Archives Marguerite Audoux

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Lettre de Marguerite Audoux à Valery Larbaud

Auteur(s) : Audoux, Marguerite

Description
Recherche, par Marguerite Audoux, d'un appartement pour le romancier
Texte
[Paris,] samedi [23 avril 1910[1]]

Mon cher Valery,

Je commence par vous dire que mon pied est tout à fait guéri et que j'en ai profité pour vous trouver un autre logement. Marcel Ray m'avait fichu le trac en me disant que vous étiez exposé à être assassiné dans Montrouge[2]. Voici ce que j'ai trouvé rue Leverrier[3], à deux pas de chez moi : un petit appartement au deuxième sur la cour, 3 petites pièces, mais logeables. Chambre à coucher[4] avec cheminée et placard. Salle à manger avec cheminée. Une troisième pièce donnant sur une autre cour, pouvant[5] faire une chambre de bonne ou un grand cabinet de toilette. Les trois pièces indépendantes et se donnant tout de même la main. Cuisine claire. Cabinet d'aisance clair avec tout‑à‑l'égout. Entrée assez grande. Maison dans le genre de la mienne et concierge aimable. Tout cela pour quatre cent quatre‑vingts francs[6].
J'ai obtenu de la concierge qu'elle m'attende jusqu'à mardi pour lui donner la réponse. Voyez, mon cher Valery, si cela vous convient. J'en serai quitte pour donner congé de votre appartement de la rue Friant et au 15 juillet vous entreriez[7] (ou vous n'entreriez pas) dans votre nouvel appartement[8]. C'est‑à‑dire que je m'occuperais de votre déménagement puisque vous ne serez pas à Paris à cette époque.
Je n'ai pas encore acheté votre linge. J'ai tout le temps puisque vous ne venez pas avant le 15 mai.
Je vous envoie par la même occasion les papiers ci‑joints que votre marchand de meubles avait adressés chez vous[9].
Comment allez‑vous ? J'ai reçu des cartes postales de Marcel Ray[10]. J'ai reçu aussi la photo que vous aviez commandée chez Druet[11] et je vous remercie.
Marie‑Claire passera le 10 mai à La Grande Revue[12]. Je n'ai pas encore les épreuves.
Francis et Agathe sont partis pour Coutevroult. Werth est enchanté de Mirbeau qui l'a recommandé à Paris‑Journal pour deux chroniques par mois[13]. J'ai envoyé ce matin à Madame Philippe les livres qu'elle réclamait, et je lui ai écrit une gentille petite lettre comme si je ne savais pas qu'elle a une dent contre moi.
Je n'ai plus de nouvelles du Lampadaire.
Répondez‑moi de suite au sujet du logement, mon cher Valery, car je crois qu'il serait difficile de trouver mieux pour ce prix‑là.
Si vous vous décidiez tout à coup à mettre 6 ou 7 cents francs,[14] je vous trouverais sans doute cela aussi facilement car en ce moment il y a des logements à louer de tous côtés.
Je vous embrasse bien affectueusement.

Marguerite Audoux

[1] C'est l'évocation des livres renvoyés « ce matin » à Mme Philippe et celle de la lettre faussement innocente que Marguerite Audoux lui joint qui nous permettent de dater précisément la présente lettre (datation confirmée par la seule mention de « samedi »). Pour le détail de la petite histoire des livres renvoyés, voir la lettre 30.

[2] L'appartement que Marguerite Audoux a trouvé rue Friant (et dont il sera donné congé sans que Larbaud y ait emménagé) jouxte Montrouge.

[3] La rue Leverrier se trouve entre la rue d'Assas et le boulevard du Montparnasse, effectivement à deux ou trois cents mètres de la rue Léopold‑Robert.

[4] à coucher est ajouté dans l'interligne supérieur.

[5] pouvant est précédé de moins grande.

[6] 1850 euros de 2018 (loyer annuel)

[7] Suit un dans.

[8] L'on sait que Larbaud emménagera au début de l'été au 152 du boulevard du Montparnasse.

[9] Sans doute des traites, puisque Larbaud confie à Ray que, « [g]râce à une recommandation de Francis Jourdain » (qui lui‑même dessine des meubles, dont plus tard ceux de Marguerite Audoux), il achète une partie de son mobilier à crédit. (Correspondance Larbaud – Ray, Gallimard, tome deuxième, p. 25).

[10] Nous n'avons pas trouvé cette partie de la correspondance.

[11] Valery Larbaud, tout comme Rodin, est client du célèbre photographe Eugène Druet (1866‑1916).

[12] Pour la première des trois livraisons (voir la note 1 de la lettre 18)

[13] On retrouvera bien la signature de Werth dans Paris‑Journal, ainsi que dans Gil Blas (voir la lettre 198), La Grande Revue, Les Cahiers d'aujourd'hui, puis plus tard L'Intransigeant, Le Populaire, Maintenant… De 1925 à 1940, l'écrivain exercera à plein temps la profession de journaliste (en tant que chroniqueur judiciaire, commentateur sportif pour le Tour de France, critique d'art, de littérature et de cinéma, reporter en Cochinchine, …) En 1945, il rendra compte du procès Pétain dans les colonnes du quotidien Résistance.
Voir Heuré (Gilles), L'Insoumis Léon Werth (1878‑1955), Viviane Hamy, 2006, et plus particulièrement, à propos du procès Pétain, les p. 284‑287. Voir aussi Werth (Léon), Impressions d'audience, Le Procès Pétain, présenté et annoté par Christophe Kantcheff, Viviane Hamy, 1995

[14] Entre 2315 et 2700 euros de 2018

Lieu(x) évoqué(s)Cérilly, Coutevroult, Paris
État génétiquePremier paragraphe :
- un à coucher ajouté
- moins grande rayé avant pouvant

Lettres échangées


Collection Correspondants

Cette lettre a comme destinataire :
LARBAUD, Valery

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Notice créée par Bernard-Marie Garreau Notice créée le 17/12/2017 Dernière modification le 03/05/2024