lettre de Marion que vous me rendez. Quelle charmante fille. Comme la tirer de là. Quel péché de la lasser croupir dans ce sot ménage. Je n’ai pas vu les Metternich hier, il n'était pas bien. Lady Allen est revenue au moment où j’allais me mettre au lit. Elle avait manqué le chemin de fer. Adieu. Je suis encore fatiguée, mais quand on a le cœur en place. Le reste est peu de chose. Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00361.jpg
Richmond Samedi le 14 Juillet 1849

En repassant chez moi après vous avoir quitté hier, j’ai trouvé Ellice & mon fils qui venaient d’arriver. Le premier en demandant à dîner. Le second m’annonçant son départ pour une tournée en Angleterre ; il part ce matin fuyant le choléra de Londres et les mauvaises odeurs dans le quartier qu'il habite. il m’a quitté à 7 1/2 de sorte que je n’ai pas causé seule avec lui. Ellice m’a dit que la discussion de la chambre des Pairs était ajournée à vendredi & que la motion de Brougham était fort hostile. Du reste point de nouvelles.
Rodolple Cousin m'écrit de Paris assez tristement sur les affaires en France. Misère, mauvais esprit, impossibilité de continuer comme on est.
Je crois que la place Vendôme me conviendrait mieux. Je flotte. Quoique je fasse j'aurais mieux fait je crois d’épouser Célimène Est- ce bien là ce vers ? Le petit Cousin à moi m'écrit de Pétersbourg. Tout le monde y est triste. Je vous montrerai demain ces deux lettres. Je suis de nouveau un peu souffrante des entrailles ce matin. Est-ce que le choléra serait venu à Richmond ? Adieu à demain. Je ne répèterai plus cela qu’une fois. Ah il y a de quoi mourir de chagrin et je suis bien triste ! Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00346.jpg
Richmond Samedi le 7 juillet 1849

Vous souvenez-vous qu’Hélène dans sa dernière lettre me disait : " Vous verrez la Grande Duchesse Marie à Londres ou ailleurs. " Je vois dans Le Times que le duc de Leuchtenberg est attendu à Paris. Voilà qui est fort inattendu pour moi. Si cela est, c'est là que j’irai la voir.
Mon malaise continue. Mes jambes vont mal. Le temps est cependant bien doux aujourd’hui, votre course sera agréable. J'ai voulu vous dire un mot, j'écris de bonne heure aussi. Peel n’a pas dit un mot de la politique extérieure. Quelle lâcheté. Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00314.jpg
Richmond le 27 Juin 1849
Mercredi 5 heures

On vous a vu hier au bal très tard, à quelle heure en êtes-vous sorti ? Je rentre de chez Lady Allen. De la causerie avec lord Harry Vane et Lord Chelsea. Tous les deux de l'esprit. Vane croyant que la seule chose à faire aujourd’hui c’est de soutenir le Président. Le seul homme assez remarquable dans le Gouvernement Falloux. Fort considéré, et aimé du Président. Quoi qu’il le sache très légitimiste J'ai écrit une longue lettre à l’Impératrice, j’avais du temps, je ne sais plus ce que je lui ai dit. Je crois que je lui ai dit que c’était drôle de vous voir courir les bals. Encore si vous y attrapiez des maris. Mais on ne les trouve pas. Marion ne m’ayant pas écrit, je suppose qu’elles vont me revenir. J’ai été chez Mad. Metternich hier soir. Le Prince n'était pas visible, il avait été mal. La nuit. Tout le monde était resté levé jusqu’à 2 heures. Ni Rome, ni Hongrie. C’est tout. J’ai lu la discussion à l'Assemblée, Tocqueville n’a pas mal parlé. Voilà que je n'ai plus rien à vous dire. Si vous étiez là, il n’en serait pas ainsi, Marion & Aggy arrivent. dans ce moment. Mad. Rothschild a eu une lettre de Changarnier qui lui dit qu'il a refusé le bâton de Maréchal. Il trouve cela trop tôt ! Adieu. Adieu. & adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00370.jpg
Richmond Mercredi 18 juillet 1849
Onze heures

Je veux encore essayer de vous faire parvenir deux mots à Londres. Cette pensée si douce que vous êtes à une heure de distance, il y faut donc renoncer. Renoncer à tant de bonheur ! Ah mon Dieu Hier mes genoux ont fléchi quand vous avez fermé la porte. Je suis restée en prières. J’ai tant prié, et toujours une seule & même prière. Je n’ai pas pleuré. Le moment même d'un grand chagrin me trouve sans larmes. C'est de l’étonne ment. Tout est suspendu en moi. Je me suis mise à la fenêtre, presque sans pensée. Je ne sais ce que j’ai fait ensuite. Je me suis couchée. J’ai dormi un peu, pas beaucoup et je me lève, la désolation dans l'âme !
Une lettre de Constantin de Berlin. L’Empereur est parti subitement de Varsovie pour aller surprendre l'Impératrice le jour de sa fête le 13. Il ne devait passer à Pétersbourg que deux ou 3 jours. Un moment de halte dans les opérations. On veut toucher en masse sur l’armée véritable des rebelles. Tout est calculé. On ne doute de rien, et dans 15 jours ou 3 semaines l’affaire de la Hongrie sera terminée. A Berlin, grand changement dans les esprit même les plus sages. L’unité, l’unité au profit de la Prusse ; les succès dans le Palatinat & dans le grand-duché de Bade ont tourné toutes les têtes. grande haine contre l’Autriche, mille soupçons. Le roi, la reine & une partie du ministère résistent seuls à cet entrainement. Mais la bourrasque est bien forte. Prokesh et Bernstorff sont incapables de rien arranger. Il faut changer ces deux instruments. L’armistice avec le Danemark mécontente beaucoup les Allemands. Enfin beaucoup de fronde à Berlin.
Adieu. Adieu, cher bien aimé, adieu. Voici les larmes. Je m’arrête. Adieu. Dites un mot, pour que je sache que vous avez reçu cette lettre. Voilà du vent. J’ai peur pour cette nuit. Passez-vous sur un bâtiment anglais ou français ? Je ferme ma lettre à 2 1/2. Je l'adresse chez Duchâtel. C’est plus sûr. Mon messager reviendra de la directement. Adieu. Adieu, mille fois. Mon cœur se brise. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00338.jpg
Richmond le 4 Juillet 1849

J'aurais parié hier ma vie que vous ne viendrez pas aujourd’hui, et j’aurais gardé ma vie. Mais ne parlons pas de cela. Nos jours sont comptés. Si d'un côté cela devrait disposer à être avare de nos bons moments si courts et si rares, d’un autre côté cela m'impose de ne point quereller. Ainsi encore une fois n'en parlons plus. Voilà donc Rome soumise J'en sens bien aise. Mais encore une maladresse tout au bout. Bideau envoie lorsque Oudinot achève ! Au reste voici les embarras qui commencent.

7 heures
Lord Aberdeen est venu. J’espère que vous avez vu l’article de Thiers sur l’Espagne. Admirable Lady Allen, Peel, lady [?] Flahaut, Koller. Abondance aujourd’hui, Metternich va plus mal. Il s'affaiblit. Il ne peut plus marcher on le porte. On persiste à dire qu'il n’y a pas de danger. Cela n’est pas possible. Les Ellice sont partis. Cela me fait un vrai chagrin et un grand vide. Adieu. Je crains de manquer la poste. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00313.jpg
6 ½ heures Mardi 26 juin
Je trouve cette lettre en rentrant, je vous l’envoie, renvoyez la moi. Quel bon temps ! Passé hélas. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00287.jpg
Richmond Mardi le 19 juin

C’est cela. L'absence est cause de tout. Ensemble, toujours ensemble, et il n’y aurait jamais de nuage, et je suis condamnée aux accident de nuages ! Ma vie ne sera plus longue et je crains qu’elle ne soit triste ! Qu’allons nous devenir. Je ne vois rien de clair, rien de bon. Je passe mes nuits à penser à cela. Je vous renvoie la lettre de Beyier. Elle m’a intéressée. Vous voyez, lui aussi pour le président. Il m'est venu hier beaucoup de monde. La duchesse de Beaufort, lady Wilton, la princesse [Crasal?] les Delmare. Le soir j’ai passé un moment chez les Metternich. Il est bien tout-à-fait !

5 heures Je rentre de ville. Déjeuner manqué à droite et à gauche, j’ai fini par le prendre au Clarendon. La duchesse de Cambridge sombre pour l’Allemagne je ne sais pourquoi. Une longue lettre de Constantin du 8. Des forces immenses le 14 ou 15 au plus tard on attaquera sur toute la ligne. Lui-même venait de recevoir l’ordre de départ n'osant pas dire où. Paskevitch parti le 10. L'Empereur allait à Cracovie. Le 14. Lenchtenberg. Mouralt ainsi que la fille du G. D héritera. L'Empereur toujours en pleurs. Le temps est laid. Je ne suis pas sûre d'aller demain en ville. Il faut que je sois ici à 4 h. En tout cas je serais pressée. Si je ne viens pas vous m'écrirez, & puis lundi vous viendrez. Adieu. Adieu. Adieu.
Je vous envoie le relevé des forces.
205 bataillons
187 Escadrons
370 Pièces d’artillerie
Voilà Russes et Autrichiens
De plus Tellachich 45 000 hommes & les Services venaient d’offrir 50 000.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00351.jpg
Richmond Mardi le 10 juillet
3 heures

Je n’ai vu personne encore. Constantin m'écrit de Varsovie. Lettre toute militaire. Succès de tous les côtés, Pesth va être pris. Amoureux de l'Empereur d’Autriche. Il m'annonce la mon de la petite Grande Duchesse. Hélène me dit que Leuchtenberg va mieux, mais il mourra. Il ira à Madère, sa femme, non la Princesse [?] a vu hier à St Léonard la duchesse d’Orléans triste ; adoration de la France. Il n’y avait point de Dumon & & là Adieu. J’ai écrit à Aberdeen. Hier était charmant. Il me gâtera un peu demain. Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00261.jpg
Richmond mardi 5 Juin 1849

Le temps est lourd et accablant. Si j’étais à Londres, je serais morte, c’est comme cela que je me console d’être à Richmond. Je ne trouve rien dans les journaux français. Le constitutionnel regrette que Bugeaud ne fasse point partie du ministère, mais il compte que la majorité restera unie. Il ne nomme pas Dufaure. Rome, Rome voilà la curiosité aujourd’hui ! Je vais dîner chez lady Allen. Je ne sais qui j'y rencontrerai. 6 heures. Les Colloredo, la marquise Douglas, et Mme Metternich rien que cela. Les Infants d’Espagne partent ou sont partis pour [?]. Le mariage est rom pu. Il s’est conduit comme un sot. Rien de nouveau du tout. Je n’ai pas eu de lettres. Adieu. Adieu. Demain. J'espère vous voir. Je vous recommande de. lire la lettre du Triumvir à M. Lesseps 24 mai, elle est très bien faite. Les r[?] à lui sont pitoyables. Voici un mot de Metternich que je vous envoie.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00306.jpg
Richmond lundi le 25 Juin 1849
11 1/2

Je commence ma lettre avant d’aller à Londres. J’ai été si ... j'allais dire heureuse hier lorsque m'est venue une lettre de Londres à laquelle il a fallu répondre de suite, l'heure pressait je suis partie & je rentre en ce moment. 5 heures. Je continue. Mon bonheur reviendra demain et de bonne heure. J’ai vu lady Jersey, lady Grainville, et Sir H. Seymour ministre au Portugal, vieille connaissance de l’esprit. Si je ne me trompe un peu frondeur & pas en adoration & son chef. Thomas est à la tête des Ministère, il dit que c’est trop tôt, mais il fait son éloge. Un peu aussi celui de Narvaez. Un peu de moquerie de Bulwer. J'ai ramené ici lady Allen ce qui m’a fait un retard. Hier j’ai passé une heure chez lord Solen. Toujours Rome en première ligne & ne concevant pas comment peut finir cette affaire. Une grande moquerie du roi de Prusse et de [?] accusation de mauvaise foi même du Roi de Prusse envers la roi de Hanovre. Je m’exprime mal, c'est le Roi de Prusse qui est le trompeur. C'est long à conter. Du reste point de nouvelles. J’irai peut être dîner chez Metternich mais je n'en suis pas sûre. Adieu et adieu. Je me réjouis tant de demain ! Adieu. & Voilà

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00283.jpg
Richmond le 18 Juin
Lundi 5 heures

Hier les John Russell tous seuls copiant des vers de lord Byron. Il croit que l’assemblée va statuer quelque chose sur la situation du Président. Il ne sait quoi. Drouyn de Lhuys sera nommé ambassadeur ici. Dufaure a dit à Normanby. " Les soucis de tribune, c’est des bêtises ! Le pouvoir c’est tout, je l'ai, et je le garderai. " Mon Empereur mécontent de roi de Prusse. Voilà tout ce que j’ai relevé de la conversation hier. J’ai rencontré Duchâtel dans la rue. Delessert lui mande qu'on s’est fort battu à Lyon, on a tiré des forts. Cela a bien fini, & tout cela est bon. Je rentre, le temps est charmant, & la promenade avec vous serait plus charmante encore. Des visites. Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00365.jpg
Richmond Lundi le 16 Juillet 1849 8 heures

J'ai beaucoup dormi mais je me sens encore plus fatiguée qu’hier et sans le moindre appétit. Deux cuillérées de bouillon viennent de me redonner des crampes. C’est bien ennuyeux mais qu’est-ce que ma santé à côté du malheur inévitable de votre départ ? Je ne me comprends pas, sans vous, sans la possibilité de vous revoir. le lendemain. Je reste hébétée quand je pense à cela, et j'y pense sans cesse !
Lady Alice Peel est venue un moment ce matin. Elle ne sait rien. La situation des Français à Rome me parait terrible. Comment cela finira-t-il ? Adieu que puis-je vous dire ? Je ne sais rien, et je ne trouve dans mon propre fond que misère, tristesse, désolation. Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00332.jpg
Richmond lundi le 2 juillet 1849

Voici votre lettre, je vous renvoie celle de Darn. Curieuse chose que Thiers. Au fond j'aimerais assez que vous vous vissiez ici, à part mon intérêt de vous garder quelques jours de plus. Cela ne serait-il pas possible ? J’ai vu hier lord John. Les nouvelles de Paris ne sont pas bonnes. Dufaure est un empêchement. Normanby a mauvaise opinion de la boutique. Il avait causé avec tous ; président, ministres, journaux. Le socialisme règne d’une manière effrayante dans les provinces. Deux millions de Socialistes, prouvés par les votes. Sur Rome O. Barrot a dit à Normanby, qu’Oudinot avait outrepassé ou dénaturé ses instructions. Que Lesseps avait méconnu les siennes que de là provenaient tous les embarras, les contradictions. John Russell observe, que cela prouve seulement que les instructions n'étaient pas claires. Il est en grand blâme de tout cela, et il dit que cette affaire contribue grandement au mauvais esprit. qui règne en France. Lord John s'attend à un superbe discours de Peel aujourd’hui ou demain en faveur du gouvernement il m’a beaucoup parlé de Peel avec étonnement de sa conduite, comme nous en parlerions nous mêmes.

Midi, Je vous écris de bonne heure pour vous renvoyer Daru. Si j’attrape quel que chose je vous écrirai encore. En tout cas nous nous verrons demain. Adieu. Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00357.jpg
Richmond jeudi 12 Juillet 5 heures 1849

Votre question sur ma santé hier, ne m’a pas réussi. Je me suis réveillé les entrailles malades. Me voilà au régime, et un peu effrayée. Je suis sortie cependant. J’ai vu lord Beauvale, bien spirituel et sensé. Les Palmerston viennent passer la journée chez lui dimanche. Lord Brougham et Ellice y viennent Samedi. Je suis plus triste que de coutume aujourd’hui parce que je me sens malade. Avec de la santé on croit plus facilement à ce qui plait, à ce qu’on désire. Dans huit jours, avant même, comme je serai misérable ! Ah quelle tristesse que votre départ. Adieu. Adieu, à demain.

N'oubliez par lord Aberdeen Adieu. Voici Albrecht. C’est un peu dur. Il est trop tard pour que ma lettre parte ce soir pour Paris. Je me ravise, il sera temps encore, ainsi je ne puis plus vous consulter. 10 000 pour 6 ans. 11 000 pour 3 ans.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00270.jpg
Richmond Jeudi le 7 juin

Rien de nouveau. Ma lettre de Lady Holland renfermant seulement ceci. Le Président a dit dans son intimité la plus intime qu'il faisait ses paquets, & qu'au premier vote insolent ou récalcitrant de l'Assemblée il partirait pour l'Angleterre, laissant une lettre d’adieux à la France & charmé de ce débarrasser d’elle. Aberdeen était venu pendant que j’étais en ville J'ai manqué lord Lyndhurst aussi & Koller. Que faire ! Le soir chez Metternich, rien de nouveau. Je vous écris de bonne heure aussi, comme vous m'avez promis de le faire, afin que ma lettre vous parvienne dans la journée. Une lettre de Marion rempli d'esprit, mais sans un mot de nouvelle. Furieuse de [?] des bombardements annoncés. " Quel prix à payer pour le rapiècetage(sic) du pauvre. Lambeau qui reste de l’honneur français. " Adieu. Nous sommes bien loin l’un de l’autre. Pourquoi n'êtes-vous pas à Richmond & Marion avec ? Voilà des perfections auxquelles on n’atteint pas dans ce monde. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00342.jpg
Richmond jeudi le 5 juillet 1849

Je n'ai encore vu personne aujourd’hui que lady Jersey. Je ne sais donc que les journaux. Une lettre d’Albrecht bonne. Il [?] & Kisseleff essaie de rattraper pour moi là rue St Honoré. Je désire ; mais je doute. Une fois à Rome, qu’allez- vous y faire, et d’abord quel drapeau arborerez- vous ? Que de complications à prévoir. Albrecht dit que les puissances doivent ménager la situation de la France et reconnaître qu’elle a rendu un grand service à l’Europe par cette triste campagne. C’est sans doute le dire de Kisseleff voilà pourquoi je cite. Metternich va toujours de même. Les forces s'en vont, c'est là le côté alarmant. L’appétit est parti aussi, il ne veut rien prendre. J’ai été interrompue par le duc de Beaufort & les Delmas. Ce n’est pas là où l’on trouve des nouvelles. Adieu, je vous attends donc demain à cinq heures. Ce sera bien court, c'est toujours trop court. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00272.jpg
Richmond Dimanche 10 Juin

Voici un mot de Metternich. Vous ne m'avez pas envoyé la revue, je n'ai absolument rien à lire, & ceci m’aurait aider à traverser un peu mieux le Dimanche. J’étais prié hier au soir chez Lord John, mais arrivée là à 9 1/2. J’ai attendu une demi-heure. On ne sortait pas de table, je les ai planté là, je n’ai donc vu personne, & je n'ai rien à vous raconter, sinon que je n'ai pas dormi cette nuit, & que j’ai fait mille plans dont pas un agréable ; c’est qu’il n’y a plus moyen pour moi de rien trouver, de rien rêver, qui me convienne, ou qui soit convenable. Triste destinée ! Je crois que le choléra dispensera des explications à l’Assemblée. Ils auront peur d’être pris de la maladie, on ne siègera pas. 3 heures. J’ai vu lord John un moment. Il ne fait pas l’éloge de Bugeaud, et dit sur lui à peu près ce que Piscatory m'écrit . Il affirme. que le gouvernement français nie qu’on soit convenu de quoi que ce soit à [Gach] Il déplore beaucoup l'attaque sur Rome, et il dit après que fera-t-on ni le Pape, ni les Romains ne veulent rien devoir aux Français. Réflexions générales sur ce qui se passe dans le monde, la faute c’est qu'on ne parvient pas à l’entendre sur aucune question. Voilà à peu près. Il fait aussi froid ici qu'à Pétersbourg. Adieu. Adieu.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00348.jpg
Richmond Dimanche.
Le 8 juillet 9 1/2

J’ai passé une nuit blanche, je n’ai pas la force d’aller à Londres. Je vous en préviens bien vite. Pouvez-vous venir je vous ramènerai jusqu’à Putney plus tard. Venez le plus tôt que vous pourrez car je crains le monde le dimanche. Peut être dînerez- vous ici ? Adieu. Un mot de réponse.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00328.jpg
Richmond Dimanche 1er Juillet 1849

Le voilà commencé ce vilain mois dans lequel doit commencer notre séparation. Ah que ce sera dur comme hier encore était charmant. Comment nous passer de cela ? Marion et Aggy sont revenues. Ellice a reçu une nouvelle lettre de Thiers hier matin. Il sera ici le 20 juillet avec tout son ménage. Le 10 août il veut être de retour à Paris. Il écrit en bonne humeur & bonne espérance. Il dit que la majorité est excellente. Ferme, décidée. Plus de batailles à craindre dans les rues. J’ai été chez Metternich hier soir. Il était bien, et de bonne humeur ; l’accident & l'inquiétude étaient passés.

4 heures
Je rentre d'une longue promenade à Hampton court. J’ai voulu montrer au moins les jardins à mes petites. Le temps est charmant. Vous auriez aimé cette course. Qu’apprendrons-nous demain ? 6 heures. Voici les Duchatel. Il faut fermer ceci. Adieu. Adieu. Adieu.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00253.jpg
Kimbolton. Castle. Mercredi 21 mars 1849

Vif déplaisir ce matin en ne recevant pas de lettre. Puis, je me suis aperçu que j’avais tort, et que vous n'aviez pas dû m'écrire, m'attendant aujourd’hui. Deux lignes seulement pour vous dire que j'aurais bien certainement fini, ce soir mes lectures, et mes extraits et que je partirai demain comme c’est dit. Donc à demain soir. J'espère avoir une lettre demain matin. On m'envoie ici une lettre de Lady Jersey qui m'invite pour hier soir, et à dîner pour Vendredi. Je lui réponds que j’irai dîner vendredi. J’ai tant refusé, qu’il faut bien accepter une fois. Point de nouvelles, car la guerre du Piémont n'en est plus une. Je n’ai pas encore lu le Manifeste du Roi Charles Albert. Si la lutte se prolonge et avec un peu d’incertitude, cela pourrait bien amener quelque complication. Adieu. Adieu. Je retourne à mes papiers deux petites lettres de Paris. Insignifiantes. En voici une de Saint-Aulaire à qui j’avais recommandé un pauvre homme. Vous me la rendrez. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00246.jpg
Kimbolton Castle. Mardi 20 mars 1849.

20 mars ! Quel jour, il y a 35 ans! Louis XVIII avait fui de Paris dans la nuit. Napoléon y entrait le soir. très tard, et en se cachant, quoique le maître. Trois trônes sont tombés à Paris depuis ce jour-là. Trois Rois ont fui de nouveau. Et qui sait ?
Merci de votre lettre. Je l’avais ce matin, à 5 heures et demie. Vous d'abord. et puis des nouvelles. Mais voici un grand déplaisir. Il m’est absolument impossible d’en finir aujourd’hui avec les papiers. Il y en a plus que je n'en attendais. Il me faut la journée de demain. Et Guillaume aura à copier sans relâche pendant ces deux jours. Je ne puis pas être venu ici pour n'en pas remporter ce que j’y ai trouvé. J’en partirai après-demain Jeudi, vers 10 heures du matin, pour être à Bedford à onze heures trois quarts, à Londres à 3, à Brompton à 4, et chez vous le soir avant 8 heures. Pouvez-vous m'envoyer votre voiture à 7 heures et demie ? Je vous écrirai encore demain. J’ai deux déplaisirs, le mien et le vôtre. Ce serait bien pis si je n'en avais qu’un. Je travaille depuis ce matin. Il n'y a pas moyen. Le manifeste de la Rue de Poitiers est ce que j'attendais. Une sonate sans défaut. L'impression universelle sera celle-là. Par conséquent complète impuissance, ce qui n'est jamais bon pour des hommes importants. Il faut parler pour tous, ou parler seul et pour soi seul. Mais parler tous ensemble et tous du même ton, c’est si impossible que cela devient ridicule, quelque irréprochable que soit le ton. Je suis toujours sans nouvelles de Paris. Ce qui fait que j’en suis chaque jour plus curieux. Ce voyage m'a fort dérangé. Si je n’avais pas quitté Brompton, ce que j'ai à écrire eût été écrit cette semaine.
Je crois à l’arrangement des affaires de Sicile. Les Siciliens se résigneront. Le monde a vu des fanatismes qui ne se résignaient pas et qui résistaient, même sans chances de succès. Mais aujourd'hui ce n’est pas au fanatisme, c’est à la folie que nous avons à faire. La folie se décourage bien plutôt. Le Roi de Naples donne aux Siciliens tout ce à quoi ils ont droit, et peut-être plus qu'ils ne pourront porter. Mais cela n'en fera pas moins pour l'Angleterre, en Sicile l'effet d’un abandon honteux après une provocation coupable. Je suis, quant à la situation du cabinet, de l'avis de Peel qui en sait plus que moi. Et c’est l'avis que je trouve ici, parmi deux ou trois hommes simples et sensés qui vivent loin des Affaires. Quand les hommes simples et les hommes d’esprit sont du même avis, ils sont probablement bien près de la vérité. Pourtant je parierais pour le maintien. Adieu. Adieu. Cela me déplait beaucoup de voir les jours s'écouler. Vous partirez dans onze jours, et je serai plus de six semaines, sans vous voir. Ecrivez-moi encore un mot demain. Je l’aurai après-demain à 8 heures et demie, et je ne partirai qu'à 10. Adieu. Adieu.
G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00240.jpg
Kimbolton. Castle Lundi 19 mars 1849
9 heures

J'arrive. Je viens de m'habiller. On dîne à 6 heures. La poste part dans une demi-heure. Grand château délabré. Vous aviez raison. A coup sûr il n'est pas riche. Deux choses seules l’occupent ; les prophéties hébraïques et les ruines de Ninive. Bon et saint homme, très poli. Il vient de me remettre ses papiers. J'examinerai cela demain matin. Je désire qu’il vaille la peine d'être venu. Car sans cela, j’en serais fort ennuyé. Point de Macaullay. Un beau-frère, M. Calérafh, que j’ai rencontré au chemin de fer, assez d’esprit, ami de Peel. Une jeune fille de 18 ans en grand deuil, jolie, noble, intelligente et gauche. Des chambres très froides. Je m'en doutais. J’ai ma pelisse. Adieu. Adieu. Je vous disais demain à quelle heure je partirai après demain. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00008.jpg
Ketteringham. Park, Lundi 1 janvier 1849

Vous me manquez aujourd’hui plus encore que de coutume. Un nouvel an ne devrait pas pouvoir commencer sans vous. J'ai prié pour vous ce matin, pour nous, de tout mon cœur. De tout mon cœur, c’est la devise de mon hôte. Elle me plait. Toute cette famille me plait. Il y a du sang français, solidifié et point glacé par le sang anglais. Je suis sûr que je leur plais aussi. Beaucoup même. On se plait aussi, autour de moi. Mais la shyness est grande. Je suis bien aise de laisser mes enfants ici une semaine sans moi. Point de lettres de Londres ni par conséquent de Paris ce matin. J’enverrai chercher la poste à Wymondham à 5 heures celle qui sera partie de Londres aujourd’hui, à onze heures et demie. Je compte sur une lettre de vous. Je partirai demain à onze heures et demie. J’irai voir Duchâtel le soir après dîner. Voici un billet de lui que j'ai reçu hier. Pouvez- vous dicter à Marion un mot pour Lord et Lady Holland, afin d'avoir l'éclaircissement que le Roi désire ? Il a écrit par suite d'une lettre de vous où vous me parliez avec détails de la bonne grâce de Lord Holland dans son offre. Soyez tranquille sur la recommandation que me fait Duchâtel à la fin. J’y avais eu égard d'avance. Louis Bonaparte quelques mois plus tôt ou plus tard périra comme je le prévois depuis qu’il est question de lui, par l'impossibilité de se former un gouvernement et un parti de gouvernement sérieux. Pour tout le monde, sans exception, il n'est lui-même qu’un expédient. Cela paraîtra bientôt, et cela est mortel. Il faut être pris pour soi-même, et à titre définitif. Un grand pays peut être forcé, un jour, de se loger en hôtel garni. Il ne s'y établit pas. Les débuts du Cabinet Barrot sont pitoyables. Il n’aura que des débuts. Je crains qu’on n’arrive trop tôt à la dissolution de l'Assemblée actuelle. Je ne voudrais des élections que lorsque le parfum du nom Napoléon se sera dissipé dans le plein air. Flahaut triomphant ne m'étonne pas. Je lui trouvais depuis quelques mois, plus de bon sens que n'en comporte ce qu’il a d’esprit. Pourquoi pas lui ambassadeur à Londres. Mais Louis B. aimera mieux y laisser son cousin, qu’il ne peut garder à Paris sans danger. N'avez-vous aucune nouvelle de Pétersbourg ? Adieu. Adieu.
A après-demain. Votre dernière écriture est bien plus ferme. Ce n'est pas écrit sans voir. Adieu. G.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00249.jpg
Clarendon le 21 Mars 1849
Midi

Quelle contrariété. Je ne vous ai pas écrit hier parce que je trouvais plus simple que vous vinssiez recevoir ma lettre à Brompton, ignorant si elle vous arriverait à Kimbolton avant votre départ. Voici que vous n’arrivez pas. C'est plus que contrariant, c’est malheureux. Si vous avez de de l’esprit vous le comprendrez. J'ai bien affirmé que vous serez ici aujourd’hui. Ma visite de 2 1/2 y compte. Je n’ai guère de nouvelles à vous donner. Lord Clauricarde est venu m'annoncer hier que Lord Aberdeen fait demain une motion sur l'Italie. Cela a surpris la Chambre haute & moi aussi. J’ai été contente du premier dans des Débats à propos de la proclamation de la rue de Poitiers. Duchatel m’a dit que le manifeste n’a plu à personne. Broglie est parti pour la province. On lui mande qu’il était à l’état d’automate galvanisé. Piscatory a été chez le Président. Quelle platitude. Vitet écrit très lugubrement. Le nouveau roi de Hollande est parti hier matin. Une députation de ministres était venue le chercher. Il était très saisi très ahuri. Mes soirées sont abominables. Personne. Il faut donc encore aujourd’hui subir ma société toute seule.
4 heures. Je dois vous déclarer formellement qu'il faut que vous veniez du chemin de fer droit chez moi, avant d’aller à Brompton. L'heure presse, et cela est de toute urgence. Je pense que vous pourrez être ici à 3 1/2 ou 3/4 on vous y attendra ; j’ai répondu de vous, il est impossible que vous ne compreniez pas qu'il faut faire ce que je vous dis. Morney écrit que Piscatory est de son avis sur votre élection et le lui à dit. D'Haussonville un peu cela aussi, mais avec une [ ?]. La fin de Morny est curieuse. Pourquoi M. Guizot ne dirait-il pas (par écrit je suppose) qu'il faut à la France une Monarchie ? j’ai répondu Ah, Ah on sait donc qu’il n'y a que lui qui ait du courage. La motion pour demain fait du bruit. Le camps ministériel est embarrassé. Lansdowne décidé à se conduire dans son intérêt d’honneur personnel. A demain chez moi entre 3 & 4 sûr. Ma voiture vous ramènera chez vous. Si j’ai quelques personnes vous entrerez droit dans ma chambre. Adieu. Adieu. Je ne saurais vous dire le chagrin de ne pas vous avoir parlé aujourd’hui. Mais demain.

Auteurs : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00242.jpg
Clarendon Lundi 19 mars 1849
Midi

Je commence sans avoir un mot à dire. Êtes-vous content de la rue de Poitiers ? Moi je trouve la proclamation bonne, mais je ne suis pas juge. Certainement elle ne compromet personne. Le temps est horriblement triste. 3 heures Lord Aberdeen a vu une lettre de devant Palmerston du 8. Les propositions d’abord repoussées ont été reprises, et on s’attendait à les voir acceptées. Le Constitutionnel annonce que la guerre en Piémont est inévitable. Le Roi n'a pas écouté les remontrances des alliés. Aberdeen est d’avis qu'il faut rappeler Abercrombie. Peel trouve la situation du Cabinet bien mauvaise ses mesures ne passeront pas. Selon toutes les règles il devrait tomber. Je n'ai encore vu et entendu que ce que je viens de vous dire. Je crains les visites Je vous fais ma lettre, in good time. Adieu. Adieu.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00326.jpg
Brompton. Vendredi 29 Juin 1849
Midi

Rien dans les journaux et point de lettres. Rome devient vraiment ridicule. Donner l'assaut et rester debout sur la brèche, cela ne s'est jamais vu. Les savants du Génie ont probablement de quoi expliquer cela, mais le public n'y comprend rien. Je suis rentré hier à onze heures. On est resté à table, un temps énorme. Dîner, très insignifiant. Lord et Lady Morley, Sir W [?] et Lady Molesworth, Lord Clare qui m’a demandé de vos nouvelles deux ou trois autres hommes inconnus. Le soir il est venu beaucoup de monde ; entr’autre le Hongrois. Il avait l’air d'avoir l'oreille basse. On croyait fort à une grande victoire austro-russe.
Je n'aurai rien de vous aujourd'hui. Le temps est moins chaud et moins lourd. Cela vous conviendra peut-être mieux. Bien certainement, c’est Paris qui vous convient, quand il n’y aura plus de choléra du tout. Et vous y retrouverez une bonne partie de la société qui vous plaisait. Le Duc de Noailles sera probablement nommé pour le siège vacant à Chartres. Plus j’y pense, plus je crois qu’il a raison. D’ici à assez longtemps, il y aura à Paris des agitations de Chambre, des difficultés de gouvernement; point de grands désordres de rues. Vous tirerez vous-même vos pronostics quand vous y serez. Adieu.
Je sors avant 2 heures pour le Kings college. J'en reviendrai je ne sais à quelle heure. Mais je n'apprendrai rien là. Je ferme donc ma lettre. A demain. J’espère bien être à Richmond à 11 heures Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00149.jpg
Brompton. Vendredi 26 Janv. 1849

Il n'y a pas moyen de me donner lundi. Béhier arrive de Paris. Dimanche soir ou lundi matin. Il ne vient que pour deux jours. Il m’apportera beaucoup de choses. J'ai besoin d'être ici lundi. Je viendrai donc demain à Brighton, selon notre premier plan. J'espère que nous réussirons à causer, un peu seuls. Vous me direz quand vous comptez revenir. J’aime bien Brighton et j'en garderai un bon souvenir. J’aimerai mieux Londres. Duchâtel sort d’ici. Mêmes nouvelles que les miennes. Misérable état des affaires. L'Assemblée veut non seulement durer, mais faire faire les élections par des Ministres à elle. Et si cela arrivait, si les ministres appartenaient à la République et non à la réaction, les élections, s'en ressentiraient beaucoup. Louis B. est encore le drapeau de l’ordre, la population n'en est pas encore à faire les élections en opposition à son ministère. L'Assemblée veut aussi faire elle-même, le budget de 1849 se promettant de se rendre populaire par des réductions d'impôts et de paralyser l'administration entre les mains de ses adversaires. Tout ce qu'il y a de plus personnel et de plus petit ; les personnes étant très petites. Pas une ombre d’idée ou de sentiment public. Dumon dit : " On ne fait plus de politique en France ; il n’y a plus que des intrigues de couloir. " L'Etat intérieur du Cabinet ici se révèle. On en parle partout. C'est sur le discours de la couronne que l’embarras éclate. On ne réussit pas à se mettre d'accord sur ce qu’on dira de l'Italie et de l’Espagne. Il me revient qu'hier Lord Palm. était pris d’un vif retour de goutte, suite de la vive contrariété. Je dîne aujourd’hui chez le Ld. Holland. Il est plus que vous ne croyez au courant de toutes choses. Adieu. Adieu. A demain 2 heures. J’aime bien la veille. C'est le lendemain qui est mauvais. Enfin, bientôt il n'y aura plus de lendemain. Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00297.jpg
Brompton. Vendredi 22 Juin 1849
2 heures

Je ne sais si vous viendrez me voir ce matin. Je vous écris à tout hasard. Je n'ai encore rien de Paris. Je viens de causer de nouveau avec Génie qui venait de chez Duchâtel. On arrive toujours aux mêmes résultats. Le rabâchage de la conversation est charmant à une condition. Hors de là, c’est insupportable. Lisez l'article des Débats de ce matin sur le manifeste du Cercle constitutionnel, et le Manifeste même. C'est assez ennuyeux mais il y a là quelque chose qui confirme un peu la lettre, que je vous ai montrée hier, de mon ancien, conservateur persuadé que la république durera. Bien des gens feront effort dans ce sens. Plus j'y pense plus je demeure convaincu qu’on ne réussira pas. Mais, pour agir sur des esprits sur lesquels on a besoin d’agir, il faut garder, sur ce point certains ménagements de langage Je ne trouve pas, dans les Débats d’hier la lettre de Dumon au Ministre des Finances. Cela me contrarie. Les Débats ne donnent pas non plus l’ordre du jour du Général Changarnier dont je vous parlais hier. Probablement par quelque relation d’amitié avec le Général qui a été ainsi tancé. Je ne sais pas son nom. Voici l’ordre du jour. Le grand rapport du Général Changarnier sur la journée du 13 est excellent, sans phrases. Je ne vous ai pas montré hier les lettres de Bussierre. Nous avons toujours si peu de temps quand nous en sommes ensemble ! Il y en a une qui est vraiment intéressante. Pas la moindre nouvelle d'ailleurs. Mad. Lenormant écrit que le duc de Noailles revient de Chartres pour assister au mariage de Mlle Alexis de Noailles. Elle ne dit pas avec qui. Adieu. Adieu. Je vais écrire à F. Léonard pour savoir positivement quel jour arrive. Mad. la duchesse d'Orléans. Il faut que j'aille faire là une visite avant de rentrer en France. J’irai quand la Princesse sera arrivée.
Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00110.jpg
Vendredi 19 Janvier 1849 Brompton
Midi

Voici deux lettres venues hier ; l'une de mon libraire, l'autre de mon hôtesse. Lisez-les, je vous prie attentivement. J’espère que vous pourrez les lire vous-même sans trop de fatigue pour vos yeux deux grosses écritures. Je n'en persiste pas moins dans ma résolution. Plus j'y pense, plus je suis sûr que c’est la seule bonne. Mais il faut tout écouter. Evidemment le travail sera très actif contre moi. Quelles misères ! Si le bon sens et le courage de mes amis ne sont pas en état de les surmonter, ma présence pourrait bien me faire élire ; mais après l'élection, je serais affaibli de toute la peine que j'aurais prise moi-même pour mon succès. Je ne veux pas de cela ; il faut que j'arrive par une forte marée montante, ou que je me m'embarque pas. Je vais écrire dans ce sens à tout le monde. Renvoyez-moi tout de suite ces deux lettres. Je vous prie. Il doit être arrivé à Brighton encore des journaux pour moi. Le postman par excès de zèle, s'est obstiné à m'en envoyer là quelques uns, sans ordre. Cela cesse aujourd’hui.
Je suis frappé du silence de l'Assemblée et du peu de paroles des journaux sur l'expédition de Toulon. Je doute que l'affaire soit aussi avancée qu’on l'a dit d'abord. Cependant la nouvelle proclamation du Pape, que les Débats donnent ce matin est bien forte. C’est la guerre déclarée aux républicains romains, autant que le Pape peut faire la guerre. Il faut qu’il soit sûr d'être efficacement soutenu. Je n’ai encore vu personne ici. Je vous quitte pour écrire à Paris. J’ai trois ou quatre lettres à écrire. Et longues. Il ne me suffit pas de dire non. Il faut que je persuade ceux qui me demandent de dire oui. Si je ne les ramène pas à mon avis, ils n'auront pas de zèle, et il me faut leur joie. Adieu Adieu. Je n'ai pas encore, ma lettre de vous. J'espère bien qu’elle viendra dans la matinée. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00235.jpg
Brompton. Vendredi 16 fév. 1849
Midi

Demain sera charmant. Et je serai charmé que vous me fassiez honte de mes mauvaises pensées. J’ai tort de dire mes. Je ne devrais dire que ma. J’en ai bien rarement. Votre lettre de demain matin me dira si vous voulez que j'aille dîner avec vous. La dernière tentative pour ajourner la fin de l'Assemblée à échouer. Les élections auront très probablement lieu, le 22 avril. Cela met mon retour en France aux premiers jours de mai. Je n’ai point de nouvelles ce matin. Duchâtel, qui sort de chez moi, m’a apporté les siennes. Tout à fait d'accord avec les miennes. Seulement il ne croit pas qu'au fond Molé sait bien en ce qui touche notre élection. Il se croit sûr que Molé, sous main, travaille activement contre lui à Bordeaux. Je lui ai montré ce que j’ai écrit au duc de Broglie. Il approuve complètement et écrira dans le même sens. Thiers a fait sa paix avec le Président. Il a vu que les affaires du Président allaient mieux, et il s'est rapproché de lui. C’est Morny qui l’écrit à Flahault. Flahault toujours très bien, très gentleman et tenant un très bon langage. Dites, je vous prie, au Prince de Metternich que je regrette, et que je regretterai beaucoup mes visites à Brighton. Nous avons à peine commencé à causer, et nous avons ce me semble, de quoi causer des années. J'espère que nous nous reverrons à Londres. Je me désespère même pas de Paris. Faites-moi aussi la grâce de demander pour moi, à la Princesse de Metternich, une petite place dans ses souvenirs de Brighton. Et notre bonne Marion ? Est-ce quelle ne m’écrira pas quelques fois pour son compte ? Est-ce qu’elle ne viendra pas vous voir ? Il y a bien peu de personnes qui gagnent plus on les voit. C'est le sort de Marion. Je la charge de mes amitiés pour ses sœurs. Adieu. Adieu. Il fait plus froid ce matin. Prenez bien vos précautions demain. Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00068.jpg
Brompton, 12 Janv.1849

Merci de m'avoir envoyé le billet de Lord Aberdeen. Certainement il me plaît beaucoup. Qu’y a-t-il de plus charmant que de la vraie amitié ? J'étais allé le voir hier et il m’avait laissé entrevoir ce qu’il vous a écrit. Je l'ai trouvé, sans qu’il en dît grand chose, très préoccupé de la situation d’ici. Il serait bien content, si Lord P. tombait aux trois quarts pour la bonne politique, un quart pour sa propre satisfaction. Au fond du cœur ; il l'espère un peu. Ce serait la petite pièce de la déroute qu'après leurs coup d’éclat de 1848, les révolutionnaires européens me paraissent destinés à subir en 1849. Flahault est venu me voir hier. Il venait chercher un exemplaire de ma démocratie. Nous sommes très bien ensemble. Bon langage sans effort, comme il arrive quand la conduite est bonne. Je ne crois pas qu'il aille à Paris. Il ne veut se montrer, à Louis B, ni malveillant, ni ami. Il m’a demandé deux ou trois fois, avec un peu de sollicitude : " Croyez- vous qu’il dure ? " J’ai toujours répondu que non. Il ne m’a pas paru qu’il en fût fâché. Je viens d'être interrompu par M. Hallam qui revient de Bowood. La mort de Lord Auckland a été un grand chagrin pour lord et lady Lansdowne. Ils ont prié la Reine de les dispenser d’aller à Windsor où ils étaient invités. Hallam croit à lord Normanby en remplacement de Lord Auckland, et à Bulwer à Paris. Grande joie pour Lady Bulwer, et sans doute aussi pour Lady Cowley. Même situation à Paris. Thiers et Molé font ce qu'ils peuvent pour hâter la dissolution de l'Assemblée. C’est leur seul moyen de sortir d’embarras. Nous verrons ce qu'aura été le débat. d’aujourd’hui. Je doute fort que la dissolution vienne assez vite pour que Thiers et Molé puissent se dispenser de prendre le pouvoir. La situation qu’ils ont faite à Louis B. et qu’ils se sont faite à eux-mêmes ne supporte ni une durée, ni une publicité un peu longue. Adieu. Adieu. Vous me direz si mon paquet de brochures vous est arrivé. Je me suis décidé à en envoyer une à chacun des Princes, quand même. J’aime mieux avoir tous les bons procédés. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00016.jpg
Brompton. Vendredi, 5 Janv. 1849

Je n’ai que le temps de vous dire que je suis arrivé. Je trouve en arrivant une foule de petites affaires pressées, toutes relatives à la publication de ma brochure. Elle paraîtra à Paris le mardi 9. Il faut qu'elle paraisse ici le même jour. Je n’ai pas une heure à perdre. Point d’accident. Peu froid. Pensant à vous. Achevez de guérir vos yeux. Je m’en suis allé bien malgré moi. Dites je vous prie à Lord Aberdeen combien je le regrette. Je compte que nous nous retrouverons à Brighton, non pas la semaine prochaine, mais dans la suivante. Rien dans mes lettres de Paris. J'extrairai demain le peu qu’il y a. On ne me parle que de mes affaires personnelles. Un seul fait est évident : tout le monde pense et dit que Louis Bonaparte n'est pas une solution. Ce n’est- pas encore ça. Adieu.. Adieu. A demain. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00176.jpg
Brompton. Vendredi 2 février 1849
9 heures

Je n'ai pas encore vu le discours de la Reine. Les gens chez qui j’ai dîné hier juges, lawyers, en étaient contents. Mais ils n’entendent rien aux phrases de politique étrangère. J’attends le Times. Je suis devenu singulièrement peu impatient pour tout ce qui ne m'est pas de premier intérêt. Je ne trouve pas que la passion s'affaiblisse avec l’âge, mais elle se retire sur un très petit nombre d'objets et s'y concentre. Ce matin m'ennuie. Lord Holland m'a demandé d’aller à Holland House donner une ou deux heures de séance à son peintre M. Watts pour qu’il retouche et termine le portrait de moi qui est à Holland house. Dans mes bonnes intentions pour le ménage, je n’ai pas voulu refuser. Le temps est très vilain. Pluie et brouillard. Il me semble que, pour vos yeux, cela doit valoir mieux que le froid. Voilà votre lettre et mes lettres. Vous avez pensé et senti comme moi. En dernier résultat, ce qu’on a fait vaut peut-être mieux. Mais j’écrirai de manière à ce qu’on ne recommence pas, en pareille circonstance. Je ne veux pas que dans mes rapports avec les personnes, mes meilleurs amis disposent de moi sans moi. Au fond, ceci me déplait. Quel dommage qu’il n’y ait personne, dans la Chambre des Communes, pour traiter cette polémique du Globe comme elle le mérite ! Lord Palmerston ne dira pas un mot de tout cela à la chambre. Mais il faudrait l’y porter, malgré lui. Il faudrait l'attaquer précisément au nom de ce patriotisme anglais et de cette politique libérale, derrière lesquels il essaie de se cacher. Sa tactique est celle qu'elle a employée contre moi : décrier ses adversaires, au dehors, par des mensonges et des calomnies dont on ne répond pas parce qu'on ne les signe pas, et amortir ainsi d'avance les coups qu'on recevra d’eux dans les chambres, et dont on n'a pas moyen de se bien défendre. Il serait bien aisé de retourner cette tactique contre lui, en la mettant au grand jour. Je n’ai rien de Paris. Le rejet de la proposition de M. Billault achève de déjouer, pour quelques jours, l'intrigue Girardin. Car c’est Girardin qui mène tout cela, et qui se promettait d'arriver au Ministère des finances, avec Lamartine aux Affaires étrangères et Billault à l’intérieur. Il recommencera. Pourtant je penche à croire qu'on arrivera sans secousse à la dissolution de l’Assemblée en mars, et aux élections en avril. Nous verrons le débat de samedi. Adieu. Adieu. Je fermerai ma lettre en revenant de Holland House. 3 heures Je reviens. Personne ne s'attendait au vote du la Chambre des Lords. Lord Holland en était un peu stupéfait et regardait cela comme un grave échec. Deux voix seulement, malgré l'effort du duc de Wellington ! Je n'ai rien lu encore. Je vais tout lire. Et comme je dine chez Lord Lansdowne, je vous dirai demain les figures. Lord Holland part mardi ou mercredi. Il a eu une lettre de sa femme, de Boulogne, et m'en a donné des nouvelles avec une intuition marquée. Ils resteront trois ou quatre mois à Paris. Lady Lilford était à Holland house. Ils m'ont tenu compagnie pendant la séance. Adieu. Adieu. Je voudrais voir Lord Aberdeen. J’irai peut-être demain. Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00301.jpg
Brompton. Samedi 23 juin 1849,

Est-ce que ce beau temps chaud vous fait mal ? J’en serais bien fâché. Je jouis du soleil et de la chaleur avec une vivacité d’enfant du midi. Il faisait pourtant trop chaud hier chez la marquise de Westminster, une vraie foule dans la galerie. La bande des Strauss, la Duchesse de Cambridge, God save the Queen. Les tableaux s'étonnaient qu’on les regardât si peu. Je n’ai pas entendu parlé là de la Duchesse de Sutherland ni de la mort de sa petite fille. On pense si peu aux morts et à la mort. C'est mon plus profond sujet de mépris contre les vivants. Personne là qui sût rien de nouveau. J’ai vu Bunsen le soir. Moins joyeux, et moins confiant. Comme Lady Palmerston plus anti- autrichien que jamais, et me faisant fort la cour pour que je sois Prussien. Très occupé de Rome. Il est établi que le Pape n’y viendra pas quand les Français y seront entrés. Quand et comment en sortiront-ils ? Le Duc de Nemours est venu me voir hier. Très amical et très sensé. On se demande évidemment un peu là pourquoi je n’y ai pas été depuis longtemps. J’irai dans les premiers jours de Juillet. Madame la Duchesse d'Orléans arrive jeudi 28. Le duc de Nemours va la chercher à Rotterdam. Elle passera à St. Léonard, tout le mois de Juillet. La Reine des Belges arrive à Londres lundi, et ira à St. Léonard quand Mad. la duchesse d'Orléans y sera arrivée. Ainsi pour un mois. Le Prince et la Princesse de Joinville ont été à Eisenach, et de là ils se promènent en Allemagne jusqu'à Munich, et ne seront de retour à St Léonard que du 8 au 12 Juillet.

2 heures
J’ai été interrompu par Vigier, et par Génie. Le dernier repart ce soir. Je suis bien aise qu’il soit venu. Il m’a remis bien au courant. Point de lettre de Paris ce matin. Vous verrez dans les Débats d’aujourd’hui la lettre financière de Dumon. Ou plutôt vous ne la verrez pas. Vous n'irez certainement pas jusqu'au bout. C’est très vrai et très bon financièrement, mais sans vigueur et sans effet politique. Je ne vous vois pas venir ce matin. J’irai dîner avec vous demain dimanche. Je suis pris toute la semaine prochaine. J'espère qu’aujourd’hui vous n'aurez pas été retenue à Richmond par votre malaise. Je dîne samedi chez Lord Aberdeen. Je crois que Duchâtel finira par aller prendre sa femme à Spa, et delà avec elle à Paris où ils ne passeront que trois ou quatre jours en traversant pour aller à Bordeaux. Il est dans tous les supplices de l'indécision. Avez-vous fait partir votre lettre à Rothschild ? Adieu. Adieu. Je ne fermerai ma lettre qu'à 3 heures alors je serai sûr que vous ne venez pas aujourd’hui. Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00115.jpg
Brompton. Samedi 20 Janv. 1849
une heure

Je reçois ce matin de mon hôtesse ces quatre lignes : " Je maintiens tout ce que contient ma lettre du 16. Cependant il y a, depuis 24 heures, beaucoup d’agitation dans le parti extrême. Les journaux de ce parti sont d’une telle violence que je vous engage à voir comment les choses vont se dessiner. Elle a pris peur du conseil qu’elle m’avait donné. Sa peur ne me fait pas grand chose et je ne la crois pas fondée. Mais plus j’y pense, plus je pense la même chose de son Conseil. Je viens d'écrire en détail à [?] les motifs qui me décident à rester ici. Je ne doute pas que vous me persistiez comme moi. Remerciez beaucoup, je vous prie, le Prince de Metternich de ses petites pages pleines de grandes vérités, à propos de l'article du Journal des Débats. Je n'y réponds pas, car je suis de son avis. Je n'ai qu'à le remercier, et à regretter qu’il ne vous ait pas donné tout à qu’il vous avait promis à propos de ma brochure. Sa conversation m'a plu infiniment mais point rassasiée. Je voudrais le voir. tous les jours. Je me figure que nous ne finirions jamais de causer, et que nous recommencerions toujours avec plaisir. J’en suis sûr pour moi. Je me promets deux heures, charmantes la semaine prochaine. Si vous pouvez trouver à Brighton le Siècle de mardi dernier 16, lisez-le et faites-le lire à M. de Metternich. L'article sur moi en vaut la peine. Vous y verrez quelle vive alarme j'ai causée. Je regrette de ne pouvoir vous l'envoyer. Je ferai partir par une occasion, très prochaine (lundi ou mardi) votre lettre à Barante. Rien d'ailleurs de Paris. Je me figure que l'expédition de Toulon pourrait bien faire long feu, comme celle du général Cavaignac. Le Président de la République sera bientôt aussi ridicule que la République. Sa liste de candidats pour la vice-Présidence est une bouffonnerie faite sans le savoir ; ce qu’il y a de pire. Adieu. Adieu.
Vous avez eu la bonté n’est-ce pas de remercier M. Ellice de son obligeante attention ? Ellice est venu me voir hier. Il part aujourd’hui pour Paris. Répétant toujours que Lord Palm est bien mal qu’il ne durera pas que ses collègues le disent comme lui, Ellice. Il confirme le dire de Lord Ashley que Lord Palm ne savait rien des préparatifs de Toulon. Le petit M. de Montherot disait hier que les Légitimistes étaient en hausse à Paris. Il racontait un calembour : l'Assemblée nationale veut la République, mais la France, en rit (Henri). Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00281.jpg
Brompton, Samedi 16 Juin 1849

J'espère que vous êtes mieux. Je suis mieux aussi. Si nous avions vu parfaitement à découvert jusqu'au fond du cœur l'un de l'autre, nous n'aurions pas eu cette mauvaise journée. Les petites choses n’ont de valeur que parce qu'elles inquiètent sur les grandes. C’est absurde. Mais dites-moi que vous êtes mieux. Je n’ai pas une ligne de Paris ce matin. Ni Duchâtel non plus ; je viens de le voir. Ses nouvelles, d’hier sont les mêmes que les miennes. Les modérés sont d'autant plus heureux de la victoire qu'elle leur à moins coûté. Au Morning Chronicle, à 2 heures les lettres d'hier n'étaient pas arrivées. C’est un grand ennui, car demain nous n'aurons, rien du tout. Je ne crois pas que vous veniez à bout d'attirer les Duchâtel à Richmond. Elle veut décidément aller voir sa mère à Spa ; et lui s’effraie un peu de la solitude de Richmond. Il dit que vous vous couchez de trop bonne heure et que les Metternich tous les soirs, ait trop, même avec le whist. Sans compter, ajoute-t-il, que M. de Metternich ne joue pas bien. Il (Duchâtel) est convaincu que si le cholera cède, il faudra retourner en France dans le cours de Juillet, ou d’Août et il s'y prépare. Il ne doute pas que cette victoire-ci n'assure la tranquillité pour la fin de l'année. Je n’ai pas vu une âme d'ailleurs. Je ne vous ai rien dit hier de la lettre de Constantin qui est intéressante, mais qui prouve qu’on croit la guerre de Hongrie sérieuse, et qu’on s’y prépare sérieusement. J’aime mieux cela que si l’on croyait aller à une promenade. On ne gagne jamais rien à croire les choses plus faciles qu'elles ne sont Adieu. Adieu. J’aurais mille choses à vous dire et très bonnes si nous étions ensemble. Rien à vous écrire. Il ne faut pas être loin quand on a ou quand on a eu le cœur gros. A demain, 5 heures. Le train passe à Putney à 4 h 3/4, comme les autres jours de la semaine. Adieu. Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00359.jpg
Brompton, Samedi 14 Juillet 1849
2 heures

Je reviens de Kensal-Green où je suis allé dire adieu au tombeau de ma mère. Je ne regrette pas de la laisser ici, car elle-même n’a pas regretté d'y rester. Cette terre protestante, et protectrice pour moi lui plaisait comme dernière demeure. Elle me l'a positivement témoigné. Ma mère avait deux choses bien belles, et qui sont toutes deux devenues rares, de la foi et de la passion. J’ai fait mettre sur cette place une pierre, entourée d’une grille, et qui porte simplement son nom, son âge, et cette phrase de St Jean qu'elle répétait souvent : " Heureux sont dés à présent, ceux qui meurent au Seigneur, car ils se reposent de leurs travaux et leurs œuvres les suivent. "
Le Duc de Broglie m'écrit pour me demander de lui indiquer précisément quel jour, et à quelle heure j’arriverai au Havre. Il veut s’y trouver, avec Piscatory. " On a si peu de temps, dit-il, dans la maudite vie que nous menons, que peut-être ne pourrions-nous nous voir de quelque temps. " Un autre de mes amis, M. Plichon, m'écrit aussi qu’il part pour Paris afin de venir m'attendre au Havre. Je désire qu’il n’y en ait pas davantage. Je viens de voir un ancien député conservateur, M. Calmon, que je trouve excellent sur le passé, sur le présent et sur l'avenir. Très sensé et très fidèle. Tenant la chute de tout ceci pour certaine, mais croyant à une assez longue durée. On tombera ; on sait qu'on tombera mais comme on craint de se faire mal on chancellera longtemps. Cela me paraît dans le vrai. M. de Falloux m'écrit un billet très courtois pour me dire qu’il a fait ce que je désirais pour ma retraite de l'université. " Ce n’était pas à moi dit-il, qu’il appartenait de décerner à M. Guizot une distinction honorifique. Je dois le remercier d'avoir bien voulu ne pas tenir compte de cette méprise des circonstances." Je lui réponds : " Je vous remercie de votre courtoisie. Elle vous sied bien, et j'y comptais. Je ne sais encore à quel moment je pourrai avoir le plaisir de vous en remercier moi-même. Je compte rentrer, sous peu de jours dans mon nid du Val-Richer. Mais ce sera pour y rester avec mes enfants et mes livres. Je jouirai de l’air frais qu’on y respire et mes vœux vous suivront dans la fournaise où vous vivez. Il me semble que c’est convenable. L’air frais que je regretterai tous les jours, c’est l’air frais de la Tamise. Adieu. Adieu.
Il fait bien chaud aujourd’hui. J'espère que nous ne serez pas sortie à ces heures-ci. Rien de nouveau de Paris, vous voyez qu’Oudinot a envoyé au Pape les clés de Rome. Adieu. A demain cinq heures. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00076.jpg
Brompton, Samedi 13 Janv. 1849

Avant tout, ma joie pour vos yeux vous écrivez et vous lisez. Ménagez les bien et n'en parlons plus. Seconde joie. Vous approuvez. Je crois que vous avez raison. L'effet est grand à Paris. Un homme de mes amis, qui a beaucoup de sens et d’esprit d'affaires m'écrit le Mercredi soir, le jour même de la publication : " Votre libraire est dans une espèce de jubilation fébrile. On fait queue dans son magasin pour acheter votre brochure. Ce matin, à 10 heures, il en avait déjà vendu 5000 exemplaires. La première édition est complètement épuisée. Et le lendemain jeudi : " La 2° édition est épuisée. On tire la 3°. Le succès est immense. J’ai la conviction qu'aux prochaines élections, vous serez au nombre, des représentants de Paris. " Je souris et je doute. Mais il me paraît clair que l’effet que je désirais produire est produit. Nous verrons les conséquences. Je ne vous envoie pas les journaux, l'Univers, l’Evènement, le Siècle, & . Je vous apporterai mardi, ce qu’il y aura d’un peu remarquable. Je n'ai encore rien vu dans le National. Ce que vous m’envoyez contre Thiers est en effet bien vifs. La lutte sera rude, surtout après la victoire. De tout ceci le public sortira éclairé, et les partis ardents. Durer, là sera le problème. Pour le vainqueur, quelconque. Peel m'a écrit. Le Roi aussi. Tous deux très approbateurs, et assez réservés. Comme me souhaitant beaucoup de succès et ne se souciant guère de s’engager dans mon combat. Bien des gens, pas plus démocrates que moi s'étonnent de me voir attaquer si franchement la démocratie, le géant du jour, comme m'écrit Jarnac. Je me souviens d’un temps où l'on me trouvait démocrate. C’est une des grandes difficultés de notre temps que d'avoir à changer de position en changeant de dangers & d’ennemis. Je causerai à fond avec Montebello avant son départ. Je pense de lui autant de bien que vous. Je suis curieux du débat qui a commencé hier. Il me conviendrait que l'Assemblée constituante ne se séparât qu'à la fin de mars. Je doute qu'elle puisse vivre jusques là. Les Anglais ont bien de la peine à comprendre ces revirements d'opinion si soudains et si emportés. Je comprends qu'ils ne comprennent pas. Il faut être Français pour croire qu’on peut vivre en tournant si vite.
Je n'ai vu personne hier. J'aurai certaine ment d’ici à mardi des nouvelles de Génie. Il ne m'a pas écrit ces jours-ci. Il était trop occupé de mes affaires. Mardi sera charmant. Adieu. Adieu. Je ne puis vous dire le plaisir que me fait votre écriture. Je crois que je relis vos lettres plus souvent. Mes tendres amitiés à Marion. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00205.jpg
Brompton- Samedi 10 fév. 1849
3 heures

Je ne trouve rien en arrivant que des journaux insignifiants et des invitations à dîner que je vais refuser. On me dit qu’il y a des gens qui disent que l'Assemblée constituante fera durer très longtemps la discussion de la loi électorale, et vivra encore ainsi quatre ou cinq mois. Je ne le crois pas. Je crois que si elle l'essayait, elle attirerait sur elle-même quelque violence. Elle me paraît résignée. Ce sera encore bien assez long. J’ai achevé Macaulay en route, et pensé à vous. Puis à Paris. Je suis presque aussi triste de l'avenir que du présent. Je cherche ce que je puis faire pour aider mon pays à se relever. Je suis bien plus préoccupé de son abaissement que de son malheur. Adieu. Adieu. Je ne veux que vous dire que je n’ai pas été écrasé par le railway. C’est bien ennuyeux de n'avoir rien de vous demain. J'en sais plus long que Raphaël. Adieu. Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00347.jpg
Je suis arrivé hier soir. Je repars ce matin. Que ne vous ai-je pour nous promener au bord de la mer à St Léonard. Mais cette course, si rapide vous fatiguerait. J'espère avoir de vos nouvelles ce soir. Adieu. Adieu.
A demain. Je n’ai pas encore mes journaux. Adieu. G. Samedi matin 7 Juillet 1849

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00021.jpg
Brompton, samedi 6 Janv. 1849
Une heure

Je viens de passer ma matinée, avec Mrs Austin, et Mr. Murray à corriger des épreuves, à régler des détails de publication & Tout est long et difficile quand on veut que ce soit bien fait, et bien fait dans deux pays à la fois. Enfin, c’est fini. La brochure paraîtra décidement mardi prochain, à Londres et à Paris. Le Times a beaucoup insisté pour en avoir les prémices, et il en donnera un extrait lundi ou mardi. M. Murray s'en promet beaucoup de succès en Angleterre. Je n'ai vraiment rien de Paris. Pas le moindre fait et à peine quelques réflexions de Philippe de Ségur qui me promet sa voix pour le duc de Noailles à l'Académie. Génie ne me parle que de ma brochure. Il est évident que la crise ministérielle a un peu troublé tout le monde, ceux qui l’ont faite et ceux qui l’ont subie, et que personne, ne s’est soucié de pousser, quant à présent, la lutte plus loin. Il me semble même qu'on blâme Thiers de l'avoir commencée sitôt. J'ai vu ce matin un ancien député conservateur, M. de Marcillac, bon homme, sensé, et tranquille, qui n'a nulle envie que Louis Nap. dure mais qui trouve qu’on se presse trop de le faire tomber. Il m'a dit de plus, et ceci me chagrine que le maréchal Bugeaud avait été réellement fort malade et ne se remettait qu'à moitié. Il a un poumon en mauvais état. M. de Marcillac croit que les prochaines élections se feront fin de mars ou au commencement d’Avril, que beaucoup de conservateurs rentreront dans l’Assemblée et qu’elle sera beaucoup meilleure que celle-ci, mais que le parti républicain y sera encore fort, trop fort. Le parti n’est plus au pouvoir, et ne tardera pas à reprendre quelque faveur dans le bas de la société. Non comme république, mais comme opposition. Ségur est fort sombre. Sa lettre ne vaut pas la peine de vous être envoyée. Il y a plus de dissertation et d'Académie qu’il ne vous en faut. L’amiral Cécilla est un choix honnête. Il a du bon sens et du savoir-faire. Très étranger à la politique générale, il ne s'appliquera qu'à bien vivre avec Paris et avec Londres, et à les faire bien vivre ensemble. Il n’aura point d’idées et ne fera point d'affaires. On le regarde comme un excellent marin. Pourquoi vos yeux vous faisaient-ils mal hier soir, après une bonne nuit ? C'est l’approche de la neige. J’ai eu de l'humeur ce matin en la voyant. Je crois que Mardi de la semaine prochaine sera le jour qui me conviendra pour venir à Brighton. J’aimerais mieux lundi. Mais je ne suis pas sûr. Je vous l’écrirai positivement dans deux jours. Adieu. Adieu. Quel ennui de vous avoir quittée ! Mes amitiés à Marion. Voici un complet de M. Etienne Arago sur le nouveau ministère. L'assemblée est fort satisfaite du ministère qu'on lui fait ; elle n'avait qu'une buvette ; elle a maintenant un Buffet.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00182.jpg
Brompton, samedi 3 février 1849
Une heure

Lord Palmerston a passé son défilé. Médiocre attaque, assez bonne défense. Je n’ai pas encore lu son discours. Macaulay et Lord Mahon avec qui je viens de déjeuner chez M. Hallam, disent qu’il a bien parlé, et pas long, ce dont tout le monde lui a su gré. Il a ajourné les questions même à la production des papiers. Le leadership de M. d'Israeli a déplu à beaucoup de conservateurs. Sir Robert Inglis disait que, si on mettait l'amendement aux voix, il voterait contre. Les Conservateurs nient le leadership de M. d'Israeli ; ils disent qu'ils ont institué un triumvirat, M. d'Israeli, Lord Granby et M. Herrses. Mais en fait, le premier a paru et parlé comme leader. Entre nous deux choses manquent, l’esprit et le courage. On a quelquefois, l’air d'avoir de l’esprit à la surface ; et du courage, pas même l'air. Je ne m'étonne pas du succès. C’est à bon marche. Je n’ai pas eu envie d'aller ce matin chez Lord Aberdeen. Hier, chez Lord Lansdowne, pas un mot de politique. Dîner de pure conversation morale et littéraire, assez agréable. Toujours Macaulay pour [?]. Lady Skelburne change de plus en plus. Elle m'a fait peine à voir. Les lettres d'Ellice sont très intéressantes. Je vais les envoyer à Lord Aberdeen. Les renseignements français ne sont pas d'accord avec les siens. Ils disent que le président et son Cabinet ont gagné plus que ne l'indique leur petite majorité ; qu'ils ont le haut du pavé sur l'Assemblée, qu'entre les deux timidités, celle de l'Assemblée c.à.d. des républicains de l'Assemblée, est la plus timide ; que très probablement le Cabinet gagnera le temps jusqu'aux élections, et fera les élections ce qui est tout. La général Changarnier est si populaire qu'on regarderait comme impossible de le déplacer. Il aura dans huit jours, 100 000 hommes, dans ou autour de Paris. Ces 100 000 hommes feront ce qu’il voudra, le concert avec le Président et son Cabinet ; et la garde nationale qui a confiance en lui, et qui est très lasse de se battre lui laissera faire à lui et à ses 100 000 hommes, tout ce qu’il voudra. Voilà pour la situation générale. Quant aux situations particulières, Molé est pour le moment le conseiller favori. Thiers et Rémusat grognent. Les légitimistes. parlent trop haut. Les Orléanistes se bouchent les oreilles, pour ne pas les entendre. L'accord se maintiendra pour les élections. Après, c’est la nuit. Le Chancelier a eu une petite mésa venture, par suite d’une petite faiblesse. Il est allé à une réception d'Odilon Barrot. Qu’avait-il à faire là ? La première personne qu’il a rencontrée sur l’escalier, en montant, c'est le Président de la République qui descendait. La conversation a été courte mais convenable, et assez à l'avantage du Président qui lui a dit de bonne grâce, en le quittant : " Sans rancune, mon cher juge. " Je vous en prie, pas d’étouffement. Il me semble que, chaque fois que nous nous voyons, nous avons plus de choses à nous dire, et plus de plaisir à nous les dire. Gabriel Delassort repart ce soir pour Paris. Tenez pour certain que, curiosité à part, Ellice a autant aimé ne pas être ici à l'ouverture du Parlement. Adieu Adieu. Adieu. G.

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00257.jpg
Il est quatre heures. Vous ne viendrez probablement pas aujourd'hui. Voici les nouvelles de Paris. Dupin a été nommé Président au premier tour de scrutin. Il a eu 336 voix (Dupin aîné) et 9 (Dupin seul) ; en tout 345. Ledru Rollin 182. Et Lamoricière (porté par la réunion Dufaure) 76. C'est un très bon résultat. Les rouges et le tiers parti ensemble n'ont que 258 voix. Les modérés seuls en ont 345. C'est une meilleure majorité qu’on n'attendait. On m'écrit de plus, (M. Mallac en sortant de chez le Maréchal Bugeaud), que cette majorité se montre décidée, compacte et très disposée à marcher sur le ventre de la minorité si la minorité veut l'opprimer. Quant au cabinet avant-hier, il semblait formé. Dufaure, Remusat, Vivien, Tocqueville. Ils avaient tous accepté. Bugeaud et Falloux étaient à l'écart. La séance violente de la veille a épouvanté Dufaure et relevé en même temps ses prétentions. Soit sincèrement, soit pour rompre, il a demandé l'éloignement de Changarnier. Rémusat voulait rompre aussi. Le président a refusé d'accepter seulement la discussion sur ce point. Ces messieurs se sont retirés. Le Maréchal a été rappelé. Il comptait sur Barrot, Barrot a objecté sa fatigue, et décliné absolument d'entrer sans Dufaure. On m'écrit : " Le maréchal est décide à aller jusqu'au bout. Les désertions successives ne l’intimident pas. Vous pouvez regarder la combinaison suivante comme arrêtée : - Présidence et guerre, le Maréchal - Affaires Etrangères, Gal Bedeau - Intérieur Maleville - Travaux publics, La Redorte - Finances, Benoist - Instruction publique, Falloux - Marine Piscatory - Commerce buffet. - Garde des Sceaux, M. Rouher député nouveau (ami de Morny). Ces messieurs devaient se réunir hier soir chez le président et en finir. Si on peut finir quelque chose. Ceci serait le mieux possible. Adieu. Adieu. Il fait bien beau. Vous aurez pris plaisir à vous promener. Adieu.

Brompton, Samedi 2 Juin 1849 4 heures

Auteurs : Guizot, François (1787-1874)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/MF-G-L011_00255.jpg
Brompton- Samedi 2 Juin 1849
8 heures et demie

Je suis toujours horriblement pris du cerveau. J'éternue scandaleusement. Si Lady Lovelace m’a trouvé aimable hier soir, elle n’y est pas difficile. Il y avait là peu de monde, des savants et cet envoyé hongrois dont j'oublie le nom et qui disait à tout le monde : " dans quelques jours, nous reprendrons l'offensive, et il viendra de Hongrie de grands évènements. Je ne suis pas entré en conversation avec lui. Il y a certainement quelque faveur dans le public pour les Hongrois et s’ils s’étaient bornés à défendre leur ancienne constitution en se disant toujours fidèles à l'Empereur, on leur donnerait raison. Mais certainement aussi l’Angleterre ne se mêlera pas de leurs affaires. Personne ne disait rien d'ailleurs. Je suis sorti un moment après dîner. J’ai été voir des maisons à louer, dans mon quartier. Deux qui me conviendraient bien, Onslow square. Reste à savoir le prix. Et restera à attendre les événements. Je les attends avec une impatience où il y a peu de curiosité n'espérant pas grand chose de bon et prévoyant à peu prés tout le mal possible. Il ne m’est venu hier matin, après vous, aucune nouvelle de France. J'ai lu. J’ai reçu M. De Larive et M. Broadwood. J’irai aujourd’hui à l'Athenoeum et je verrai Duchâtel. Je voudrais travailler avec suite. J’ai bien des choses en tête. Que la vie est courte, et que de temps perdu dans cette vie si courte ! Milnes qui était hier chez Lady Lovelace soutient que le Président devrait faire sur le champ un cabinet rouge. Ledru Rollin en tête ; que ce serait le moyen de traverser et d’user ce parti au meilleur marché possible. On dira et on fera peut-être faire à ce pauvre Louis Napoléon tout ce qu’on a dit et fait faire à Louis XVI. Et il ne s’en tirera peut-être guèure mieux. J'attends les journaux. Je vous reviendrai après. Midi. Je n'ai point de lettre et les journaux ne contiennent rien. Cela finira par un Cabinet tiers parti, ou par le maréchal Bugeaud énervé par le tiers parti. On n'a pas le sentiment du mal et on a une peur effroyable du remède. J'espère bien vous voir ce matin. Je vous écris comme, si je ne devais pas vous voir. Je sors. Je vais chez Duchâtel. Je serai rentré à 2 h. Adieu. Adieu. G.
Formats de sortie

atom, dcmes-xml, json, omeka-xml, rss2