Guizot épistolier

François Guizot épistolier :
Les correspondances académiques, politiques et diplomatiques d’un acteur du XIXe siècle


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Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 23 octobre 1850

Je ne sais rien hors le fait du général [Schrans], ministre de la guerre raconté partout. Le monde hier & aujourd’hui. par le journal des Débats. Mad. de Contades qui venait de dîner chez le Président avec tous les ministres, n’en savait pas un mot hier soir et doutait ou faisait semblant de douter. Ce dîner était donné en l'honneur de la Toison d'or. Il y avait l’Espagnol & le Turc, je ne sais ce que le Turc avait à faire là-dedans.
[Stokhamm] est arrivé hier de Hanovre, il est venu chez moi de suite. Son roi accablé. Il ne trouve par un ministre qui se charge de ses affaires. Tous veulent aller plus loin même que M. Steeve. Le Hanovre est très exposé. Il serait envahi de suite par la Prusse ; il n'y a pas moyen. Ce qu’on peut faire de plus hardi est de rester neutre. Hubner hier soir inquiet. Si mon empereur ne se décide pas, dieu sait où l'on va. Et l’on craint les affections de famille. L'Autriche est tellement engagée que la guerre est inévitable si la Prusse ne recule pas, et si nous ne parlons pas très haut et très ferme, elle ne reculera pas. Il est impossible que tout cela ne soit pas tranché d’ici à 10 ou 12 jours au plus.
Il y avait un dîner hier chez Thiers pour Changarnier, Grasalcoviz & Kisseleff. Lady Jersey a été retenu à Hanovre elle n'arrive qu'à la fin de la semaine. Je crois qu'il y a quelque désaccord entre cette lettre et les précédentes où je vous disais que la Prusse reculait. Elle a reculé quant à l’Union. Erfert est fini. Mais il faut qu’elle reconnaisse la Diète, voilà l’ultimatum de l'Autriche, et la Prusse s'y refuse. Elle veut son indépendance. La Hesse est le symptôme. C’est la diète qui y entrera. Et c’est dans cette qualité que la Prusse conteste ce droit d’y entrer. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 3 Novembre 1849 Samedi

La situation est des plus tendues des plus extraordinaires. J’ai vu hier Berryer, après le dîner. Il se rendait à la réunion du soir où l’on devait décider de la conduite à tenir, il est sombre, il n’est pas désespéré, mais il n’entrevoit pas comment on pourra sortir de ce chaos au milieu de tant de prétentions vivantes. Voilà pour l’ensemble quant au moment actuel Dieu sait ce qu’on aura décidé hier. Les intrigues de la semaine ont été énormes. On se plaint beaucoup de Molé. Un très bon conservateur disait hier. " M. Molé est toujours, en toutes circonstances, avec tout le monde en trahison, on ne peut pas croire à lui un instant. " M. Molé est dans le dépit le plus grand contre le président qui l’a joué. Thiers n’est pas allé hier à la réunion des 10 chez Molé. Il y manquait aussi Berryer & Vatimeuil. Sur les 7, quatre ont voulu qu’on parle, et 3 qu'on se taise à la séance. On avait préparé quelque chose s'il y avait eu lieu. Mais le programme n’y a pas donné lieu. Accueilli avec le plus grand silence. Broglie est d’avis qu’on ne fasse aucune opposition, mais que personne en mette plus les Jeudi chez le président à ses réceptions. Marquer de la froideur & du mécontentement. Avant aucun accord même cela s’est déjà fait ainsi jeudi à la soirée. Il y avait la diplomatie, grand nombre de militaires, point de députés. Hier on a fait entrer de la troupe de plus à Paris. Tout le monde disait hier que dans le petit public, la masse, le message du président avait le plus grand succès. Je sais que hier devait se tenir une réunion des partisans personnels du président, Moskova, Victor Hugo & & qui cherchent à en attirer d’autres parmi les rangs des conservateurs. Le coup d’état est regardé comme infaillible. Les affidés disent : " Nous sommes en marche." Berryer en disait : dans les faubourgs il pourra se trouver 40 m. personnes. criant vive l’empereur. Alors il pourrait s’en trouver 60 m aussi qui crieraient vive la république socialiste. On verra alors. Il y aura lutte certainement. Que faire je parle de moi maintenant certainement à supposer même que l’armée reste très bonne. (Changarnier ne ferait pas comme au 13 juin. Il laisserait faire un peu pour pouvoir réprimer. Réprimer c'est batailler. Vous savez si j’aime les batailles. Tout le monde y compte & reste. On est aguerri ici. Mais moi qui n’ai aucun appui auprès de moi, comment me risquer dans la bagarre. Tout cela est bien triste. Je ne puis pas vous dire tout ce que je vois de monde. Depuis 3 1/2 jusqu'à 9 du soir jamais un moment seule, que l’intervalle très court des dîners. Kisselef vient sans cesse, impossible de causer. Je le ferai dîner avec moi. pour avoir enfin le tête-à tête. Il a reçu un courrier, il a des communications importantes à faire. Il ne sait à qui parler. Il est allé hier chez Hautpoul, pas reçu. Berryer est plein de sens. Au fond sa conversation est celle qui m’a le plus convenu d'entre toutes les autres, vous verrez, car vous le verrez. Il m’a parlé de vous, mais pas autrement que pour me dire que lui dans le temps, avait voté pour qu'on soutint votre élection. La princesse de Joinville est accouchée avant terme d'un enfant mort. Elle a été à la mort elle même. Selon les nouvelles d'hier elle allait mieux. Quelle tour de Babel que ce Paris. Je me trompe. Tout ce que je vois est d'un seul et même avis au fond, mais que faire, & quoi au bout ? Adieu. Adieu. Adieu.
Personne ne sait ce que veut Changarnier, au fond il est impénétrable. Flahaut est ahuri. Lui, approuve le message et s’étonne de la majorité Il dînera chez le Président mais il ne veut pas se montrer à ses soirées. Il repart jeudi pour Londres.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris Samedi le 4 octobre 1851

Le duc de Noailles est venu me voir hier un moment. Vous devez savoir que le Comité légitimiste a décidé ces deux choses. 1° on ne choisira pas de candidat avant l’élection de la nouvelle assemblée & l'on pressera cette élection 2° on ne prendra pas pour candidat à la Présidence un nombre qui aurait voté pour la proposition Creton. L’exclusion est formelle, et elle a été formellement annoncée au général Changarnier Il est évident qu'il a repoussé, et qu’il votera pour. Voilà donc qui est fini. Je trouve l'humeur des Légitimistes très tranchante. Certainement ils finiraient par voter pour le Président actuel.
J’ai rencontré Thiers chez la [duchesse Mackikoff], il y est tous les jours & tout le jour pérorant, ne se compromettant pas. Je lui ai dit quelques petite paroles provocatrices il ne s’est pas laissé entraîner. Il est monarchiste orléaniste et puis c’est fini. Très contenu sur les personnes. Enfin je n'ai rien à citer. On ne se battra pas dans la rue, les rouges sont battus d'avance. On se battra beaucoup à l’Assemblée & & & bien amusé comme tout le monde de la correspondance sur Abdelkader. Cela passe vraiment toute imagination ! Je me permets de blâmer la réponse du président. Lamoricière veut [rosser] Londonderry quand il viendra à Paris.
J’ai vu le soir mes diplomates. Je n’ai pas vu Dumon. Il ne m’est pas très fidèle. On ne parle que d'ici. Je ne sais pas un mot sur ce reste de l’Europe. Thiers était bien monté hier contre l'Angleterre. Sur ce point il dit comme tout le monde. Vitel est parti pour 15 jours pour les environs de Dieppe. Narvaez & Bulwer sont les plus grands amis du monde. Celui-ce retourne à Londres. Lady Cowley est fort malade. Adieu, adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Paris Samedi 10 août 1850

Il n’y a plus personne ici, et j’ai eu du monde hier tout le jour Dalmatie Mallac, Génie, Piscatory, des insignifiants. Rien de plus que ce que nous savons ; mais un sentiment général qu’il faudra absolument du nouveau l'hiver prochain, et que tout ce qui est est usé. Le banquet de l'Elysée fait encore assez de bruit. Changarnier et les officiers supérieurs étaient partis quand les sous officiers se sont promenés dans le jardin, en criant : " Vive l'Empereur ! Aux Tuileries ! Pas tous, à beaucoup près, dit-on, mais un certain nombre. Et on dit que ces banquets se renouvelleront au retour du Président que tous les sous-officiers de l’armée de Paris y seront successivement invités. Cela déplaît beaucoup aux Généraux. Changarnier pourrait bien interdire, aux sous-officiers d’y aller. Alors le conflit entre les deux. Evidemment la Camarilla du président se remue assez et voudrait se faire un parti dans l’armée. Si son voyage réussit, s'il est bien reçu par les populations, on s’attend à quelque chose. Je ne m'attends à rien. Et au fond, Piscatory, non plus, ne croit pas qu’il se fasse rien, quoiqu’il eût bien envie de croire qu’il se fera quelque chose. On dit qu'au retour de l’assemblée, les diverses réunions, Rivoli, Richelieu, & & se disloqueront que, dans toutes, les sensés et les fous sont las de vivre ensemble et veulent se séparer, que tous les partis sont en état de désorganisation. Je crois cela ; mais je crois que l'explosion et les conséquences de cet état se feront encore attendre longtemps. Un seul fait est certain c’est que pour le moment, les légitimistes sont en perte et les orléanistes en progrès. On fait toutes sortes de raisonnements fantastiques ; voyez l’Espagne pourquoi s’est-elle sauvée ? Parce qu'il n’y avait sur le trône que des femmes et des enfants. Plus les apparences, d’un gouvernement sont faibles, moins il y a de péril ; le peuple veut un gouvernement qu'il ne craigne pas, qu'il ne respecte pas, qui ait besoin de sa protection.
Savez-vous pourquoi vous êtes tombé sans être soutenu ? Parce que vous imposiez trop, parce que vous n'avez point de préjugés populaires. Si le Roi avait suivi, en 1840, la pente populaire, s’il s’était engagé n'importe dans quoi en harmonie avec les traditions de la révolution et de l'Empire, il serait arrivé on ne sait pas quoi, mais autre chose, quelque chose qui eût duré. J’écoute, je souris, j'objecte ; je finis par parler sérieusement, et on ne sait plus que dire. Les esprits sont bien grès de retomber dans les vieilles maladies ; mais les corps sont fatigués et impuissants.
J’ai passé près de deux heures à Bruxelles avec le Prince de Metternich. Grande satisfaction de me voir ; il voulait être plus que poli. Après lui, il a fallu entrer chez Madame de Metternich ; il m'y a conduit. Aussi gracieuse que lui, là, il a fallu m'asseoir. Des compliments et des questions sur mes filles, sur leur mariage ; on cherchait mes faibles pour entrer par là. Quand je m’en suis allé il m'a reconduit jusqu'au milieu de l'escalier. Il m'a même écouté en silence deux ou trois fois. Bonne conversation. Il m’a parlé de l’Autriche et de Thiers. Plein de confiance dans l’avenir de l'Autriche : " Les hommes qui gouvernent sont de braves gens, pleins de courage " sur quoi, il me raconte toutes leurs fautes, et les embarras qui résultent de leurs fautes. Mais tout va bien. Ce qu’il m'a dit de ses conversations avec Thiers m’a intéressé. Il a fini par : " Je ne suis pas Thiériste." Et alors une longue comparaison entre sa situation à lui Metternich, et la mienne, pourquoi, il ne retourne pas en Autriche, pourquoi je fais bien de rester en dehors de tout ; en quoi nous nous ressemblons et en quoi nous différons . Pour qu’il y ait vie, il faut qu’il y ait les conditions de la vie. Ce n'est pas la même chose d'être tout-à-fait vieux, et de ne l'être pas encore tout-à-fait & &. Il m'a amusé, et il s'est amusé. Adieu.
Mon fils vient de m’arriver. On dit qu’il y a ce matin, une séance publique de l'Académie française ; prix Monthyon, l'éloge de Mad. de Staël. J'irai peut-être, pour voir quelques personnes. Adieu, Adieu. J’espère bien avoir une lettre ce matin. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 12 octobre 1850 Samedi

Le dîner hier, animé. Après le dîner, curieux. M. Fould est venu plein de courtoisie et presque d’intimité pour le général Changarnier, conversation générale ou celui-ci racontait le passé avec vivacité intérêt, & appuyait forte- ment sur ceci. " L'armée m'estime, me respecte & me craint." Avant cela ils avaient passé tous deux dans le salon jaune et ont causé là un quart d’heure. Évidemment il y a quelque chose. La commission se rassemble de nouveau aujourd’hui. On dresse un procès verbal qui rappellera la séance de Lundi, le quasi engagement pris par le général d’Hautpoul d'interdire les cris. La déviation de cette promesse. On blâmera, ce blâme retombe sur l’Élysée. Et cette pièce sera soumise à l’assemblée à sa réunion. Changarnier m’a dit, que la séance avait été vive. M. Dupin très vif contre l'Élysée. J’ai retrouvé dans la Conversation la même impatience que par le passé. M. Molé a été parmi les blâmants.
Du reste Changarnier m'a dit que les nouvelles d’Allemagne étaient bien mauvaises. On s’attend à un éclat. Le Président est fort préoccupé de cela. Il penche pour la Prusse et pour s’en mêler si l’Italie venait à s'agiter en conséquence. Hier on a eu la nouvelle que l’Autriche avait mis à la disposition de l'électeur, un bataillon autrichien qui se trouve sur la frontière. La Reine des Belges est morte hier à 8 heures du matin. Votre pauvre reine !
Marion est venue ce matin la bombe a éclaté. Elle a été très ferme. Deux résolutions de sa part. Rester à Paris auprès de moi. Ou rester à Paris avec sa soeur Fanny malade, s’établir ensemble modestement. Ceci accepté par la mère. Marion est décidée à l’un ou à l’autre parti. C'est sans doute le dernier qui sera adopté. Adieu. Adieu. Il n’a pas été question hier des absents. Adieu. Pas de conversation a parte avec Fould.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris samedi le 20 7bre 1851

Longue visite de Hatzfeld le matin. Très souffrant & très chagrin de l'être. Très sensé à discuter les chances. Il ne croit pas si facile d’écarter les lois pénales, si la [proposition] Creton est rejetée, les légitimistes tranquilles de ce côté, se retourneront de l’autre pour empêcher la réélection. Croyez-vous cela. On parle beau coup de discussions dans le camp légitimiste. Je ne sais rien, je n’ai pas revu le duc de Noailles.
La [duchesse] de Montebello va mieux. Le soir assez de monde et beaucoup de conversa tion sur l'unique sujet. Le nonce est inquiet en pensant que l’armée à Rome peut se trouver Dieu sait en quelles mains dans quelques mois. Je vous envoie Ellice sans presque l’avoir lu moi-même, mais cela me parait curieux, pour l'Angleterre. Renvoyez-moi cette lettre elle appartient à Marion qui ne l’a pas lue. Je ne lui en ai envoyé que la première partie à Ferrières. Elle y reste jusqu’à lundi. Il fait très froid ici. Adieu. Adieu.
J’ai dormi mais je suis mécontente. Ce sera un mauvais hiver. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris Samedi 29 Juin 1850

Ce n’est pas Aix-la-Chapelle. C'est à Ems que je vais en droiture. Je voulais partir ce soir. Je remets, car il ne fait plus si chaud, et une nuit gâtée peut me fatiguer beaucoup. Ce sera demain matin ou lundi. Adressez toujours ici jusqu’à nouvel avis. Je n'ai qu’un mot de Greville qui convient que le discours de Palmerston a été superbe et qu'il a produit un prodigieux effet. Cependant il ajoute, que le fond manque, & que ce n’est pas du tout une réponse à Graham. En somme Il regarde tout ceci comme d’un effet important & dangereux pour la politique de son pays. Voyons Peel ! Aurait-il parlé ? & qu’aura-t-il dit ?
Hier la journée prise par les adieux, que suis restée toute fatiguée. J'ai reçu Duchatel qui avait passé cinq jours à la campagne. Il ne savait rien. Montebello hier a voté aussi contre la loi des Maires. Il ne dit pourquoi, je l'ai oublié... Je crois que c’était pour ne pas diviser la majorité. Le président est de bonne humeur. Il a donné à dîner aux Normanby avant hier. Mardi Lahitte les fait dîner chez lui. Hubner est parti hier soir pour Vienne. Il est venu me dire adieu très abruptement. 2 heures Ellice d’hier soir. Situation de plus en plus tendue & périlleuse. Beau discours de Gladstone & autres. Les grands n'ont pas encore pris la parole. Peel. John, Disraeli, Cobden. Bright. Le débat ira jusqu'à lundi probable ment. Les chances de bonne majorité diminuent à moins de 37 les ministres se retirent. On dit que les Peelistes font des arrangements avec les protectionnistes, pour le cas où les princes seraient appelés au pouvoir. 1ère condition. Pas de dissolution. Mon opinion est qu’on ferait un ministère mixte. Peelistes & Whigs modérés. Ou bien Protectionnistes modérés, s'il y en a et toujours les amis de Peel ! Que Wellington s'en mêlera. Nous verrons. Toujours c’est bien gros, et peut devenir bien grand. Greville m'écrivait du 27. Ellice du 28.
En sortant de chez le duc de Cambridge jeudi la reine a été frappée au visage, par un officiel en retraite avec la canne de cet officier. Elle a paru à l'opéra le soir, grand enthousiasme pour elle.
Les radicaux veulent donner un grand dîner à Palmerston à un des grands théâtres. Tout cela c'est la révolution. Il faut l’arrêter à temps, & c'est ce qui me fait croire au changement de ministère. Viel-Castel et Kisseleff chez moi ce matin de bonne heure. Mareschalchi parle aussi de déconvenue possible pour le g[ouvernement] mais il n’est pas aussi explicite & détaillé qu’Ellice. Il finit en me disant souligné I think there must be change. Adieu. Adieu. N’est-ce pas triste de partir à la veille de mon triomphe ? Mais vous voyez bien que cela entraîne trop loin ce n’est que le télégraphe de Mardi qui annoncerait le vote. Je ne partirais donc que Mercredi. Trop long. Je suis emballée. Adieu. Ecrivez toujours ici.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris Vendredi le 3 octobre 1851

J’ai vu hier matin Saint-Aulaire & Vitet. Celui-ci un moment seulement. La commission de permanence s’était ajournée au bout d'une demi-heure. On a parlé des discours de M. Léon Faucher. On a décidé qu'on lui ferait des questions à la tribune. Changarnier a dit de Léon Faucher qu’il ne fallait pas le prendre au sérieux. Fould a rencontré hier quelqu’un à qui il a parlé sans beaucoup d’assurance Il avait le langage triste, et a laissé la conviction que la loi du 31 mai serait abrogée. Il a dit que c’était une idée fixe dans la pensée du Président. Selon lui, il n'y a que deux vrais pouvoirs, ou la légitimité, ou le suffrage universel. Il représente et veut représenter celui-ci. Odillon Barrot se met en mesure de redevenir Ministre, car Léon Faucher & quelques autres cesseraient de l’être. Barrière est revenu bien malade encore.
Hier soir longuement seule avec Changarnier. J’ai dit ce qu'aurait dû dire Marion. Vous deviez rester à la tête du parti de l'ordre. Vous avez excité des méfiance. Vous n’avez pas d’armée, où est votre parti ? & & & de trés belles vérités. Il a été très irrité. Ah, je n’ai pas de parti ? Si je parle à l'Assemblée tout le monde m’obéit vous verrez quand j'irai à la tribune. Mais que veut-on de moi. Que j'écrive sur mon chapeau [?] Henry V ? Mais c’est insensé. Je suis perdu & tout le monde l'est avec moi. Est-ce que je n’ai pas assez dit ce que je suis. Je l’ai dit pendant 2 heures en tête-à-tête à Berryer. Il est sorti de là disant : que j’étais très réservé. Ce sont des menteurs. On veut toujours me croire orléaniste. Je ne le suis pas du tout. Je n'ai aucune raison de l’être. Alors il m’a fait un beau morceau sur son élection qui ne dépend que des Légitimistes. Qu’ils lui doivent seulement 400 mille voix & c’est fait, il est entre les cinq. Alors un discours à la tribune racontant ses services. Etranger à la Révolution de 30, à celle de 48, étranger à toutes les batailles sanglantes à Paris. En connaissant de batailles que celles sur le sol algérien, à Paris trop batailles pacifiques, voilà l'homme qu’on présente à la France. Très beau discours que ferait Berryer ou tout autre, & il est nouveau. J'écoutais en toute humilité et attention. Grandes éloges de St Priest, Nettemont, Barthélemy. Grande haine de Berryer. Peu d’estime pour les grands hommes. Grande confiance dans sa popularité en France. Mais Thiers lui-même dit que hors Paris, on ne vous connaît pas en France. C’est menti, il n'y a pas un [?] qui ne connaisse mon nom. Depuis trois ans j'ai rempli la France de mon nom. Toujours haine du Président, de mon Président. Je vous promets que j'empêcherai votre Président de le redevenir. Je ne sais ce que je saurais faire mais je suis sûr d'empêcher. Voilà le ton pendant une heure.
Beaucoup de diplomates sont venus ensuite. Il est resté jusqu'au bout de la soirée. Dumon a voulu causer avec lui. Cela ne prenait pas. A moi il avait dit, je ne suis un candidat qu’avec vous, il ne me convient pas d’aller me proposer à d’autres. Je crois que voilà tout sur Changarnier. J'ai fait l’éloge du Président. Nous n’avons eu qu'à nous louer de lui, politique, honnête, & pacifique. Il est parti de là pour l'appeller le candidat de l'Empereur Nicolas. Enfin cela m’a amusée.
Grasalcoviz est arrivée. Elle a eu hier chez elle. Thiers & Changarnier. Kisseleff va mieux. Que dites-vous de la correspondance entre Londonderry & le Président, c'est impayable. Le temps est laid et froid. Paris vaut mieux je crois que la campagne. La duchesse de Montevago a dîné à St Cloud avant son départ, elle est partie hier, après le dîner on a joué au lansquenet. Elle a gagné deux mille francs au Président dont elle était très honteuse. Adieu. Adieu.
[Changarnier] m’a dit que le duc d’Aumale est en pleine approbation de ce qui s'est fait à Claremont. Il m’a dit encore 1000 contre 1 que Joinville se proclamera candidat. Il n’attend que la proposition Creton. Pour celle-là [Changarnier] croit fermement qu’elle sera rejetée. D’autres pensent le contraire, et disent que si l’exil est levé Joinville annoncera qu’il ne veut pas de la Présidence. Il ne veut que rentrer en France.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 7 juin Vendredi

J’ai trouvé M. Molé, fort malade. très mauvais visage au moins. Jaune, faible. Il a toujours la fièvre. Bonne conversation, rien à relever que vous ne sachiez ou que vous ne deviniez. Il n'était pas bien au courant de la négociation avec Londres. Il croyait toujours que Lahitte ne faiblirait pas. Mais moi je suis convaincue que Lord Palmerston se sera fâché hier de tout accorder, et avec la complicité du télégraphe français vous savez bien qu'en deux heures de temps on peut parler à Londres de sorte qu’en en terminant même qu’aujourd’hui. Cela arriverait encore à temps pour gâter la discussion de ce soir. Quoiqu’il en soit, nos amis de Londres sont des nigauds d'avoir tant attendu. Thiers était du dîner de Hubner. Il m’a dit qu'il a prévenu le Président de son voyage à Claremont et qu'il comptait y aller dans peu de jours croyant le roi assez mal pour craindre qu’il ne meure très incessamment. Je suis sûre qu’il ne sera de vos voyages respectifs comme de vos luttes parlementaires chacun veut garder son discours, pour répondre à celui de l’autre. (tout ce qu’il m’a dit hier m’a prouvé qu’il est entièrement orléaniste.) Pourvu que l’occasion de le faire en vienne à manquer à tous les deux. (Transportez les deux dernières sentences, ce sera plus concret.) On ne sait rien de Varsovie que ce que disent les journaux. Hubner & Hatzfeld sont également perplexes. Schwarzenberg avait quitté Varsovie, & voilà que son empereur s'y rend, c’est au moins ce que dit le télégraphe de Cologne. c’est drôle. Ce qu’il y a de sûr c'est que le Prince de Prusse est allé à Pétersbourg voir l’Impératrice. Lahitte a dit hier à Chreptovitz si Lord P[almerston] me cède tout je ne puis pas ne pas me reconnaitre satisfait. C’est juste.
Je suis de santé comme j’étais à votre départ. Le mien approche le 20 ou 25, mais je crois que Je verrai Chancel avant, parce que que tout le monde traite d’extravagante l'ordonnance d’aller à Aix-la Chapelle pour la poitrine.
1 heure. Ellice me mande que le Cabinet, très alarmé, et craignant une grande majorité contre lui ce soir, & envoyé une pétition à lord Stanley pour la conjurer au nom du bien public, de remettre la discussion à huitaine. Quand on donne des motifs pareils on n'ose pas refuser. Il donc été obligé de fléchir. La discussion est remisé à Lundi 17. Ellice dit qu'il y aura une grande majorité contre le gouvernement. D’un autre côté voici K[isselef] qui apprend, mais par voie détournée, que Brunnow a l'ordre de partir. Je saurai tantôt ce qu'il y a de vrai. Le vrai est que Brunnow avait demandé un congé, Il lui a été accordé pour l’été de 1851. Ceci serait donc un vrai rappel. Il y a une lettre du Prince Albert à l’université de Cambridge qui indique de la défaveur pour le gouvernement. Je n’ai pas lu encore. Vos réflexions sur les 3 millions sont excellentes. J'en ferai usage. Adieu. Adieu. J’attendrai pour ma lettre, mais je n’attends pas de nouvelle nouvelle à vous mandez.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 10 octobre 1851

Pardonnez-moi hier, je n’étais plus en état d'écrire une ligne. J’avais passé ma matinée en allées & venues, consultations & & pour l’affaire de mon fils. Constantin me conseille une lettre à l’Empereur. Je l'ai écrite de suite, je l'ai fait partir. Quel sera son sort ? Je vous envoie la copie. La croyez-vous bonne ? Hélas si elle ne l’est pas, il est trop tard. M. Fould est venu hier matin. Il est décidé pour le maintien de la loi du 31 mai. Il admettrait quelque modification, mais l'abrogation jamais. Un changement de Ministère est très possible. Odilon [Barrot] sera ministre peut être. Pourquoi M. de Falloux ne le serait-il pas ? Il l'a bien été. Les Légitimistes doivent comprendre que leur intérêt est de soutenir le président.
J’ai lu un passage de votre lettre où vous prêchez cela aussi. Cela lui a fait un grand plaisir. Le coup d’état, il n’y a pas de raison pour le faire. Et après tout on a aisément raison de l’Assemblée. Elle reviendra très divisée et très impuissante. La candidature Joinville ne fait aucun progrès. Partout c’est le président qu’on nomme. Grande résolution de faire de la force. On proposera [par exemple] la déportation pour les sociétés secrètes. Voilà à peu près tout ce qu’il m’a dit je vous envoie la lettre d’Ellice, vous me la rendrez par Génie. John Russell [...]

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Le 15 octobre

Je brave la consigne cela m'ennuie. L'effet du discours est grand et bon. Tout le corps [diplomatique] content. Je les ai tous vus. Cowley dit un chef d'œuvre. [Drouin de Lhuys] lui a dit que cela devait effacer le lac français petite flatterie qui a fait son effet. Hubner content aussi avec la remarque que ce qui est une sécurité pour l’Europe est également une satisfaction à la France, il a parlé pour plaire extra et intra muros. Pourquoi ne pas croire à la sincérité ? Ou pour le moins dire qu'on le croit. Persigny est venu me voir bien content, il y a de quoi ; tous ses [?] qu’on regardait comme autant d’extravagances accomplies. C’est enivrant et cela ne l'enivre pas du tout, au contraire pour la première fois je l’ai trouvé très modeste. Lui et son maître sont les moins étonnés de tous. Ils savaient que cela devait être et ils prennent cela très tranquillement tout cela tient de la fable et c'est bien cependant une réalité.
Je vois Fould souvent, très occupé. Et très content. On dit que Jérôme l'est, puis il affecte de l'inquiétude. Le Prince entre demain aux Tuileries, il y trouvera sa famille. Ensuite il ira dîner et coucher à St Cloud. Après viendront les conseils de Ministres, où l’on décidera l’époque & le comment. Personne ne le devine encore, et les ministres pas plus que les autres. Seulement Fould me dit : il n’est jamais pressé. Paris sera très en fête demain. Des arcs de triomphe partout. [?] sous mes fenêtres à l’entrée du jardin. Je ne sais rien de la Princesse de H. Sigmarignan. Mais évidement il faut une femme mais Le nonce est embarrassé mais quand on lui demande si le Pape viendra, il ne dit pas non. Le départ de [Kisseleff] me désole et désole Hubner. Hatzfeld revient dans huit jours. [Kisseleff] est parti sans connaître le discours. Que j’aurais de drôleries à vous raconter et elles seront perdues oubliés quand nous nous reverrons. Aggy a reçu l'ordre formel de rester. Elle reste, plus tard Marion viendra. Je vois Andral tous les jours & je vais tous les jours pire. Adieu.
Voilà tout ce que mon oeil me permet de vous écrire. Aggy redemande la lettre de sa sœur. Envoyez-la moi.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris vendredi le 19 septembre 1851

J'ai vu hier M. Fould très longtemps. On ne songe pas à un coup d'État. Il serait sans aucune cause ni prétexte à présent. L'Assemblée se réunira. La [proposition] Creton sera rejetée. La loi pénale pour vote inconstitutionnel sera rejetée. La révision aura au moins la même majorité. Mais alors, le prétexte est trouvé. Devant tant de manifes tations du voeu public entravé par la minorité révolutionnaire, il faut faire. Qui fera ? C’est incertain. L’irrégularité sera commise de l’une ces trois manières : de concert avec l'Assemblée, sans l’Assemblée, ou par le pays. Pourquoi les légitimistes sont-ils si mal pour le Président ? Pourquoi un dédain dans leurs journaux ? Il est sensible aux bons comme aux mauvais procédés. Si on s'approche on sera accueillis. Très disposé à bien recevoir M. Molé moi, mais il faut que quelqu’un commence. (deux fois dans la conversation & sans aucune provocation de ma part) Le Président ne songe pas à se marier. Il n’a point, il n’aura point de dynastie. Il ne se fera pas empereur et l’avenir de la France y songe-t-il ? Henry V hériterait de lui. A part cela, la conversation a été bonne et sensée. Il est parfaitement sûr de son affaire. Le Président n’a qu’à attendre. On lui sait gré de sa patience. Joinville n’a pas de chances et en eut-il tant mieux car c’est cela qui rallie les hommes sensés au président. J’ai parlé de l’Assemblée prochaine, il n’a pas pris cela beaucoup au sérieux on ne peut pas recommencer ce mode de suffrages. C'est une loterie. On peut avoir une chambre rouge tout comme une bonne chambre. Le vote par arrondissement. Il faut revenir à cela. J’en conclus que le coup d’état qui doit se faire embrasserait cette question aussi. Je crois vous avoir répété l’essentiel.
Certainement toute la manière de Fould indiquerait de la tranquillité & de la confiance. Il regrette qu’il n’y ait pas de rencontres. Si on se parlait cela pourrait aller mieux. J'ai manqué hier le duc de Noailles. Je le regrette. Je suis inquiète de Montebello. Il n’est pas venu me voir, & je vois qu'il n'a pas été à la commission. Le voici qui m’a interrompue. Sa femme avait été mal. Elle va mieux j’ai dormi. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 24 octobre 1851 Vendredi

Je suis si malade, et si tourmentée que je ne sais pas vous écrire une lettre raisonnable. Pardonnez-moi et acceptez le peu que je vous donne. La crise n’a pas fait un pas. Le public est très insouciant. J’ai vu hier-soir Berryer et beaucoup de monde, trop pour mes nerfs. On est très monté sur tout ce qui se passe. Le parti légitimiste très résolu à tenir tête. Je ne sais pas les autres. On me dit qu'on est très content de Changarnier. La mort de la Duchesse d'Angoulême est un événement et pourrait mener à bien, si à Claremont on veut le bien.
En attendant vous avez vu les paroles du Prince de Joinville à Adiot. Je vous les envoie pour le cas où vous ne les aurez pas. Deux lettres l'une à M. Foucher de lui qu'on a vues sont en contradiction formelle avec cela. Il veut qu'on soit muet, comment [?] cela. Les paroles dites à Adiot sont du 17. Les lettres des 20, & 21. Le Chancelier était aussi chez moi hier soir, très vif sur ce qu’on doit faire par suite de la mort de La [Duchesse] d’Angoulême. Noailles reste encore aujourd’hui ici. Le comte Bual est à Bruxelles. On retient Brunnow à Pétersbourg. Je ne sais ce que fera Brunnow. Mais évident le monument Kossuth fait fiasco. Lord John a réuni le cabinet le 14, & ne lui a pas dit un mot encore sur la réforme. Les Ministres n’en savent pas le premier mot. C’est Bauvale qui me le dit.
Une nouvelle impertinence de Lord [Palmerston] a provoqué de le part de Fortunato une [?] très vive, dit Antonini. La légation napolitaine à Londres est rappelée toute entière. On désigne un autre ministre Carini mais qui n’ira pas encore Antonini est plus furieux que jamais. A propos il est le seul diplomate qui approuve ce que fait le président.
Je suis triste pour moi du retard de votre arrivée à Paris. Pour vous je ne le regrette pas. Je ne vois pas le bien que vous pourriez faire, & je vois, même dans ce qui se passe aujourd’hui l’avantage pour vous de votre absence. Si l'on cherche à peser sur Claremont il vaut mieux pour la chose, que vous y soyez tout à fait étranger. Qu’allez-vous dire à Falaise depuis certaines préfaces il me reste de l’inquiétude dès que vous parlez ou écrivez. Vous me pardonnez mon impertinence.
Je ne sais rien de Morny. Vitet est établi à Paris depuis hier. Je le questionnerai sur Duchatel. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 24 Septembre 1852

Pas de nouvelle du tout à vous mander, quoique j'ai vu assez de monde hier. Le duc de Noailles le matin. Montalembert, Fould, le soir, au milieu d’un cercle assez nombreux. Quelques jolies femmes, une hongroise fort belle. Molé arrive demain et passera ici 6 jours. Le prince George de Prusse vient demain aussi. On me dit que la Belgique ne fera pas de représaille elle laissera les vins & les soieries tranquilles. Montalembert s’est mis en tête que le Président veut quelque conquête en Afrique et il voudrait bien (Montalembert) que l'Angleterre laissât faire sans réclamer. Il a fort peur de la guerre. On commence à se demander qu’est-ce que fera Paris pour le retour du Président ? On dit que ce sera encore pire qu'en Provence. Le mot est je crois de M. de Maupas. Adieu Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris le 26 septembre 1851

Je suis bien triste de votre lettre. Votre pauvre fille me fait une grande peine. On m’a dit hier de deux très bonnes sources 1° que le général Magnan a déclaré au Président qu'il ne devait pas compter sur lui pour un coup d'État. 2° que le Président a fait passer de l’argent en Angleterre. Les propos hier soir n'étaient pas bons.
La duchesse de Marnier part après demain pour son service à Claremont, toute radieuse des excellentes nouvelles de sa province, le Doubs, je crois, pour la candidature Joinville. On cite des lettres de M. de Montalembert dans le même sens, (du fait, pas de la joie.) Thiers a dit hier matin à la Princesse Menchikoff chez qui il va tous les jours. “ Le comte de Chambord est impossible, jamais la France ne l’acceptera. La tentation Joinville n’est pas sûre, mais il faut la tenter, elle a beaucoup de chances, c'est la seule façon de retrouver la monarchie. Mais je conviens que si elle échoue le Prince est perdu & la Monarchie aussi. "
Dumon est revenu charmé de sa journée à Champlatreux. Hatzfeld trouve assez naturel que le Prince de Joinville laisse l'espoir qu'il prêtera serment à la République puisque c'est la seule façon de gagner les votes de la montagne dans la [proposition] Creton. Cette affaire-là se présente tous les jours comme plus graves. On croit beaucoup qu’elle passera dans le public. Le sobriquet de sourd donne de l’intérêt, un petit nom tendre. Je vous répète le bavardage. Et si on bavarde à présent qu’est-ce que ce sera dans quarante jours ?
Changarnier a dit à Marion que dans 15 jours il saurait quelles sont ses propres chances. A propos elle a eu avec lui les scènes les plus drôles. Elle s’est [montrée] soucieuse de ce que vous me dites. Mon pauvre fils attend encore. Il venait d'envoyer ma lettre à Orloff. Les apparences étaient mauvaises au dire du [gouverneur] de la Province le Prince Souvoroff. Vitet est venu me voir hier matin. Spirituel & très perplexe, qui ne l’est pas ? Adieu. Adieu.
Brougham a dîné hier chez Thiers avec Changarnier. Très Présidentielle, mais elle lui a promis de devenir très Changarnier, si lorsqu'il sera président, elle le voit accablé d’injustices & de calomnies, elle sera alors son Don Quichotte enragé. Ceci a fait prendre feu au général et pendant une heure il a harangué avec passion et éloquence. Elle vous amuserait bien, si elle vous racontait cela. Elle est fort drôle. Mad. Rothschild est venue me voir hier pour me la ramener fort engraissée & fort gaie. Gladstone est un fou. Je vous renverrai sa lettre & j’aurais [...]

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris Vendredi 27 mai 1853

On croit savoir ici qu'il y a dissidence dans le Cabinet Anglais et l’on est dans la plus grande espérance que l’affaire turque sera cause de la chute de Lord Aberdeen et de l’élévation de Palmerston. à la direction suprême du cabinet ce qui amènerait sur le champ l’alliance avec la France.
On dit aussi que tous les spectateurs ici, (& qui ne l’est pas ?) sont enragés, & veulent à tout prix que l’affaire s’arrange.
Je ne sais pas d’autre nouvelle aujourd’hui que ce que vous voyez dans le Moniteur et qui laisse quelqu'espoir.
Quel ennui d’avoir à vous écrire, comme j’en suis triste et misérable. J'ai vu beaucoup de monde intéressant hier, mais Je ne sais vraiment rien de plus que ce je vous ai dit là. Je crois que je verrai Cowley aujourd’hui. Hier il était malade, la tête enflée et emmailloté. Adieu. Adieu. Merci de [?] & encore adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond dimanche le 23 sept. 1849

Voici le résumé du langage tenu à Berlin par M. de Persigny et évidement celui qu'il est chargé de tenir partout. La monarchie est la seule forme de gouvernement qui convienne à la France. Il y a maintenant deux partis, républicain & monarchique. Le premier se compose des plus mauvais éléments de la société. Il est en minorité. L’autre est puissant et considérable, grande majorité. Ce parti : 3 sections. Légitimistes, Orléanistes & Napoléoniens Les légitimistes comptent un grand parti religieux qui est plus catholique que Henri quinquiste, et la portion rurale de la France, [?] dans la noblesse est plus napoléonienne que Bourbonne. grand abime sépare la branche ainée, de la nation. C'est la révolution de 89 et la restauration par les baïonnettes étrangères. La branche cadette compte très peu d'adhérents. On déteste Louis Philippe, il n’avait de force que dans la bourgeoisie & celle-ci a passé en grande partie dans le camp napoléonien grande magie dans ce nom, et le prince peut à l'ombre de ce nom faire plus que tout autre pour la restauration de lord & d'un bon gouvernement. Sa bonne conduite lui a déjà rallié la majorité de la nation. Si Henry V venait à manquer, les légitimistes se rallieraient certainement autour du Prince plutôt que du comte de Paris. L'armée lui est entièrement dévouée. La noblesse sait très bien qu’il n'y a que lui qui puisse rétablir l'hérédité de la pairie , en même temps que les classes inférieures ont confiance en lui pour conserver une forme libérale de gouvernement. Ce qui a rendu le grand Napoléon impopulaire c’était la conscription. M. de Persigny [?] expose the parallel between the Ceasar & the Napoléon. Louis Napoléon would receive his uncle line as Julien. Ceasar was ultimatly replaned by Augustus. Copié textuellement. Deux fois déjà le Prince pouvait être proclamé Empereur, il a trouvé qu’il ne perdait rien à attendre. L’état actuel ne peut cependant pas durer. Un appel au peuple. établissait l’Empire, cela se serait fait maintenant, sans la circulaire de M. Dufaure ! Il a tout gâté. M. de Persigny a vu le roi & le Ministre des Affaires étrangères. L’un et l’autre se sont bornés à faire l’éloge de la bonne conduite du Prince. La conduite de la Prusse vis-à-vis de la France se règlera sur celle des autres puissances. Le but de M. de Persigny était de s’assurer de la reconnaissance de l’Empire. Je vous ai redit bien exactement ce qui vient de source. Le roi de Hollande reprend son naturel, il est violent, absurde, une espèce d'enragé. Cela pourra finir mal. L’Empereur Nicolas ne veut pas entendre parler de rivalité entre ses généraux & les Autrichiens. Nous avons à nous plaindre, et quand on se plaint, l’Empereur fait taire. Le Maréchal lui a écrit, pas de réponse, & lorsque le Maréchal a voulu lui en parler à son arrivée à Varsovie, l’Empereur lui a fermé la bouche. C'est de la bien bonne conduite. L'Empereur d’Autriche a envoyé à Petersbourg l’archiduc Léopold son cousin, pour remercier solennelle ment de l’assistance. On ne dira pas ceci à Vienne. Ils sont là pro fondement humiliés de notre secours. Que c'est petit !
J'ai eu hier pendant deux heures M. Kondratsky secrétaire d’ambassade ici, arrivé en courrier de la veille. Ses récits sont très curieux sur l'empereur, sur l’excès de la joie, et puis l’excès de la douleur. Douleur énorme, qui inquiète. Le voyage l’aura réuni, mais je suis impatiente des premières lettres de Pétersbourg.

Lundi le 24 sept. Hier dimanche, petite pluie fine tout le jour j'ai été déjeuner chez La duchesse de Glocester, et puis rendre enfin visite à Mad. Van de Meyer. J’y trouve une petite personne bien tournée, comme dans les boutiques élégantes de Paris, visage tartare, large & rond, très Russe, jolie. On me l’a présentée, c'était Mad Drouyn de Lhuys. Son mari est à la chasse en province. Elle dit qu’on dit autour d’elle qu’il y aura du bruit à Paris. Vous ai-je dit que Mad. Lamoricière est retournée à Paris. Son mari est allé à Pétersbourg. Les voyageurs de Varsovie disent que sa tournure n’est pas grand chose. Un peu français à cheval, et pas distingué à pied. Mais on est content de lui chez nous. Kisselef sera nommé ministre très prochainement. Hier John Russell. Il y a toujours quelque petit cous pi quant et utile dans le dialogue. Hier, réflexions sur la facilité dans le travail. Très bon quand On a connu [?]Lord John l’esprit simple et droit ; dangereux quand on a trop de goût a faire des affaires. Lord Palmerston a beaucoup de facilité. Incontestablement c'est fâcheux entre un ministre qui ferait trop peu, & un qui ferait trop, le premier is the safest. - I think you are right. It reminds me of Lord Grey who always said. Let a thing alone ; in dropping it, it minds sooner by itself.- - Trés vrai, en travaillant toute chose on ne fait quelque chose, et quelques fois une très mauvaise affaire. Voilà notre train de conversation. avez-vous lu la lettre de l’Empereur au comte Nesselrode ? Et le passage où il parle du conquérant ambitieux d'il y a 36 ans ? Cela ne promet pas beaucoup de faveur pour la [?] Je vous ai dit je crois que l’Empereur a donné à la fois son portrait à Nesselrode & Orloff. Faveur très rare et l’altesse à (Sernicheff, très rare aussi. Avec lui en voilà 6 dans l'Empire. Que de choses diverses je vous écris, & que de choses encore j'aurais à vous dire. Lord Normanby a déjeuné l'autre jour avec le président qui lui a raconté M. de Falloux. Il con naissait la lettre mais on a commis la faute de ne point le prévenir de sa publication. On est curieux de voir comment se prononcera la majorité de l’Assemblée sur l’affaire de Rome. Si elle reste unie pour soutenir le gouvernement. It is all safe, & je puis retourner à Paris, si elle se fractionne, il y aura du bruit et il vaudra mieux attendre qu’il soit passé. Je vous envoie une toute fraîche lettre de Lord Melbourne, si sensible (anglais) que je crois vraiment qu'elle vous frappera vous et le duc de Broglie. Lisez-la avec attention. Moi elle me paraît concluante. Lisez bien.

Midi. La poste de France n'arrivera que plus tard pas de lettres. Adieu. Adieu. Adieu

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond dimanche le 19 août. 1849

J’ai dîné hier chez lord Beauvale avec les Palmerston. Nous faisons très bon ménage. Tout-à-fait de l’intimité sans beaucoup de sincérité, mais cela en a presque l'air.
Il n’avait pas de nouvelles hier seulement il croit savoir que le voyage de Schwarzenberg à Varsovie avait pour objet de se plaindre des lenteurs du Maréchal Paskowitz. Celui-ci se plaint à son tour que le gouvernement autrichien ne donne pas à manger à notre armée. Ce qu’il y a de vrai c’est que selon les lettres de Constantin on est mécontent chez nous du Maréchal, on dit que cela traîne, que nous laissons échapper l’ennemi quand tout ne va pas bien il y a toujours quelqu’un qu'on en amuse. En Transylvanie cela va mieux. [Bem] a été parfaite ment battu, c’est littéralement vrai, car outre que nous avons détruit un corps de 6000 hommes. Voici ce qui est arrivé. La calèche de [Bem] tombe en notre pouvoir on y trouve deux hommes. Le plus grand on le tue, l’autre était petit et si laid, qu'on se met à le fouetter, et lui, si agile qu'il parvient à s’évader au milieu des coups. C'était [Bem]. Constantin a lu avec Schwarzenberg les papiers trouvés dans cette calèche. C’était la correspondance de [Bem] avec Kossuth, très curieuse, & bonne à connaître. Constantin me dit que Lamoricière a été bien reçu mais il me dit cela froidement on l’a fait assister à un exercice de cavalerie, et il a dit qu’il n’avait jamais rêvé à une pareille merveille. Bon courtisan. Lord P. m’a dit que l’Autriche et la Russie seraient très empressées et très charmés de reconnaître l’Empire français. Il faut d'abord le faire.

4 heures
Longue visite de Lady Palmerston et curieuse conversation. Elle est venue pour me démontrer combien son mari avait raison en toutes choses, en dépit de ce que, public européen, public anglais, la presse toute entière, les collègues. même, la cour, étaient contre lui Curieux aveu. Alors sont venus les détails il est très autrichien & & très conservateur partout & & - C'est donc un homme bien calomnieux. - C’est cela. Horriblement calomnieux. Mais enfin après tout ce que je vous ai expliqué n’est-ce pas que j’ai fait quelque impression sur vous ? - Certainement vous m'avez convaincue que vous croyez très sincèrement à tout ce que vous me dites. - Mais ce que je vous dis est la vérité. - Je veux bien le croire, mais prenez de la peine pour détruire tout ce qu’on croit de contraire. Votre mari est puissant, puissant en actions, en paroles, en écriture. Et bien que tout ce qui vient de lui action, parole tout porte le cachet de ce que vous dites. On ne demande pas mieux que de voir lord Palmerston dans la bonne voie mais il faut le voir pour le croire, & aujourd’hui je vous déclare qu’on ne le croit pas & Voilà pour l'ensemble ; dans le détail ; - On accuse mon mari d'être personnel ? Personne n’est moins cela que lui. Il aime tout le monde, Il aimait beaucoup M. Guizot. (Comment voulez-vous ne pas rire ?) Enfin j’ai ri, j'ai écouté, je n’ai voulu ni disputer, ni discuter. Je me suis amusée, et je vous amuse. Au milieu de tous les bons principes, elle est convenue avec beaucoup de plaisir même que lord Palmerston était le roi des radicaux. Enfin c'était très drôle, et cela a duré une heure & demi.
Je rentre d'un luncheon chez la duchesse de Cambridge où j’ai trouvé Madame Rossy (?) La duchesse a rencontré avant hier la duchesse d’Orléans chez la reine douairière. Elle ne lui a pas plu du tout, Elle a surtout éte désappointée dans sa tournure. Elle ne lui trouve pas l’air grande dame, & elle lui a paru très laide. Elle a dit deux choses désobligeantes à sa fille la grande duchesse de Meklembourg. Manque de tout plutôt qu’intention, je suppose. Car alors ce serait grossier. La Reine douairière n’a pas longtemps à vivre.
Lundi 11 heures
Hier encore dîner chez Lord Beauvale avec les Palmerston point de nouvelle de la causerie rétrospective. Toujours énorme désir de voir en France une autre forme de gouvernement, et ferme conviction que cela doit arriver. J’ai vu hier matin lord John Russell un moment très occupé, il est parti ce matin pour rejoindre la reine en Ecosse. Mad de Caraman est [?] installée au Star & Garter. Elle veut absolument faire mon portrait, c’est bon s'il pleut, et une séance plus, pas possible. Van de Weyer est revenu hier de Bruxelles, il est mon voisin aussi à la porte du parc. Cela sera une ressource j'en ai beaucoup cet été. Encore interrompue par lady Palmerston. Mais c’est fini. Ils retournent à Londres aujourd’hui pour dîner chez C. Fox avec l’ambassadeur de France. Grande satisfaction de n'être mêlé en rien dans l’affaire de de Rome, en rien dans l’affaire de La Hongrie toutes les deux détestables et dont on ne peut pas comprendre le dénouement. Van de Weyer rapporte de Bruxelles la conviction que la France aura l’Empire Léopold, glorieux, heureux, fort aimé. On va lui offrir une couronne civique. Voici la poste. Votre lettre, une de Duchâtel, intéressante avec rien de nouveau cependant grande tranquillité. De la division et beaucoup dans le camps modéré. Thiers en grand discrédit. Molé un peu aussi. Il n'y a qu'un seul homme dont on attende quelque chose c'est Changarnier lui-même Duchâtel a été parfaitement traité à la douane. Du respect, de l’empressement Adieu, Adieu voici l'heure de fermer ma lettre et puis ma promenade. Vous avez là une grosse lettre. Adieu. Adieu. Je répondrai à la vôtre tantôt. God bless you dearest.

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Richmond le 10 août 1848 Jeudi
midi

Lord John était très préoccupé de l’Allemagne surtout. Qu’est-ce que veut dire cette immiscion dans les affaires d’Italie ? Cette guerre au Danemark ? Ces prétentions sur le Limbourg de quoi se mêle Francfort ? Mais ni nous, ni la France, ni la Russie, ni la Prusse probablement ne peuvent le permettre. Nous espérons dans Wessemberg qu'il ait un esprit sage. Quand au Pce de Linange sa nomination nous déplait fort. La Reine est très fâchée. Nous pouvons être dans le cas de faire très mauvais ménage avec son frère. Sur l’Italie, il m’a donné à entendre que la médiation de la France & de l'Angleterre aurait pour base l'Adige. Mais d’un côté il ne sait pas si l’Autriche voudra s’en contenter après les victoires de Radzki, de l’autre il ne me semblait pas très sûr de la France qui a proclamé l’indépendance de l’Italie toute entière. Ensuite, il me dit quoique Cavaignac & Bastide. parlent dans le meilleur sens, on n’est cependant jamais très sûr du même langage deux jours de suite. Enfin il n’était pas très stons en fait de confiance, mais certainement extrêmement anxious d’éviter la guerre. On va faire venir la Reine à Londres pour un conseil où on reconnaitra la république française, et elle recevra. Talleney. Il m’a dit, " et vous aussi vous avez dit que vous reconnaîtriez." Je n’en sais rien. Le Morning Chronicle annonce ce matin que Gustave de Beaumont est nommé ministre à Londres. Ce serait du Thiers n’est-ce pas ? Voici une lettre du duc de Noailles. Renvoyez la moi après l'avoir lue. Constantin m’écrit : " Si l'armée allemande entre dans le Lettland nous intervenons et la guerre en est la conséquence. Que fera la Prusse ? Se soumettra-t-elle à Francfort ? S’exposera-t-elle à voir ses provinces envahies par notre armée ? Ou se joindra-t-elle à nous qui seule pouvons la soutenir et la rendre à son honneur national. " Les réponses de Lord Lansdown à Stanley semblent équivalentes à l’aveu que la flotte anglaise s'opposera de force à l'envoi des troupes napolitaines, contre la seule ses réponses confirment aussi de tous points ce que Lady Holland vous avait dit. Quelle conduite ! Lisez le leading article du Times ce matin, admirable. Que de topics, sur lesquels nous aurions à parler à perte d’haleine. Quel dommage, quel dommage d’être si loin. Votre petit mot ce matin est bien court. J'espère mieux demain. J'ai déjeuné hier chez la duchesse de Gloucester, bonne femme. Adieu, adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond le 17 août 1848

Une charmante lettre. Celle d'hier si charmante et élevée que je veux l'envoyer demain à l’Impératrice, telle quelle, par courrier. C'est le jeune Stakelberg qui est à Paris, & voici l’histoire. Il a été l’automne dernier à Alger. Il a fait un rapport qui a fort intéressé chez nous à la suite de cela on l’a nommé agent militaire à Paris, avant la révolution, ainsi auprès de vous. Quinze jours après, arrive la République, il n’a pas été révoqué, & réside maintenant à Paris dans cette capacité. Voici maintenant l’histoire de Kisseleff. Il a reçu l’ordre formel de quitter lui et toute l’ambassade. Il ne devait plus rester à Paris que Speis le consul général & Tolstoy qu’on attachait pour la forme au Consulat. Cet ordre de départ était signé par l’Empereur lui même il portait la date du 10 Mars. A l’époque où il parvient à Kisseleff, les révolutions de Vienne & de Berlin avaient eu lieu, & changeaient visiblement notre situation, puisqu'au lieu de nous tenir serrés avec nos alliés Autriche & Prusse comme nous le voulions & le désirions, nous restions absolument seuls. Kisseleff a représenté que, selon lui, cela modifiait tellement notre situation, qu'il regardait comme un devoir d’attendre, d’autant plus qu’entre les préparatifs de départ, les soucis à donner aux Russes, le bon effet que pourrait avoir encore sa première pour empêcher une trop vive explosion pour la Pologne. Il devait s’écouler peut- être 18 ou 20 jours. Que de nouveaux ordres pourraient lui arriver en conséquences de ces observations et qu’il attendrait jusqu'à une certaine date. Coup pour coup, il reçoit approbations de sa conduite & l’ordre de rester comme par le passé, mais en se dépouillant de son titre. Tout ceci m’a été conté hier par Tolstoy c’est fort bien expliqué et nous avons eu raison, & Kisseleff avait eu du courage. Tolstoy dit comme tout le monde qu'on veut la monarchie qu’on déteste la république. Mais voici la drôlerie, il y a une république et pas de républicains et on veut une monarchie seulement il manque un roi. Où le prendre ? Personne ne le dit.
Combien de choses nous aurions à nous dire ! J'ai un chagrin aujourd’hui. La Revue rétrospective nomme l’affaire de Mad. Danicau Philidor. Le nom y est. Evidemment on tient davantage car voici un renvoi.

Cette note si elle est étrangère à l’affaire, Petit ne l’est pas comme on le verra par son post-scriptum au trafic de places, et prouve que sous ce rapport il y avait résistance de la part de M. Lacave Laplagne à laisser faire de M. Guizot.

Adieu. Adieu.
Le temps ne s’arrange pas. Il est atroce, on a bien de la peine à ne pas être malade. Quand vous vous promenez prenez garde à la marée, ne vous laissez pas surprendre pas elle. J'ai peur de tout quand vous n'êtes pas sous mes yeux. Hier Lord Palmerston a donné à dîner à M. Beaumont. Les convives les Granville, les Shelburn, les Holland, les Janlyce, Henry Granville very well, mais dans tout cela le maitre de la maison aura manqué car à la longueur de la séance hier il est impossible qu'il ait dîné. Je n’ai pas lu encore la discussion. On la dit très curieuse. Je ne sais pas d’une manière positive si Naples a fait faire une déclaration. Mais ce que je sais pour sûr c’est qu’on a conseillé au roi de tenter l’expédition pour mettre la flotte Anglaise au défi de s'y opposer. A propos de Kisseleff, j'oubliais de vous dire que Normanby l'a mis en contact avec Cavaignac, & qu'il va quelques fois chez lui. Toujours très bien reçu ; mais privatly.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond 8 août 1848, Mardi
Midi

Mon fils a longtemps causé hier avec Tallenay. Celui-ci lui a dit qu’il n'y avait un jusqu’ici que de la conversation avec Palmerston. Le désir de s’entendre, le désir comme d’éviter la guerre, & d’offrir la médiation commune que cependant les prétentions de l’Autriche étaient telles qu'il était fort douteux qu'on puisse les présenter, & que lui Tallenay ne croyait pas du tout à la réussite ni de l’entente ni de la médiation. Et il y croyait moins encore depuis l’article du National que je vous ai envoyé hier, & qu’il regarde comme officiel. Tallenay ayant appris que Marast devait le remplacer a fait comprendre à Paris qu'il ne le souffrirait pas. Que s'étant chargé de les représenter dans un moment où ils n’avaient rien d’honorable & de convenable à envoyer, ni il était en droit d’attendre des égards. Qu'il concevait que lorsque les relations seront établies régulièrement on tient à avoir ici une bonne politique considérable. Mais que c’était lui qui devait rester jusqu'à ce moment, c.a.d. lui faire reconnaître la république. Il a ajouté que d’après ses lettres de Paris, on se conformerait à cela. Montebello a vu des lettres de Paris. Flocon a dit que dans 6 mois personne ne voudrait plus de la République. Cause perdue. Vous voyez comme l’Assemblée nationale s'échauffe. Le rapport sur l’enquête a fait un grand effet. Beaucoup de lettres menaçantes anonymes. Enfin cela va devenir gros. La déclaration de Palmerston hier au Parlement est quelque chose. Cela prouve le travail commencé. Mais il me parait impossible qu’après de si éclatants succès l’Autriche se contente de ce qu’elle demandait lorsqu'elle était en mauvaise situation d’un autre côté comment la France pourrait-elle faire moins qu'assurer la Lombardie à l'union italienne. Ici l’opinion sera un peu combattu. Mais en toute justice peut-on imposer à l’Autriche des sacrifices quand c’est elle qui a été attaquée, chassée, & que c’est elle qui triomphe ! Quel dédale. Et puis Francfort ! Et puis Berlin. ¨Pas d’hommage le 6. Ainsi un commencement de résistance à la volonté de Francfort. Que de choses à nous dire, que de raisonnements à perte de vues ! Comme vous êtes loin ! J’attends votre lettre ; je n'ai rien à vous dire de nouveau que ce qui précède. Ma santé est comme vous l'avez laissée. Je crois que mon fils part demain. Adieu. Adieu. Voici le National. Curieuse.

3 heures. Voici votre lettre. Vous me paraissez être in a perplexing state cela m'inquiète aussi. Vous serez probablement très mal à Cromer sans aucune ressource. Pourquoi ne pas revenir ? La mer du nord est la moins bonne pour les bains de mer. S'il les faut absolument allez donc les chercher sur la côte méridionale. St Leonard, Hastings, Weymouth, si vous ne voulez pas de Brighton. Encore plus chaud. Mieux civilisés. Enfin je ne trouve pas qu’il y ait beaucoup de good sens dans tous vos projets. Pardonnez-moi de croire que si je m’en mêlais cela serait mieux. La presse a reparu hier, je l’ai reçu, pas lu encore. Les Débats se moquent très joliment d’un nouveau journal de l’Etat qu’on veut mettre au monde.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mardi 9 octobre

Vous aviez toute raison. J'adopte votre point de vue de la question. Occupation des principautés. L’affaire s’arrangera. Il serait trop absurde de penser que la guerre s'en suive. Les nouvelles de Vienne hier au soir étaient meilleures. Les Hongrois à Widdin, disent qu’ils aiment mieux être perdus en Autriche que de vive à Widdin, où l'on ne leur donne pas à manger. La porte leur a envoyé un prêtre. Bem et 3 généraux se sont fait musulmans avec 24 officiers. Kossuth & tout le reste a refusé ce moyen de salut terrestre. La porte à qui on conseille d'expulser les Polonais, dit qui non, par ce qui l’Empereur préfèrera qu’elle les retienne prisonniers. Cela va à votre opinion. Je vois lord John tous les jours, le soir. Le matin il le passe à Londres en conseil. Mes yeux me font souffrir. Et vous en souffrez. J'écris à Aberdeen, à Beauvale, assez à Pétersbourg, je les épuise. Mais ce moment est gros. Metternich & Wellington se sont dit Adieu avec beaucoup d'émotion. Mad. de Metternich. N’a pas voulu que je disse adieu à son mari. Ils sont allés à Londres avant hier & s'embarquent aujourd’hui. Les Flahaut ont quitté Richmond. Il me reste ici les précieuses les Delmas, & Lord John. J’ai le projet d'aller à Londres Samedi j'y passerai quelques jours. Depuis vendredi vos a refusé ce moyen de salut terrestre. La porte à qui on conseille d'expulser les Polonais, dit qui non, par ce qui l’Empereur préfèrera qu’elle les retienne prisonniers. Cela va à votre opinion. Je vois lord John tous les jours, le soir. Le matin il le passe à Londres en conseil. Mes yeux me font souffrir. Et vous en souffrez. J'écris à Aberdeen, à Beauvale, assez à Pétersbourg, je les épuise. Mais ce moment est gros. Metternich & Wellington se sont dit Adieu avec beaucoup d'émotion. Mad. de Metternich. N’a pas voulu que je disse adieu à son mari. Ils sont allés à Londres avant hier & s'embarquent aujourd’hui. Les Flahaut ont quitté Richmond. Il me reste ici les précieuses les Delmas, & Lord John. J’ai le projet d'aller à Londres Samedi j'y passerai quelques jours. Depuis vendredi vous m’adresserez vos lettres au Clarendon Hotel. Je vous dirai le reste quand je serai fixée. Que de choses perdues que nous nous serions dites ! Adieu. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond mardi 11 7bre

Je suis bien malheureuse des yeux inflammés. Je vous écris les yeux fermés. Je ne vous dirai que deux mots. Quelle misère. Et tant à dire ! Ah si vous étiez ici. J’ai vu lord John hier résigné mais pas content. Aberdeen a eu avec lui de longues conversations. Il me l'écrit & John me le dit. D'abord sur les questions générales. Nicolay est venu dîner avec moi hier. Scharzenberg n’a pas encore répondu à la dépêche de Palmerston. Cette dépêche était d'une longueur assommante. Une de ses plus pauvres productions. Fould est parti ce matin for good. Beauvale ne vient plus. C’est rompu. Le grand duc Michel allait un peu mieux. Mais on ne le sauvera pas. J’ai vu hier aussi mon fils, à Londres 450 morts du Choléra dans un jour. Comme je suis triste de mes yeux. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mardi le 14 août 1849

Je suis mieux aujourd’hui, mais hier je suis restée tout le jour sur mon lit souffrant beaucoup de crampes & d’agression. Le médecin ici m’a fort bien traitée. Tous mes voisins sont accourus, mon fils aussi de sorte que je n’ai pas été seule. Il ne valait pas la peine d'envoyer chercher Mussy qui était à Claremont. Enfin je le répète je suis mieux, je je crois même que je sortirai. Merci merci des deux lettres de Vendredi & Samedi. Je reviens au duc de Lenchtemberg honnête jeune homme, conversation sensée, pleine d’affection, mais reste étranger sous beaucoup d'autres rapports. Du good sense, et bonne vue des choses. Il a vu l’Empereur il y a quinze jours, qui lui a dit que la guerre en Hongrie serait terminée au plus tard en six semaines donc, dans un mois. Qu’aussitôt, cela fait il dirait le bonjour aux Autrichiens &t rentrerait chez lui avec armes & bagages, mais que son armée resterait en Pologne, prête à d’autres éventualités. La totalité de nos forces actuellement en Hongrie & Transylvanie est de 220 mille hommes, 130 mille de réserve en Pologne. En tout 350 m/ sur pied de guerre. On se préparait à recevoir très bien le général Lamoricière. L'empereur lui a assigné un palais à Varsovie (c'est énorme !) Nous allions nommer de suite ses Ministres à Paris. Brunnow affirme que c’est Kisseleff. Le prince a souci & a dit qu’on était mécontent de Kisseleff sans beaucoup de rapports, & qu’il ne croyait pas que ce serait lui, moi, je crois Brunnow mieux renseigné. Après le Prince j’ai eu une longue visite d'un des cavaliers de sa suite, homme d’esprit, français. Il me dit que l’empereur est devenu très serieux, très grave, qu’on a fort peur de lui. Ces propres enfants. Refus absolu de passeport pour l’étranger, pas une exception, personne, personne ; ne peut sortir de Russie. Cela a été provoqué par la conduite de certains Russes à Paris Branitzky entr'autres. Le Prince repart après demain pour Madère. Grande suite 12 ou 14 personnes, toutes grands noms, & des gens comme il faut !
Je n’ai pas de nouvelles à vous mander d’ici. Les Palmerston devaient y venir coucher hier et à côté de moi lorsque tout à coup ils sont partis pour Tunbridge où un autre petit garçon de Ashley est mourant. Lady Holland m'écrit une lettre assez curieuse. Il parait que Thiers a complètement désorganisé le parti conservateur. Brouillé ouvertement avec Montalembert & Barryer. Molé s’en montre fort triste, & dit : " je ne vois plus ce qui peut sauver le pays." Il y a quelque rapprochement entre l’Elysée & les Invalides. Le rappel d’Oudinot n’est pas du tout sûr. Le ministre le rappelle mais le président lui écrit de rester. Cela serait-il possible ? Oudinot a toujours été mal avec Tocqueville et ne lui faisait pas de rapport tandis qu'il écrirait tout confidentiellement mais par intermédiaire au Président. Je vous donne là lady Holland. Son mari est venu pour huit jours. J'espère le voir. Lady Alice est encore ici mais malade. Elle vient de louer Marble Hill. Le temps est à la tempête. Et je suis ici comme dans une cabine de vaisseau. On meurt beaucoup du Choléra à Londres. Adieu. Adieu.
Voici votre lettre d’accord avec lady Holland quant à la scission dans le parti modéré. Si on va de ce train, Ledru Rollin sera président dans 3 ans. Adieu. Adieu. Adieu. Tournez. Vous me faites bien plaisir en continuant votre langage & votre attitude réservée. Persistez, persistez, sans un moment de distraction. Adieu encore.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mardi 19 Septembre 1848
6 heures

J'ai été à Surbiton. Tout le monde en visite depuis hier chez la Duchesse de Glocester. On ne revient que demain ils y auront passé 3 jours. Voici une lettre que vous intéressera vous me la renverrez car je l’ai à peine lue. Elle m’arrive dans ce moment. Pas la moindre nouvelle à vous dire. Je n’ai vu que les Willoughby et lu que les journaux. Vous avez donc la plus pauvre lettre. Je crois que Cavaignac persistera à envoyer ses commissaires. Question de Cabinet au moment des élections et peut-être d’émeutes, la Chambre aura peur. Et il fera sa volonté ! Il me parait d’après la lettre de Nesselrode qu’il n’avait pas reçue celle que je vous ai remise dimanche et qui devait partir par une occasion. Je suis sûre que je lui mandais là votre retour. Demandez si elle a été portée à M. Reboul. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond mardi le 24 juillet 1849

Je découpe du Morning Chronicle le passage (très abrégé à ce qu'on m'a dit) du discours de Lord Aberdeen qui s’adresse au roi et à vous. C'est pour le cas où le Galignani ou les journaux français l’auraient ouïe. Voici donc ce mardi dernier jour où nous nous sommes vus. Comme chaque minute de cette journée reste & reste vive dans mon souvenir jusqu’à ce que votre présence l'efface ou l’adoucisse. Votre présence, quand est ce que le ciel me l’accordera !
J’ai été voir hier Mad. de Metternich enragée plus enragée que jamais contre Lord Palmerston ces deux séances de vendredi et Samedi ont produit un grand effet, mauvais, cela a fait éclater la sympathie de la chambre basse pour les Hongrois, et assuré un grand triomphe à lord Palmerston. Une longue approbation de sa politique ; il fera plus que jamais rien que sa volonté. Il n'a jamais été aussi glorifié et ainsi glorieux, à la suite de cette séance il y a des public meetings pour demander au Gouvernement la reconnaissance de la république de Hongrie. Votre ami Milner s'y distingue. J'ai dîné hier chez Beauvale avec Ellice, il affirme que tout le monde est Hongrois au jourd’hui. Le prince de Canino est arrivé. Lord Palmerston l'a reçu. Il recevra certainement Marrini aussi. Demain & Samedi, lord Palmerston a de grandes soirées. On me dit cependant que Londres est à peu près vide. La peur [des] minorités vendredi à la chambre haute était si grande parmi les Ministres que Lord John lui-même a écrit des lettres de menaces à de vieux Pairs Tories pour les engager à retirer leurs proxies. Il annonce sa démission, une révolution, une république. C’est littéralement vrai ce que je vous dis. Lord Buxley, jadis Vansitart, a reçu une lettre de cette nature qui l'a tant épouvanté qu'il a de suite redemandé à Lord Wynfort le proxy qu'il lui avait confié. Je vous entretiens des petits événements anglais, biens petits en comparaison de tout ce qui se passe hors d'Angleterre.
Dieu veuille qu’il ne se passe rien en France. Il me faut la France tranquille, vous tranquille. Lord Normanby écrit qu'à [?] lorsque le Président y est venu on a crié à bas la république, vive l’Empereur et pas de bêtises. " Je trouve cela charmant, je ne demande pas mieux.

Midi. Voici votre lettre de Dimanche. La correspondance va bien. Gardons ce bien précieux le seul qui nous reste. J'envoie ma lettre à la poste de bonne heure, c'est plus sûr. J’aime ce qui est sûr. Adieu. Adieu. Je suis bien aise que vos amis viennent vous voir n'importe d'où. Je voudrais vous savoir entouré. Je ne veux pas que vous vous promeniez seul. J'ai si peur. Adieu. Adieu dearest. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond le 25 septembre 1849

Lord John a été frappé de la lettre de l'Empereur au comte Nesselrode. C’est au Manifeste. Il y a de l’intention dans chaque ligne pas mal d'orgueil. L'avez-vous lu avec attention ? le 26. jeudi Le feuilleton des Débats de Samedi est très remarquable. Des choses très frappantes, seulement la dernière scène n’est pas exacte. Le roi ne gouvernait plus alors ; C'était la princesse de Montpensier Emile Girardin & &. Du reste vraiment c'est un article très curieux & très bien fait. Le roi & la Reine se promenaient hier à pied dans le parc ils viennent en [raiment], mais toujours à l’heure où je suis rentrée, de sorte que je ne les rencontre pas. J’ai vu hier matin Van de Weyer & Flahaut. Celui-ci arrive d'Ecosse. Il restera probablement une quinzaine de jours à Richmond. Sombre sur Paris, sur la France. Renvoyez-moi je vous prie la dernière lettre de Beauvale celle sur vos affaires. Elle m’a tant plus que je veux la garder, tant de good sens. Les Metternich sont décidés pour Bruxelles. Je ne sais si cela plait tout-à-fait au roi Léopold. Je suis bien contrarié de ne plus recevoir vos lettres que tard, je ne puis pas y répondre. J’appends que mon fidèle correspondant que lord Palmerston est bien aigre contre lord Grey & contre lord John à propos de l’affaire de Malte. J’apprends aussi que lord Palmerston est en grande espérance d'une révolution en Grèce, et qu'il s’en mêle. Voilà tous mes commérages pour aujourd’hui. Adieu. Adieu Pauvre lettre Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mercredi 6 septembre
1 heure

Savez-vous que je trouve le discours de la Reine très bien. & la partie extérieure d'une mesure et convenance parfaites ? Ne le pensez-vous pas aussi ? J'aime assez les Débats ce matin. Langage toujours dédaigneux pour les travaux de l'Assemblée, et puis la fin « puisque le suffrage universel envoie des gens qui ne savent pas lire, à quoi bon la liberté de la presse ? »
Positivement la question italienne dort, on veut du moins le faire croire. Je crois toujours que c'est un calcul pour ne pas effrayer la bourse, et qu’en attendant on prépare, & on fera une petite démonstration à la façon d’Ancône, pas autre chose. Je n'ai rien absolument à vous dire.
Montebello part demain, c’est certainement un chagrin pour moi. J’ai fait la lettre pour Bulwer, bonne, je crois. Ne pensez-vous pas qu'on remarquera, avec un peu de dépit à Paris que la France n’est pas appelée république dans le discours de la Reine ? Moi, je trouve cela très bien. Adieu, car je n’ai pas autre chose à vous adresser adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mercredi le 9 août 1848
onze heures

En relisant votre petit mot de Lundi, je le trouve bien triste. Cela ne vous est pas habituel. L’accident de Pauline vous a inquiété, la maladie de votre hôte, le dérangement de votre plan d'Ecosse, tout cela ensemble vous vexe. Vous concevez surement à sentir aussi le vide, l'absence de conversation, de nouvelles, dans un moment si immense comme intérêt, importance de tous les côtés. Croyez-moi tout votre plan d’été a été mauvais. Laissez là la mer du nord. Venez de ces côtés. Etablissez vos enfants avec Melle Chabaud dans un des petits homes de mer de la côte méridionale. Quand vous ne serez pas auprès d'eux, venez auprès de moi, ce régime vous ira beaucoup mieux. Et [?] pour mer, celle au midi n’est surement pas la plus mauvaise. Pourquoi ne m'avez-vous pas écouté plutôt ! Je ne veux plus faire de reproches, mais je voudrais que vous fissiez attention à mon conseil à présent.
J’attends votre lettre aujourd'hui avec anxiété. Les affaires grossissent beaucoup à Paris, en Italie. Que va-t-il arriver, et tout de suite ? Nous pourrions parler sur cela tout le jour, que je regrette entre autre nos trios avec Aberdeen. Ce n'est pas le moment vraiment de s'éparpiller à présent.
Midi. Voici votre lettre. Ainsi Yarmouth à présent. Pardonnez moi, mais tous ces changements n’ont pas de sens. Et voilà que vous n'arriverez au but de votre voyage qu'au bout de 15 jours. Je ne me trouve guère avancée. Voulez-vous bien me dire maintenant quel jour vous reviendrez à Londres ? Je suis de bien mauvaise humeur. Je ne vois pas du tout de quoi j'aurais à me réjouir comme vous me le diriez dans votre lettre de Samedi. Je n’ai aucune nouvelle à vous mander. Vous lisez les journaux maintenant. On dit que Yarmouth est la ville la plus sale de l'Angleterre Adieu. Adieu. Lord John Russell sort de chez moi. L'Angleterre va reconnaître la République. Il espère qu'on s'entendra sur l’Italie. La frontière de l'Adige absolument, c’est ce que veut l'Angleterre, pas moins.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Mercredi 12 sept. 1849

Les yeux vont un peu mieux. Mais j’écrirai peu. Voici ce que mande Lord Ponsonby : " nobody here cares one reach what all the goodies in England ta hef say as advice to be listen to, but great disgust is created by it, and entre nous. [?] there may be source danger of desagreable results." Ceci est tout frais. Lord John a épluché devant moi la lettre du Président à M. Ney. Il voulait trouver les quatre conditions exigées, très élastiques et peu compromettantes. Cela me semble difficile. Au reste il critique la lettre beaucoup dans la forme, dans le fond & ne comprend pas comment on se tirera de toute cette affaire. Je n’ai pas vu M. de Metternich, je ne sors pas. Morny m’avait dit sur la composition de l’Assemblée à peu près ceci. De 150 à 170 rouges. 150 légitimistes, 50 légitimistes exagérés, une quarantaine de flottant & ce bagage passant aisément aux rouges. Les vrais conservateurs en minorité. Grande majorité s'il s'agit d’ordre. Fractionnant immédiat s'il s’agit de forme de gouvernement ou de tout ce qui y mène. Impossibilité de rien entreprendre par le moyen de l’Assemblée actuelle. Morny reviendra dans huit jours, je chercherai à mieux fixer les chiffres.
Aberdeen a eu de longues conversation avec Lord John à Balmoral. Il me dit. (J'abrège) "We talked freely of every thing. Without naming his colleague we certainly talked of various matters in astrain to which he would not have [?] at the same time I think Lord John is radically disposed, but corrects his radicalism by his policy and prudence. his colleague is not naturally dispond to radicalism but being without political principles freely of every thing. Without naming his colleague we certainly talked of various matters in astrain to which he would not have [?] at the same time I think Lord John is radically disposed, but corrects his radicalism by his policy and prudence. his colleague is not naturally dispond to radicalism but being without political principles principles yields at once to the passion or interest of the moment. The proportion as the world is rettering to his senres, his failures become more manifest." Voilà beaucoup pour mes yeux. Je finis Quel dommage que je ne puisse pas tout conter. P. E. la dépêche de Lord. Palmerston à John. Mais c'est si long. Voici : Rough Sketch " il y a le probable & le possible (comme cela ressemble à Metternich). Probable vous battrez les Hongrois. Possible vous serez battus par eux. Alors quoi ? Ne risquez ni le probable ni le possible. Arrangez vous tout de suite. Donnez indépendance && " Adieu. Adieu, si vous me donnez des yeux, je vous amuserais davantage. Adieu Adieu.
J’ajoute encore. [?] ne veut pas se rendre. Les autres l’attaqueront avec toutes leurs forces. La Prusse n’est pas assez forte pour faire sa volonté en Allemagne. L'Autriche qui ne veut pas de ce que veut la Prusse n'opposera que son vote et son inertie. Mais si la Prusse employait la force alors Autriche, Russie & &France tout serait là pour s'opposer. Voilà ce que mande Lord Ponsonby.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond le 19 septembre 1849

Ah si j’avais des yeux ou si j’avais Marion. Il n’y a pas moyen. Je vous envoie la lettre de Beauvale, elle vous donnera une idée plus exacte que ce je vous ai dit ce matin de l’affaire de Malte. Quant à la lettre de Berlin, elle traite longuement la question allemande. On cherche à s’entendre avec l'Autriche. Il est probable qu'il y aura deux Allemagnes nord & midi. J'en ai causé ce matin avec Metternich. Il dit que ce serait la guerre. entre elles. & que le feu au centre de l’Europe c’est le feu partout. Selon lui Il n’y a de possible & de sensé que 1815. Il ne sort pas de là. M. de Persigny a fait bien des efforts à Berlin pour faire comprendre la nécessité de donner de la force au Président démontrant qu’il n’y avait possible que Louis B. en France. Il faut donc le soutenir. Le correspondant de Berlin ajoute : la question de dynastie en France embrouillera tout l’avenir de l'Europe. Moi, je ne vois pas cela. C'est une question de ménage. jeudi le 20 septembre. Longue conversation hier avec lord John. Certainement il soutiendra le gouverneur de Malte, & approuve complétement son refus de recevoir les réfugiés, Nous allons voir qui l’emportera de lui ou de Palmerston sur ce point. Le gouverneur [?] est en Angleterre dans ce moment un protégé de lord Minto. Quant au Cap, quoique les habitants ne veulent pas recevoir les Convites, le gouvernement cédera, et fera revenir ceux qui sont déjà partis. Longue discussion commençant par un : " Quel beau rôle vous avez fait à mon empereur ! Vous pouviez le partager avec lui, vous n'aviez qu’à rester tranquille, & & &. Vous voyez tout ce que j’ai dit à la suite. J’ai été très belle vous auriez eu plaisir à m’entendre. Les busy body poussant les révolutions, & puis abandonnant. S’aliénant les gouvernement et les peuples. battus partout. Nous tranquilles d’abord, et puis le reste, finissant par dire. Il y a plus d’honneur aujourd’hui à être Russe qu’Anglais. " Il a voulu expliquer les motifs les nécessités d’intervention partout. Les répliques n'ont pas été difficiles. De tout cela il résulte qu’il est bien bon enfant, qu’on peut tout lui dire, mais je doute qu'il entend souvent tant de vérités. C’est très sain pour un Ministre et puis réflexions générales. Par quoi finira tout ceci. Le bouleversement est si profond qu’il ne peut rien ressortir de raisonnable, de tempéré. Ce sera l'un on l’autre extrême partout. absolutisme, ou démocratie. tous avons trouvé cela spontané ment & simultanément et nous nous sommes quittés sur cette belle perspective. Vous comprenez que j'aime mieux la première & lui aussi. En parlant des nouvelles inventions, il dit : là où il n'y a qu’une chambre, il n'y a plu de gouvernement, il ne vaut pas la peine d'en avoir. Adieu.
Il fait froid, cela ne me plait pas. Je reçois dans ce moment une lettre de Bro[ ?]. Palmerston y est. " Il a grande. envie de l'empire. Il y croit, il déteste les 2 branches de Bourbon, et ne croit pas du tout que l’état actuel puisse durer. Christine & Narvaez cherchent à faire abdiquer la Reine en faveur de sa sœur, et profitant pour cela de l'absence d'un représentant d'Angleterre ! " Est-ce que cela ne voudrait pas dire que Palmerston a envie d’en envoyer. un ? Voilà tout & je finis. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond le 25 Juillet 1849
5 heures

Je vous écris au milieu d'un violent orage. J’ai peur. Je me réfugie auprès de vous. J’ai là la visite du Président à Ham. Je demeure très frappée & charmée de son discours au dîner. Ce que vous m’avez rapporté de l’opinion de vos amis sur son compte est excellent aussi. Curieuse apparition que cet homme. Juste ce qu'il faut pour la situation. Je suis d’avis qu'il faut la rendre meilleure encore, et que personne n'y convient mieux que lui.
J’ai lu à Lord Aberdeen ce que vous m'en dites. Cela l'a beaucoup intéressé. Ces visites dans les provinces sont bonnes, utiles, je suis pressée du dénouement. Je ne vous ai pas parlé du discours de M. de Montalembert. Décidément je rechercherai sa connaissance. Beau talent, nature honnête, sincère. C’est très frappant l’un après l'autre on vient se confesser. Tout le monde a eu tort. Je me propose ce texte pour ma première conversation avec le prince Metternich, je suis sûre qu'il me dira : " Oui tout le monde, hors moi. " Je n'ai encore vu personne aujourd’hui, et je ne me suis pas trop ennuyée. Cela m’étonne. Je ne serais pas fâchée que la prorogation de l’Assemblée ne fut pas longue, car Paris vide ne me conviendrait pas du tout.

Jeudi le 26. Onze heures
L'orage a continué presque tout le jour hier, j’ai cependant trouvé moyen de me promener dans les intervalles de pluie mais personne n'est venu de Londres. Lord Beauvale est décidément un grande ressource. J’y vais le soir, et puis les Delmare, gens très faciles à vivre et en grande passion pour moi. On écrit de Paris à Lord Palmerston que tout le monde s’attend à un événement c. a. d. un avènement. Dans les derniers jours le nom de duc d'Aumale est devenu très populaire par suite de ce qu’a dit M. Charras à l'Assemblée. Mais cela n’a pas le sens commun. S’il y a un changement, ce ne peut être que l’Empire. Comment finira l’affaire entre l'Autriche & le Piémont. Cela devient vif. Le choléra a beaucoup augmenté à Londres. 732 morts dans la dernière semaine. C’est beaucoup.
Vous ne sauriez croire tout ce que j’ai d’invention pour me faire passer le temps plus vite. Comme je suis polie pour les ennuyeux, comme Ils m'ennuient moins, depuis que je n’ai plus qu’eux. La veille duchesse me parait avoir un peu d'esprit. Je lui laisse son dire sur les Hongrois en toute liberté, cela l'enchante. A propos, Palkevitch a commencé par un petit échec. Il parait que les Hongrois sont parvenus à couper la ligue. Cependant les récits sont bien confus & contradictoires. Mais tout cela est long, beaucoup plus long que nous ne comptions.

Midi.
Certainement c’est le Dimanche qui a fait votre désappointement. Mardi. Accoutumez-vous à la tristesse du Mardi comme moi à celle du Dimanche. C'est à dire résignez vous. C'est bien triste un jour sur 7. Mauvaise législation Anglaise. Vous voyez que je viens de recevoir votre lettre. Elle me parle de M. de Montalembert. Je vous en ai parlé. J’étais sûr que nous serions d’accord. Je m'en vais lire le discours de Thiers. Adieu. Adieu. Vos lettres font toute ma joie. Adieu mille fois.

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Richmond Mercredi 26 septembre 1849

Vous voilà donc écrivant toujours vous fatigant la tête. Pourquoi ? [Vain est] bien la peine de parler raison à des gens qui ne savent pas la comprendre. Dire des vérités mais de quoi cela sert il ? Si non à augmenter le paquet assez gros d’ennemi que vous avez déjà. Moi je vous voudrais tranquille, reprenant tranquillement une douce vie à Paris. Ceci ne vous la rendra pas plus facile qui sait si cela ne vous empêchera pas d'y venir ? Vous aurez fait de la belle. besogne. Dormez. Mangez, pas trop, menez une vie paisible, ne vous tracassez pas. Laissez aller le monde comme il lui plait d’aller. Vous ne le reformerez pas. Il y aurait trop de vanité à croire que vous le pouvez. Les Français sont incorrigibles, vous ne les corrigerez pas. Mais je veux que vous vous portiez bien, et que nous causions tranquillement des misères de ce monde, de ses drôleries aussi, car il est drôle. N'êtes-vous pas un peu philosophe aussi ? On le porte mieux à ce métier. ces deux pages sont le produit de votre lettre. Je parlerai [?] cela bien mieux que je ne puis vous écrire. I do my best.
Jeudi 27 septembre Voici une lettre. Assez curieuse, vous me la renverrez. Flahaut est venu jaser hier. Trois heures de séance, très bonne conversation. Beaucoup de good sense. Deux idées favorites absolues : l’Empire, et l'abolition de la liberté de la presse. Sans elle on ne sortira jamais des Révolutions. De quoi servent des lois restrictives ? On publie journellement des horreurs. Si cela continue, le monde croulera, la société s’entend pour cela je le crois. Flahaut a parlé à lord John un langage bien France sur lord Palmerston. Il est impossible de dire plus & plus fort. Il écoute, il sourit el va à Woburne pour 10 jours. Je le reverrai encore à son retour. Evidement les Metternich tout bien de quitter l'Angleterre. Elle ne se possède plus. Son langage est si violent qu'elle pourrait bien s’attirer des désagréments ici. On peut bien haïr & nuire mais avec plus de convenance M. Guenau de Mussy vient me voir quelques fois. Hélas il est prié par le roi. Il reste attaché à sa maison. 20 m. Francs par an, & les pratiques qu’il pourra se procurer à Londres. Je regrette fort qu’il ne vienne pas à Paris. J'aurais en lui pleine confiance. Imagines que lord John Russell & M. Drouyn de Lhuys ne se connaissaient pas. Ils se sont vus une fois à la chambre des communes. Voilà tout. John a porté sa carte, l’Ambassadeur l'a rendue, & c’est fini. C’est incroyable. Certainement le tort est à l’Ambassadeur. C'est à lui à rechercher le premier ministre. Adieu, car je n’espère pas votre lettre. Je vais me plaindre à lord Clauricarde. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Richmond Samedi le 18 août 1849

J’aime bien la lettre de M. Cousin. C'est un brave homme Piscatory est un peu noir. Savez-vous que vos affaires me déplaisent. Metternich me disait hier qu'il a la pleine conviction d’une nouvelle catastrophe à Paris. Ah mon Dieu, cela serait-il possible ! Car, si cela était possible, tout serait fini pour les honnêtes gens. Mais cependant les éléments de résistance sont là. Je ne sais que penser mais je suis inquiète. Dans un mois je songe aller à Paris, mais j'y veux de la sécurité. Qui me répond que j’en aurai ?
J’ai vu hier matin Lady Palmerston, Sabine, Beauvale, les Metternich. Sabine est amusante. Elle a vu tout le monde à Paris, dîner chez le président et passé beaucoup de soirées chez lui. Elle en parle très bien. Elle gémit de la désunion dans le parti modéré, elle aime les vieux légitimistes, elle parle bien des jeunes. Elle vante Changarnier, sans savoir à qui il appartient. C’est égal tout le monde l’adore. Elle croit Molé tout-à-fait au Président. Beauvale va hélas quitter Richmond bientôt, ce sera pour moi une grande perte. Je le vois tous les jours et ordinaire ment deux fois. Je crois que lui me regrettera aussi. Metternich est fâché de l’exécution du prêtre à Bologne, Il appelle cela du mauvais zèle. Il se plaint que son gouvernement au lieu d’adoucir, envenime la querelle avec la Prusse. J’ai dîné hier chez lord John Russell. Il y avait lord Lansdown racontant vraiment des merveilles de cette Irlande. Je remarque que ce qui fait le plus de plaisir n’est pas tant l’enthousiasme irlandais pour la Reine, que la découverte, que la reine est susceptible d’en ressentir de son côté. Elle passe pour froide & fière. Elle a oublié tout cela en Irlande. Il y avait à ce dîner trois Anglais inconnus à moi de nom & de visage. L'un grand ami de Mackaulay & bavard comme lui, je serais curieuse de savoir lequel des deux se tait quand ils sont ensemble. Je n’ai rien à vous raconter de mon dîner, la conversation a toujours été générale. Je me suis un peu ennuyée, car on n’a parlé que royaumes unis. Attendu que j’ai dîné tard je me sens un peu incommodée aujourd’hui. Misérable santé. Prenez-vous encore les eaux de Vichy.
L’autre jour en parlant du sentiment public Hongrois ici, je dis " malheureusement, le Ministre des affaires étrangères donne l’exemple." à quoi Brunnow dit que je me trompe et qu'il sait que malgré de mauvaises apparences le fond de la pensée est bon. Je reporte " êtes-vous donc le bon dieu pour lire au fond des cœurs ? " Le duc de Lenchtemberg écoutait. en riant. Et bien tout ceci a été redit à lord Palmerston par Brünnow en ajoutant que j’avais voulu donner au prince une idée défavorable du ministre. Je me dispense des commentaires. Adieu. Adieu, mille fois adieu.

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Richmond Samedi le 22 Septembre 1849

Je suis restée 3/4 d'heures à Claremont la reine en merveilleuse santé. Le roi très bien, mais à mon avis très changé d'humeur. Je ne l'avais pas vu depuis plus d’un an. Je l’ai trouvé triste, résigné peut-être. Pensant mal de la France, & de la situation de tous les autres états. Il a repris l'examen des fautes, tout le monde en a convenu, (pas lui je suppose.) Le seul homme bien renseigné à Paris était Delassort, mais on ne l'écoutait pas. Duchatel est paresseux et léger. Il ne vous a pas [ ?] pendant toute ma visite pas une seule fois, ni la reine non plus. Il a dit ; il n’y a pas d’homme en France. Voilà Le duc de Broglie et Molé, ils sont de l’assemblée, et bien que font-ils ? Et puisqu'ils ne font rien, pourquoi ont ils été se mettre dans cette mauvaise compagnie. Pas la moindre allusion aux légitimistes. J'avoue que je n’ai pas pensé à eux sans cela j'aurais pu amener là dessus la conversation. Je me reproche cet oubli. Mais voici ce que Lord John m’a dit hier soir : " Savez-vous que le roi a fait prescrire à tous ses adhérents de soutenir les légitimistes. " Je ne sais pas autre chose. Le roi m’a dit, et bien l'Empereur fait donc au Président les notifications d'usage, il lui a écrit. Oui, sire comme au Président des Etats-Unis. A moi, il ne m'a jamais fait l'honneur de m'écrire. Je n’ai pas répondre. Evidemment la blessure est profonde. Il y a eu une petite discussion sur la résidence d’hiver. La reine se prononce vivement contre l'Angleterre. Le roi très décidé à y rester. Je vous ai dit je crois qu’ici cela ennuie, la cour. J’ai lu à Lord John le petit passage où vous me parlez du duc de Broglie, de son bon souvenir du secours qu'il a trouvé quelques fois en John. Cela lui a fait un très visible plaisir. Vous Vous rappelez que ce secours, était un recours contre Lord Palmerston. Il a ri et assenti. Nous avons reparlé de Malte, du gouverneur qu’il protège beaucoup. Je lui ai dit : " Mais on dit que Lord Palmerston le blâme beaucoup et voudrait qu’on le destituât. Qu’est-ce que cela fait ? Lord Grey & moi, nous l’approuvons cela suffit. Il m’a dit plus au long ce qu’on m’avait écrit à propos de Thiers. à l’époque où Morny me dirait qu’il entrerait c’était vrai. " Il avait fait savoir au président qu'il accepterait l’intérieur même avec un président du Conseil. Tout à coup, il a changé, et il a dit. Je veux qu’on puisse inscrire sur ma tombe. Thiers n’a jamais servi la république. Est-ce que la chance d'une Monarchie n'importe quelle, lui parait plus prochaine ?

1 heure Merci de votre bonne lettre. Certainement nous faisons notre possible pour suppléer à la parole qui serait si douce, si abondante que faire ! Beauvale est bien content de mes conversations avec Lord John. Il croit que personne ne lui dit ce que je lui dis, & que cela fait du bien. Il ajoute que si Palmerston savait mes jaseries quotidiennes cela l’inquiéterait fort. Il est toujours chez Beauvale. Entre celui-ci et moi correspondance de tous les jours. Style très abrégé Adieu. Adieu. Adieu. Le gouvernement français va diminuer l’arrière de 60 000 hommes.

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Richmond Samedi le 23 Septembre 1848
Onze heures

J’ai vu Koller hier soir. L’Autriche est bien décidé à garder Lombardie, Venise, enfin tout ce qui est à elle. On a accepté la médiation du bout des lèvres. On traitera peut-être du sort de Modène et Parme. On parlera d’institutions à donner aux Lombards voilà à quoi se bornera le congrès. Autriche, France Angleterre, Piémont. Palmerston reçoit tout les envoyés d’Istrie, de Venise de partout, il les écoute, il discute. Et puis il dit à Koller, qu'il pourrait voter à la main, prôner qu'on a le droit d’intervenir entre l’Autriche & tout ce monde-là. Blaguerie, car il ne songe pas à s’armer de votes pas plus que de canon.
Koller craint que nous verrons encore du pire en Allemagne. Francfort n’est pas fini. Quelle horreur que la mort de ce pauvre Lichnowsky ! à Berlin certainement il y aura une crise violente tout à l’heure. Et Paris, comment échapper à du très gros aussi. Je trouve que partout on est trop porté à dire et à laisser la révolution s'user. Si la troupe y passe, tout est perdu, et en temporisant ou s'expose à cette chance. à Berlin, à Paris le soldat commence à être ébranlé. Comment perdre du temps alors ? Voilà mes réflexions sagaces. Peel est délivré du plus ardent de ses ennemis. Adieu. Adieu, à demain, mais là, la causerie va mal. C’est égal, il faut y venir. Adieu.

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Richmond Vendredi 5 octobre 1849

Hier point de lettre. D’où vient ? cela m'inquiète. Le Cabinet de Mardi a décidé à l’unanimité de soutenir la Turquie. La France marche avec l'Angleterre. On dresse en ce moment une pièce, en forme de remontrance, peut être de menace, à la Russie et à l’Autriche. Tout le monde est d’accord. On nous exaltait il y a huit jours. Aujourd’hui nous sommes honnis. Lord John arrive ici ce soir. Voici ce qu'il m'écrit de Woburne. " Your emperor after having showing so much prudence, so much power & so much modération has mode an mormons fault in threatening the Turk if he did not violate the law of hospitality so sacred among Mahometans. The Turkish anger is [?] aud we can do no otherwise than support them in [?] a cause." J’ai diné hier avec Lord Carlisle chez Miss Berry. Il m’a raconté le conseil. De l’inquiétude de la façon dont Palmerston va mener cette affaire. Parlant mal de lui. Espérant cependant qui l’affaire s’arrangera. Brunnow a beaucoup demandé que la démarche auprès de nous ne soit pas collective, France & Angleterre probablement chacun écrira de son coté mais dans le même sens, si non le même ton. Je parie que le Français vaudra mieux. L'affaire en est donc là. Fuat Effendi parti pour Pétersbourg pour fléchir l’Empereur. L'Angleterre & la France écrivant, intervenant et décidée à soutenir la Turquie, ainsi la guerre générale si l’Empereur persiste. Dans 20 jours la décision. Brunnow est venu me voir hier. A wonder ! Essayant de traiter ni de bagatelle au fond inquiet, blâmant notre conduite à Constantinople. Plus en soupçons contre la France que contre l'Angleterre, persiflant cependant lord Palmerston, n’ayant pas. l'air de croire que l'Angleterre est décidé pour la Turquie. A propos de la France disant, elle a 30 m hommes en Italie, elle en a 60 m en Algérie elle peut les faire marcher contre nous. Quelle bêtise, peut-elle dégarnir l’Afrique ? Je vous redis tout. Vous voyez que je vis in hot water. Jamais il n'y eut un moment plus critique. Drôle de situation. Evidemment, il y a, il y aura plus de laisser-aller vis-à-vis de moi que de Brunnow. et mes relations avec lui ne sont pas telles que je puisse lui rendre des services. Aujourd’hui nouveau conseil de cabinet. Demain tout le Cabinet à Osborne chez la Reine, enfin c’est une grosse crise. Si vous étiez là que de choses à nous dire. Ecrivez je vous prie au Directeur de la douane pour qu'on me traite bien à Boulogne ou à Calais ; Je suis à la veille de me décider & ce n'est pas bien éloigné, ce pourrait être au milieu de la semaine prochaine. Le temps est mauvais, orageux, j’attends encore.

1 heure. Pas de lettres encore aujourd’hui il est vrai que les journaux aussi ne sont pas venus mais hier je les ai eus. Enfin Voilà deux jours, c’est affreux. Adieu, adieu. Je ne puis pas croire à la guerre. Ce serait trop épouvantable. Adieu

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Richmond vendredi le 14 septembre 1849

J'ai vu hier lord John. Mauvaise nouvelle de Paris, Le général Changarnier a dit à lord Normanby qu'on se battrait encore vers la fin d’octobre. Que faire que devenir ? Molé est un critique de la lettre du Président. Il approuve le fond, mais pour tout le reste il dit que c'est le bon moyen de ne pas arriver à son but, et que l’affaire est complètement manquée par la France. Certitude que Molé prendra les affaires ; lui, Thiers, Falloux. Falloux l'homme important de France, car il dispose de toute la portion religieuse du pays. Conviction intime qu’on passera à l’Empire. J'ai eu à dîner chez moi Hier lady Allice, Mad. de Caraman, Lord Somerton & [?] Byug. Le soir comme de coutume chez Delmas de la musique. Cet aveugle m'a remis entrain. C’est son seul plaisir, et à force de jouer, je reprends ma mémoire et mes doigts. Le temps est devenu froid, je m’y résignerai avec plaisir si cela nous débarrasserait du choléra. Lady Holland est décidément arrivée, mais on dit que le mari n'a jamais été malade. Elle ne m’a pas donné signe de vie encore.

1 heure. Quelle intéressante lettre que la vôtre du 11 & 12. Paris se complique, & certainement il y aura des bourrasques, peut être des orages. Cela m'importe peu tant qu’il n’y a pas d'orage dans la rue. Je ne connais pas de bon contré parapluie contre cela Vous me paraissez si bien au courant que vous saurez me dire quelque chose ainsi sur les projets des rouges. Adieu. Adieu Les yeux vont mieux, comme vous voyez, mais il faut que je les ménage beaucoup. Adieu.

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Richmond vendredi le 17 août 1849

Lord et Lady Palmerston sont venus ici hier pour quelques jours je crois. Ils sont au Star comme moi et mes voisins de Chambre. J’ai dîné avec eux chez Lord Beauvale. A table conversation générale se félicitant de trois choses finies. Le Danemark, la Sardaigne, & l’unité allemande dont il n’est plus question. Nous avons cependant trouvé que s’il n'en était plus question à la façon de Francfort, il fallait que quelle qu’autre façon la remplace à moins d’en revenir à l'ancienne. L’Empire français remis au mois d’octobre. M. Drouyn de Lhuys, très agréable et facile en affaires. Il n'y a guère eu que cela pour la galerie. après le dîner il s'est rapproché de moi pour me dire, d'abord, que nous avions battu les Hongrois en Transylvanie et en Hongrie. [?] a failli tomber en nos mains, nous lui avons pris tout sont bagage, sa voiture de voyage, ses papiers, tout. De l’autre côté [Paskeviez] a battu Georgy. Partout où nous les rencontrons, l’avantage est à nous, mais ils trouvent le moyen d’échapper. L'issue de la lutte ne saurait être douteuse mais elle peut être longue. En transaction est toujours ce qu’il y a de désirable. Pourquoi l’Empereur d’Autriche ne dit-il pas ce qu’il veut faire ? Il est impossible qu'il songe à [?] la constitution hongroise. Pourquoi ne dit-il pas qu’il leur rendra leurs droits, leurs privilèges ? On ne sait pas qui gouverne là. C’est comme au temps du Prince Metternich où l’un rejetait la faute sur l’autre. La constitution faite par Stadion est impraticable, impossible aujourd’hui il n'y a rien, pas de constitution, on n’y songe plus. L'Autriche et la France sont en très bonne entente sur l'Italie. L’Autriche et la Prusse se divisent tous les jours, davantage. Mais la Bavière est encore bien plus que l'Autriche en guerre de paroles avec la Prusse. J'ai demandé si deux Allemagne n'était par la chose probable ? Peut être. Et puis se rapprochant de moi un peu davantage et à voix basse. Le général Lamoricière a été fort mal reçu à Varsovie. On lui avait d’abord destiné un bel appartement au palais de Bruhl et il le savait. Mais à son arrivée, porte close. Il a fallu aller chercher à se caser dans une auberge. Là, avec difficulté, de mauvaises chambres. Cela a fort étonné. Deux jours après, audience de l’Empereur qui l'a reçu très froidement. On cherche les causes ; il a passé par Cracovie. Parfaitement lors de la route de Berlin à Varsovie. Un énorme détour. Qu’est-il allé faire là ? Autre motif qu'on insinue de Paris. C’est un avis confidentiel qu'aurait reçu l’Empereur que Lamoricière n’avait point du tout la confiance du Président, & qu’il fallait se méfier de lui. Cet avis serait venu de source directe. Lord Palmerston ne comprend pas bien. Il s’étonne et me raconte sans beaucoup de déplaisir. Je lui ai demandé qui conduisait les affaires à Paris. Il me dit qu’au fond c’était le Président qui faisait tout & qu'il avait plus de good sense que tous les autres. Il a entendu parler aussi du dégout de M. de Tocqueville et de son envie de se retirer. Je crois vous avoir tout redit. La visite impromptue du Prince Scharamberg à Varsovie ne lui est pas expliqué. Il n’a passé que 24 heures. On dit à Lord Palmerston qu’il venait demander plus d'activité dans les opérations militaires. L’Empereur lui a répondu en lui montrant les rapports des deux engagements cités plus haut. Lord Palmerston blâme vivement le gouvernement autrichien pour avoir fait exécuter un prêtre à Bologne. Il avait été pris les armes à la main dans la suite de Garibaldi, mais il était sujet roumain & ne pouvait pas être jugé par les Autrichiens. A propos de prêtre, de quoi s'avise votre archevêque de Paris ? Voici Lord Palmerston. Je vous quitte adieu.

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Schlangenbad vendredi le 23 août 1850

Le bon Fleichmann m'a quittée hier soir. Excellent homme, mais très [unitaire] beaucoup de détails curieux, très sensé et amusant. Le duc de Noailles me mande que Salvandy arrive Dimanche. Madame de La Ferté aujourd’hui. Tous les jours, foule nouvelle. Hier 60 nouveaux arrivés. Le duc de Noailles retourne à Paris Mardi. Il est très vraisemblable que nous ferons route ensemble. Mais je suis encore un peu flottante pour Bade. Aujourd’hui que j'ai bien dormi le courage me reprend. Mon incertitude me déplait pour vos lettres. Ce qui me paraît le plus sûr et que vous les adressiez à la rue St Florentin. Je donnerai là des directions pour le cas où je ne revienne. pas tout de suite. Voici ce qui est l'alternative. Je pars le 27 avec le duc septembre de Noailles, ou 7 septembre avec Paul Tolstoy dans ce dernier cas j'aurais fait ma [?] sur Bade.
Le temps est affreux toujours, j’ai eu bien du guignon pour ceci. La princesse Grasalcovitz va être ma seule ressource car je crois que le duc de Parme part aujourd’hui. Je suis curieuse de votre opinion sur le discours du Président. Je persiste à le trouver habile. On ne m'en dit rien de Wiesbade. Au reste je n’ai vu personne de là depuis et je n'ai eu qu’un mot insignifiant du duc de Noailles sur ces mouvements. Adieu. Adieu.
je n'ai rien du tout à vous mander de ces montagnes. Adieu.

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Schlangenbad le 17 août 1851

Je ne fais que dormir, signe certain de bile. Je n’ai pas voulu prendre mon bain aujourd’hui. Je suis découragée. Je crois que je quitterai ceci le 23 ou 24. Mais je ne veux rien décider encore avant d’avoir vu Constantin. Lundi 18. Constantin ne sera ici que le 21. Il va avant voir à Kissingen Prince [Czernichoff] qui est très malade. Toujours je crois que je quitterai ceci le 23 ou 24. J’irai lentement. Il me semble que dès le 20 je ferai bien de vous adresser ma lettre à Paris. Mais après à Londres à qui ?
Léon Faucher qui est à Londres a beaucoup dit à C. Greville pleine assurance de la réélection du Président. Fort préoccupé d'empêcher tout renoncement du côté de l’Elysée ou du [gouvernement], convaincu qu'en se tenant tranquille on arrive. Voulant dépenser 100 millions en ouvrages à Paris. Cela tient le monde en bonne humeur. Granville a mortellement offensé les Ministres français en ne faisant de visite à aucun d'eux. Il a eu grand tort.
Il y a eu un gros orage cette nuit. Hier la journée était charmante. Une troupe de chanteurs Tyroliens nous a donné un charmant concert sur la terrasse. Les auditeurs en groupes en amphithéâtre. C’était un coup d'oeil ravissant mais pas une âme de connaissance. La duchesse de Hamilton a l'air brisé par le chagrin. Sa fille est toujours à Venise avec son amant. Adieu. Adieu. J’attends vos récits de la dernière matinée à Paris. Il me semble que vous êtes assez content. De quoi ? Adieu. Adieu.

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Schlangenbad le 14 août 1851 jeudi

Je viens d'écrire une lettre à L. Aberdeen qui ne lui plaira pas, car je lui dis de bonnes vérités sur sa faiblesse d'avoir permis à Gladstone de lui adresser ces détestables lettres. Vous voyez la joie de L. Palmerston. 8 heures. Voici un mot de vous de Paris, lundi, mais si petit, si court, trop court. J’espère que vous vous serez donné de meilleures proportions le lendemain. Je rentre d'une longue promenade avec la duchesse de Hamilton, personne très digne, très convenable, parlant le Français à merveille, et voilà tout. Les journaux m'apprennent que vous & la Marseillaise avez été très honorés à la distribution des prix. Quel singulier accouplement ! Je suis charmé des succès de Guillaume.

Vendredi 15. Je relis votre billet. Vous trouvez les choses en meillleur train que vous ne croyez. Je suis interrompue par l’arrivée de vos deux lettres perdues 31 & 2. Elles avaient été envoyées à une Princesse de Lieven. Ma nièce à Kreuznach. L'une, elle l’a ouverte. C'est bien égal, c’est une brave femme qui n'y aura pas compris un mot. Je suis ravie d’avoir retrouvé mon bien.
Je me repose ici de Francfort, les deux jours que j’y ai passés m'a vaient vraiment fatiguée, déjà l’idée que je ne m’appartenais pas, que je faisais un peu la volonté d'une autre. Cette idée me chiffonnait. Vous comprenez cela pour moi ? Adieu. Adieu.
Je crois que Constantin sera ici demain ou après- demain. Adieu.

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Schlangenbad le 4 août lundi 1851

Marion est toute éprise du Pce Metternich (à propos et pour ne pas l'oublier il est dans une grande admiration de votre lettre insérée au Journal des Débats & Ass. nationale) Elle a écouté tous ses récits, tous ses raisonnements avec curiosité, intérêt, & esprit. Elle fait sur tout cela de réflexions pleines de justesse. Il me paraît que lui a été très frappé de son mérite à elle. Ils étaient ensemble tout le jour. Se promenant en tête à tête. On allait se coucher, elle restait seule avec un vieux professeur à l'écouter, & discuter avec lui. On adore Marion là. D’abord elle a été revue en reine. Le fils & la fille sur la rive opposée du Rhin à Bingen. La Princesse Metternich sur le rivage au pied du château. Le Prince sur le péron, et des Ambassades ! La Princesse l'a reconduite jusqu’à moitié chemin de ceci. Elle veut venir me voir, & et espérant que j’irai passer quelques jours chez eux. Mais je ne sais pas si bien écouter que Marion. Certainement cette fille a l’esprit mieux fait & plus solide que le mien. Elle cherche et trouve le mérite dans les profondeurs du rabâchage. Je n’aime pas à prendre tant de peine.

Mardi 5. Pas de lettres hier ! Est-ce que ma combinaison Francfort serait mauvaise ? C’est-ce que je vais apprendre aujourd’hui en attendant cela me contrarie vivement. Cela et mon mal de tête qui continue. Rien n'y fait. Mauvaise année. Le temps est charmant, le lieu aussi. Marion aussi. Mais ma tête, j’en perds la tête. Je n’ai pas un correspondant à Paris, il n’y a que vous qui me donniez des nouvelles. La commission de permanence me semble bonne. Adieu. Adieu.

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Schlangenbad Mardi le 12 août 1851

La grande duchesse m’a comblée. Mais elle m'a bien fatiguée, aussi. Hier jusqu’à minuit. Ce matin dès huit heures ! Elle est partie à 10 heures pour Bade & moi un quart d’heure après pour revenir ici. Cette petite rencontre s’est passée parfaitement. C’est comme si je ne les avais jamais quittés cela m’a vraiment touchée. Ainsi n’ai-je rien marchandé, & pendant 48 heures je me suis admirablement conduite. Je ne sais comment cela [?] qui se soutenir même un jour de plus.
Je n’ai pas fermé l'oeil la nuit dernière. J’ai été prise du mal de Thiers à la langue, & j'en souffre beaucoup. J'espère me reposer ici. J’en ai bien besoin. Votre petit mot ce matin me donne bien à penser. Une intrigue avec la montagne pour le Prince de Joinville. Il est capable d’accepter ce secours. J'ai bien mauvaise opinion de vos Princes. Je leur souhaite de tout mon cœur d'échouer.
Marion est revenu de Johannisberg toujours chérie là. Elle y a vu Hubner pendant deux jours. Il se rendait à Venise & retourne à Paris pour la fin du mois. Tout le corps diplomatique a été aux fêtes en uniforme. Vraiment on a fait du Lord mais un empereur Nicolas, c'est un peu drôle. Au reste les fêtes ont été superbes, & le ciel s’en est mêlé aussi. Constantin sera probablement ici Samedi ou Dimanche. La duchesse de Hamilton est ici. Je ne sais si ce sera une ressource, j’en doute. Adieu. Adieu. Ma tête est un peu mieux, mais ma langue me fait bien mal. Elle m'empêche de manger. Adieu.
Fini Mercredi 13 août

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Schlangenbad le 19 août Mardi 1851

Merci de votre très intéressante lettre du 14. Vous me trouverez probablement à Paris à votre retour de Londres. Je crois que j'y serai le 30. Je vous adresserai ma prochaine lettre à Paris. Et puis je n’ai plus votre adresse où allez-vous à Londres ? J'espère que vous aurez songé à me le dire. De Paris adressez-moi une lettre à Bruxelles poste restante, de Londres la première aussi car je resterai certainement un jour à Bruxelles. Ensuite à Paris.
Le temps est bien rafraîchi. Et Schlangenbad alors est détestable. Enfin, c’est bientôt fini. Je partirai sans doute dimanche. Constantin sera ici après-demain.
Quelle joie dans tous les journaux radicaux de ces lettres de Gladstone. Vous devriez bien en faire honte à lord Aberdeen. Moi je lui ai parlé assez durement de cela, un petit mot plus doux de vous ferait bien de l’effet, et vraiment il mérite une leçon. Le Roi de Prusse a passé hier à Mayence le jour de la fête de l’empereur d’Autriche ou plutôt ses 21 ans. Samedi le roi reçoit l'hommage de ses nouveaux sujets de Hohenzollern. Grand speech historique à cette occasion. Adieu. Adieu. Que voulez- vous que je vous dise de ce lieu solitaire ? Pas une âme. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Schlangenbad le 13 août 1851

Je n'ai jamais entendu dire un mot de l’idée du Roi George IV de rendre la bibliothèque royale à l’Empereur, c'est un conte. Dites cela à M. Croker. À votre question maintenant. C'est l’Assemblée nationale qui a raison. Nous avons écrit à nos représentants en Italie exactement ce que le journal a cité. Je le sais par Bouteneff notre Ministre à Rome à qui j'ai fait lire le journal. À propos il s’abonne, à l’Assemblée nationale je l'ai recommandé à mes autres ministres aussi. Voici ce qui me reste du peu de mots que m’a dit le prince de Prusse de ses conversations à Londres. La Duchesse d’Orléans dit " Henry V doit être rappelé. Nous serions élus. Cela rentre dans le principe de ma maison." " Et voilà entre nous la différence. " Je vous ai dit que la grande Duchesse survenant au milieu de cela, il n’y a plus eu moyen de reprendre & quelques instants après Le Prince voguait sur Cologne.
Ma langue va un peu mieux, mais j’ai un grand échauffement à la tête. C’est ennuyeux de le sentir mal arrangée par ce bout là. J’ai vu la duchesse de Hamilton. Ce sera si non une ressource, du moins quelqu’un. Jeudi matin le 14. Rien à vous dire. J’ai passé une mauvaise nuit. Il y a intermittence. On me conseille la quinine. Je ne me soucie pas de ces conseils là. Dans 10 jours j’aurai fini ceci je suppose, mon voyage n’a pas bien été. Que faire ? Adieu. Adieu. Je suis avide de vos lettres de Paris. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Trouville, jeudi 15 août 1850 8 heures

J’ai passé hier au Val Richer où j’avais des papiers à prendre. Je suis ici jusqu’au 28 ou 30 août. Je serai bien aise d'être rétabli au Val Richer. Quand je ne suis pas avec vous, je ne me trouve bien que chez moi. Je ne suis pourtant pas mal accommodé à Trouville. J’ai un assez bon cabinet, et une petite chambre où presque rien, ne me manque du comfort devenu presque nécessaire. C’est beaucoup à Trouville, encombré de monde et dans une maison que mes enfants et leurs deux familles remplissent jusqu'au toit.
Bien peu de monde du reste qui vous convînt. Toujours le chancelier et Mad. de Boigne Dumon qui m'attendait et que j'ai vu hier mais qui va repartir Quelques Delessert que vous ne connaissez pas. Hors de là personne de notre société et même à ce que disent mes enfants, un peu de mauvaise compagnie. Dumon ne m’a rien appris. Il venait de lire une lettre de M. Molé, triste et découragé. Triste pour lui-même ; il s’aperçoit de son peu d'influence. Son été de la Saint Martin est passé. Personne ne fait plus guère attention à ce qu’il dit et à ce qu’il fait. Sans parler de ses peines de coeur dont il ne parme qu'à Mad. Kalerdgi et dont il ne lui parle même plus. Je doute de cela. Je parierais qu’il y est retourné. Il est en fait de fierté comme pour tout le reste, tout apparence, rien au fond. Le Duc de Broglie toujours aussi noir et sans avenir que jamais. Changarnier de mauvaise humeur et impatient. Un homme d’action qui ne fait rien, c’est une situation difficile à prolonger. Il est d’une commission de l'assemblée qui prépare une loi bonne, dit-on, sur le recrutement et l’organisation de l’armée. Lamoricière qui en est aussi y fait meilleure mine et y a plus d'influence que lui. Lamoricière a des idées à tort et à travers, et parle bien. Changarnier se déplait là. Ceci inquiète quelques personnes. Je vous ai redit tout Dumon. Je vous quitte pour aller faire ma toilette. La poste arrive ici à 10 heures et part à 2 heures. C'est mieux arrangé qu’à Ems.

Midi
Je reçois votre dernière lettre d’Ems et la première de Schlangenbad. Si Schlangenbad vous engraisse c'est bien ; mais je crains pour vous cette complète solitude. La Princesse de Prusse aurait mieux fait de rester. Si vous retournez à Ems comme vous en aviez le projet, pour voir la grande Duchesse, soyez assez bonne pour m'acheter deux garnitures de boutons de gilet, en pierres du Rhin, comme celle que vous m'avez choisie pour Guillaume. Huit boutons pour chaque garniture ; cela coûte 8 francs. C’est pour mes deux gendres. Les cailloux du Rhin ont été trouvés très jolis.
Le Journal des Débats donne bien des pièces de votre cour. Il les tient de la bonne source. Je suis bien aise que tous ces documents soient publiés. Il vous font honneur. Les pièces venues de Pétersbourg sont mieux rédigées que celles de Brünnow. Adieu. Adieu. Je regarde un peu à ces récits du voyage, du Président. Je vous en dirai mon impression. Adieu adieu. G.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Trouville, Jeudi 22 août 1850

Vous rendez compte dans la perfection. Reste à mettre à sa juste valeur l'impression et le dire de vos deux interlocuteurs, vous feriez cela à merveille aussi. Si vous aviez vu vous-même. Pourvu que vous laissassiez aussi à votre propre impression le temps de s'apaiser et de le juger. En tout cas, ce que vous me redites est très curieux et très important. Et il y a au bout des paroles, un fait très significatif, l’attitude prise envers. M. de la Rochejaquelein. Le jour où les hommes sérieux et sensés dirigeront au lieu de suivre, le parti sera un parti politique. Cela lui a manqué jusqu'ici. Strasbourg et Wiesbaden, la rive gauche et la rive droite, étrange spectacle ! J'attends avec curiosité des détails sur le Président à Strasbourg. Je les aurai ce matin. Il ne me paraît pas que Besançon, ait été merveilleux. Je suis frappé de ce bal où le Président s’est vu obligé d'aller et dont il s’est hâté de sortir. M. de Montalembert devrait régner à Besançon.
J’ai fait hier ma course chez Mad. Denois par une tempête de pluie, en allant et une tempête de vent en revenant. Ce que c’est que d'avoir promis. Je ne puis souffrir de faire manquer ce que les gens ont pris peine à arranger. C’est un très joli cottage dans un joli pays un peu sauvage. De bons conforts et de beaux tableaux au au milieu des bois et au bord de la mer. J’ai assez conservé la faculté de prendre intérêt quand j'y suis, aux choses dont je ne me soucie pas du tout quand je n’y suis pas. Wiesbaden est très populaire dans cette maison-là. Ce qui n'empêche pas le Président d'y être populaire aussi. On voudrait bien l'avenir qui plaît mais à condition de ne rien risquer dans le présent.

Midi
Je ne m'étonne pas que Duchâtel n’eût rien à vous dire. Il paraît que Creuznach est un vrai trou. Thiers à Bade, Duchâtel à Creuznach pendant que le comte de Chambord est à Wiesbaden, et personne ne leur en demande raison. M. Royer Collard redirait bien encore : " pour M Guizot, on ne lui passe rien. " J’avais raison sur Besançon. Evidemment le Président n'y a pas été bien reçu, s’il ne l'est pas bien à Strasbourg, le voyage sera médiocre. On comptait beaucoup sur la Lorraine et la Champagne, Nancy, Metz, Châlon, Reims. Nous verrons. Ici c'est-à-dire à Cherbourg, il n’aura ni désagrément, ni grand agrément. On l’y attend le 4 ou le 6 septembre.
M. de Daunant m'écrit des Pyrénées où, il se promène depuis six semaines, qu’il n’y trouve pas l'ombre d'un rouge ou d’un socialiste. Rien d’ailleurs dans les journaux. Est-il vrai que Radowitz tombe tout-à-fait ? Adieu, Adieu.
Je voudrais, pour votre plaisir, que vous rencontrassiez votre grande Duchesse. Elle vous intéresserait quelques heures. Adieu. G.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Trouville lundi 24 juin 1850

Je pars tout à l'heure ; mais je crains de trouver le facteur parti quand j’arriverai au Val-Richer. Deux lignes donc d’ici. Pour ne vous rien dire du tout, car je n’ai pas entendu depuis deux jours une parole à redire ; quoique j'aie vu deux fois hier Mad. de Boigne. Bien fusionniste, pourvu que la fusion ne soit pas une cause de secousses, car le repos avant tout. Je trouve dans le journal l'Opinion publique que mon gendre reçoit une lettre de Claremont. empruntée à l'Univers, qui est assez piquante sur Thiers. Faites vous lire cela. C'est curieux comme la vérité perce vite, confusément, mêlée de mensonge ; mais elle perce. Ce temps-ci est fait pour le malheur des finesses et des situations doubles. La finesse n'est plus possible qu'aux esprits assez grands pour savoir s’en passer. Adieu, Adieu. Je rentrerai aujourd’hui en possession de notre correspon dance. Quel dommage que vous n’ayez pas été à Trouville hier et aujourd’hui ! Ciel et temps et mer sont charmants. Adieu. G.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Trouville, Samedi 24 Août 1850

Je trouve les animosités des légitimistes entre eux bien vives. Ceux qui sont ici sont bien amers contre Berryer, tout en parlant fort légèrement de M. de La Rochejaquelein. J’ai peur que les défauts du caractère national, qui nous ont déjà coûté si cher ne soient encore plus dominants dans les légitimistes que partout ailleurs.
On me parle beaucoup d'un abbé Trébuquet (je crois que c’est bien le nom) qui a été dans l’éducation de M. le comte de Chambord, et qui est resté auprès de lui. C'est, me dit-on, l'influence la plus intime, et un homme de peu d’intelligence politique, plus étranger même que le gros du parti au monde réel et actuel. Pouvez-vous faire quelques questions à son sujet ?
Nous n'avons plus à voir que la fin du voyage du président. On dit qu’elle sera meilleure que le milieu. Je doute qu’elle change l'impression générale déjà produite, et qui n'est certainement pas très encourageante. Les choses ont paru telles qu'elles sont en effet ; la démagogie violemment ennemie ; les autres classes bienveillantes froidement et précairement sans confiance ou uniquement par un calcul momentané, si je ne me trompe le président et l’Assemblée se retrouveront au mois de novembre, l'un et l'autre plutôt refroidis qu’échauffés et sentant qu’ils ont besoin l’un de l'autre. Ni l'un ni l'autre ne feront d'évènement. Dieu leur en enverra peut-être.

Midi
Pas de lettre ce matin. C’est très déplaisant. Elle viendra peut-être plus tard dans la journée. Cela arrive quelques fois.
Je ne vois dans mes journaux que le voyage du président ; toujours très mêlé ; même des projets d’assassinat. A Strasbourg plus de mauvais que de bon. Que pense-t-il à présent de son étoile ? Adieu, Adieu.
J’écris en Angleterre par ma fille qui part aujourd’hui, à M. Gladstone, à Marion & Adieu. Je voudrais bien avoir ma lettre. G.
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