Guizot épistolier

François Guizot épistolier :
Les correspondances académiques, politiques et diplomatiques d’un acteur du XIXe siècle


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Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Ems Mardi 16 juillet 1850

Je deviens décidément unitaire allemande. Si l’Allemagne était cela, mes lettres vous arriveraient. Tous les petits états se passent leur fantaisies, c-à-d. que l’administration va comme il lui plait. Les postes ne sont pas réglées. Que faut-il faire ? Je n'en sais rien. Mes lettres m’arrivent, les journaux aussi, mais ce qui part d'ici n’arrive pas. Je vous ai écrit un mot par Strybon sans l’affranchir, peut être cela ira-t-il mieux. Je m’en vais remettre ceci à Rothschild. J’essaye de tout. Quel ennui. Vous, inquiet. Moi sans nouvelle. Car vous ne voulez plus rien me dire. Voici quatre de vos lettres sur une demi page pour vous inquiéter et vous plaindre. Je n’ai pas de lettres d’ailleurs ainsi pas un mot à vous dire, puisque je n’ai pas même à vous répondre. Je vous répète que je vous ai écrit tous les jours, tous les jours. Voici ma douzième lettre d’Ems, car je vous ai déjà écrit ce matin. Si je vous avais là que de choses à nous dire que d'observations à nous communiquer sur ce qui se passe.
Je pense toujours beaucoup à Peel. Décidément un grand caractère. Sa volonté d’outre tombe vaut mieux que tous les volumes de M. de Chateaubriand. Il veut que sa postérité reste roturière. C'est bien de l'orgueil. Cela plaira à tous les démocrates dans le monde. Je vois d'ici les grimaces de la belle marquise. Les Canning n'ont pas su faire cela. Mais encore les fois quel manque de tact d’offrir à la famille Peel la même chose, pas plus, qu’on n’avait offert à la veuve Canning. Canning beau parleur rien de plus. Belle comparaison ! Adieu car il faut finir. Quand me direz-vous que vous avez reçu mes nombreuses lettres où même une seule ! Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Ems Mardi le 16 juillet

Je me porte bien, je n’ai pas manqué un jour de vous écrire. Je suis désolée de votre inquiétude. Je prends le parti d’adresser autrement ma lettre aujourd'hui. Je l'envoies à Strybon pour qu’il la mette lui-même à la poste. Les autres je les ai toujours adressées au Val Richer, et affranchies c’est peut-être cela qui les empêche de vous arriver. Je ne vous dis que ce mot à 6 h. du matin, en toute hâte & tristesse de votre inquiétude. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Ems Lundi 15 juillet 1850

Je me sens tout-à-fait malheureuse de votre inquiétude. Car je sais bien que dans un cas pareil j’aurais fait mille sottises comme de me jeter à l’eau par exemple, ce qui empêcherait les autres. J’ai pris tous les renseignements possibles. D'ici mes lettres sont certainement parties. Mais la poste Tour & Ta[?] a ses agents partout, & par curiosité comme par calcul, ils font quelques fois passer les lettres par Mayence & Francfort, et il se peut que des lettres d’ci mettent quatre jours pour aller à Paris. Cela expliquerait comment le 11 vous n'aviez pas encore ma lettre du 6. Cependant non, voilà plus de cinq jours. Enfin que faire. Moi je n'en sais rien. Un jour vous recevrez douze lettres à la fois. Je plaindrai les onze lettres. C’est assez parler de nos ennuis. Le beau temps est revenu. Je suis toujours bien ennuyée & bien docile. L'effet des eaux est une lassitude, & somnolence excessive, et puis des douleurs de jambes et d’estomac, on me dit que c’est très bon. Qu’en pensez-vous ? Moi je crois que je devrais cesser. Je crains un coup d’apoplexie. Vous me reconnaissez là.
Je ne sais que penser de la loi sur la Prusse. Je vois que le Journal des Débats prend le mors aux dents, je vois que la Prusse en prend son parti, qu’est-ce que ce revirement extraordinaire. Venez à mon aide. J’ai fort aimé ce que M. de Laboulis a dit dans la séance de jeudi. Mais je vous parle de choses qui seront bien vieilles & oubliées quand vous recevrez ceci. Je m’avise de proposer à lord Aberdeen de venir ici vous rencontrer pour le 1er ou 2 août. Quelle idée ! Pourquoi pas ? Viendrez-vous toujours et quand à peu près. Ma cure complète finit le 5 août, il faut deux jours de repos et puis je pars. Je ne sais pas du tout ce que je ferai du reste de l’été. Mon fils aîné passera le mois d'août à Paris. Mais quel vilain mois pour y rester. Je n'en serai pas capable. Hier je n’ai pas vu une âme mais le temps était superbe. J’ai bien fatigué mes chevaux. Adieu. Adieu. Adieu.

Comme je trouve inconvenant de n’avoir offert à lady Peel que ce qui a été fait pour Mme Canning ! Manque de tact. En tout cas elle eut refusé. La prévoyance de Peel ajoute encore à la popularité de sa mémoire. Grand homme, grand démocrate. Il restera désormais le héros de la démocratie. Au temps qui court l’effet ne sera pas bon pour la upper house.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Ems le 14 juillet 1850, 10 heures

Le temps se relève depuis ce matin et cela donne courage. Mais voilà les bannis interrompus. Une machine rompue, qui nous met à sec. Ils sont bêtes par ici. Que je suis désolée de cette autre bêtise, les postes. Je n’ai pas manqué un seul jour de vous écrire. De Cologne vendredi 5. D'Ems Samedi 6 lendemain de mon arrivée. Et puis tous les jours comme de raison. Hier je n'ai rien eu de Londres, ni de Paris. Je vous ai raconté Lady Allice et Marion. Selon ses derniers renseignements Meyendorff allait décidement. à Vienne. Je ne lui ai pas répondu à deux de ses lettres.
Je ne puis rien vous dire sur le Danemark. Je n’y entends rien et je n’ai eu personne à consulter. Ma princesse régnante ne sait pas grand chose, elle me dit seulement qu’elle s'est retirée de l’union, & que les autres petits états font de même. Je ne sais pas même si le Duc de Prusse est à Coblence. Je ne vous amuserais pas du tout, je n’ai [rien] reçu à vous conter. Adieu, Adieu, à moins d'une catastrophe entre ici et 4 heures départ de la poste. Elle arrive à 6, c’est arrangé avec intelligence ! Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Ems Mardi le 9 juillet 1850

Mon fils est parti ce matin, c’est un gros chagrin pour moi. Il est retourné à Paris, de là il va en Ecosse, il m’a presque prouvé de revenir ici, mais je ne veux pas y compter. Le Prince Paul de Wurtemberg a fait son entrée très imprévue chez moi hier. Il passe ici deux jours et va à Francfort. Je n’ai du reste vu personne hier, et le temps a été pluvieux & froid tout le jour, ce qui a empêché mes promenades. Je n’ai pas de livres, je n'ai rien. Il y à de quoi se pendre. Et pas de lettres de mes correspondants anglais il est tout-à-fait impossible qu’ils ne m’aient pas écrit. Où sont ces lettres ? Les vôtres m’arrivent le 4ème jour. Hier 8 j’ai reçu cette du 5. Ainsi huit grands jours pour la question et la réponse. C'est bien ennuyeux. Les arrangements de la poste sont tout-à-fait sauvages. Je vous apprendrai bien peu ou rien du tout sur les affaires d’Allemagne. Je ne vois personne et il n’y a personne ici qui vaille la peine qu'on voie. Il y a des princes & princesses allemandes. Elles m'ont fait témoigner qu'elles seraient charmées de ma connaissance. Je le crois bien, mais je ne suis pas aussi sûre de l'être de la leur, et j’évite. Les connaissances se font dans le jardin & le salon, je n'y vais pas. C'est de la cohue. Entre autres altesses il y a les héritiers du Danemark. J’ai vu Antonini avant mon départ. Sa cour proteste contre le principe. Mais comme on fait valoir des cas où, hors la guerre civile, il y a eu des pertes infligées à des Anglais, on a nommé une commission qui examine. Mais rien ne sera admis pendant les bombardements. ou combats. J’ai trouvé ce qu’a dit Dupin de Peel, parfaitement de bon goût. Mais quels hommes à cet homme ! Jamais citoyen n’en a révélé de semblables. La grande duchesse Hélène arrive ici le 15 août. J’espère bien être partie avant.
4 heures. Voici l'heure d’envoyer les lettres. Je n'ai rien à dire de plus. Je suis de bien vilaine humeur, de toutes choses, & surtout de ce que je ne trouve pas d’encre noire ici. Adieu. Adieu. Ecrivez-moi des nouvelles. Adieu. J’espère que mes lettres vous arrivent toujours affranchies ?

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Ems Lundi 8 Juillet 1850

Enfin deux lettres de vous du 3 & du 4. Une d’Aberdeen du 5. Le plus vif chagrin. Perte nationale. Ressentie par la nation toute entière, depuis la Reine jusqu'au laboureurs. Jamais ou n’a vu un deuil un chagrin aussi général. Le plus grand homme qu’ait eu l'Angleterre, & pour Aberdeen un ami de 50 ans. Il n'a pas cœur à me parler d’autre chose, ni à spéculer "on the probable consequences of this calamity in our political combination. The session of Parliament will be brought to an early termination." Vous voyez par les journaux toutes les démonstrations. Certainement tout cela prouve que vous et moi nous le mettions un peu au dessous de son mérite. Il n’y a rien à dire devant une opinion aussi universelle. Toutes mes autres lettres d'Angleterre me manquent. J’ai vu hier la duchesse d’Istrie & les deux petites princesses de Beauvale, celle qui est fille du Duc de Mortemart est fort gentille. Mon fils me quitte demain. C’est un grand chagrin pour moi. Aujourd’hui j’ai commencé à boire, par un temps pluvieux, & froid. C’est du guignon. Ah qui je vais m'ennuyer !
Je trouve bien bonne la dernière partie de votre lettre au sujet de l’institut. Je crois que les mois prochains vont être bien fades. Si les vacances de l’Assemblée sont longues il y aura de quoi s’endormir. Ici c'est l’occupation obligée de tout ce qui marche sur deux pieds. Vous ne vous figurez pas l'ennui de ce lieu. C’est pire que ce que j’avais craint. Adieu de peur de trop. vous faire goûter les plaisirs d’Ems. Adieu.

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Ems Dimanche le 7 juillet 1850

Pas de lettre, ni de vous, ni de personne c'est inconcevable. Si je n'en reçois pas aujourd’hui, il faudra. que vos lettres reprennent le chemin de Paris. Car ce que Stybon m'envoie m’arrive exactement. Je suis désolée de cette longue privation de vos nouvelles. Désolée ainsi de n’avoir rien d'Angleterre. Il est impossible qu'on ne m’ait pas écrit. Plus je pense à la mort de Peel, plus je trouve cela un gros événement, & un grand malheur. Quelle sensation cela a produit ! Quel hommage universel. Et comme tout est frappant là dedans. Vendredi son dernier discours. Samedi l'horrible accident et quelle belle mort ! Avez-vous lu le Galignani du 4 afternoon edition ? Tout s’y trouve. Les derniers moments, et les réflexions de journaux. Le Times admirable. J’ai fort aimé les Débats aussi.
Je n’ai pas à vous entretenir d’autre chose. Je n’ai vu ici que le médecin du lieu. Demain je commence. Nous verrons si Ems me va. Le pays est superbe. J’y ferai bien des belles promenades, et je m’y emmenerai bien convena blement. Toujours, pas une avec de nom connu. Personne. C’est trop peu. La Princesse de Prusse réside à Coblence, mais elle ne vient jamais ici. 4 heures. Il y a ici un Rothschild very usefull man. Il me dit qu'il faut mettre sur les lettres par Coblence. Ainsi ne l'oubliez pas. Adieu. Adieu.
Comme nous sommes loin.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Ems Samedi le 6 Juillet 1850
Midi

Si je reviens jamais à Paris, je suis bien décidée à n'en plus sortir. Quelle histoire que celle de mon voyage, & quel début à Ems. Arrivée hier soir bien fatiguée J’ai passé deux heures allant de porte en porte demander un gite. Pas un. Nulle part, une chambre. Enfin dans une tabagie à côté de buveurs, une pièce avec deux lits moi & ma femme de chambre. Pas un domesti que dans la maison. Mon fils mon docteur, mes trois domestiques chacun éparpillé dans des granges. Je ne sais où. La perspective de m’en retourner aujourd’hui à Paris. Enfin depuis une heure on m’a trouvé quelque chose de bien mauvais, mais enfin je suis logée avec mon monde. Un immense rocher derrière moi et une jolie vue en face.
Je suis très abîmée du voyage et des agitations de tout genre. Ainsi hier l’université de Bonn avec moi sur le bateau. Chantant d'atroces chansons. Ah le vilain pays. J’avalerai Ems pendant 3 semaines ou 4. Et puis bon jour, on ne m’y rattrapera plus. Je verrai aujourd’hui le médecin du lieu pour régler mon régime. Je serai bien docile. J'essaierai de croire qu’Ems m’aura fait du bien.
J'ai bien à rattraper. Pas une âme de connaissance dans une énorme liste d'étrangers ainsi la solitude dans la foule. Je vois Londres & Paris comme dans un nuage, bien loin, bien loin. Pour tout ce qui n’est pas affection la distance est mortelle, l’intérêt s'en va. Si je reprends des forces je recommencerai à y penser. Mon fils me quittera dans très peu de jours. Je n'ose pas le retenir. Ceci est trop ennuyeux. Je vais bien vous ennuyer aussi. Qu'aurai-je à vous dire ? Les lettres partent d'ici à 8 h. du matin. Il faudra donc toujours qu’elles soient écrites de la veille. Je vais voir comment m’arriveront les vôtres. Je n'ai rien trouvé, la poste entre à 6 h. du soir. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Cologne le 5 Juillet 1850
8 h. du matin

Quelle fatigante journée que celle de hier ! En arrivant ici j'ai pleuré de fatigue, pleuré tout- à-fait. Me voila reposée & je pars. Voilà donc Peel mort. C'est une grande et affreuse nouvelle. Je vois que si cela est bon comme question de part, c'est plein de périls futurs pour le pays en tout cas l’événement à une portée immense. Et pour le moment ce sera une perte sensible pour le gouvernement. Vous songerez à cela bien mieux que je ne saurais le faire. Moi j’en reste bouleversée.
Le Prince de Prusse arrive après-demain à Bruxelles. Cela fait grand plaisir au roi Léopold. Il ne lui dira que de bonnes & utiles choses. Je suis impatiente d’arriver à Ems pour y trouver votre lettre vos lettres peut-être. Je serai avis de me reposer & de me soigner, & de me débarrasser de tout cela le plus tôt possible. Adieu Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 1er Juillet lundi 1850

Je trouve que le débat a été bien grand et que quand on voit tous les hommes les plus considérables de l'Angleterre condamner un ministre, ce ministre est virtuellement fini. J’ai bien aimé ce que Peel a dit sur vous. La politique anglaise est claire. La propagande partout on est averti. J’ai vu vos amis & Morny & Kisselef. Je reverrai tout cela aujourd’hui, & demain matin ! Je pars. Adressez encore demain votre lettre à Paris. Et puis vous adresserez à Ems. Duché de Nassau. Allemagne.
Lord Aberdeen m'écrit, point surpris de vote. La crainte d'une dissolution a agi sur beaucoup de votants. La situation ministérielle confirme for the present, cependant the vote of the lords stands recorded. La défense de Lord Palmerston est un manifeste de radicalisme, il ne peut pas vivre en bonne intelligence avec les autres puissances. This can not last long. Il me recommande ce discours & Gladstone comme admirable. Lord John is talking of a foreign cabal insinuated more than he chose to express. Aberdeen a eu une longue conversation : avec Brunnow, & devait recommencer. His position is not very intelligible to me. Voilà toute la lettre. Je vous dis vraiment. Adieu de Paris. Vous serez un jour au moins sans lettre de moi. Je vous écrirai de Bruxelles. Adieu. Adieu. Adieu.
Nous serons bien loin ! Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 26 juin 1850

Voici votre lettre d’hier. Celle de Lundi me manque encore, à moins que vous ne m’ayez pas écrit, ce que j’ai peine à croire. La discussion à Londres se prolonge. Lady Allice seule m'écrit, & me dit que Sir J. Graham avait parlé contre le g[ouvernement] & que certainement Peel voterait & parlerait contre aussi ! On croit que la majorité pour le gouvernement sera de 30 voix, plus peut-être. Voici dans ce moment une lettre de Brougham. Il croit aussi à la majorité, mais il dit c’est égal, après le vote à Le Chambre haute Palmerston ne peut pas tenir & Lansdowne ne peut plus présider car les Pairs seront ingouvernables après le démenti qui leur aura été donné par les [Communes]. Voici votre lettre de lundi aussi.
2 heures. J’ai été interrompue Chreptovitz pendant trois heures. Une lettre de Lord Stanley. Content de lui même, & disant que quand bien même la Chambre basse appuierait Lord Palmerston. Il ne peut pas durer. J’ai appris par une source. intime très sûre que les ministres avaient demandé l’intervention active de Changarnier pour emporter le vote. Il y avait donc quelques confidences de ce qui devait se passer à l'Assemblée, mais bien peu. Hier le Président a offert avec convenance ses remerciements au général. On me dit aussi que si l'Assemblée n’avait pas voté pour, le Prince était [?] de retrouver la somme, et bien au delà, dans une souscription nationale, et qu’au fond cette alternative lui eût convenu. Les situations respectives restent ce que je vous disais hier. A Londres hier il restait encore à avaler cinq longs discours : John, Palmerston, Disraeli, Peel, [?], sans compter les autres, c’est ce qui me fait douter qu'on aie pu voter hier. Il fait une chaleur accablante si je pars samedi ce sera le soir. Adieu. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris mardi le 25 Juin 1850

Quelle grande journée que celle d’hier ! Ce n’est pas à vous que j'ai à en faire la remarque. On dit que l’effet a été prodigieux à l'Assemblée. La loi était perdue, perdue à 100 voix de majorité peut-être. L'apparition de Changarnier à la tribune a été le plus grand coup de théâtre. Imposant, doux, fier. Tout le monde surpris les visages allongés. La bataille gagnée en moins de cinq minutes. 246 voix de majorité. Larochejaquelein, Dalmatie, changeant la couleur de son billet, en s’en voulant. Enfin l’argent au Président, l'honneur à Changarnier. Il a pris possession à la fois des deux pouvoirs de l'État. Voilà le résumé de la journée.
Hier soir chez Hatzfeld, tout le monde, moins Changarnier. Il s’est dérobé aux ovations sincères & hypocrites. Moi bien sincère. Je suis charmée. J'en ai oublié Lord Pal[merston] ! Quelle plein d'injures contre moi dans ses journaux ! I don't care. Noble guerre ! Je crois qu'il aura eu la majorité hier dans la Chambre basse. Mais il a la flèche empoisonnée dans le flanc. Avez-vous lu L’Univers de Samedi ? Quel article sur Thiers ! Molé me dit qu'il est furieux. Je n’ai pas de lettre de vous aujourd’hui, pourquoi ? La poste de Londres ne m'a rien apporté non plus. C’est demain qu'il y aura une pluie de lettres. De quelle couleur seront-elles ? Je crains même une assez forte majorité. & je me méfie beaucoup de Peel. Brunnow a l'ordre de rester à Londres jusqu’à la fin de la session, après on l'appelle à Pétersbourg. Adieu. Adieu.
Dans ce moment un billet du héros d’hier, qui me dit : " Je vais me cacher pendant soixante heures dans un petit chateau du Loiret." Je livre cela à vos méditations. Il revenait de l’Elysée, il me le dit. Adieu. Adieu. P.S. J'ai une réponse. Si l’initiative venait de la part des intéressés les conseils seront bons.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 18 juin 1850

J’espère une lettre de vous aujourd’hui. J’ai donné à dîner hier aux Chreptovitz. J’avais entre autres Molé, Changarnier, Morny. Les deux premiers aiment mieux je crois dîner séparément. Le soir je suis allée un moment chez les Hatzfeld. Le g[énéral] de Lahitte y est venu. Je ne sais aucune nouvelle. Seulement rien n’est terminé avec l'Angleterre. On est, je crois, d’accord sur le fond, mais non pas sur la forme. On ne parle que de la dotation. Toujours du doute mais je ne crois vraiment pas possible que cela soit refusé. La discussion à ce que dit Berryer ne viendra que Lundi. Un mot d’Ellice de hier. Mais je n’ai pas à vous parler de Londres. Vous savez tout à présent, & nous, nous n’en savons rien.
Thiers raconte à tout le monde son émotion des [ ?] de St Léonard. On dit qu’il pleure encore en racontant. On dit aussi qu'il est revenu fusionniste. Chreptovitz part après demain avec un grand regret de ne pas vous voir. J’ai écrit à Marion une lettre suppliante, Hélas cela n’y fera rien. Ste-Aulaire me quitte à l’instant. Hier on m’a dit que si l’Assemblée refuse, le pays fera une souscription, et qu'on lui votera 15 millions peut être. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Mercredi le 12 juin 1850

Quel plaisir que votre lettre ce matin. Je vous reverrai dimanche. C'est bien charmant & c'est bien utile. Il sera ici samedi pour jusqu’à lundi. J’aurai dimanche soir chez moi, ceux que vous aimerez à rencontrer. Je suis très entrain de Lord Palmerston. J’ai tant de complices que l'ouvrage est facile. Savez- vous que je le crois bien entamé, bien malade. Le g[énéral] Lahitte est bien ferme. Il se loue du Président qui est très ferme aussi. Enfin jusqu’ici rien n’est fait. J’ai fait arriver en bon lieu vos soupçons sur ce qui pourrait se traîner à Athènes. On y fera attention. La manière dont la question est posée dans la négociation qui se poursuit ne rend pas raisonnable que l'intrigue à Athènes puisse aboutir. D’ailleurs j’ai vu [?], il me parait qu’il a pris les devants dès il y a 3 semaines. Il a bien conseillé de laisser faire la France. Quand je vous verrai, je vous dirai pourquoi ma lettre est si courte aujourd’hui.
Depuis onze heures pas un moment jusqu’à présent 2 heures. Rien à vous dire. La dotation passera, tout le monde le dit à présent. Le discours du Président dans son voyage, fait du bruit. On le trouve un peu socialiste. Au demeurant ce voyage a été excellent pour lui. L'accueil partout, parfait. Changarnier ne le fait pas voir, on n’entend pas parler de lui. Mes fils sont toujours ici. Adieu. Adieu. Adieu Chreptovitz est en activité et en grande confiance pour moi. Morny que j’ai vu hier on dit que Flahaut ne voudrait pas qu’on fût trop raide. Mais cela n’agit pas sur Morny d’ailleurs je vous répète Lahitte est tout-à-fait décidé. Adieu. Adieu.

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Paris vendredi le 31 Mai 1850

Triste abominable ressource ! N’avoir plus que mon papier vert pour vous retrouver. Ah que j’avais le cœur lourd hier. et aujourd’hui & tous les jours à venir ce sera de même. Je n’ai vu personne hier matin, le soir j’ai été dire adieu à la Princesse Wittgenstein qui part aujourd’hui. J’y ai rencontré Kisseleff qui viendra tantôt ici pour compléter ce qui peut manquer au petit extrait ! Ensuite chez Madame Kalergis. Molé y était. La négociation avec Normanby se poursuit et avance. Lahitte dit, que dès qu’il aura sa satisfaction il sera satisfait et ne laisse aucune espérance qu’il traîne. Molé comprend très bien l’importance que ce ne soit pas fini avant le 7 juin (la discussion à la chambre des Lords ) mais il est convaincu que tout sera conclu et & rétabli avant. Les petites finesses du métier, les ressources les plus élémentaires sont inconnues, et d’un autre côté le désir de terminer, & de soutenir Lord Palmerston est grand chez le Président. Il paraît que Palmerston cédera tout. Il faut convenir que si cela est ainsi ce sera passablement honteux pour lui. Bref never mind.

2 heures. [Chraptovitch] est venu m’interrompre. Deux heures de conversation excellente, sur tout sur ce qu'il y a de plus intime. Vous êtes le héros de Nesselrode. Le gendre au désespoir de votre départ. Il aurait tant aimé causer avec vous. Le maître est tout-à-fait dans vos idées. Adieu, il faut que je ferme parce que vont venir mes visiteurs. Adieu. Adieu.

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Paris le 14 Novembre 1849

Voici votre lettre, & voici encore la mienne puisque vous m'ordonnez de vous écrire. Mais c’est bien la dernière. Que j'aurai de choses à vous dire. Hier tout le monde était charmé du verdict de Versailles, bon correctif à l'amnistie de la veille qui n’a pas fait grand plaisir dans le monde de la majorité. Le duc de Broglie m’a fait une longue visite hier. Je ne le trouve pas si désespéré, mais je lui en demande pardon c'est un suprême [?]. Il avait vu longtemps Lord Lansdowne, il ne m’a pas raconté ce qu'il lui avait dit mais il lui a parlé de Lord Palmerston comme il en pense. Broglie a chassé Kisselef qui était en train de me raconter sa matinée. Il avait été chez le président je crois que cela a été vif ; on n’aboutit à rien ici. J'ai été le soir passer une demi-heure chez Molé. Très curieux salon, pour moi, qui n'ai jamais été dans un salon politique à Paris. Rien que des députés, Molé resplendit. Il était très flatté de mon apparition. Cela a bon air chez lui, grand [?] et facile. Il m’a présenté M. de Montalembert l’extérieur n’est pas brillant. La conversation bonne, un peu tranchante, cassante, mais ses bons principes couvrent tout. Il y avait là aussi Larochejaquelin. J'ai causé un moment avec Changarnier, je ne l'ai pas bien compris quand il m’a dit qu’on entrevoyait quelque chose derrière le rideau. Broglie était là aussi, une foule d’hommes, en femme pas une, excepté Mad. de Hatzfeld. Il est vrai que je me retire de bonne heure.
A entre 7 et 8.
Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris lundi le 12 Novembre 1849

Mad. de Boigne est restée longtemps ici hier matin. Elle est en grande recherche pour moi. Salvandy est venu aussi. J’ai oublié de le prier pour la soirée. Long tête-à-tête avec Hatzfeld. Quelques indifférents le soir un brouillard ni épais que personne n’a pu venir des quartiers éloignés. Les voisins sont venus. Molé, & Achille Fould, en blâme de la proclamation de Carlier quoique contresigné part F. Barrot. Le corps diplomatique de ce côté-ci de l’eau. Les Normanby toute la soirée, Lansdowne. Mes jolies dames russes. Enfin l’ordinaire. Salon élégant, point politique. Et c'est ce qui me va. Molé avait le matin deux heures de tête-à tête avec Lansdowne, il se disait content. Il avait l’air plus calme que l’autre jour. Lui aussi est resté jusqu’au bout. Le discours du Président hier est l'objet de l’éloge de tout le monde. On commence à croire tout-à-fait que le coup d'état est éloigné, cependant on veut se tenir préparé. Berryer n’est pas venu hier soir. Il m'écrit ce matin que le brouillard, l'a égaré c’est parfaitement. possible. Je deviens impatiente de Constantinople. Beauvale dit : " tout est fini, Brunnow rit. Il n’y a plus de flotte." C’est bel et bon de rire, mais je voudrais savoir vraiment que tout est fini. Vous verrez chez moi un collègue du pauvre Rossi, le duc de Rignoux. Il a l'air bête mais sa femme pas. Quel plaisir de penser que vous arrivez. Vous avez surement du plaisir à faire vos paquets & vos arrangements. La campagne est rude au mois de novembre. Adieu. Adieu. Adieu.
Je ne vous écrirai bientôt plus. A propos sachez que le jour de votre arrivée à Paris, vous me trouverez chez moi entre 7 à 8 heures. Je dis cela pour tel jour de cette semaine.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris lundi le 29 octobre 1849

Voici ce que m'écrit Constantin. 24 Berlin. " L'envoyé turc a été trouvé très content, une fois hors de l’influence de St Canning. Le jour où Bloomfield & Lamoricière ont présenté leurs notes, le comte Nesselrode a eu la satisfaction de pouvoir leur dire, que tout était terminé directement avec la Turquie Le pied de nez est complet. Vous vous en réjouirez surtout à l’endroit de Lord Palmerston, ce génie infernal ." Voici les dates. Le courrier Anglais est parti de Londres le 7 octobre. Il n’a pu arriver à Pétersbourg que Le 10e jour au plus tôt. Or nous avions fini avec le Turc le 14. Le 16 il a eu son audience de l'Empereur vous ne voyez le récit dans les Débats c’est que les hommes importants s'emparent du pouvoir de gré ou de force : Thiers, Molé, Berryer ministres. Tous les gens de cœur & d’honneur se mettant au service. Le duc de Noailles accepterait d’être sous préfet. Il s'agit de sauver la France il n'y a d’autre moyen que l'épuration des places. Il est très éloquent et très monté. J'ai été le soir un moment chez la vicomtesse. Le duc de Mouchy est un vrai paysan. Il me déplait parfaitement. Aujourd’hui qu'il est l'un des 150 rois de la France, il est insoutenable. Et puis il a été 10 fois impressionné dans la demie heure que j’ai passé là. Votre lettre ne vient pas, qu’est-ce que cela veut dire ? Adieu, Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Clarendon Hôtel Dimanche Le 14 octobre 1849

Longue visite hier de Collaredo. Ils me soignent beaucoup. J'avais donné quelques hints à Lord John sur les dégouts que Collaredo ressentait ici. Hier il m’a dit qu'il a donné sa démission. Il ne veut pas rester exposé à être traité comme le fait Lord Palmerston. Il est très décidé. Il passera probablement par Paris en se rendant en Italie où il passera l'hiver. J’ai vu Flahaut aussi. Morny est toujours ici, & ne sait pas du tout quand il partira. J'avais envoyé la lettre de Lord Aberdeen à John Russell. Il me l’a renvoyé avec quelques explications. L’effet de la lettre a certainement Eté bon, car l’opinion d’Aberdeen était appuyée de celle de Peel qui se trouve chez lui. Tous deux trouvent qu'on a beaucoup trop grossi l’affaire ici, & qu'a Constantinople. Canning a été dans son tort. Il y a des nouvelles de Pétersbourg. On connaissait l’événement turc, & on attendait pour ne dire son avis que Fuat Effendi soit arrivé pour expliquer & excuses, car c'est comme excuse que nous prenons son envoi. Je commence à penser aussi que cela s'arrangera.

Lundi matin le 15 octobre envoi de votre lettre. Je n’ai que deux minutes à vous donner. Hier longtemps Brunnow, C. Greville, Flahaut, Morny, & la Marquise Douglas, qui me raconte beaucoup Paris, & le président, le comte de Chambord & sa femme, avec lesquels elle et aussi intime qu’avec son cousin Louis Napoléon. Brunnow croit que cela s'arrange. Il blâme un peu Titoff & beaucoup Canning. Tenez pour certain que c’est lui qui a fait tout le mal. Morny dit qu’à Paris on est très pacifique. & que le Président l’est surtout. Voilà tout en très gros. Quel dommage pour le détail ! Le départ de Collaredo fera sensation ici, contre Palmerston. Adieu. Adieu.
Il souffle très fort & Douvres & Calais & Folkestone & Boulogne sont encombrés de gens qui ne peuvent pas passer. J'attendrai comme eux, s'il faut attendre. Adieu. Adieu, vous aurez encore un mot d'ici demain.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond le 13 octobre 1849
11 heures

Mon dernier mot d'ici. Je pars pour Londres où je passerai trois jours. Mardi je pars, mais le temps est affreux. Mad. de Caraman dit qu’elle m'ac compagne. J’aurai peut-être Kolb. Pour Mussy, je n'y compte guères. Lord John est vraiment triste de me voir partir. Toujours de bonnes conversations avec lui. Je crois qu'à la longue je serais utile un peu. Mais bonjour ! Rien de nouveau. Je suis convaincue que Strattford Canning est l’auteur de tout ceci. Il pouvait empêcher l’éclat. Il me semble que John est de mon avis. Je suis très fatiguée d’arrangements, quel ennui de se déplacer quand on n’est pas une impératrice. Adieu. Adieu. d'ici. Peut-être j'ajouterai un mot de Londres.
Clarendon Hotel 4 heures Je reviens déjà de chez mon oculiste, & de chez mon banquier. Demain est inutile à Londres, il faut tout faire aujourd’hui, & j'ai beaucoup à faire. J’ai eu une bonne lettre d'Aberdeen bien sensée, je l'envoie à Lord John, c’est du bon commérage. Les deux hommes ont du gout l’un pour l’autre. Votre lettre ne me reviendra de Richmond que ce soir.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond le 12 octobre 1849

Hier déjeuné tout royal chez les Cambridge. On me pressait beaucoup d’y dîner avec Don Juan, & Cabrera, mes yeux ne me permettent pas d’accepter ces plaisirs. Cabrera m’aurait cependant intéressé. Il tourne la tête à tout le monde ici. Les princesses me comblent d’amitié. Sérieusement la duchesse de Cambridge veut venir à Paris et voit dans mon salon, les characters. Lady Palmerston m'écrit la lettre la plus tendre & la plus pressante, ils sont tous à Brockett & m'attendent là. Je crois vous l’avoir dit. Je n’ai rien appris de nouveau hier à Londres je saurai quelque chose. Mais là aussi je serai tracassée, occupée. Comme j'ai besoin d’être settled & tranquille ! Le Times fait retraite aujourd'hui. L’apostasie de Bem & [?] a fort refroidi le zèle. Les Anglais vont prendre possession de deux îles grecques. (Schiza & Sapientza) (dequel droit ?) Pas de poste ce matin, voici ma dernière lettre de Richmond. Je vous écrirai demain & Lundi & Mardi de Londres, & puis de France j’espère. Adieu. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Jeudi le 11 octobre 1849

Les paquets, les comptes, les adieux, voilà à quoi je suis occupée ici, & ce qui m'attend encore à Londres. Je suis fatiguée de ce présent et de ce futur, et je voudrais vous écrire longuement tout ce que je sais et je n’ai eu le temps ni les yeux. Lord Palmerston se vante que toutes ses dépêches à Pétersbourg, Constantinople, Vienne, & amiral Parker, sont des plus douces, & conciliantes pas un mot qui puisse nous blesser. Lord John m'a l’air tranquille. Il s’inquiète maintenant de Rome, du consulat français. La reine a été très fâchée de la résolution du Cabinet de soutenir la Turquie. Elle nous est très favorable, mais il a fallu céder. Collaredo m'a fait une longue visite hier. Très ouvert. Trés en blâme de la conduite ici mais parlant toujours de la querelle. avec la Russie sans y mêler l’Autriche, quoique Sturner ait agi comme Titoff. Nos diplomates ici blâment ces deux messieurs. Ils se seraient trop pressés. Au fond c’est seulement cela qui fait le bruit ici et l'embarras. Car le droit de l’Empereur est pleinement reconnu, il demande ce que les traités lui donnent le droit de demander. Et la porte ne veut pas répondre, elle envoie un extraordinaire pour expliquer l’opinion est générale que cela s’arrangera. Mon fils qui est venu hier a été très frappé de vos conjectures. On me presse bien d’aller à Brockett Hall. Les Palmerston y sont. Elle m'écrit que son mari fera tout pour me plaire. Beauvale est bien pressant aussi. Ce n’est pas possible. Le temps devient rude, il faut que je parte. Depuis lundi vous adresserez votre lettre à Boulogne. Je voudrais déjà avoir passé cette mer ! Adieu. Adieu. Adieu.
Un petit mot lundi à Londres aussi pour tous les cas. Il n’y a pas un mot de vrai au changement de Ministère à Vienne. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mardi 9 octobre

Vous aviez toute raison. J'adopte votre point de vue de la question. Occupation des principautés. L’affaire s’arrangera. Il serait trop absurde de penser que la guerre s'en suive. Les nouvelles de Vienne hier au soir étaient meilleures. Les Hongrois à Widdin, disent qu’ils aiment mieux être perdus en Autriche que de vive à Widdin, où l'on ne leur donne pas à manger. La porte leur a envoyé un prêtre. Bem et 3 généraux se sont fait musulmans avec 24 officiers. Kossuth & tout le reste a refusé ce moyen de salut terrestre. La porte à qui on conseille d'expulser les Polonais, dit qui non, par ce qui l’Empereur préfèrera qu’elle les retienne prisonniers. Cela va à votre opinion. Je vois lord John tous les jours, le soir. Le matin il le passe à Londres en conseil. Mes yeux me font souffrir. Et vous en souffrez. J'écris à Aberdeen, à Beauvale, assez à Pétersbourg, je les épuise. Mais ce moment est gros. Metternich & Wellington se sont dit Adieu avec beaucoup d'émotion. Mad. de Metternich. N’a pas voulu que je disse adieu à son mari. Ils sont allés à Londres avant hier & s'embarquent aujourd’hui. Les Flahaut ont quitté Richmond. Il me reste ici les précieuses les Delmas, & Lord John. J’ai le projet d'aller à Londres Samedi j'y passerai quelques jours. Depuis vendredi vos a refusé ce moyen de salut terrestre. La porte à qui on conseille d'expulser les Polonais, dit qui non, par ce qui l’Empereur préfèrera qu’elle les retienne prisonniers. Cela va à votre opinion. Je vois lord John tous les jours, le soir. Le matin il le passe à Londres en conseil. Mes yeux me font souffrir. Et vous en souffrez. J'écris à Aberdeen, à Beauvale, assez à Pétersbourg, je les épuise. Mais ce moment est gros. Metternich & Wellington se sont dit Adieu avec beaucoup d'émotion. Mad. de Metternich. N’a pas voulu que je disse adieu à son mari. Ils sont allés à Londres avant hier & s'embarquent aujourd’hui. Les Flahaut ont quitté Richmond. Il me reste ici les précieuses les Delmas, & Lord John. J’ai le projet d'aller à Londres Samedi j'y passerai quelques jours. Depuis vendredi vous m’adresserez vos lettres au Clarendon Hotel. Je vous dirai le reste quand je serai fixée. Que de choses perdues que nous nous serions dites ! Adieu. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Dimanche le 7 octobre

Metternich ne peut pas croire que cela devienne la guerre. Il croit que la Turquie aura cédé moi, j’ai peur que non, et comme je ne puis concevoir que l'Empereur se rétracte s’il est vrai qu'il a dit, extradition ou guerre, il y aura la guerre. L’incertitude durera encore près de 3 semaines de Pétersbourg doit venir tout. Je n’ai pas vu encore John Russell, il n’est revenu d' Osborne que cette nuit. Je le verrai aujourd’hui. Sa femme est venue chez-moi, très vive. Le Globe est d'une insolence sans égale. Il appelle l'Empereur insane. je ne me fais au fond pas une idée bien claire de toute cette affaire. On la fait bien grosse ici. L’est-elle vraiment autant ? Tout est énigme. D'un côté Sturnier et Titoff agissent comme un seul homme. D’un autre côté comment. admettre que l’Autriche s'associe à nous pour aboutir peut être à la destruction de l'Empire Ottoman ? A Vienne personne n’est inquiet, on ne parle pas même de l'incident. Les l’étourderie ave laquelle on a engagé l’affaire de Rome c’est Toqueville qui rit. Les Palmerston restent à [?] chez L. Baauvale. On m'écit en confidence qu’ils ne peuvent pas rentrer chez eux. Ils seraient pour suivis, saisis pour dettes. Quelle situation ! Le 8 Longue conversation avec Lord John. Toute l’histoire telle que vous la connaissez. La porte ne refuse ni n'accorde. Elle attend les suites de l’envoi de Fuat Effendi. (mais lui permettra-t-on de passer la frontière ). Strattford Canning se vante de n’avoir pas voulu voir nos ministres, il regarde cela comme son devoir. Plaisant médiateur, et il appelle cela faire son devoir. Lord John est convenu que c’était singulier. Peut être ancienne rancune Et vous acceptez les conséquence de cette rancune ? Il a ri. La dépêche pour [Pétersbourg] n'est pas encore partie. Elle a été revue par tout le cabinet. Aucun ordre n’a encore été donné a L'amiral Parker. Mais à propos. On ordonne à Parker d’aller s’emparer de 2 petites îles voisines de 7 îles, en possession du Gouvernement grec. Mais on croit que le gouvernement n’a pas le droit de les posséder. On va donc les lui prendre. C’est impayable. fonds à Paris et à Londres ne se sont guère émus. Et cependant le langage ici dans tous les partis, dans tous les journaux est aussi menaçant que possible. Je suis curieuse de la conversation de Lord John. Voici un bout de lettre de Beauvale qui vous regarde. Il a bien de l’esprit. J'ai eu hier à dîner Lady Allice qui est venue passer quelques jours avec moi. Mad. de Caraman, lord Chelsea & Bulwer. Je n’avais pas vu celui-ci depuis 4 mois, il est près de son départ pour l'Amérique, pas très pressé pour son compte. Il revient de Paris, il a beaucoup causé avec M. de Toqueville. Il me le donne pour un homme de beaucoup d’esprit. Il rit de l’étourderie ave laquelle on a engagé l’affaire de Rome. C’est Toqueville qui rit. Les Palmerston restent à [?] chez L. Baauvale. On m'écit en confidence qu’ils ne peuvent pas rentrer chez eux. Ils seraient pour suivis, saisis pour dettes. Quelle situation ! Le 8 Longue conversation avec Lord John. Toute l’histoire telle que vous la connaissez. La porte ne refuse ni n'accorde. Elle attend les suites de l’envoi de Fuat Effendi. (mais lui pemettra-t-on de passer la frontière ). Strattford Canning se vante de n’avoir pas voulu voir nos ministres, il regarde cela comme son devoir. Plaisant médiateur, et il appelle cela faire son devoir. Lord John est convenu que c’était singulier. Peut être ancienne rancune Et vous acceptez les conséquence de cette rancune ? Il a ri. La dépêche pour [Pétersbourg] n'est pas encore partie. Elle a été revue par tout le cabinet. Aucun ordre n’a encore été donné à l'amiral Parker. Mais à propos. On ordonne à Parker d’aller s’emparer de 2 petites îles voisines de 7 îles, en possession du Gouvernement grec. Mais on croit que le gouvernement n’a pas le droit de les posséder. On va donc les lui prendre. C’est impayable. Mes pauvres yeux m'empêchent de vous donner le [?] de cette curieuse conversation. Au total j’ai trouvé l'humeur plus douce qu’elle n'était dans le billet, des plaisanteries sur Palmerston, mêlé de défiance. De l'espoir que l’affaire s'arrangera. Un peu de peur cependant. Enfin mélange. Pas le langage d'un premier ministre. Voici votre lettre de Vendredi. Celle de samedi viendra plus tard. Vous voyez que vous faites bien d'écrire tous les jours. Adieu. Adieu.
Nous n'avons par dit livrez-les ou la guerre. Au contraire les termes sont très convenables. [?]

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Vendredi 5 octobre 1849

Hier point de lettre. D’où vient ? cela m'inquiète. Le Cabinet de Mardi a décidé à l’unanimité de soutenir la Turquie. La France marche avec l'Angleterre. On dresse en ce moment une pièce, en forme de remontrance, peut être de menace, à la Russie et à l’Autriche. Tout le monde est d’accord. On nous exaltait il y a huit jours. Aujourd’hui nous sommes honnis. Lord John arrive ici ce soir. Voici ce qu'il m'écrit de Woburne. " Your emperor after having showing so much prudence, so much power & so much modération has mode an mormons fault in threatening the Turk if he did not violate the law of hospitality so sacred among Mahometans. The Turkish anger is [?] aud we can do no otherwise than support them in [?] a cause." J’ai diné hier avec Lord Carlisle chez Miss Berry. Il m’a raconté le conseil. De l’inquiétude de la façon dont Palmerston va mener cette affaire. Parlant mal de lui. Espérant cependant qui l’affaire s’arrangera. Brunnow a beaucoup demandé que la démarche auprès de nous ne soit pas collective, France & Angleterre probablement chacun écrira de son coté mais dans le même sens, si non le même ton. Je parie que le Français vaudra mieux. L'affaire en est donc là. Fuat Effendi parti pour Pétersbourg pour fléchir l’Empereur. L'Angleterre & la France écrivant, intervenant et décidée à soutenir la Turquie, ainsi la guerre générale si l’Empereur persiste. Dans 20 jours la décision. Brunnow est venu me voir hier. A wonder ! Essayant de traiter ni de bagatelle au fond inquiet, blâmant notre conduite à Constantinople. Plus en soupçons contre la France que contre l'Angleterre, persiflant cependant lord Palmerston, n’ayant pas. l'air de croire que l'Angleterre est décidé pour la Turquie. A propos de la France disant, elle a 30 m hommes en Italie, elle en a 60 m en Algérie elle peut les faire marcher contre nous. Quelle bêtise, peut-elle dégarnir l’Afrique ? Je vous redis tout. Vous voyez que je vis in hot water. Jamais il n'y eut un moment plus critique. Drôle de situation. Evidemment, il y a, il y aura plus de laisser-aller vis-à-vis de moi que de Brunnow. et mes relations avec lui ne sont pas telles que je puisse lui rendre des services. Aujourd’hui nouveau conseil de cabinet. Demain tout le Cabinet à Osborne chez la Reine, enfin c’est une grosse crise. Si vous étiez là que de choses à nous dire. Ecrivez je vous prie au Directeur de la douane pour qu'on me traite bien à Boulogne ou à Calais ; Je suis à la veille de me décider & ce n'est pas bien éloigné, ce pourrait être au milieu de la semaine prochaine. Le temps est mauvais, orageux, j’attends encore.

1 heure. Pas de lettres encore aujourd’hui il est vrai que les journaux aussi ne sont pas venus mais hier je les ai eus. Enfin Voilà deux jours, c’est affreux. Adieu, adieu. Je ne puis pas croire à la guerre. Ce serait trop épouvantable. Adieu

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond le 28 septembre 1849

Je croyais lord John parti hier matin, au lieu de cela je l’ai trouvé m'attentant chez moi à mon retour de ma première promenade. Il m’a dit qu'il avait des nouvelles des îles.
On a pendu pas mal de gens. On en pendra encore. La tranquillité est rétablie. Ce qui l’a surtout compromise est la presse, de détestables journaux prêchant le vol & l’assassinat. Et bien suspendez, ou abolissez. Quel grand & salutaire exemple vous donneriez là !
Sourire.

Le soir je suis allée chez eux. Et bien, j’ai relu tous les rapports, & j’ai eu une lettre de Lord Grey sur toute cette affaire. C’est des horreurs. On forçait les gens à souscrire pour ces journaux, sous peine d'assassinat. Nous allons suspendre toute publication de journaux dans les îles. (J'ai poussé un cri de joie.) Attendez, attendez, mais nous voulons le faire légalement et nous soumettons cette question aux gens de loi à Londres. Qu’est-ce que vous croyez qu'il diront ? Je crois qu'ils nous donneront raison. Que vous êtes de brave gens vous et lord Grey ; ayez soin surtout de ne pas consulter lord Palmerston. Toujours sourire.
Nous avons brodé & broché sur ce sujet longtemps, & je vous assure que je lui ai dit d'excellentes choses. I heure. Voici votre lettre. Je suis très frappée que la mienne de Lundi ne vous soit pas parvenue Mercredi comme elle devait. Je crois me souvenir qu’elle était curieuse et qu’elle renfermait une lettre de Beauvale curieuse aussi. Elle aura trouvé des curieux peut-être. Donnez moi des nouvelles de cette lettres je suis un peu accablée d’écritures. J’ai trop de correspondances. Est-ce que des lettres peuvent se perdre ? Ma lettre de Lundi m'inquiète. Celle de Mardi y faisait suite, le même sujet. Adieu. Adieu Je reçois une longue lettre de Lord Aberdeen, pas lue encore. Constantin de la Haye, très tendre, la Reine en pleurs. Sa Sœur de Weymar arrivait pour pleurer aussi. Un château dans une forêt qui a l'air d’un cercueil,, & Constantin retournant là pour pleurer avec les deux sœurs. Que de lettres pleureuses. J'ai été obligée d'écrire. Adieu. Adieu.

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Richmond le 25 septembre 1849

Lord John a été frappé de la lettre de l'Empereur au comte Nesselrode. C’est au Manifeste. Il y a de l’intention dans chaque ligne pas mal d'orgueil. L'avez-vous lu avec attention ? le 26. jeudi Le feuilleton des Débats de Samedi est très remarquable. Des choses très frappantes, seulement la dernière scène n’est pas exacte. Le roi ne gouvernait plus alors ; C'était la princesse de Montpensier Emile Girardin & &. Du reste vraiment c'est un article très curieux & très bien fait. Le roi & la Reine se promenaient hier à pied dans le parc ils viennent en [raiment], mais toujours à l’heure où je suis rentrée, de sorte que je ne les rencontre pas. J’ai vu hier matin Van de Weyer & Flahaut. Celui-ci arrive d'Ecosse. Il restera probablement une quinzaine de jours à Richmond. Sombre sur Paris, sur la France. Renvoyez-moi je vous prie la dernière lettre de Beauvale celle sur vos affaires. Elle m’a tant plus que je veux la garder, tant de good sens. Les Metternich sont décidés pour Bruxelles. Je ne sais si cela plait tout-à-fait au roi Léopold. Je suis bien contrarié de ne plus recevoir vos lettres que tard, je ne puis pas y répondre. J’appends que mon fidèle correspondant que lord Palmerston est bien aigre contre lord Grey & contre lord John à propos de l’affaire de Malte. J’apprends aussi que lord Palmerston est en grande espérance d'une révolution en Grèce, et qu'il s’en mêle. Voilà tous mes commérages pour aujourd’hui. Adieu. Adieu Pauvre lettre Adieu.

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Richmond Mardi le 25 septembre 1849

J’ai causé hier avec Lord John du même sujet que traite la lettre de Beauvale que je vous ai envoyée hier. Il s'est mis à rire. " Les Français sont si drôles. Ils raisonnent, ils raisonnent & n’arrivent jamais à du plain good sense. Of course leur assemblée comme notre parlement est bien maîtresse de faire ce qu'elle veut & sa dé[?] ne la gêne pas. What did we do in George 1st reign ? At that time te parliement sat for three years, that was the law. But as the country was agitated by the intrigues of the Jacobit party and as there might have been danger from it, parliament renewed sitting for 7 years. And this has been the rule ever since. So that we did not fear to do an unlawfull thing. When there was necessity for it. And certainly there is necessity in France to do away with their mons truous constitution. This assembly is just as powerfull as was the former. But they will go on talking and talking without doing anything that has common sense. Vous voyez que c’est bien là le même langage que Beauvale. Pas de nouvelles. Je crois que Flahaut & Morny arrivent d'Ecosse aujourd'hui. Lady Shelborne étant ici. Je pense qu’ils y viendront.
N’est-ce pas demain que je vous adresse pour la dernière fois ma lettre au château de Broglie. Je le regrette, J'aimais à vous savoir avec lui, & de la bonne conversation. De quoi êtes- vous convenu avec lui sur l’époque de votre retour à Paris, car enfin vous n'avez pas le projet de passer l'hiver au Val-Richer, & l'hiver commence en 9bre 1. Quel ennui ! Depuis deux jours on ne me donne les lettres & journaux de France qu'a 3 heures. A propos, écrivez-moi le vendredi une lettre séparée, Elle me sera remise le lundi, plusieurs heures avant celle de Samedi. Ainsi écrivez & envoyez tous les jours de la semaine. Achille Fould est à la campagne chez Lady Allice. Voilà qu’elle veut me l'envoyer quelle drôle de femme. Il repart Samedi pour Paris. Adieu.

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Richmond dimanche le 23 sept. 1849

Voici le résumé du langage tenu à Berlin par M. de Persigny et évidement celui qu'il est chargé de tenir partout. La monarchie est la seule forme de gouvernement qui convienne à la France. Il y a maintenant deux partis, républicain & monarchique. Le premier se compose des plus mauvais éléments de la société. Il est en minorité. L’autre est puissant et considérable, grande majorité. Ce parti : 3 sections. Légitimistes, Orléanistes & Napoléoniens Les légitimistes comptent un grand parti religieux qui est plus catholique que Henri quinquiste, et la portion rurale de la France, [?] dans la noblesse est plus napoléonienne que Bourbonne. grand abime sépare la branche ainée, de la nation. C'est la révolution de 89 et la restauration par les baïonnettes étrangères. La branche cadette compte très peu d'adhérents. On déteste Louis Philippe, il n’avait de force que dans la bourgeoisie & celle-ci a passé en grande partie dans le camp napoléonien grande magie dans ce nom, et le prince peut à l'ombre de ce nom faire plus que tout autre pour la restauration de lord & d'un bon gouvernement. Sa bonne conduite lui a déjà rallié la majorité de la nation. Si Henry V venait à manquer, les légitimistes se rallieraient certainement autour du Prince plutôt que du comte de Paris. L'armée lui est entièrement dévouée. La noblesse sait très bien qu’il n'y a que lui qui puisse rétablir l'hérédité de la pairie , en même temps que les classes inférieures ont confiance en lui pour conserver une forme libérale de gouvernement. Ce qui a rendu le grand Napoléon impopulaire c’était la conscription. M. de Persigny [?] expose the parallel between the Ceasar & the Napoléon. Louis Napoléon would receive his uncle line as Julien. Ceasar was ultimatly replaned by Augustus. Copié textuellement. Deux fois déjà le Prince pouvait être proclamé Empereur, il a trouvé qu’il ne perdait rien à attendre. L’état actuel ne peut cependant pas durer. Un appel au peuple. établissait l’Empire, cela se serait fait maintenant, sans la circulaire de M. Dufaure ! Il a tout gâté. M. de Persigny a vu le roi & le Ministre des Affaires étrangères. L’un et l’autre se sont bornés à faire l’éloge de la bonne conduite du Prince. La conduite de la Prusse vis-à-vis de la France se règlera sur celle des autres puissances. Le but de M. de Persigny était de s’assurer de la reconnaissance de l’Empire. Je vous ai redit bien exactement ce qui vient de source. Le roi de Hollande reprend son naturel, il est violent, absurde, une espèce d'enragé. Cela pourra finir mal. L’Empereur Nicolas ne veut pas entendre parler de rivalité entre ses généraux & les Autrichiens. Nous avons à nous plaindre, et quand on se plaint, l’Empereur fait taire. Le Maréchal lui a écrit, pas de réponse, & lorsque le Maréchal a voulu lui en parler à son arrivée à Varsovie, l’Empereur lui a fermé la bouche. C'est de la bien bonne conduite. L'Empereur d’Autriche a envoyé à Petersbourg l’archiduc Léopold son cousin, pour remercier solennelle ment de l’assistance. On ne dira pas ceci à Vienne. Ils sont là pro fondement humiliés de notre secours. Que c'est petit !
J'ai eu hier pendant deux heures M. Kondratsky secrétaire d’ambassade ici, arrivé en courrier de la veille. Ses récits sont très curieux sur l'empereur, sur l’excès de la joie, et puis l’excès de la douleur. Douleur énorme, qui inquiète. Le voyage l’aura réuni, mais je suis impatiente des premières lettres de Pétersbourg.

Lundi le 24 sept. Hier dimanche, petite pluie fine tout le jour j'ai été déjeuner chez La duchesse de Glocester, et puis rendre enfin visite à Mad. Van de Meyer. J’y trouve une petite personne bien tournée, comme dans les boutiques élégantes de Paris, visage tartare, large & rond, très Russe, jolie. On me l’a présentée, c'était Mad Drouyn de Lhuys. Son mari est à la chasse en province. Elle dit qu’on dit autour d’elle qu’il y aura du bruit à Paris. Vous ai-je dit que Mad. Lamoricière est retournée à Paris. Son mari est allé à Pétersbourg. Les voyageurs de Varsovie disent que sa tournure n’est pas grand chose. Un peu français à cheval, et pas distingué à pied. Mais on est content de lui chez nous. Kisselef sera nommé ministre très prochainement. Hier John Russell. Il y a toujours quelque petit cous pi quant et utile dans le dialogue. Hier, réflexions sur la facilité dans le travail. Très bon quand On a connu [?]Lord John l’esprit simple et droit ; dangereux quand on a trop de goût a faire des affaires. Lord Palmerston a beaucoup de facilité. Incontestablement c'est fâcheux entre un ministre qui ferait trop peu, & un qui ferait trop, le premier is the safest. - I think you are right. It reminds me of Lord Grey who always said. Let a thing alone ; in dropping it, it minds sooner by itself.- - Trés vrai, en travaillant toute chose on ne fait quelque chose, et quelques fois une très mauvaise affaire. Voilà notre train de conversation. avez-vous lu la lettre de l’Empereur au comte Nesselrode ? Et le passage où il parle du conquérant ambitieux d'il y a 36 ans ? Cela ne promet pas beaucoup de faveur pour la [?] Je vous ai dit je crois que l’Empereur a donné à la fois son portrait à Nesselrode & Orloff. Faveur très rare et l’altesse à (Sernicheff, très rare aussi. Avec lui en voilà 6 dans l'Empire. Que de choses diverses je vous écris, & que de choses encore j'aurais à vous dire. Lord Normanby a déjeuné l'autre jour avec le président qui lui a raconté M. de Falloux. Il con naissait la lettre mais on a commis la faute de ne point le prévenir de sa publication. On est curieux de voir comment se prononcera la majorité de l’Assemblée sur l’affaire de Rome. Si elle reste unie pour soutenir le gouvernement. It is all safe, & je puis retourner à Paris, si elle se fractionne, il y aura du bruit et il vaudra mieux attendre qu’il soit passé. Je vous envoie une toute fraîche lettre de Lord Melbourne, si sensible (anglais) que je crois vraiment qu'elle vous frappera vous et le duc de Broglie. Lisez-la avec attention. Moi elle me paraît concluante. Lisez bien.

Midi. La poste de France n'arrivera que plus tard pas de lettres. Adieu. Adieu. Adieu

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond vendredi soir 24 août 7 heures

J’ai été à la poste moi-même et j'ai eu l'air si misérable qu'il m’a semblé que les gens là ne pouvaient pas se dispenser de me fabriquer une lettre du Val Richer. J'ai eu raison, j’ai eu ma lettre. Pourquoi pas plutôt c’est ce que je ne conçois pas. Mais la voilà et me voilà contente. Mais quelle drôle de chose que dans cette lettre vous vous plaignez du même accident pas de lettre de moi ! Faites comme moi, allez mendier, et on vous donnera bien longue visite de Milnes, impayable, amusant, enragé hongrois. Proclamant à son de trompe l'humiliation de l'Autriche, le triomphe de la Russie, des barbares, disant mille absurdités. Au bout de tout cela, il me plait assez, bon enfant écoutant tout sans se fâcher, & je lui en ai dit dans ma couleur sans en gêner le moins du monde. Il a souvent des lettres de M. de Tocqueville. Les dernières étaient pleines de soucis. A propos des affaires de Rome. Il est resté chez moi deux heures ; je m'imagine que je l’ai diverti à mon tour Je l’ai mené chez Lady John Russell. Nous avons rencontré chemin faisant Madame de Metternich, elle a traité Milnes très mal, moi pas très bien, vu que j'étais une mauvaise compagnie.

Samedi 25 août
Lady Palmerston écrit à son frère des lettres fort aigres. Elle s'amuse de se laisser mener par moi comme un petit garçon, de n'être plus un Anglais, d’être devenu Russe. Enfin elle est bien contrariée de l'affaire de la Hongrie. Plus j'y pense moi, plus j'en suis contente. L'effet est immense. Je remarque que les rapports autrichiens éludent, quand il s'agit de dire à qui Georgy et son armée se sont rendus. C’est petit il faut dire la vérité. Il est bien naturel que les Hongrois préfèrent se rendre aux Russes. Les Russes rendent ensuite à l’Empereur d’Autriche, il fera comme il voudra. Nous ne lui passerons rien. Milnes veut qu’on ne condamne personne. Je lui demande pourquoi O'Brien avait dû être pendu. Il répond que quand les insurrections sont sur une grande échelle comme en Hongrie, ce n’est pas comme en Irlande. c-à-d. Que parce que le mouvement d'O'Brien na pas fait tuer des milliers d’hommes, il faut le pendre et attendre que Kossuth en a sacrifié 100 mille peut- être et ruiné son pays. Il faut [...]

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond vendredi 24 août 1849

Une longue lettre de Constantin du 20 de Berlin. Intéressante racontant Varsovie au moment où les bonnes nouvelles y sont arrivées. D’abord, rapport de Leeds, destruction & dispersion, du corps de Bem le 10. Une heure après courrier de Paskevitch annonçant la soumission de Georgy et la fin de la lutte L'Empereur était dans son cabinet avec quelques intimes il s’est jeté à genoux remerciant Dieu de sis faveurs. Et puis il envoie son fils aîné à l’Empereur d’Autriche pour le féliciter de la soumission de la Hongrie ne voulant confier cette mission délicate qu'à ce jeune prince qui certainement la remplira avec toute convenance ! Un autre Russe aurait laissé percer de la hauteur. Et puis courrier à Pétersbourg, à Moscou, annonçant la fin de la guerre. Constantin à Berlin mission de Convenance. Très bien reçu par le roi, grand dîner à la cour. Le roi portant au bruit des fanfares la santé des braves soldats russes leur souhaitant victoire toujours. Constantin ajoute mais modestement que le roi a porté sa santé à lui aussi. Il repartait le 22 pour Varsovie. Il restera auprès de l'Empereur jusqu’au départ de celui ci pour Pétersbourg. Dans 4 semaines toutes nos troupes seront sorties de Hongrie. J’espère que tout cela a bonne mine ! Les Hongrois se sont souciés absolument uniquement à mon Empereur. La nouvelle de ces grands événements est arrivée à Vienne le 18 anniversaire de la naissance du jeune Empereur et au moment du Te Deum à St Etienne pour cette solennité. Cela a fait une sensation immense. On y a vu un heureux augure pour son règne. Lui-même était allé à Ishel passer 8 jours auprès de sa mère. C'est là que mon grand duc sera allé le chercher. Van de Weyer est venu me voir hier. Tout-à-fait convaincu de l’Empire, ou du moins persuadé que le Président en est convaincu en grande gloire de son propre roi. Lady Palmerston a annoncé il y a quinze jours que tant qu’elle restera à Londres, elle recevra le corps diplomatique tous les Mercredi avant hier jour de l’arrivée de la grande nouvelle elle écrit à Koller pour le prier de prévenir l’ambassade d'Autriche que ce jour-là elle ne peut pas recevoir concevez-vous quelque chose de plus bête. Melbourne enrage Lord Westmorland est arrivé hier. Je le verrai. Ils viennent demain pour quelques jours au Star & Garter.

1 heure.
Pas de lettre ! Voici la première fois que cela m’arrive. J’en suis pétrifiée. Qu’est-ce que cela veut dire ? Je vous en prie, donnez-moi ma lettre aujourd'hui car je ne pourrai pas achever ma journée, si je ne l’ai pas reçue. Je ne puis rien vous dire de plus, car je ne pense qu’à votre lettre. Adieu. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Jeudi 9 août 1849 Midi

Ce que vous mande Piscatory est triste. Comme tout le monde dit de même, ce doit être la vérité attendue. J’ai eu hier quelques visites du voisinage. (à propos la vieille princesse si touchée de ce que vous lui adressez, que vite elle a envoyé chercher des fleurs, bouquets, plantes & & pour orner mon salon) le duc de Cambridge qui part aujourd’hui pour faire visite à son frère à Hanovre. Plus tard j’ai été dîner chez la duchesse de Glocester, rien que la famille royale et moi. J’ai regretté d’avoir accepté, car malgré mes barricades, mes yeux ont souffert de la lumière rien d’intéressant naturellement. A onze heures j'ai été dans mon lit. La duchesse de Cambridge se plaint et avec raison, de la duchesse d’Orléans qui ne lui a pas fait visite quoiqu’elle en ait fait aux autres membres de la famille. Cela fait un petit commérage qui les occupe. Sa fille de Meklembourg me plait chaque fois que je la rencontre. Le vieux Dennison M.P. frère de la. Marquise de Conyngham vient de mourir. Il laisse à lord Albert Conyngham, second fils de sa sœur toute sa fortune en terre et de plus deux millions de Livres, ce qui veut dire deux millions de Francs de rente. Vous avez vu lord Albert chez moi à Paris, pas grand-chose.
Voici votre lettre de Mardi. Toujours un nouveau bonheur quand j'aperçois votre petite lettre dans la grosse main de Jean. Quand aurai-je un autre bonheur que celui-là ? Adieu. Adieu. Je ménage mes yeux aujourd’hui, et je n’ai pas une nouvelle à vous donner ici on ne parle que de la reine et de l'Irlande. Il me semble que nos affaires vont cependant bien en Hongrie, Dieu merci. Adieu dearest Adieu. Comme vous êtes loin ! Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mardi le 7 août 1849

Vos lettres sont des fêtes pour moi. Je lis & relis. Point de nouvelles. On va patienter chez vous et vivre pauvrement toujours avec la perspective d’un événement. Quel état ! Ici l’on ne parle que du voyage de La Reine en Irlande. L’enthousiasme le plus énorme. Heureux pays où ce sentiment se conserve ! Outre la Reine, les Irlandais auront cette année de bonnes pommes de terre. Ils sont donc enchantés.
Je n’ai vu hier que les habitants de Richmond. Lord Chelsea & les Delmas chez moi. Lord Beauvale chez lui. Il était fort amusé d’une petite [?]. Duchâtel a enlevé à Lord Faukerville une belle dame, demoiselle je crois, Miss Mayo nièce d'une Lady Guewood. Fort jolie et fort leste. Elle venait chez les Duchâtel souvent, elle vient de partir avec eux pour Spa et Paris, & peut être Bordeaux. Quelle bonne femme que Mad. Duchâtel.
J'ai eu une longue lettre de Lord Aberdeen. Il s’ennuie à périr en Ecosse, il me le dit. Je crois que nous lui manquons. Je lui avais raconté mon dialogue avec John Russel au sujet du discours de Palmerston. Cela lui a fait plaisir. Beauvale ne croit pas à nos revers en Hongrie. Moi je ne sais [?] que croire. Pourquoi n’y a-t-il pas de bulletin officiel ? Dans tous les cas l’affaire traine beaucoup.
M. de Mussy m’a interrompue. Il m’a dit qu'il avait une lettre de vous. Je ne lui ai pas dit que je le savais. Il est en redoublement de soucis ; je crois bien que c’est lui qui m'accompagnera à Paris ce serait excellent. Le duc de Lenchtenberg est attendu à Londres cette semaine. Les ministres ici s’étonnent beaucoup qu’au milieu des immenses difficultés de vos finances, on ne songe pas à une réduction de l’armée & de la Marine. John Russell & lord Palmerston m'en ont parlé tous deux. Ils disent que très certainement ils vous imiteraient tout de suite pour leur marine, & que vous leur ferez un grand plaisir. L’épouvantail de l'armée russe n’a pas le sens commun. Elle ne veut pas, elle ne peut pas, & personne ne permettrait qu'elle vous attaque. C’est des bêtises. Gardez amplement ce qu'il vous faut pour chez vous & [?] le reste. Adieu, Adieu, que je voudrais jaser, comme nous jaserions. Comme ce serait charmant. Adieu. Adieu dearest. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Dimanche 5 août 1849

Mauvais dimanche, qui ne m’apporte rien, c’est si triste. Les Duchâtel sont encore venus me dire Adieu hier. Je me suis presque attendrie en leur disant Adieu. C'est mon dernier lien avec la France dans ce pays-ci et c'est de vos amis. Si nous nous retrouvons à Paris, je me propose bien de continuer cette connaissance. Ils partent ce soir. Samedi 11 ils seront à Paris. Les Paul de Ségur étaient encore venues les voir de Dieppe. Duchâtel avait été à Claremont avant hier. Grande préoccupation là du séjour de la duchesse de Bordeaux à Ems. Evidemment préparatifs de lignée. Cela les trouble beaucoup. La Duchesse d'Orléans veut toujours partir le 15. M. Fould est revenu me voir aussi et m’a gâté ma dernière demi-heure avec Duchâtel. Je ne le trouve pas plus beau à la seconde visite qu'à la première, mais dans ces temps de révolution j'essaie d’être polie. Le soir Beauvale & les Delmas, habitude qui durera tout le mois d'août encore. Après quoi tout le monde part. Je dîne aujourd’hui chez Beauvale avec les Palmerston.

4 heures
J'ai été faire mon luncheon chez La Duchese de Glocester. Bonne. vieille princesse, bien contente de me voir. De là j’ai été faire visite à lady John Russell. Je les trouve toujours seuls, et ayant l’air content de me voir. Nous n’avons guère parlé que de la France. Il désire l’Empire. Il désire quelque chose qui ait l’air de durer. Il dit que Changarmier n’attend qu'un signe & l’armée proclame l’Empereur. Mais ce signe, on ne le donne pas. Il me dit aussi que Molé rêve à la présidence pour lui-même. Cela, je ne l’avais pas encore entendu dire ! Lundi 6 août, onze heures Le dîner chez Beauvale était fort agréable. Lord Palmerston très naturel & amical. Sa femme ni l’un ni l’autre tout-à-fait, quoique elle est l'intention de le paraitre. J’ai fait quelques questions. La paix avec le Piémont n’est pas douteuse quoique pas faite encore. En Hongrie Paskévith a essuyé quelques revers. Georges est meilleur tacticien que lui. En le nommant L. Palmerston disait Gorgy au lieu de Georgy, ce qui m'a fait lui demander qui lui avait enseigné cette prononciation, il m’a répondu. Les Hongrois qui sont ici. Sur la France vif désir d'y voir une forme de gouvernement plus solide. " La constitution est tout ce qu'il y a de plus absurde, c’est comme fait exprès pour rendre tout impossible. On ne peut pas aller comme cela. Il ne dépend que de la volonté de Louis Bonaparte de changer cette situation. Qu'il dise un mot, Changarnier se charge de reste. Cela pouvait se faire le lendemain de la visite à Amiens. Cela peut se faire tous les jours. Une fois fait, la France sera trop contente. "
Enfin, cela est fort désiré ici et moi j'en suis. Avant de venir chez Beauvale les Palmerston avaient passé à Richmond Green. Ils se sont montrés chez Metternich avec Disraeli. Sans doute mutuelle surprise. A propos, Lord Palmerston m’a dit que Disraeli s’est vanté à elle d’avoir été très heureux & glorieux du succès de son mari, parce qu'il avait prédit à ses amis que des attaques sur lui ne pouvaient aboutir qu'à un triomphe. 100 membres de la Chambre des communes ont souscrit pour un portrait de Lord Palmerston qui sera offert à sa femme ! Et voilà ! J'attends la poste avec impatience. A propos serait-il question de vous nommer pour le Conseil général ? Qu'est-ce que cela voudrait dire ? J’ai bien envie que vous n'en soyez pas. Je n’aime pas vous savoir au milieu de ces mauvaises populations. Adieu. Adieu. Dearest Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond vendredi 5 heures 3 août 1849

J'ai sur le cœur d’avoir coupé si court à ma lettre tantôt. M. de Mussy n’avait que 10 minutes à me donner. Jean me pressait pour porter la lettre à la poste. Vous voulez bien que je parlasse à votre médecin. Il me plait beaucoup. Je voudrais l’enrôler pour ma [?] à Paris. Il me dit que je me porte bien. Je le prie de ne pas me tenir ces mauvais propos. Lord John sort d'ici. Si bon, si facile à vivre, bon enfant. On peut tout lui dire. Rien de nouveau cependant. Il espère la paix avec la Sardaigne, il convient avec moi qu’elle n’a pas le droit d'exiger que l'armistice pour les Lombards fasse partie du traité ! Et il m’assure que lord Palmerston a émis cette opinion aussi. Fâché que la guerre de la Hongrie traîne. S'avouant incapable de comprendre la question Hongroise tout entière. Il part le 20 pour rejoindre la reine en Ecosse. Il a trouvé chez moi lady Jersey qui est venue me dire adieu avant son départ pour Vienne, Elle est sortie lorsqu'il est entré. Ils ne se parlent pas. J’ai vu Metternich ce matin, il est mieux et presque remis. Hier il a eu une lettre de son Empereur. Lettre charmante à ce qu'il dit : évidemment cela lui a causé une grande joie. Mais voyez le menteur. Vous vous souvenez que c’est sa fille qui m’a dit combien le silence absolu de l'Empereur le navrait. Je me souviens d’avoir écrit cela à l'Impératrice, il y a quelque 6 semaines (entre nous soit dit je ne serais pas étonnée si cela avait contribué à la lettre actuelle) je dis à Metternich : " Ah, je suis bien aise que votre empereur ait enfin rempli ce devoir. - Comment mais je suis en relation constante avec lui ; et ce n’est pas la relation du souverain avec son ministre. " celle de l'élève avec son maître. Orgueil et mensonge.

Samedi 4 août. Onze heures
Je passe dans une demi-heure dans mon nouvel appartement. Mad. [Steiley] vient de le quitter. Je regrette celui-ci, il était confortable mais on l’avait promis. Le Roi Charles Albert est mort. Samedi dernier à Porto. Je vois que le voyage du Président n’a pas été aussi brillant qu'on l’avait espéré. c. a. d. quant aux conséquences. Je le regrette. Je désire ces conséquences et qu'il y eut quelque chose de fait avant mon retour. Je ne suis pas du tout curieuse d'événements, je veux de la tranquillité une fois que je serai à Paris. Vous, et du repos voilà ce que je demande. Les Metternich iront dans un mois à Brighton. Les Beauvale retourneront à cette époque aussi chez eux, ils voudraient m'y entrainer, mais je n’aime pas faire des visites. Je verrai ce que j'aurai à faire dans un mois. S’il n’y a plus de ressources ici, il faudra bien aller quelque part. Adieu Dearest adieu. Je vous quitte pour déménager. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond vendredi le 3 août 1849

Votre lettre me fait rétrograder dans mes espérances. On restera donc comme on est. Si cela pouvait rester ainsi toujours, je n'ai rien à dire mais cela ne se peut pas. Hier un temps charmant aujourd’hui de la pluie. Une longue lettre de Constantin de Berlin. Sa femme n'accouche pas il s’impatiente. Il voudrait aller retrouver ses cosaques. Je crois qu’au fond il les aime mieux que son ménage. Les élections bonnes, pas assez pour défaire tout le mauvais ouvrage, surtout pas assez pour se rapatrier avec l’Autriche. En Autriche on s'en moque de la constitution promulguée à [?], personne n'y pense plus. On est tout militaire. On veut ressaisir tout le pouvoir que donne la force des baïonnettes. Cependant la guerre traine, mais nous écraserons. C’est toujours le langage. On ne sait que faire de Bade. Pays pourri. La famille régnante très déconsidérée. En Bavière l’opposition unitaire gagne. Constantin furieux du discours de Lord Palmerston. Voilà sa lettre. Le duc de Cambridge m’a fait une longue visite. Cela ne m’a pas extraordinairement divertie. Beauvale valait mieux. J’y ai rencontré le L. Holland qui m'a demandé de vos nouvelles avec bien de la tendresse. Le choléra toujours gros à Londres, sans changement. J'ai diné chez Delmars avec Mad. de Caraman. Voici M. Genaud de Mussy. Pardon & Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Jeudi le 2 août 1849

Votre lettre de Lundi me prouve que ma frayeur vous a bien effrayé aussi. Je me reproche de vous avoir tant dit sur cela. Aujourd’hui je suis très calme sans avoir de bonnes raisons de l’être. J’attends ce matin M. Guenaud de Mussy. Hier j’ai été faire mon luncheon à Ken. Les dames Cambridge toujours fort en train et aimables. Rien de nouveau à apprendre là. Dans le courant de la journée mes visiteurs ordinaires ; Crasalcovy, Delmas, & le soir chez Beauvale. Les Delmas vont s’établir dans 15 jours à Brighton, j'en suis très fâchée. Je crois que Les Metternich finiront par là aussi. & je crains que les Ellice n'imitent tout ce mauvais exemple. On a peur de Paris, d'une nouvelle alerte. On s’ennuie en Angleterre mais on y dort en sécurité. Tout cela est bien vrai & bien raisonable, et je sens que mon inquiétude sera grande à Paris. Cependant vous êtes en France. Je ne veux pas rester en Angleterre.
Il n'y a plus de quoi bavarder ici, calme plat. Plus de Parlement, la Reine en Irlande, la société débordée. Les journaux sont fort insipides. On devient marmotte. Si je ne causais un peu tous les jours avec Lord Beauvale je deviendrais parfaitement bête. Je n’étonne qu'il aie tant d'esprit, car il vit bien seul, et sa femme n'en a pas du tout. Je vous envoie toujours ma lettre avant d’avoir reçu la vôtre, c'est ennuyeux mais c’est plus sûr pour le sort de ma lettre. Ce changement provient du changement de domicile, il y a une grande demi-heure de perdue par la distance. Adieu. Adieu. Je ne vous ai rien dit, je n'ai rien à redire je n’aurais qu’à répéter ce que nous savons si bien par cœur dans le cœur. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond dimanche le 29 Juillet 1849

Ma journée a été plus calme hier. Si elle avait continué sur le ton de la veille, je ne crois pas que j'eusse été en état de vous en rendre compte aujourd’hui. Mad. Delmas, [Crasalcowy], les Beauvale, Brougham. Les Collaredo, tout cela m’a aidé à me calmer. Aujourd’hui j’attends M. Guenaud de Mussy. Je ferai ce qu’il me dira. Le choléra avait un peu diminué à Londres avant hier pour ici je n’en sais rien. Personne ne me dira plus la vérité, & je ne croirais pas aux bonnes nouvelles s’il y en avait. J’ai dîné chez Beauvale avec Brougham pas déconcerté du tout. Il m’a donné copie d’une lettre qu'il adresse à la reine. Lettre de remontrance & d'avertissements " Votre ministre tout en protestant qu'il veut l’existence de l'Autriche, prononce des paroles. sympathiques pour les Hongrois. Le lendemain la cité retentit de discours et de vœux pour les rebelles, encouragés par ce qui s’est dit à la chambre des Communes. Rappelez-vous que votre Empire se compose aussi de nationalités diverses que c'est s’attaquer à votre couronne que se liguer avec les Révolutions au dehors. " & & & Tout cela fort bien développé. Extraordinaire créature. & il commence sa lettre en s’appuyant sur son droit de conseiller de la Couronne & son droit d’une audience de la Reine, il préfère lui écrire plutôt que l’incommoder. Tout cela est en règle. J'ai une lettre d’Hélène. La grande Duchesse était retournée à Pétersbourg. Le duc de [Lench] devait la suivre par mer & puis s'embarquer de Peterhoff pour son grand voyage, qui pourrait bien cependant se borner au midi de l'Angleterre. Beaucoup de tendresses impériales pour moi. Votre lettre de jeudi est charmante. Hélas aujourd’hui, rien du tout. Je crois l'air sur la montagne meilleur, & si je reste ici j’ai l’assurance d’un appartement [?] que celui où je suis nichée maintenant. Ellice est parti pour l’Ecosse. Tout le monde quitte Londres. Lady Palmerston a eu hier une dernière soirée. On était curieux de savoir si on y rencontrerait le Prince de Canino. Je ne crois pas, mais Pulsky, bien sûr.

Lundi le 30 juillet
Guenaud de Mussy est venu. Il me plait beaucoup et d’abord il m’a fort rassuré, comme la famille royale arrive demain à Claremont, il a exploré tous les environs pour s'assurer de l’état sanitaire. A Richmond 2 cas. Au surplus toutes les raisons contre la maladie m'ont paru excellentes. Il reviendra me voir jeudi. Enfin! Il m’a calmée. Je me suis prévalue de votre nom. Il me parait qu'il vous est dévoué avec enthousiasme. Kielmansegge est venu hier. Il part pour le Hanovre. Il ne m'a rien dit de nouveau. J’ai vu lord John aussi. Il espérait que la paix allait se conclure avec le Piémont. Il m’a beaucoup parlé de Paris. Il a fort critiqué le discours du président à [?] et s'en est moqué. Moi je l'ai défendu, nous avons eu une petite discussion la dessus. Il est convenu cependant que le discours avait fait un bon effet à Paris. Et bien, c'est tout ce qu'il faut. Lord John est ravi de la fin de Palmerston. A propos, autre discussion sur Palmerston. A mon tour je me suis permis de critiquer et très fort les paroles grossières qu'il a adressées à Lord Aberdeen, et j’ai dit qu’un homme de bonne éducation ne se permettrait pas cela, et que lui Lord John depuis 35 ans qu’il est à la chambre n'a jamais adressé de semblables paroles à ses adversaires. En résumé que cette grossière épithète avait gâté son discours du reste habile. Il m’a donné raison, & sa femme aussi. C'était très drôle cette conversation. Elle vous aurait amusé. J’ai dîné chez Delmas. C'est de la distraction. J'en cherche, j'en ai besoin. Duchâtel vient me voir ce matin. Je crois qu'il part après-demain. Cela me fait de la peine ; mon seul lien avec la France. Je n’en causerai plus avec personne de compétent. Adieu. Adieu. J’essayerai de vous écrire par la poste de 4 heures. Vous me direz si la lettre vous arrive en même temps que celle-ci de 1 heure. Adieu. Adieu.

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Richmond le 25 Juillet 1849
5 heures

Je vous écris au milieu d'un violent orage. J’ai peur. Je me réfugie auprès de vous. J’ai là la visite du Président à Ham. Je demeure très frappée & charmée de son discours au dîner. Ce que vous m’avez rapporté de l’opinion de vos amis sur son compte est excellent aussi. Curieuse apparition que cet homme. Juste ce qu'il faut pour la situation. Je suis d’avis qu'il faut la rendre meilleure encore, et que personne n'y convient mieux que lui.
J’ai lu à Lord Aberdeen ce que vous m'en dites. Cela l'a beaucoup intéressé. Ces visites dans les provinces sont bonnes, utiles, je suis pressée du dénouement. Je ne vous ai pas parlé du discours de M. de Montalembert. Décidément je rechercherai sa connaissance. Beau talent, nature honnête, sincère. C’est très frappant l’un après l'autre on vient se confesser. Tout le monde a eu tort. Je me propose ce texte pour ma première conversation avec le prince Metternich, je suis sûre qu'il me dira : " Oui tout le monde, hors moi. " Je n'ai encore vu personne aujourd’hui, et je ne me suis pas trop ennuyée. Cela m’étonne. Je ne serais pas fâchée que la prorogation de l’Assemblée ne fut pas longue, car Paris vide ne me conviendrait pas du tout.

Jeudi le 26. Onze heures
L'orage a continué presque tout le jour hier, j’ai cependant trouvé moyen de me promener dans les intervalles de pluie mais personne n'est venu de Londres. Lord Beauvale est décidément un grande ressource. J’y vais le soir, et puis les Delmare, gens très faciles à vivre et en grande passion pour moi. On écrit de Paris à Lord Palmerston que tout le monde s’attend à un événement c. a. d. un avènement. Dans les derniers jours le nom de duc d'Aumale est devenu très populaire par suite de ce qu’a dit M. Charras à l'Assemblée. Mais cela n’a pas le sens commun. S’il y a un changement, ce ne peut être que l’Empire. Comment finira l’affaire entre l'Autriche & le Piémont. Cela devient vif. Le choléra a beaucoup augmenté à Londres. 732 morts dans la dernière semaine. C’est beaucoup.
Vous ne sauriez croire tout ce que j’ai d’invention pour me faire passer le temps plus vite. Comme je suis polie pour les ennuyeux, comme Ils m'ennuient moins, depuis que je n’ai plus qu’eux. La veille duchesse me parait avoir un peu d'esprit. Je lui laisse son dire sur les Hongrois en toute liberté, cela l'enchante. A propos, Palkevitch a commencé par un petit échec. Il parait que les Hongrois sont parvenus à couper la ligue. Cependant les récits sont bien confus & contradictoires. Mais tout cela est long, beaucoup plus long que nous ne comptions.

Midi.
Certainement c’est le Dimanche qui a fait votre désappointement. Mardi. Accoutumez-vous à la tristesse du Mardi comme moi à celle du Dimanche. C'est à dire résignez vous. C'est bien triste un jour sur 7. Mauvaise législation Anglaise. Vous voyez que je viens de recevoir votre lettre. Elle me parle de M. de Montalembert. Je vous en ai parlé. J’étais sûr que nous serions d’accord. Je m'en vais lire le discours de Thiers. Adieu. Adieu. Vos lettres font toute ma joie. Adieu mille fois.

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Richmond mardi le 24 juillet 1849

Je découpe du Morning Chronicle le passage (très abrégé à ce qu'on m'a dit) du discours de Lord Aberdeen qui s’adresse au roi et à vous. C'est pour le cas où le Galignani ou les journaux français l’auraient ouïe. Voici donc ce mardi dernier jour où nous nous sommes vus. Comme chaque minute de cette journée reste & reste vive dans mon souvenir jusqu’à ce que votre présence l'efface ou l’adoucisse. Votre présence, quand est ce que le ciel me l’accordera !
J’ai été voir hier Mad. de Metternich enragée plus enragée que jamais contre Lord Palmerston ces deux séances de vendredi et Samedi ont produit un grand effet, mauvais, cela a fait éclater la sympathie de la chambre basse pour les Hongrois, et assuré un grand triomphe à lord Palmerston. Une longue approbation de sa politique ; il fera plus que jamais rien que sa volonté. Il n'a jamais été aussi glorifié et ainsi glorieux, à la suite de cette séance il y a des public meetings pour demander au Gouvernement la reconnaissance de la république de Hongrie. Votre ami Milner s'y distingue. J'ai dîné hier chez Beauvale avec Ellice, il affirme que tout le monde est Hongrois au jourd’hui. Le prince de Canino est arrivé. Lord Palmerston l'a reçu. Il recevra certainement Marrini aussi. Demain & Samedi, lord Palmerston a de grandes soirées. On me dit cependant que Londres est à peu près vide. La peur [des] minorités vendredi à la chambre haute était si grande parmi les Ministres que Lord John lui-même a écrit des lettres de menaces à de vieux Pairs Tories pour les engager à retirer leurs proxies. Il annonce sa démission, une révolution, une république. C’est littéralement vrai ce que je vous dis. Lord Buxley, jadis Vansitart, a reçu une lettre de cette nature qui l'a tant épouvanté qu'il a de suite redemandé à Lord Wynfort le proxy qu'il lui avait confié. Je vous entretiens des petits événements anglais, biens petits en comparaison de tout ce qui se passe hors d'Angleterre.
Dieu veuille qu’il ne se passe rien en France. Il me faut la France tranquille, vous tranquille. Lord Normanby écrit qu'à [?] lorsque le Président y est venu on a crié à bas la république, vive l’Empereur et pas de bêtises. " Je trouve cela charmant, je ne demande pas mieux.

Midi. Voici votre lettre de Dimanche. La correspondance va bien. Gardons ce bien précieux le seul qui nous reste. J'envoie ma lettre à la poste de bonne heure, c'est plus sûr. J’aime ce qui est sûr. Adieu. Adieu. Je suis bien aise que vos amis viennent vous voir n'importe d'où. Je voudrais vous savoir entouré. Je ne veux pas que vous vous promeniez seul. J'ai si peur. Adieu. Adieu dearest. Adieu.

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Richmond Lundi le 23 Juillet 1849 onze heures

J'attends l'heure de la poste avec une vive impatience. Je commence en attendant ma relation d’hier. J’ai vu Flahaut, Cetto, Kielmansegge. Tous les trois fort occupés et révoltés de la séance de Samedi à la Chambre basse. Lord John Russell faisant amende honorable à la Chambre pour avoir osé qualifier (dans une précédente séance) la révolution de Hongrie, d’insurrection. Palmerston appelant Lord Aberdeen an antiquated imbecility. Voilà les aménités qui se sont dites. Lord Palmerston a eu un complet triomphe comme de coutume, & il lui sera loisible de faire jusqu’au mois de février comme il l’entendra : il était en pleine gloire à son Dieu.
Le soir quelques personnes seulement car Lady Palmerston ne sachant pas si son mari serait encore ministre ce jour- là n’avait prié que quelques intimes. C’est ce qu’elle a dit elle-même à Cetto. Votre ambassadeur a fait la connaissance avec quelques diplomates. On ne trouve pas sa femme jolie. De lui, on dit qu'il est assez bien rappelant un peu M. G. de Beaumont. La princesse Metternich et Mad. de Flahaut ont eu hier une vive dispute à propos de la Hongrie. Mad. de Metternich est sortie de son salon et à dit à Flahaut qu’elle n’y rentrerait pas tant que Mad de [?]. y serait. Des témoins de cela ont été fort amusés & sont venus me raconter la scène. Cela a dû être drôle.
J’ai fait ma promenade en calèche avec Kielmansegge. J’ai été dîner chez Mad. Delmas. Madame de Caraman, Richard Metternich & & de la musique après le dîner. Mad. de Caraman joue du piano avec goût. Richard avec force. Le vieux aveugle grogne et voudrait renverser toute les constitutions du monde. Mad. Delmas occupée de mes yeux, de mon poulet. Enfin pleine de bonne grâce. Bonne femme. Voilà hier, et un ciel couvert l’air doux.

4 heures Lady Alice m’a interrompue et voici votre lettre de Lisieux. Vendredi & Samedi. Merci merci de tous les détails. Je n'ai fait encore que parcourir, je vais lire & relire. Paul Tolstoy m'écrit aussi deux mots pour me parler de vous. Comme il vous aime ! Excellent homme, je vais bien le remercier. Votre lettre, vos lettres vont faire mon seul, mon unique plaisir. Je vous en conjure point d’accidents dans notre correspondance. Dieu sait ce que je ne croirais pas si j’en manquais un seul jour. Adieu. Adieu dearest. Adieu. Il pleut, il fait laid mais j’ai votre lettre. Adieu encore, encore.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Dimanche 22 Juillet 1849
Midi

J'ai vu hier Ellice. Il avait assisté à la séance vendredi. Brougham a été long, diffus, ennuyeux, sans effet. Le parti très mécontent de lui & disent qu’il les avait rendus à la Mallet, Aberdeen excellent, et Stanley encore plus, mais celui ci n’a commencé son discours qu’à 3 h. du matin ; les amis avaient sommeil, quelques uns sont partis, c'est ainsi que la minorité a été diminuée. En attendant le chiffre 12 a comblé de joie le ministère. Aberdeen a dit des vérités très dures. En parlant de Palmerston il a dit insanity, de Minto playing antics with [?] & & Je cherche en vain dans le Times ce qu'il a dit de vous. Je l'ai là dans le Chronicle. Ellice m’a dit qu'il a entendu ce passage, grand éloge. Il faut que je le trouve et vous l’envoie. On dit que Minto a été misérable, si misérable qu'on en était honteux pour lui.
Voilà donc le Pape proclamé. Et bien cette expédition tant critiquée et avec quelque raison, a un très beau dénouement. Et Oudinot doit être content. Tous les orateurs à la Chambre haute l'ont comblé de courage. Ce qui viendra après ? Dieu sait.
De Londres je n’ai vu qu’Ellice. Hier Madame Delmas est venue. J’ai été voir Mad. de Metternich. Elle est changée, ses cheveux sont même fort gris, elle est triste, quoique le mari soit très bien ; mais ils ne savent où aller. Ils finissent l’Angleterre, elle est trop chère. Bruxelles, mais c’est bien ennuyeux Je crois presque qu'ils se décident pour Paris au mois d'octobre. Ils essaieront au moins pendant quelques mois. J'ai été le soir chez Beauvale, avec mon Ellice. J’ai joué un peu de piano, et puis un peu Whist. A 10 heures dans mon lit. Voilà ce triste dimanche, sorte d’anticipation du tombeau. Dieu que cela est triste aujourd’hui. Il y a huit jours je vous attendais ! Ah que de bons moments finis ! Je me fais une grande pitié car je suis bien à plaindre.
J'écris aujourd’hui à Albrecht pour quelques arrangements, pas grand chose. Je vous en prie ne vous promener pas seul dans vos bois. J’ai mille terreurs pour vous. Je vous envoie cette lettre aujourd’hui. Vous me direz si elle vous arrive avant celle de Lundi ou en même temps. Dans ce dernier cas je ne ferais qu’une enveloppe pour les deux jours, à l’avenir. Car je vous promets bien une lettre tous les jours. Adieu. Adieu. Toujours ce fauteuil devant moi et vide. Comme c’est plus triste de rester que de partir. Adieu. Adieu mille fois et tendrement adieu.

5 heures dimanche. Flahaut sort de chez moi dans ce moment. Il me dit qu’à Carlton Gardens on est triomphant ; il y avait soirée hier après le dîner pour M. Drouin de Lhuys. Triomphe complet. Lord Palmerston s’était fait interpeller hier à le Chambre des Communes. Il a parlé de tout, de ses vœux pour les Hongrois ! De ses adversaires personnels, il a apellé Lord Aberdeen that antiquated imbecility. Cela vaut les gros mots de Mme de Metternich. J’ajoute ces sottises, pour avoir le prétexte de vous dire encore adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Samedi 21 juillet 1849
Midi.

J'attends aujourd’hui une lettre du Havre. Le Times ce matin dit que vous y êtes arrivé, et que votre réception a été des huées. Cela fait bien de l'honneur à vos compatriotes ! Ma journée a été triste hier comme le temps. Beaucoup de pluie, point de visites de Londres. J’ai vu les Delmas la vieille princesse, & le soir les Beauvale. Là, bonne et longue et intime conversation.
Lady Palmerston avait écrit une lettre très inquiète, elle croyait à une bataille perdue à propos de la motion de Lord Brougham. Je vois ce matin qu’elle a été rejetée par 12 voix. La séance a duré jusqu'à 4 h. du matin. Brougham. Carlisle. Hugtesberg. Minto. Aberdeen Lansdown, Stanley. Voilà les orateurs & dans l’ordre que je dis là. On m'apporte votre lettre du Havre. Merci, mais vous ne dites pas comme le Times. J'aime mieux vous croire vous, que lui. (C’était dans les ships news, Southampton.)
Vous voilà donc établi chez vous ! que Dieu vous protège. Comme nous sommes loin ! Les discours hier sont si longs, qu’il m’est impossible de les lire. J'ai choisi celui d'Aberdeen, j’y trouve des paroles honorables & justes pour le roi, Lord Palmerston et pour vous. Je relève cela, parce que les journaux de Paris ne rendront surement pas les discours dans leur étendue. Onze heures de séance. C'est long !
Mon fils est revenu de Londres de sa tournée. J’irai peut être le voir demain, quoique je ne me soucie pas trop de l'air de Londres. Il est vrai que le choléra est bien près d’ici à Brentford vis-à-vis Ken. Peut-être à Richmond, mais on ne me le dit pas. Je n’ai pas de lettres du continent. Demain rien de nulle part, ce sera very dull. Adieu, sotte lettre. Je bavarderais bien cependant si je vous avais là dans ce fauteuil, si bien placé pour un entretien intime comme je regarde ce fauteuil avec tendresse et tristesse ! Adieu. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond jeudi 19 juillet 1849

Votre petit mot de chez Duchâtel m’a fait du bien. Je l'ai reçu chez lord Beauvale où je dînais. Je me suis mieux tenue que je ne l’avais espéré, et les convives m'ont épargné les phrases banales. Brougham a été très aimable. Ellice un peu endormi. Beauvale mange & ne dit pas un mot, il est charmé qu'on l’amuse et qu’on le laisse tranquille. Grand égoïste. Lord Aberdeen est resté longtemps chez moi avant dîner. Il est très décidé à venir à Paris en 9bre et s'en réjouit tout-à-fait, il vous aime tendrement. Il ne s’attend pas à la majorité demain, mais il voudrait une minorité très respectable.
Ellenborough ne vient pas. Il est malade à la campagne, il a écrit à Lord Brougham ( qui me l’a montré) une lettre très sage très sensée sur la discussion de demain. Lord Aberdeen de son côté a fait part à Lord Brougham de votre recommandation de ne rien dire qui peut gêner les mouvements de la diplomatie française en Italie, & Brougham m’a paru très résolu à observer cette recommandation. Nous verrons car c'est une créature si mobile. Il a vivement regretté de n’avoir pas su le jour de votre départ, il aurait beaucoup désiré causer avec vous avant le débat. Lady Palmerston lui a écrit deux autres lettres, bien aigres & bien inquiètes, il raconte cela fort drôlement.
Je ne suis pas contente de moi. Le malaise continue. Il faut que ce soit dans l'air, car Dieu sait que je me ménage. Le temps est froid. Le vent a soufflé cette nuit. Vous concevez que je n’ai pas dormi, je vous voyais malade en mer.

Midi.
Vous voilà donc en France ! Que c'est loin de moi. Je suis charmée de connaître le Val Richer. Je saurai où vous chercher. Vous aurez un grand plaisir à vous retrouver là, à retrouver vos arbres, votre pelouse, Vos sentiers. Tout cela reposera votre âme. Vous avez là tout le contentement intérieur, de la famille, de la propriété. Je vous manquerai c'est vrai, et je crois que je vous manquerai beaucoup, mais vous avez mille plaisirs que je n’ai pas. Et certes dans cette séparation je suis plus à plaindre que vous. Vous le sentez. Je voudrais me mieux porter et j'y prendrai de la peine, pour vous faire plaisir.
La Reine ayant décidé qu’elle ne viendrait plus à Londres, a reçu hier l’ambassadeur de France à Osborne. Simple présentation, après quoi il est revenu à Londres avec lord Palmerston. La reine a gardé quelques ministres à dîner, elle avait tenu conseil. Elle ne prorogera pas le parlement en personne. Son départ pour l’Irlande est fixé au 2 ou 3 août. Hier encore il m’a été dit de bien bonne source qu’elle est plus que jamais mécontente de Lord Palmerston et qu’elle le lui montre. Adieu. Adieu, mille fois. J’espère une lettre du Havre Samedi. Adieu encore & toujours.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mercredi 18 juillet 1849
Onze heures

Je veux encore essayer de vous faire parvenir deux mots à Londres. Cette pensée si douce que vous êtes à une heure de distance, il y faut donc renoncer. Renoncer à tant de bonheur ! Ah mon Dieu Hier mes genoux ont fléchi quand vous avez fermé la porte. Je suis restée en prières. J’ai tant prié, et toujours une seule & même prière. Je n’ai pas pleuré. Le moment même d'un grand chagrin me trouve sans larmes. C'est de l’étonne ment. Tout est suspendu en moi. Je me suis mise à la fenêtre, presque sans pensée. Je ne sais ce que j’ai fait ensuite. Je me suis couchée. J’ai dormi un peu, pas beaucoup et je me lève, la désolation dans l'âme !
Une lettre de Constantin de Berlin. L’Empereur est parti subitement de Varsovie pour aller surprendre l'Impératrice le jour de sa fête le 13. Il ne devait passer à Pétersbourg que deux ou 3 jours. Un moment de halte dans les opérations. On veut toucher en masse sur l’armée véritable des rebelles. Tout est calculé. On ne doute de rien, et dans 15 jours ou 3 semaines l’affaire de la Hongrie sera terminée. A Berlin, grand changement dans les esprit même les plus sages. L’unité, l’unité au profit de la Prusse ; les succès dans le Palatinat & dans le grand-duché de Bade ont tourné toutes les têtes. grande haine contre l’Autriche, mille soupçons. Le roi, la reine & une partie du ministère résistent seuls à cet entrainement. Mais la bourrasque est bien forte. Prokesh et Bernstorff sont incapables de rien arranger. Il faut changer ces deux instruments. L’armistice avec le Danemark mécontente beaucoup les Allemands. Enfin beaucoup de fronde à Berlin.
Adieu. Adieu, cher bien aimé, adieu. Voici les larmes. Je m’arrête. Adieu. Dites un mot, pour que je sache que vous avez reçu cette lettre. Voilà du vent. J’ai peur pour cette nuit. Passez-vous sur un bâtiment anglais ou français ? Je ferme ma lettre à 2 1/2. Je l'adresse chez Duchâtel. C’est plus sûr. Mon messager reviendra de la directement. Adieu. Adieu, mille fois. Mon cœur se brise. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Samedi 23 juin 1849
5 heures

Par une succession d’accidents trop longs à raconter j’ai été retenue à Londres jusqu’à 3 1/2. Il était trop tard pour aller chez vous, d’ailleurs c’est toujours si court & si gêné ! Jai vu Lord Holland. Il blâme le mouvement réactionnaire. on fait la guerre à la république rouge. Il faut la réprimer mais pas la battre. Enfin il est opposition. Pas de nouvelles. Viendrez-vous demain ? Vous me le direz sans doute aujourd’hui. Je me presse, j’arrive, & je crains que ma lettre n’arrive à la poste trop tard vu le Samedi. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Clarendon le 21 Mars 1849
Midi

Quelle contrariété. Je ne vous ai pas écrit hier parce que je trouvais plus simple que vous vinssiez recevoir ma lettre à Brompton, ignorant si elle vous arriverait à Kimbolton avant votre départ. Voici que vous n’arrivez pas. C'est plus que contrariant, c’est malheureux. Si vous avez de de l’esprit vous le comprendrez. J'ai bien affirmé que vous serez ici aujourd’hui. Ma visite de 2 1/2 y compte. Je n’ai guère de nouvelles à vous donner. Lord Clauricarde est venu m'annoncer hier que Lord Aberdeen fait demain une motion sur l'Italie. Cela a surpris la Chambre haute & moi aussi. J’ai été contente du premier dans des Débats à propos de la proclamation de la rue de Poitiers. Duchatel m’a dit que le manifeste n’a plu à personne. Broglie est parti pour la province. On lui mande qu’il était à l’état d’automate galvanisé. Piscatory a été chez le Président. Quelle platitude. Vitet écrit très lugubrement. Le nouveau roi de Hollande est parti hier matin. Une députation de ministres était venue le chercher. Il était très saisi très ahuri. Mes soirées sont abominables. Personne. Il faut donc encore aujourd’hui subir ma société toute seule. 4 heures. Je dois vous déclarez formellement qu'il faut que vous veniez du chemin de fer droit chez moi, avant d’aller à Brompton. L'heure presse, et cela est de toutes urgence. Je pense que vous pourrez être ici à 3 1/2 ou 3/4 on vous y attendra ; j’ai répondu de vous, il est impossible que vous ne compreniez pas qu'il faut faire ce que je vous dis. Morney écrit que Piscatory est de son avis sur votre élection et le lui à dit. D'Haussonville un peu cela aussi, mais avec une [ ?]. La fin de Morny est curieuse. Pourquoi M. Guizot ne dirait-il pas (par écrit je suppose) qu'il faut à la France. une Monarchie ? j’ai répondu Ah, Ah on sait donc qu’il n'y a que lui qui ait du courage. La motion pour demain fait du bruit. Le camps ministériel est embarrassé. Lansdowne décidé à se conduire dans son intérêt d’honneur personnel. A demain chez moi entre 3 & 4 sûr. Ma voiture vous ramènera chez vous. Si j’ai quelques personnes vous entrerez droit dans ma chambre. Adieu. Adieu. Je ne saurais vous dire le chagrin de ne pas vous avoir parlé aujourd’hui. Mais demain.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton le 14 février. 1849
Midi.

J'ai été bien triste hier, car vous l'aurez été ce matin en recevant la lettre de Marion. Une rechute avec redoublement des accès terribles, pas moyen de tracer un mot. Le médecin ce matin décide que je reste encore ici deux jours. Je ne partirai que Samedi. Votre lettre hier est bien longue et intéressante. Quoiqu'on fasse contre vous, vous n'y perdez pas. Je m’étonne de la sottise. Votre tranquillité fait un excellent contraste. Laissez user tous ces gens-là et tous ces évènements. Je crois tout-à-fait à l’Empire. Je n’y vois pas de mal, pourvu que cela ressemble à du despotisme. Hier le Times au jourd’hui le Chronicle sont des articles excellents sur Palmerston. Bulwer dit qu’il ira en Amérique pour [?]. C’est trop tôt montrer la comédie. Je n’ai pas de lettres.
8h. L'enveloppe était faite, et je n’ai pas pu reprendre ma lettre. Marion continue ce soir. Elle prétend que je vois mieux qu’hier à cette heure-ci. Moi, je n’en suis pas sûre. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Lundi 12 février 1849
4 heures

C'est bien long. Voici deux jours & demi passés sans un mot de vous. J’attends la poste avec impatience Je suis toujours faible. On m’a fait prendre l’air Il fait l’été. Je n'en jouis pas. Je n’ai encore vu personne aujourd’hui et les journaux du matin. sont pauvres. Voici vos deux lettres. Je pensais bien que la poste était mon ennemi. Voici tous les journaux français. Rien. 8 h. du soir. Metternich m'a interrompue et il est resté jusqu'à l’heure de mon diner. Très spirituel, très sensé, inventif. Il vous aurait beaucoup plu et il n'était pas trop long. Je me suis reprise ce soir de mon rhume. Mes yeux. Enfin je suis en pauvre état. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Brighton Dimanche 11 février

J'ai été bien désappointée de ne pas recevoir un mot de vous ce matin. Pourquoi ne m'avez vous pas écrit ? Une lettre remise même tard me parvenait. Il n’en est pas de même ici. Il n’y a pas de poste partant le Samedi après 2 heures. Ma journée s’est passée solitaire. Pas même Mad. de Metternich qui dinait de bonne heure pour aller au spectacle français le Domino noir ! J’ai revu Aberdeen après sa visite chez Metternich. Redoublement d’espoir, comptant beaucoup sur la reine. J’ai vu Freddy Leveson. Il m’a parlé d’audace et d'esprit. Ellice en avait parlé aussi à Marion. Elle a donc montré ma lettre. Cela a fait une sorte d'évènement. J’ai dit que j’avais bien entendu ne pas dire une impertinence, je ne l'aurais pas adressée à la femme. J’ai soutenu la différence entre les deux langues au besoin vous le direz aussi. Et après tout je ne regrette pas l’expression, et je parie que lui n'en est pas blessé.
8h. du soir. Naturellement rien de nouveau. On parle beaucoup de la brillante réception chez le Président jeudi dernier, tout le faubourg St Germain, force diamants, l'ameublement du temps de l'Empire, et le Président les mains sur le dos. Les homards de la fête à Molé. Rothschild a été chez Cavaignac, qui l'a assuré qu'il donnerait son appui au gouvernement dans toutes les mesures de finance. Billault est du parti Cavaignac. Adieu. Adieu.
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