Guizot épistolier

François Guizot épistolier :
Les correspondances académiques, politiques et diplomatiques d’un acteur du XIXe siècle


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Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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28 Château Stolzenfels Vendredi 2 juillet 1852

Vous ne sauriez vous figurer la fatigue que j’éprouve. Je suis rendue. J’attrappe un moment pour vous dire deux mots.
Hier le roi est venu nous prendre à Eltville. Grand concours, grandes embrassades, belle navigation. Dîner à bord, marche lente pour jouir de la vue, des applaudissements de la foule, le canon incessant. Le temps fort beau. Une petite partition sur le pont pour l’Impératrice. Le roi, les Princes. Bonne conversation. J’étais de ce petit cercle. Le roi très agréable, spirituel. et gai. La soirée ici, décousue ; illumination de toute la contrée, toutes les ruines. Moi plus ruine que tout cela ; j'ai été chercher mon lit à dix heures. J’ai dormi et beaucoup aujourd’hui. Il faut que je mange.

1 heure. Je rentre d'une longue séance chez l'Impératrice. Votre lettre m’a été remise à mon réveil, celle où vous me parlez de mon empereur : je l'ai lu à l’Impératrice qui en a été charmée. Adieu. Adieu.
Demain à Brumath après-demain à Cologne. ou même Aix la Chapelle. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Ems le 26 juillet 1850

Puisque votre dernière lettre ne me parle plus de venir, j’espère que vous y aurez renoncé pour le moment. J'ai eu beaucoup de lettres aujourd’hui lord Aberdeen il partait le même jour pour l’Ecosse. Le dîner pour Palmerston a été une pauvre affaire. Pas un ministre n’a voulu en être. Leur absence a semblé très significative. J’attends ce que Ellice m'en dira. Brunnow va en août à Pétersbourg. Il a beaucoup parlé et raconté à Aberdeen, très triste, voyant très en noir notre avenir avec l'Angleterre & désirerait connaître exactement la volonté de l’empereur, doutant de son propre retour à Londres. La guerre en Danemark tout de suite après s’être vanté du succès de la médiation pour la paix, fait à Londres un effet singulier.
Duchâtel & Montebello me disent tous deux que le Bonapartisme fait de grands progrès, même celui qui devait former notre partie carrée avec Marion à dîner, est dans cette opinion. On veut rappeler d'exil les princes. Lamoricière est à la tête de tout ce qui peut vexer l’Elysée. Il me semble que la commission est mal arrangée pour y plaire dans ce quartier. Enfin il peut encore survenir d’étranges complications. J’ai lu l’article de M. de Lavergne dans la revue des deux mondes et j'en ai été charmée. On me parle tout à l'heure d'un article du Moniteur du soir qui serait la guerre déclarée, par l’Elysée à l’assemblée. Cela a l’air vif, ce ne sera probablement rien. J'ai passé une nuit détestable des crampes, oppression de poitrine, j’ai suspendu aujourd'hui les verres d'eau, & le bain. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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30 Cologne Dimanche le 4 Juillet 1852
Midi

Quelle journée que celle d’hier, quel tapage, quelle fatigue ! Elle a commencé à 9 h. du matin pour moi, par une longue visite du roi de Prusse. Une heure de causerie intime aussi confidentielle que possible de sa part. Ensuite l’Impératrice. Puis on s'embarque pour arriver à travers le canon, les feux de joie, les drapeaux, les cris, les cloches tout le long des deux rives à Cologne. Halte d'une heure pour traverser triomphalement la ville à la cathédrale, arrivée à Brumath à 9 h. Abîmée, mourante. Car tout ce temps je l’ai passé en causerie avec [l'Impératrice] le roi dans un petit boudoir séparé sur le pont. Chaleur étouffante. Le château de Brumath superbe. A 6 h. du matin sur pied, au déjeuner de l’[Impératrice] à 7 h coupé à 8 des Larmes des deux parts. Revenue à Cologne avec la princesse de Prusse et Meyendorff.
Je me repose un moment. Je dînerai & j’irai coucher à Aix la Chapelle. Et je n’en puis plus. Demain Je serai de bonne heure à Bruxelles. Là je verrai selon mes forces. Si je puis j'irai Mardi à Paris. Et maintenant. Adieu. Adieu.
Quel besoin j’ai de me reposer. Si Aggy pouvait venir, j’ai encore écrit tendrement sans rancœur. C’est elle qui me force à revenir à Paris. De là je ne sais ce que je ferai. Vous viendrez me le dire. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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29. Boulogne Mardi le 26 août 1845, neuf heures

Pas de Bulwer. Il faudra m'embarquer avec un inconnu. Un révérend de Boulogne dont je vais faire la connaissance ce matin, je deviens bien impatiente de vous revoir, de causer avec vous. Nous voilà avancés dans notre semaine. Quel plaisir de se dire cela. Lord Cowley a eu hier une traversée fabuleuse. Le même bâteau se retrouvait à Boulogne au bout de cinq heures. Madame de Flahaut a bien envie qu'Andral lui conseille de passer l'hiver à Paris. Je vous préviens de cela ; avisez car cela ne vaudrait rien. C’est toujours la même Mad. de Flahaut au fond.

Midi. Voici votre lettre de dimanche. J'ai du malheur pour la cuisinière. Mais enfin le mois de Septembre coulera sous la protection de Guillet. Et vendredi je trouverai moyen de me nourir à Paris. Je compte partir demain matin pour aller coucher (très mal) à Granvilliers. Jeudi je serai à Paris. J'y trouverai deux lettres j’espère. Adieu. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Schlangenbad le 11 août dimanche 1850
8h. du matin

Je suis arrivée hier à 4 heures. J’ai trouvé votre lettre de Bruxelles, très agréable lettre. Je n’en aurai pas à vous écrire de cette façon. La solitude ici est complète, Madame Molorti qui part dans quelques jours, voilà tout ce que je trouve. Je l'ai essayée hier pendant une demi-heure & je suis arrivée au fond. Il n’y a rien. Voilà où j'en suis et où j’en serai.
La princesse de Prusse est retournée à Coblence, c'est là où elle aime à régner. La route d’Ems ici n’est belle que près de Nassau, et puis, près de Schlangenbad le reste est montagneux & aride. Mon appartement est agréable. Tout est riant et charmant excepté le ciel. Il pleut, il ne fait que cela. Ce sera agréable ! Pas une âme. La petite Grasalcovitz ne vient que jeudi. Adieu. Adieu. Voici la poste qui part.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris, Jeudi le 10 octobre 1844
8 h 1/2 matin

Voilà votre bon petit mot de Portsmouth. Merci. Merci. Bien dormi, bien mangé. C'est là ce qu’il faut me dire. C'est la seule chose qui m’intéresse vraiment. Hier soir Génie est venu m’apporter la dépêche télégraphique de Windsor. J’en ai été médiocrement contente, elle ne parlait pas de vous. Sachez bien qu’il n'y a que vous pour moi dans le monde.
A propos de cette dépêche la colère de Génie était sans bornes, restée 23 1/2 heures entre Windsor & Calais ! C'est vrai que c’est fort.
Il est impossible de faire plus. La venue du Prince Albert à Portsmouth à bord du Gomer, c’est parfait. Que je serai curieuse maintenant des détails. Comme les journaux vont nous en régaler ! Je voudrais qu’ils me racontent aussi ce que vous mangez.
Hier pauvre journée de larmes. Constantin m'a écrit la plus touchante lettre du monde. Vous verrez qu’elle vous touchera. Cette lettre a enfin fait pleurer la pauvre Annette. Elle n’a pas quitté son lit depuis l’arrivée de la nouvelle.
J’ai vu hier matin Fagel deux fois, Fleishman, Kisseleff, Bacourt, l'Ambassadeur d’Autriche. J'ai fait ma promenade au bois de Boulogne après mon dîner. J'ai été chez Annette où je suis restée jusqu'à 1 heure de me coucher. Je ferai cela tous les jours. Bacourt vous demande s'il doit attendre votre arrivée. Il voulait aller lundi à Bruxelles pour en revenir le 1er Nbre. Mais si vous en disposez autrement, il fera votre volonté et vous attendra. Il ne sait rien que le fait que vous avez peut être besoin de lui. Fagel est excellent d’abord pour moi (il a le cœur très charitable) et puis excellent par les rapports avec Londres. Lord Aberdeen a lu le rapport de Fagel sur son entretien avec le roi où celui-ci-li a fait un éloge si vif & si mérité d’Aberdeen. Cela lui a fait une satisfaction visible. Il s’est beaucoup loué & d'ici, et de vos agents d'Espagne surtout de Glusbery. C'est absurde de vous adresser tout cela à Windsor. Je ne sais que vous mander. Vous comprenez bien qu'ici il n’y a pas de nouvelles, & que moi plus recluse que jamais à présent à cause de mon deuil, je ne puis rien apprendre.
Le Toulonnais donne votre traité avec le Maroc. Certainement, cela n’est pas en règle. Comment ces choses là arrivent-elles chez vous ? J'espère que Tahiti ne va pas faire un nouvel embarras. Ah que j'arriverais à jeter Tahiti au fond de la mer. Revenez je vous en prie avec le droit de visite au fond de mer aussi. Je ne sais pourquoi, je l'espère beaucoup. Mais surtout je vous en supplie portez vous bien. Dormez, mangez, prenez des forces et parlez moi de cela tous les jours.
Sans doute le Roi se louera de Cowley à Windsor. Je voudrais que cela valût à ce bon vieux homme le titre d’earl. Je n’ai pas vu Lady Cowley hier elle était malade, elle viendra aujourd’hui.

Midi et demi. Dans ce moment m’arrive votre petit mot de Windsor. Mardi 5 heures Mille fois thank you dearest que c’est charmant de lire écrit de votre main : Je suis très bien. Continuez à l’être et à me le dire.
Que la bonne réception de Portsmouth m'enchante. Au fait tous ces hourras feront du bien au roi ici. Cela le réhausse encore. Quelle honte pour les Français de si peu reconnaître ce qu’ils possèdent. Mais savez vous qu’au fond il y a un sentiment d’inquiétude de son absence, on sera content de le savoir de retour. Il manque, c’est un vide. On s’aperçoit que c’est une grande affaire que le roi. Je crois moi que tout ceci fera du bien.

9 heures
J’ai été accablée de visites. Il faut que je ferme ceci & que je le porte chez Génie. Adieu. Adieu. Vos filles sont venues elles ont été très aimables pour moi, et m'ont apporté de charmantes brioches bien chaudes très utiles. Elles ont bonne mine toutes les deux. Adieu. Adieu.
Voilà le petit Nessellrode qui reste aussi. Je vous redirai tout demain. Adieu. Adieu. God bless you dearest.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Dieppe Dimanche le 8 août 1852

Kolb vient d'arriver. C'est lui qui me ramènera demain à Paris. J’ai eu une longue visite du ministre de l'intérieur ce matin. Je l’ai trouvé extrêmement changé. Il a bien mauvaise mine, & il se dit très malade. Il veut rester ici assez de temps. Il m'a beaucoup parlé mariage. Il se figure que l'Europe veut l’empêcher. Il se fait des dragons. Il croit tout-à-fait à la guerre venant des puissances autre dragon. Et puis & puis toute la conversation curieuse. Je regrette de partir lorsqu'il arrive. Les conversations avec lui m’auraient intéressée.
J’ai vu beaucoup de monde aujourd’hui & je suis fatiguée. Voilà donc Thiers, et tout le reste civil rappelé. Persigny ne me l’avait pas dit. Si je le revois je lui en parlerai encore. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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5. Beauséjour lundi 2 h 1/2
le 14 août 1843

J'ai trouvé en ville votre petit mot d'Evreux. Le timbre de l'enveloppe portait Lisieux. Vous êtes donc arrivé sans accident. Dieu merci ! J’ai eu ma petite entrevue en ville. Je suis bien contrariée de ce qu'il m’a dit. Vous le serez un peu. Peut-être trouverez-vous que votre présence ici eut mieux valu dans ce moment. Prenez garde, un faux pas peut mener loin. Je voudrais bien vous parler. Je vous disais ce matin quelque chose qui trouve assez son application. Ceci est un moment des plus importants pour vous et pour la question. Je n’aime pas votre absence. Ce n’est pas à moi du tout que je pense en vous disant cela. C’est vrai ce que je vous dis là. Voici une lettre de mon frère que vous me renverrez.
Adieu. Adieu. J’ai voulu encore ajouter ce petit mot. Les numéros sont utiles pour cela. Adieu, le 26, j'ai bien envie de ne plus y croire mais dans le bon sens. C'est-à-dire qu'il est indispensable que vous reveniez avant. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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9. Beauséjour Mercredi le 6 septembre 1843

Me revoilà dans mon home et j'en suis bien aise. J’ai encore dîné hier à Versailles et j’étais ici à 8 heures, & dans mon lit à 9. J'ai bien dormi jusqu'à 6 heures. à 7 heures j’étais sur les fortifications, je viens de faire ma toilette et me voici à vous. J’attends votre lettre. Le Galignani et les journaux ont devancé votre récit. Je sais que Lundi s’est bien passé. Belle promenade & concert. Je voudrais que tout fut fini. Dieu merci c'est le dernier jour.
Kisseleff est venu me trouver à Versailles hier sur les 3 heures, nous ne nous sommes vus seuls que dix minutes. Le Duc de Noailles est arrivé. Dans les 10 minutes il m’a dit qu'il avait écrit à Brünnow ceci : " On dit que le corps diplomatique (de Paris) montre quelque dépit de l’entrevue royale, quant à moi je me tiens dans un juste milieu. Je dis que c'est un événement très favorable au Roi et à son gouvernement et voilà tout. Si les autres disent plus ou autrement je trouve que c’est de la gaucherie. " Je l'ai encore loué. Il me dit qu'Appony avait changé de langage. Je le savais moi-même de la veille. Il est évident que c’est le rapportage de Molé et La confidence que je lui en ai faite qui ont amené ce changement. C'est donc un service que je lui ai rendu. Mais il n'en sort pas sans quelque petits blessure.
J’ai régalé le duc de Noailles de tout ce récit qui l’a fort diverti. Il a jugé l'homme comme vous et moi. Je lui ai dit qu’on savait que son langage à lui était très convenable. Cela lui a fait un petit plaisir de vanité. Il est évident que tous les jours ajoutent à son éducation politique, et qu’il meurt d’envie de la compléter. Je lui ai lu ainsi qu'à Kisseleff les parties descriptives de vos lettres. Cela les a enchantés surtout le duc de Noailles. Il trouve tout cela charmant, curieux, historique, important. Non seulement il n’y avait en lui nul dépit mais un plaisir visible comme s’il y prenait part. Je lui ai lu aussi un petit paragraphe, où vous me parlez du bon effet du camp de Plélan. Il m’a prié de le lui relire deux fois. Il est évident qu'il voudrait bien qu'on se ralliât. Il suivrait, il ne sait pas devancer. Il m’a parlé avec de grandes éloges du Roi, et de vous, de votre fermeté de votre courage, de votre habileté, de votre patience sur l’affaire d’Espagne. Il est très Don Carlos il a raison, c’est la meilleure combinaison parce qu'elle finit tout et convient à tous. Mais se peut-elle ? Il regrette que la Reine ne soit pas venue à Paris. " Un jour pour Paris, un jour pour Versailles. Elle aurait été reçue parfaitement. Le mouvement du public est pour elle aujourd’hui tout à fait. Une seconde visite sera du réchauffé. Aujourd’hui tout y était, la surprise, l’éclat. " C’est égal j’aime mieux qu’elle n'y soit pas venue. Kisselef m’avait quittée à 4 1/2 pour s’en retourner par la rive droite. Comme le Duc de Noailles partait par la gauche nous avons eu notre tête-à-tête jusqu'à cinq. Kisseleff partait triste, il avait peu recueilli. Tous les deux avaient dû dîner en ville et n'ont pas pu rester. J’ai dîné ave Pogenpohl que j’ai ramené jusqu’ici. J’ai remarqué qu'il en avait assez de Versailles. Un peu le rôle de Chambellan. La promenade et le dîner, et encore par la promenade quand j'en avais un autre. Mais c’est juste sa place.

Onze heures. Voici le N°8 merci, merci. Que vous avez été charmant de m'écrire autant ! Enfin vendredi je vous verrai c’est bien sûr n’est-ce pas ? Passez-vous devant Beauséjour ou bien y viendrez-vous après avoir été à Auteuil ? Vous me direz tout cela. Que de choses à me dire ; nous en avons pour longtemps. Et puis, l’Europe a-t-elle donc dormi pendant Eu ? Comme nous allons nous divertir tous les jours des rapports de partout sur l'effet de la visite ! J’irai ce matin en ville mais tard. Je passerai à la porte de Génie pour causer avec lui. Et puis commander ma robe de noce pour lundi. Ensuite en Appony pour voir le trousseau. J’y resterai pour dîner. Voici donc ma dernière lettre. Adieu. Adieu. Adieu. Apportez-moi moi la jarretière, je m’inquiète que vous ne m'en parlez pas. Ce que vous dites de la princesse de Joinville est charmant ! Adieu encore je ne sais pas finir. Adieu. Prenez soin de vous demain. J’ai si peur de la mer. Et puis j’ai peur de tout. Revenez bien portant, revenez. Adieu. Je me sens mieux aujourd'hui.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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52 Schlangenbad le 24 août 1853

Me voilà encore. La chaleur a été si forte que je n’ai pas où me mettre en route. Elle se dissipe un peu, et samedi je pars. Je serai à Paris sauf nouvel incident ou accident. Mardi le 30. Meyendorff était très affir matif en me mandant que Constantinople avait accepté l’Ultimatum. Une lettre de Kisseleff reçue hier l’est moins, mais cela nous est bien égal. La faute serait aux autres.
Je ne vois plus une âme, il n’est resté personne à Schlangenbad. Ce repos me plait beaucoup, seulement il ennuie mon fils. Je n’ai pas l'ombre de nouvelle à vous dire. Mariage à droite, à gauche, voilà le seul aliment des journaux. Adieu. Adieu. On a bien des Bavaroises déjà en Autriche, cela ne plaira pas.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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8 Versailles Mardi le 5 Septembre 1843
Midi

Voici ma seconde lettre aujourd’hui en vous expédiant vite la première pour ne pas faire attendre l’homme de Génie. Je n’avais pas lu encore ce que vous m'avez envoyée. Je viens de le lire avec attention, c’est excellent et vous êtes vraiment très vertueux. La pièce jointe est parfaite à lire et même à donner. Il y a dans le compte-rendu des choses qu'il faudrait soustraire ce qui fait que je me bornerai au récit. Je ne sais pas encore, si je m'en chargerai moi-même où si le dirai à mon petit homme. Je vous rendrai votre papier " Si j'avais le temps, elle m'aimerait " vous me disiez cela hier en me parlant de Lady Cowley. C'est charmant et cela a fait éclater de rire l'Autriche et la Prusse.

Une heure.
Vraiment je me sens très souffrante, et je partirai. J’attendrai 5 heures parce que je crois que le duc de Noailles doit venir me voir. Adieu Je n'ai rien à ajouter. Je trouve tous les journaux aujourd’hui fort bons. Les fonds ont beaucoup haussé. Enfin ce voyage est ce qu’il devait être un grand et bon événement. God bless you et revenez. Je vous conjure de ne point vous embarquer du tout jeudi si le temps était gros ou seulement pas bon. C'est des bétises. Il ne faut rien rien risquer. Que je serai heureuse de vous revoir ! Vous ne me dites pas quand ? Je doute que vous reveniez avant jeudi minuit ainsi vendredi de bonne heure. Mais vous me ferez dire que vous êtes arrivé vendredi à mon reveil n’est-ce pas ? Ayez bien soin de vous je vous en conjure. Adieu. Adieu. Vous concevez que si vendredi à 8 h. du matin, je n’ai pas un billet de vous qui me dise que vous êtes à Auteuil j'irai me jeter dans la Seine. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris mercredi le 10 août 1852

Je ne vous ai pas écrit hier. Je n’ai pas trouvé un moment. Du monde, des affaires, & quelle affaire pour une estropiée de s'embarquer pour Paris ! Un train spécial détestable. Je ne suis arrivée qu'à 9 heures éreintée. J'ai reçu à Dieppe encore votre lettre & la revue dont je vous remercie bien, & ce matin encore votre lettre. Je me lève après avoir assez bien reposé.
Je verrai quelques personnes ce matin. Avant hier soir tout Dieppe était chez moi, entre autres Madame de Persigny que son mari m'a amené. Elle est jolie, très jeune, & ils ont l’air fort amoureux. Mais elle est mieux portante que lui. Tout Paris est bouleversé des préparatifs de la fête. Chez moi ce sera superbe.
J’ai trouvée une invitation pour St Cloud pour le 16. Un bal. Cela me va ! Ma conversation le matin avec Persigny était au fond très curieuse quand une [race] a été chassée trois fois, quand de si grand, de si haut, on est tombé si bas, c'est fini archi fini. Il n’y a que cette race-ci pour la France, le monde est gouverné pas des symboles. Ce nom de Napoléon est un symbole. Il restera personnifié n’importe en qui. Celui-ci crée & fonde. L'administration, les institutions survivront à l'honneur et avec [?] père, ou Napoléon fils cela ira. Tout de même quand même on aurait le malheur de perdre celui-ci ou qu’il ne laissât pas d’enfants. L'Europe ne comprend pas la France, & en général la transformation des idées en Europe. [Persigny] a l’esprit frappé qu'on veut empêcher le mariage. Moi je ne le crois pas du tout.
Adieu. Adieu on m'interrompt.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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54 Bar le duc Mardi le 30 août 1853

Si je date de Mardi une lettre que je vous aurais écrit la veille (Lundi) est-ce antidater on postdater qu'il faut dire ? Répondez-moi je vous en prie et tout de suite. Détestable auberge, mais il a fallu m’arrêter.
Paris le 31. Me voilà et fatiguée. Je trouve une lettre de Meyendorff et une de Constantin. Je vous envoie copie des passages importants. Je n’ai encore vu personne ici et ma lettre partira avant toute visite, mais ces deux lettres me semblent renfermer ce qui est essentiel. Greville me mandait si les Turcs ne font pas what we prescribe nous ne pouvons plus les soutenir. Voyons comment tout cela ira, maintenant, notre partie est la belle. Heeckeren m’a dit que jamais les vaisseaux. Français ne reculeraient tant que nous resterons dans les principautés. Nous verrons. Comment pourraient-ils entrer dans les Dardanelles sans provoquer le guerre, et ils ne peuvent pas rester à Besika. Adieu. Adieu.

Je copie un autre passage de la lettre de Meyendorff. " je voudrais vous dire tout le plaisir avec un peu d'envie que j’ai éprouvé ici apprenant le beau sens du fils de M. Guizot. Comme j’admire le père d’avoir eu le temps de bien élever ses enfants ! "

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris Dimanche le 30 Juin 1850

Me voilà encore. J’étais si lasse hier que je n’ai pas pu faire mes derniers arrangements. Londres m’a troublée aussi, & le parlage chez moi. Enfin je ne suis pas partie ce matin, comme j’avais voulu le faire & ce n’est que mardi matin qui je m'embarque pour cet ennuyeux voyage. Je ne m’explique pas la majorité de 46. Pour le ministère. Le Général Lahitte m’a envoyé la dépêche télégraphique hier avant 5 heures. Très bien, rien que le chiffre. Je suis curieuse des détails. Qu’aura fait Peel ? Le coup au visage de la Reine est quelque chose dont on ne revient pas. L'histoire du monde n'offre rien de semblable. Cette brutalité révolutionnaire ! Car l'homme n'est pas fou.
Morny est venu hier, ayant l’air fâché du succès de Pal[merston]. Je lui ai dit que tout le monde l'était, moins un, le Président. Il a peu disputé. Le Prince croit que Pal[merston] est son ami, & qu'Aberdeen serait son adversaire. Comme c’est jugé faussement ! Voilà donc les pièces. Certainement la réponse de Lahitte est sèche. Drouyn de Lhuys va repartir. Il n’y a pas de motif pour ne pas retourner à Londres, & je crois que Mareschalchi est un pauvre correspondant.
Midi. Voici Ellice & lady Allice. Le premier embarrassé. Disant que c'est la guerre entre les deux chambres, & qu'au besoin Lord John pourra bien appeler à son secours les moyens révolutionnaires ou à peu près. La lettre n’a pas de valeur. Lady Allice dit, au moins voilà les partis mais, Peel, Graham, votant avec les Conservateurs & Protectionnistes. Personne ne dit si Peel a parlé. Je croirais que non. De l'aveu de mes deux correspondants, John a fait un mauvais discours. Disraeli aussi. Personne ne dit un mot du coup de canne à la figure de la Reine. J’espère avoir un mot, d’Aberdeen, Cela vient plus tard. Flahaut très Palmerstonnien, voilà ce que me dit lady Allice et ce que vous aviez dit avant elle.
2 h. Je viens de parcourir le Times bien rapidement. Peel a parlé & fortement & bien, du moins c'est ce qu'il me semble avec mes pauvres yeux. Tout cela est d'un longueur excessive. Il ressort de ce débat que les partis sont unis sur la question étrangère. C’est assez bon. Adieu. Adieu. Que vous dites vrai sur les points pas touchés ou faussement touchés par Palmerston Mais what use now ! C’est fait et j'espère que l'Angleterre aura une petite révolution. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Paris Samedi 29 Juin 1850

Ce n’est pas Aix-la-Chapelle. C'est à Ems que je vais en droiture. Je voulais partir ce soir. Je remets, car il ne fait plus si chaud, et une nuit gâtée peut me fatiguer beaucoup. Ce sera demain matin ou lundi. Adressez toujours ici jusqu’à nouvel avis. Je n'ai qu’un mot de Greville qui convient que le discours de Palmerston a été superbe et qu'il a produit un prodigieux effet. Cependant il ajoute, que le fond manque, & que ce n’est pas du tout une réponse à Graham. En somme Il regarde tout ceci comme d’un effet important & dangereux pour la politique de son pays. Voyons Peel ! Aurait-il parlé ? & qu’aura-t-il dit ?
Hier la journée prise par les adieux, que suis restée toute fatiguée. J'ai reçu Duchatel qui avait passé cinq jours à la campagne. Il ne savait rien. Montebello hier a voté aussi contre la loi des Maires. Il ne dit pourquoi, je l'ai oublié... Je crois que c’était pour ne pas diviser la majorité. Le président est de bonne humeur. Il a donné à dîner aux Normanby avant hier. Mardi Lahitte les fait dîner chez lui. Hubner est parti hier soir pour Vienne. Il est venu me dire adieu très abruptement. 2 heures Ellice d’hier soir. Situation de plus en plus tendue & périlleuse. Beau discours de Gladstone & autres. Les grands n'ont pas encore pris la parole. Peel. John, Disraeli, Cobden. Bright. Le débat ira jusqu'à lundi probable ment. Les chances de bonne majorité diminuent à moins de 37 les ministres se retirent. On dit que les Peelistes font des arrangements avec les protectionnistes, pour le cas où les princes seraient appelés au pouvoir. 1ère condition. Pas de dissolution. Mon opinion est qu’on ferait un ministère mixte. Peelistes & Whigs modérés. Ou bien Protectionnistes modérés, s'il y en a et toujours les amis de Peel ! Que Wellington s'en mêlera. Nous verrons. Toujours c’est bien gros, et peut devenir bien grand. Greville m'écrivait du 27. Ellice du 28.
En sortant de chez le duc de Cambridge jeudi la reine a été frappée au visage, par un officiel en retraite avec la canne de cet officier. Elle a paru à l'opéra le soir, grand enthousiasme pour elle.
Les radicaux veulent donner un grand dîner à Palmerston à un des grands théâtres. Tout cela c'est la révolution. Il faut l’arrêter à temps, & c'est ce qui me fait croire au changement de ministère. Viel-Castel et Kisseleff chez moi ce matin de bonne heure. Mareschalchi parle aussi de déconvenue possible pour le g[ouvernement] mais il n’est pas aussi explicite & détaillé qu’Ellice. Il finit en me disant souligné I think there must be change. Adieu. Adieu. N’est-ce pas triste de partir à la veille de mon triomphe ? Mais vous voyez bien que cela entraîne trop loin ce n’est que le télégraphe de Mardi qui annoncerait le vote. Je ne partirais donc que Mercredi. Trop long. Je suis emballée. Adieu. Ecrivez toujours ici.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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9. St Germain midi le 17 août 1843

Par quatre ou cinq raisons, matelas élastique, gens d’écurie couchant au dessous de ma chambre. Victoire toussant la nuit & &, je n’ai pas dormi du tout, et pour comble d'infortune ayant été obligée de me lever pour fermer ma porte et ne m’étant pas couverte j’ai repris un point de côté comme j'en ai quelque fois en hiver, et il m’a fallu recourir à une sueur abondante pour m'en débarrasser. Je me suis donc levé tard, en mauvais état, en mauvaise humeur, & voilà l’heureux début de St Germain !
C’est parfaitement bête, car le lieu est ravissant, l’air et le temps aussi. Mais au lieu de mes conforts auxquels Je tiens beaucoup je suis dans une méchante auberge. C’est honteux pour Henri IV. J’attends encore votre lettre. Il parait que St Germain est plus loin que Versailles. Les journaux même n'y sont pas venus encore. Nous sommes arrivés ici hier à 4 heures à 6 Kisseleff et Pogenpohl sont venus dîner avec nous. Dolgorouky qui devait venir partait le même jour. Kisselef a quelque chose à vous montrer sur la Grèce , je crois que c’est de Londres qu'il l’a reçu. Il dit beaucoup que cela va bien mal en Grèce. Il dit aussi qu’on craint que Piscatory n’ait des penchants trop constitutionnel pour l’êtat du pays. Du reste il ne savait rien.
2 heure & demi. Voilà Etienne et une charmante lettre, car je vous reverrai plutôt, ma joie est grande autant que j'ai la force d’en avoir aujourd’hui. Génie m’explique que vous devez avoir reçu le courier qui vous manquait. Mais quel ennui et que je vous plains, car si votre lettre m’avait manqué je sais bien que je n’aurais plus le sens commun. Au reste comme tout vous manquait à la fois vous ne vous, serez pas inquiété pour moi. Je désire bien appendre que vous avez retranché, the objectionable word de ce que vous aviez envoyé à Londres mandez-le moi. Adieu, il faut renvoyer Etienne pour que ma lettre ne manque pas le courrier. Adieu. Adieu.
Vous me dites que vous me reverrez cinq jours plutôt après m’avoir dit que vous quitterez le Val Richer le 21 ou 22, mais vous ne pouvez donc arriver que le 23, cela ne fait que trois jours de gagne. N’ai-je pas bonne grâce de vous quereller encore ? Adieu. Adieu. Adieu. Je serai à Beauséjour Mercredi prochain en même temps que vous. Mais dites-moi encore plus exactement votre retour. Adieu. Adieu.

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1 Bruxelles Vendredi 24 février 1854

Ah que j'ai de tristesse dans l'âme. Quel triste voyage ! Et quelle fatigue. Je ne suis arrivée qu’à 10 1/2 Chreptovitch était à la gare pour me recevoir. Je n'ai encore vu que lui. Je vous écris de bonne heure.
J’ai eu une lettre de Berlin. On a à peu près chassé Seymour sans vouloir le voir. Son collègue Castelbajac a été comblé et après avoir ici son audience, c’est l'Empereur lui même qui lui a remis ses passeports & lui a dit ensuite. Puisque vous n'êtes plus le représentant de la France, laissez-moi vous remercier de la conduite noble & chevaleresque que vous avez su tenir dans cette triste affaire. Il lui a remis lui- même alors les insignes de l'ordre de St Alexandre accompagnés d'un écrit de sa propre main. En disant adieu, le général a fondu en larmes.
Ecrivez-moi beaucoup. Chreptovitch dit qu'un on ne sait rien, absolument rien. Il ne fait pas froid & je suis assez bien logée. Adieu, donc & encore. Adieu, quel malheur de vous avoir quitté, d’avoir quitté tout !

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19 Bruxelles le 26 mars 1854

Evidemment la nouvelle donnée à Hélène est fausse mais c’est étrange. Brunnow est venu chez moi à son débotté avant d’avoir vu aucun de ses collègues. Il se disait ignorant de l'objet de sa venue. Chreptovitch qui était à la chasse tenait les dépêches enfermées chez lui. Il sera plus édifié aujourd’hui. Le ministre d'Angleterre n’est pas inquiet. Il ne peut voir dans tout cela qu'une pensée de paix. Mais comment la concevoir aujourd’hui ? Lord Howard. a rencontré chez moi Brunnow, très bien ensemble. L'Anglais est très aimable pour moi. Je suis le dernier fil, car on ne va plus les uns chez les autres.
Vous trouverez votre chambre à Bellevue. C’est rempli mais je me suis assuré de ce qu’il vous faut. Que je serai aise de causer, d'entendre. du bon français d’abord ! N’allez pas vous ennuyer ici, cela n’est pas bouffon. Tout ce que vous me dites sur nos affaires & notre conduite. est admirable de vérité. Je vois bien que même les Russes. pensent comme vous là dessus, mais il n'osent pas se le dire. En attendant l'exaltation est énorme en Russie. L’Empereur en visitant Cronstadt a fait faire en sa présence l’essai d'un nouvelle invention épouvantable comme destruc tion. Cela a parfaitement réussi. Il a ôté son casque ici en disant : " Venez messieurs les Anglais, nous sommes prêts. " Voyez-vous tout cela je le trouve abominable. Décidément je ne suis plus bonne qu'au peace society.
Le temps est fort laid, froid ; mettez-vous chaudement. Au reste les voitures sont chauffées sur le chemin de fer. Vous me direz par quel convoi vous comptez partir. 7 du matin vous amène ici à 2. C’est le plus accéléré. Celui de 11 1/2 n’arrive qu'à 10 1/2. Ne prenez pas celui du soir vous seriez trop fatigué le lendemain. Vous l’étiez tant en venant du Val Richer. Adieu, quel plaisir de m’occuper du bout de la semaine.

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47 Schlangenbad le 15 août 1853

Constantin est arrivé hier ici très inopinément. Il y passera quelques jours. Je n'ai rien décidé encore pour mon départ, mais il est très probable que je serai à Paris avant la fin du mois. J’ai lu la pièce acceptée par mon gouvernement et sans doute aussi par la Turquie & qui termine cette maudite affaire. Il me semble que c’est même plus explicite et plus obligatoire que ce que nous demandions. Les Anglais et Français ont confectionné cette pièce et c'est Lord Radcliffe qui dans ce temps avait conseillé la résistance ! Le roi de Wurtemberg est parti ce matin. Il a passé hier la soirée chez moi. Très aimable ; je regrette qu’il n’y soit plus.
Voici votre lettre du 12. Et Votre explication de notre conduite. Je l'enverrai à [Meyendorff]. Elle est curieuse et juste. Je ne lui enverrai pas l'autre page qui traite du Prince de Joinville. Elle n’est pas digne de vous. Il n’a aucun mérite à sa dénonciation. Les plus simples lois d'honneur et d’humanité lui en faisaient un devoir.
Je crois sans en être bien sure que je quitterai ceci le 23. Si je ne fais pas de halte ou de détour je serai à Paris le 26 ou 27. Vous serez informé et dans ce cas vous me donneriez bien autant de jours qu'à l'Académie ? Lady Jersey est arrivée à Wisbade et me demande un rendez-vous. Cela m'ennuie. Adieu. Adieu. Adieu.

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20. Bruxelles Mardi le 28 Mars 1854

Voilà donc la guerre déclarée ; et bien qu'on se batte, mais qu’on fasse vite, et que cela finisse. Hélas c’est cela qui sera difficile. L’Empereur retire toutes les promesses d’Olmentz, il ne se gouvernera plus que selon les circonstances. Nous sommes intoxicated. J'ai eu 4 heures de tête-à-tête avec Brunnow. Il a beaucoup d’esprit. Et il est fort triste. Kisseleff rit tout le jour avec tout le monde excepté moi avec qui il ne rit ni ne pense car je ne le vois jamais. Tous les autres Russes sont très soigneux de moi. L’Autriche ne se déclarera que si nous passons le Danube. Je crois que nous ne le passerons pas.
Je suis charmée que vous preniez le convoi de 7 heures du matin. Mais envoyez encore à Paris prendre des informations précises. Je pense avec tant de joie aux bonnes causeries que nous allons avoir ! Je vous écrirai encore un mot demain. Adieu. Adieu. 

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Richmond le 13 octobre 1849
11 heures

Mon dernier mot d'ici. Je pars pour Londres où je passerai trois jours. Mardi je pars, mais le temps est affreux. Mad. de Caraman dit qu’elle m'ac compagne. J’aurai peut-être Kolb. Pour Mussy, je n'y compte guères. Lord John est vraiment triste de me voir partir. Toujours de bonnes conversations avec lui. Je crois qu'à la longue je serais utile un peu. Mais bonjour ! Rien de nouveau. Je suis convaincue que Strattford Canning est l’auteur de tout ceci. Il pouvait empêcher l’éclat. Il me semble que John est de mon avis. Je suis très fatiguée d’arrangements, quel ennui de se déplacer quand on n’est pas une impératrice. Adieu. Adieu. d'ici. Peut-être j'ajouterai un mot de Londres.
Clarendon Hotel 4 heures Je reviens déjà de chez mon oculiste, & de chez mon banquier. Demain est inutile à Londres, il faut tout faire aujourd’hui, & j'ai beaucoup à faire. J’ai eu une bonne lettre d'Aberdeen bien sensée, je l'envoie à Lord John, c’est du bon commérage. Les deux hommes ont du gout l’un pour l’autre. Votre lettre ne me reviendra de Richmond que ce soir.

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192 Saverne Mercredi 5 juin 7 heures du soir 1839

J'ai fait hier 20 postes 1/2 et je suis arrivée à Soul morte de fatigue. Madame de T. n'a rien fait pour la diminuer, au contraire, attendu que vous me croyiez en bien bonnes mains. Moi j’étais parfaitement la dupe de mes espérances. Au lieu de secours elle était un obstacle et elle a couronnée la journée en prenant un rez-de-chaussée bien commode, et m’envoyant moi 35 au second pour être bien mal. Secours moral de sa part tant que je voudrais, mais matériel non. C'est une leçon dont je profiterai. Il n’a pas été question qu’elle entre dans ma voiture, enfin rien rien que ce qui lui convenait. Vous voyez que j'ai de la rancune.
En voilà une page toute éclairée. Ici je suis seule heureusement, est bien, je vais manger et me reposer demain je serai à Baden vers les quatre heures, sauf accident. Il pleut des torrents, les routes sont gâtées. Aujourd’hui je me sens mieux et j'ai hâte de vous le dire, et de vous dire aussi que j’ai passé ma journée au Val-Richer et que j’y resterai certainement jusqu’à dimanche. Il me tarde bien d’avoir une lettre J'espère la trouver demain. Adieu, adieux et encore adieu.

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76 Cologne jeudi le 3 Juin 1854

J’entreprends ce voyage avec une grande tristesse. Jusqu'ici je le faisais assez joyeusement. Espoir de santé, de beau temps, & parfaite certitude de Paris au bout de cela. Maintenant quelle différence. Le temps aussi est affreux, froid, pluvieux du brouillard. " Le ciel n’est pas plus noir que le fond de mon cœur. " Enfin que faire.
J’ai eu encore vos 85 & 86 à Bruxelles hier matin. Tout le monde m’a accompagnée au chemin de fer. Russie, Autriche Prusse, Brunnow. A propos avant hier matin quelques personnes chez moi, autres Kisseleff. Je dis ah ah très haut, il s’approche comme un petit garçon. Princesse je viens vous demander pardon, j’ai eu bien tort, grand tort, je vous prie d'oublier. Monsieur en ce cas c’est oublié & puis de la causerie générale. Et puis il se lève pour partir. Encore veuillez me pardonner, j’ai eu bien tort.
Monsieur, je regrette que vous m’ayez dit cela si tard. Et voilà qui est fini j’étais restée 6 semaines sans apercevoir le bout de son nez & avant vous savez. On rit beaucoup. Il n’est pas possible de se conduire plus sottement. Un petit enfant. Je lui ai trouvé bien mauvais visage.
Je ne sais pas de nouvelle naturellement la lettre de Morny m’a fort attristée. Il n'y a rien à espèrer. Adieu. Adieu. Je ne me sens pas bien un mauvais dîner d'auberge hier me rend malade. Hélène & Olga sont charmantes. Cette petite me charme tout à fait. Paul nous mène à Ems, & nous laisse pour aller à Aix-la-Chapelle. Adieu.

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77. Ems samedi le 10 juin 1854

Vos lettres font toujours mon plus grand plaisir. Elles vont être maintenant ma seule ressource. Plus de causerie, personne. Il n’y a pas un chat ici. Le temps est affreux, très froid. Je suis gelée. On ne peut pas se baigner par cette température. Mon voyage m’a fatiguée et j’ai eu une attaque de bile bien désagréable à mon âge, il ne faut plus se déranger. Et combien je vais l’être encore.
Les nouvelles du théâtre de la guerre me paraissent bien confuses. Je ne sais que croire. Je me méfie de nos bulletins. Je n’ai pas grande confiance dans les autres non plus 3 heures. J’étais si triste en vous écrivant tantôt que je n’ai pas que continuer. Je reprends après avoir fait quelques pas à pied. J’ai été chercher un piano et des fleurs, leur vue me ranime un peu. Vous ferez bien de me plaindre.
Je vois dans le journal de Francfort que le Gal. St Arnaud se serait plaint à Paris de l'embarras que lui donne Le Prince Napoléon à cause de la protection publique qu'il accorde à tous les réfugiés & aventuriers politiques. Le journal ajoute qu’après un conseil tenu à St Cloud on aurait promis le rappel du Prince si sa présence nuit aux affaires. Je ne sais ce qu'il y a de vrai là à Bruxelles je n’en avais pas entendu parler. Je n’ai pas eu un bout de lettre de personne depuis mon départ. Adieu.
Voilà la pluie, et du vent, & de froid. Ah c est bien laid ici Adieu. Adieu.

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102. Ems vendredi 21 juillet 1854

Encore Ems. Tout était prêt ; mes gens à peu près partis & moi sur le point de monter en voiture hier, j’attendais seulement la poste & mes lettres. En voilà une d’Olliffe qui m'annonce que lui & Morny seront ici aujourd’hui. Je remets mon départ, je les attends. Hélène n’a pas pu attendre, elle est partie et mon fils aussi. Ce matin une lettre de Morny du même jour mais plus dubitative. Cela me vexe. Je n’attendrai pas au delà de demain, et je partirai. Par quoi finira ma tristesse ? Je ne me sens de courage à rien si vous étiez là ! Ah mon Dieu quelle bénédiction, quel bonheur ! Mais personne à qui dire ce que je pense, personne même avec qui causer de ce qui se passe et dans quel moment !
Je ne crois pas du tout à la soit-disant dépêche de Nesselrode à Budbery. C’est trop absurde et d'un ton qui n’est pas à notre usage. Les minoteries à droite et à gauche sont incroyables. Constantin est toujours à Peterhof. La mort du Comte Vorontsov a causé là un vif chagrin. Tout de suite après les couches malheureusement de la Grande Duchesse Catherine, femme du Duc George de Mecklembourg. Elle était très mal et l’enfant mort. On ne parle plus des flottes à Peterhof, ni de la guerre.
Évidemment l’Autriche hésite encore. Cela ne peut cependant pas se prolonger. La Prusse est toujours en grande tendresse pour nous. Les petits allemands attendent avec curiosité. Il me paraît que l’Espagne tout entière à fait son prononciamento. Ce n’est pas mauvais, mais cela peut nous donner du nouveau. L’Europe est bien arrangée ! Adieu & Adieu.

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104. Ems le 24 Juillet 1854

Me voilà encore. J’ai du plaisir à la société de Morny. Je ne trouve rien de si agréable à Schlangenbad. D’abord c’est que je n’y trouve rien du tout. La chaleur est excessive. Je recule devant ce voyage. Je reste emballée cependant, mais je lambine. Ici nous causons beaucoup, toute la journée. Morny est bien agréable. Il a de plus un talent de musique charmant. La plus belle voix. Il est bien à son aise, je n’ai plus personne, car le prince de Prusse est absent pour quelques jours.
L'Espagne devient une véritablement grosse affaire. Personne ne s’en mêlera. C’est convenu. B. d'Hilliers va avec ses troupes occuper l'île de Gothland, c. a. d. qu'on l’y reçoit. La Suède se serait donc compromise contre nous. Cela me parait exorbitant mais nous devons nous attendre à tout. Nous avons bien mené nos affaires !
Comme il y a à parler, à penser. Une grande révolution s’opère en Europe. Toutes les situations sont changées. & l'ancien état de choses ne peut plus revenir. J'ai beaucoup à dire, mais Je meurs de chaud, et j’écris un peu loin.
Morny est découragé. Il croit qu’Ems ne lui conviendra pas. Olliffe est d'un avis contraire. Ils vont décider ce soir s’il reste ou s’il va à Plombières. Il a eu aujourd’hui une reprise de ses audiences de Paris. Adieu. Adieu. Je n'ai aucune nouvelle de Russie, & je ne crois pas un mot aux nouvelles des journaux. J’attends les faits. Une bataille. Encore ! Personne n’aura été battu. Adieu. Adieu.

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105. Ems le 26 juillet 1854

Toujours ici encore. Vos lettres se promènent mais elles m'arrivent je n’ai pas fixé de jour, je lèverai le camps du soir au matin. Je suis restée emballée depuis 8 jours. Morny est bien malade, et découragé. Il ne veut pas rester ici, mais il ne se décide pas. La conversation me plaît et m’amuse, je m'ennuierais à Schlangenbad profondément. Hélène m'écrit pour m'exhorter à rester. Elle sait que l'ennui est ma plus grande maladie. Enfin je suis encore là, sans savoir si j’y serai demain. Nous avons des chaleurs excessives. On ne peut pas bouger le jour. On ne peut pas dormir la nuit.
Pas de nouvelles. D'Orient rien militairement & politiquement on élabore quelque nouveau protocole qui voudra dire que nos propositions ne sont pas acceptées. Je sais ce pendant qu'on les a trouvé pas sables et que sans y donner suite à présent, on les regarde comme des jalons pour l’avenir. L’Espagne. Que va-t-elle devenir ? Je crois que c'est Espartero qui va reparaître et régner.
Je ne sais sur la mort du général Aurep que ce qu’en disent les journaux. Sa femme avait passé ici il y a une dizaines de jours. Elle ne s’y est arrêté que quelques heures pour me voir. Les journaux sont si menteurs que je ne crois pas encore à cette mort. Si l'Espagne était arrivée dans la belle saison du bavardage de mon salon, que de choses à se dire, et Dumon comme il parlerait ! Adieu. Adieu, que se passera- t-il encore jusqu’au temps où nous nous retrouverons tous ? Ce temps viendra-t-il ? Adieu.

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Clarendon Hôtel Dimanche Le 14 octobre 1849

Longue visite hier de Collaredo. Ils me soignent beaucoup. J'avais donné quelques hints à Lord John sur les dégouts que Collaredo ressentait ici. Hier il m’a dit qu'il a donné sa démission. Il ne veut pas rester exposé à être traité comme le fait Lord Palmerston. Il est très décidé. Il passera probablement par Paris en se rendant en Italie où il passera l'hiver. J’ai vu Flahaut aussi. Morny est toujours ici, & ne sait pas du tout quand il partira. J'avais envoyé la lettre de Lord Aberdeen à John Russell. Il me l’a renvoyé avec quelques explications. L’effet de la lettre a certainement Eté bon, car l’opinion d’Aberdeen était appuyée de celle de Peel qui se trouve chez lui. Tous deux trouvent qu'on a beaucoup trop grossi l’affaire ici, & qu'a Constantinople. Canning a été dans son tort. Il y a des nouvelles de Pétersbourg. On connaissait l’événement turc, & on attendait pour ne dire son avis que Fuat Effendi soit arrivé pour expliquer & excuses, car c'est comme excuse que nous prenons son envoi. Je commence à penser aussi que cela s'arrangera.

Lundi matin le 15 octobre envoi de votre lettre. Je n’ai que deux minutes à vous donner. Hier longtemps Brunnow, C. Greville, Flahaut, Morny, & la Marquise Douglas, qui me raconte beaucoup Paris, & le président, le comte de Chambord & sa femme, avec lesquels elle et aussi intime qu’avec son cousin Louis Napoléon. Brunnow croit que cela s'arrange. Il blâme un peu Titoff & beaucoup Canning. Tenez pour certain que c’est lui qui a fait tout le mal. Morny dit qu’à Paris on est très pacifique. & que le Président l’est surtout. Voilà tout en très gros. Quel dommage pour le détail ! Le départ de Collaredo fera sensation ici, contre Palmerston. Adieu. Adieu.
Il souffle très fort & Douvres & Calais & Folkestone & Boulogne sont encombrés de gens qui ne peuvent pas passer. J'attendrai comme eux, s'il faut attendre. Adieu. Adieu, vous aurez encore un mot d'ici demain.

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Paris Vendredi 19 octobre 1849
11 heures

Vous n’apprendrez absolument que le fait de mon arrivée. Mais enfin me voilà, depuis hier à 6 heures. Kisselef m’avait attendu longtemps chez moi. Il n’avait plus pu m’attendre. Je ne le verrai aujourd’hui que tard & je n'ai pas encore vu une âme. J’ai dîné, je me suis couchée. Une mauvaise nuit. Merci, merci, de vos trois lettres. Celle de hier me manque encore. Elle viendra. J'éprouve un vif sentiment d'insécurité. Pour vos affaires d’abord, & puis les affaires Turcques, l’affaire est trop engagée à ce qu’il me semble & à ce qu’il semble à Brunnow. Je verrai ce qu’en pense Kisselef. Je ne déballe rien jusqu’à plus ample informée. Vous savez bien que je ne suis en France que jour vous. Mais la République rouge où la guerre à la Russie m'en chassent, c’est clair. Et bien sous ces deux rapports, tout me paraît bien en l’air. Mes deux compagnons de voyage ont été excellents & très utiles. Tout s’est bien fait. Seulement j'apporte un rhume abominable. J’ai trouvé une lettre de Beauvale sur mon hint à Lord John à propos de Collaredo, John a écrit droit à Vienne pour supplier qu'on le nomme ambassadeur. On me prie de tenir cela secret. Bien petit intérêt à côté de tout ce qui se passe. Je vois que Thiers s’est battu hier. Je vous dis Adieu pour le cas où je sois envahie. Vous ne savez pas tout ce que j'ai à faire ! Adieu. Adieu.
2 heures. Voici votre lettre vous n'êtes pas très rassuré non plus. Il me semble que j'ai choisi un mauvais moment, si à présent je suis obligée de m'en aller, Adieu la France pour toujours, Ah quelle tristesse ! Adieu.

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49 Schlangenbad le 19 août 1853

Je vois d’après votre dernière lettre que vous voulez requitter. Paris le 26. Je ne suis pas sûre d'y être arrivée même ce jour-là, cela dépend de plusieurs choses trop longues à vous dire. Dans cette incer titude, il vaudra mieux ne pas m'attendre, car de mon côté cela m’étranglerait si j'étais obligée de me trouver là à jour fixe. Ecrivez-moi à Francfort. s/m en réponse à ceci. Hotel de Russie.
Je commence à m'inquiéter de la réponse de Constantinople. Acceptera- t-on là ce qui a été trouvé bon à Pétersbourg ? D'un autre côté Pétersbourg avalera- t-il aisément ce que Clarendon a dit le 9 que l’évacuation des principautés devait faire la base de toute négociation ? J’en doute. Greville déclare que la flotte anglaise ne se retirera que lorsque nous rentrerons chez nous. Elle aura mauvais temps. Enfin tout n’est pas fini. Je trouve très bons les quelques mots que votre empereur à dit à lord Cowley. Adieu. Adieu.

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53 Strasbourg le 29 août 1853

Je suis partie de Sch. assez souffrante. Je voyage lentement. J’ai couché ici, je n’arriverai à Paris que demain. J’ai trouvé ici Heeckeren qui nous a amusé. Je n’ai pas de nouvelle à vous dire naturellement. Je serai charmée de me reposer chez moi. Adieu. Adieu.

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42 Schlangenbad le 4 août 1853

Décidement mon voyage ne me profite pas. Je rapporterai à Paris tous mes maux avec & quelques nouveautés p. e. des crampes affreuses dans les jambes. Vous voyez bien que les médecins sont des imbéciles. Le temps est assez beau. Je prends de l’air tout ce que j’en puis prendre. Je ne m'ennuie pas, et quelques fois même je m’amuse. Marion a fait hier chez les vieux Rothschild un dîner impayable. La Princesse Louise de Prusse, Klingworth celui-ci bavardant & mentant, elle idiote. Des Allemands les Croy. Elle est revenue de là impayable de moquerie. Tous les Rotschild sont partis. Les vieux ce matin, Mad. James avant hier rappelée par son mari. Le Général est parti aussi. Tout cela sera rempli par des Biberes, ancien hospoder. C’est une lanterne magique. Nous rions souvent le roi et moi, il a vraiment bien de l’esprit. Le Prince Emile vient aussi me voir de Wisbade, tout autre genre, de la très bonne espèce. L'Empereur Napoléon vient de lui envoyer son grand cordon de la légion d’honneur en souvenir des grandes campagnes. Je ne sais rien de plus sur l'Orient. Cela finira pas la guerre après avoir fait éclater des révolutions à Constantinople le sultan est très menacé.
Je crois que mon fils Alexandre va venir bientôt ici. Je déciderai avec lui de mes mouvements ultérieurs. Je penche un peu pour Paris. Adieu. Adieu.

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16 Bruxelles Lundi le 13 juin 1853

Adressez vos lettres à Ems ayez soin de mettre par la, Belgique en haut et près de Coblence. Quelle fatigue, mais je vais me reposer un jour. Je suis venu commodément avec Paul et Marion. Je trouve ici Hélène K. Chreptoviz part demain pour la reine. Nous allons ensemble à Cologne. Paul est un charmant compagnon de voyage. Ma dernière journée de Paris a encore été bien occupée & bien employée. Tout ira bien. Nous entrerons. Vous n’entrez pars. On négociera. On aboutira car c'est de vous & le besoin de tous. Nous sommes très contents de vous. Contents d'Aberdeen. Bien contents du roi Léopold.
Menchikoff a été maladroit & Stratford Canning détestable. Mais les cours respectives soutiennent leurs agents. La diplomatie à Paris est dans un [?] énorme, je vais bien leur manquer. Je vous ai dit que j'étais charmée de ma dernière conversation avec Fould. La France se fait & se fera un grand honneur dans cette affaire tant mieux pour elle et pour tout le monde. On a fait beaucoup d'arrestations à Paris des rouges.
Adieu, car je suis prise de tous les côtés. Hier j'étais bien malade, je me sens mieux aujourd’hui. Adieu. Adieu. L’Autriche, nous appuiera.

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Bedford Hôtel Brighton Dimanche le 29 octobre 1848

Je commence Brighton bien mal. Votre lettre n’est pas venue. Pourquoi ? Vous êtes maladroit en expéditions de lettres. Sans doute trop tard à la poste, car je ne veux admettre, ni maladie, ni oubli, ni paresse. Je vous en prie, ne me faites pas de ces mauvais tours. Vous savez que tout de suite je m'inquiète. Quel temps hier, quel voyage ! Pas même Gale, personne. Avec la multitude d'amis et d’obligés, je manque toujours d’obligeants, tandis que tout le monde en trouve. J'ai eu bien peur, j’ai eu bien froid. Je trouve ici une tempête, de la tristesse, de la solitude, un joli salon mais petit comme une cage avec des courants d'air de tous côtés. Je ne sais comment je pourrai y tenir. La bonne Marion est venue deux fois me recréer la vue & me réjouir le cœur. Aggy va décidément mieux. J'irai la voir aujourd’hui, si la tempête me permet de sortir. Vous ne m'avez pas donné votre adresse pour Cambridge.
Voici Brougham amusant. Hier pas un mot de politique et je n’y ai pas pensé ; savez vous que cela repose. Et que cette continuelle agitation, excitation est très malsaine. Je ne m’agiterai tout le jour, aujourd’hui, que de votre silence, mais c’est bien pire que la politique. Je serai en rhumatisme, en choléra, cependant tout cela n’aurait pas empêché un bout de lettres, et je crois que je resterai encore un peu plus fâchée qu'inquiète.
Le Constitutionnel raconte le discours de Louis Bonaparte. Sans commentaire. La Prusse appuie cette candidature à défaut de Lamartine qu’il regarde comme impossible faute de votants. Je découpe ce qu’il dit sur Thiers ; et que je trouve très bien.
Adieu, Cambridge est loin, bien loin de Brighton. Je voudrais être à vendredi pour vous tenir plus prés. N’allez pas trop manger ou boire dans ce ménage anglais. Dites-moi votre adresse, je crains que vous ne l'ayez pas fait, de sorte que demain j'adresserai ma lettre tout bonnement à Cambridge. Envoyez la chercher à la poste. Adieu. Adieu

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3. Paris Mardi 8 octobre 1844 à 11 heures.

Quel bon réveil ! Une lettre de vous, je m’agitais dans mon lit pour deviner comment s’était passé cette nuit de Dieppe, & puis les assassins et tous les autres dragons que je me mets en tête. Lorsqu'on m’apporte votre lettre d’Eu. Je n’ai pas besoin de vous dire mes rages, mes imprécations au récit de vos aventures. Pas de places aux postières ! Il ne manquait plus que cela ! Et par une soirée froide humide, et le vent en face. Ah mon Dieu ! Vous voyez que tout le monde autour de vous est bète. Comment est-ce que Herbert vous a envoyé une voiture comme cela. Vraiment je suis en fusion. Jamais je ne l'ai été autant. Mais voyons. Le nuit a été calme, je n’ai pas dormi ainsi je sais très bien que j’aurais pu dormir sans inquiètude. A huit heures épais brouillard, mais vous étiez in smooth water. A présent, brillant soleil. L’arrivée doit être belle. Et mon dieu je me figure cela, & Dieu sait ce qui se passe ! A distance le plus sûr c’est d'être toujours alarmée.
Que de serment je fais à chaque séparation, de ne jamais en espérer de vous ! Il y avait l'Angleterre à dîner hier chez les Appony j’y ai diné aussi ; il n’y avait que cela. Aujourd’hui répétition chez les Cowley. On parle beaucoup du voyage.
Je suis restée jusqu'à 10 heures, & puis je suis revenue trouver mon lit. J’ai écrit à mon fils en lui envoyant toute ma correspondance sur son affaire. Comme la paquet est gros c'est à vous que je l'adresse. Ayez la bonté de le faire passer à Londres. Pilot a promis de s’engager par écrit pour l’année prochaine. Je n’ai pas entendu parler de Morny. Vraiment vos journaux sont des imbéciles. Vous ferez fort bien de dire à Windsor que personne ici ne fait attention à toute ces sottises qui se disent sur la visite du roi. C'est vrai, car c'est trop bête. Voilà vite qu'on me demande ma lettre. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Cologne le 5 Juillet 1850
8 h. du matin

Quelle fatigante journée que celle de hier ! En arrivant ici j'ai pleuré de fatigue, pleuré tout- à-fait. Me voila reposée & je pars. Voilà donc Peel mort. C'est une grande et affreuse nouvelle. Je vois que si cela est bon comme question de part, c'est plein de périls futurs pour le pays en tout cas l’événement à une portée immense. Et pour le moment ce sera une perte sensible pour le gouvernement. Vous songerez à cela bien mieux que je ne saurais le faire. Moi j’en reste bouleversée.
Le Prince de Prusse arrive après-demain à Bruxelles. Cela fait grand plaisir au roi Léopold. Il ne lui dira que de bonnes & utiles choses. Je suis impatiente d’arriver à Ems pour y trouver votre lettre vos lettres peut-être. Je serai avis de me reposer & de me soigner, & de me débarrasser de tout cela le plus tôt possible. Adieu Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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2. Paris lundi 7 octobre 1844,
1 heure

Voici ma seconde lettre depuis votre départ. Départ, absence, c’est abominable. Je ne suis pas raisonnable. Je m’inquiète, je me désole. Hier je suis arrivée à 5 1/2 à Champlatreux. Très bonne et Gracieuse réception, M. & Mme Molé sur le perron. Personne au Château que M. & Mme de la Ferté & Madame, je ne sais what de l’aigle. Petite femme une lionne.
Le diner à 7, la causerie générale jusqu'à 10 1/2. Ce matin à 9 heures promenade à pied dans les serres, & à 9 1/2. All night go on. J’étais ici avant midi. Il ne s’est pas dit un mot de politique. L’humeur est douce & galante.
Voilà Génie qui entre votre lettre à la main. Belle lettre ! Belle aventure. Vous voyez bien que vous ne songez à rien. Que personne ne s’occupe de vous, et de ce qui vous regarde chez vous. Partir avec une roue qui ne tourne pas ! Rester pour cela cinq heures de plus sur la grande route. Coucher dans une méchante auberge. Une chambre qui n’aura pas été avec des matelas froids, du linge humide. Un stupide valet de Chambre qui n’aura su rien faire ! Je suis dans une colère, ah mon dieu, que je suis en colère ! Ce voyage commence mal. Je vais plus que jamais me chagriner. Je ne saurais rien vous dire que mon désespoir.
Le temps est clair, mais le vent est très froid et très contraire et suffisamment fort pour vous rendre bien malade. Si vous étiez très bien portant, très fort, je serais très inquiète. Voyez un peu ce que je suis aujourd'hui ! 3 heures
Je viens de voir Appony & Bacourt. Point de nouvelles, ils m'en demandent. Voici une lettre de Lady Palmerston reçue à l’instant et que je vous envoie. Ils ne viennent pas à Paris. No harm. Adieu. Adieu, plus que dearest. Si vous pouvez vous soigner. Si je pouvais avoir demain de bonnes nouvelles. Et que je serais contente. Adieu. Adieu.

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5. Paris Mardi le 31 mai 1853

Votre petit ami a passé hier 3 heures chez [Kisseleff] et en est sorti bien content. Mon fils aîné est arrivé ; il m’accompagne à Ems de bonne grâce même. Je n’ai pas encore fixé le jour de mon départ, en tous cas pas avant samedi. Je ne sais pas de nouvelles. Menchikoff est arrivé le 24 à Odessa. Si nous n’agressons pas d'ici à demain. Que nos troupes avancent c'est qu’il n’a pas les pleins pouvoirs pour les mettre en mouvement. C’est très curieux comment nous nous tirerons de ce mauvais pas. Je ne conçois pas la bonne manière pour notre dignité. Il me semble qu'il faut aller battre les Turcs bien vite, lancer un manifeste rassurant à l’Europe, et puis laisser le sultan à Constantinople, avec de telles garanties pour nous, que la signature de la convention proposée devienne inutile. Quand nous aurons battu & fait grâce de la vie tout ce que nous céderons aura bon air. Je ne sais rien aujourd’hui et je ne saurai que plus tard. Le temps est détestable. Adieu. Adieu.

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Bruxelles jeudi 4 juillet 7 h. du matin

Je vais partir, bien fatiguée. Je vous ai dit n’est-ce pas que mon fils Alexandre me mène à Ems, il n’y restera avec moi que deux jours. J’ai pris un Médecin allemand Kolb que vous connaissez. Aujourd’hui la princesse Chreptovitz chemine avec moi jusqu’à Cologne. Hier j’ai vu le roi pendant une heure bonne conversation, intéressante, plus que jamais plein de sens, de bonne vue, de jugements excellents sur toutes choses quelques notions de plus sur l'Angleterre. Ainsi Lord Palmerston disant au Ministre du Brésil qu’il lui était bien égal que le Brésil fut république ou Monarchie. La reine des Belges assez bonne mine.
J'ai beaucoup causé avec M. van Pradt, beaucoup d’esprit. Et avec lui la causerie a été à fond sur tout ce qui vous préoccupe en France. J’ai raconté et insisté, sur la minorité de bons conseils là où ils sont si peu écoutés. Il est entré dans tout ce que je lui ai dit avec réserve et intelligence. Neumann m’avait beaucoup dit que je pouvais en sûreté causer avec lui, et que ce serait utile. J’ai vu les Metternich un moment. Enfin ma journée a été pleine. Ma nuit meilleure que l’autre, & je pars en meilleur état que je n'étais arrivée. Voilà mon histoire jusqu’aujourd’hui. What next ? Adieu. Adieu. Adieu

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Richmond jeudi 19 juillet 1849

Votre petit mot de chez Duchâtel m’a fait du bien. Je l'ai reçu chez lord Beauvale où je dînais. Je me suis mieux tenue que je ne l’avais espéré, et les convives m'ont épargné les phrases banales. Brougham a été très aimable. Ellice un peu endormi. Beauvale mange & ne dit pas un mot, il est charmé qu'on l’amuse et qu’on le laisse tranquille. Grand égoïste. Lord Aberdeen est resté longtemps chez moi avant dîner. Il est très décidé à venir à Paris en 9bre et s'en réjouit tout-à-fait, il vous aime tendrement. Il ne s’attend pas à la majorité demain, mais il voudrait une minorité très respectable.
Ellenborough ne vient pas. Il est malade à la campagne, il a écrit à Lord Brougham ( qui me l’a montré) une lettre très sage très sensée sur la discussion de demain. Lord Aberdeen de son côté a fait part à Lord Brougham de votre recommandation de ne rien dire qui peut gêner les mouvements de la diplomatie française en Italie, & Brougham m’a paru très résolu à observer cette recommandation. Nous verrons car c'est une créature si mobile. Il a vivement regretté de n’avoir pas su le jour de votre départ, il aurait beaucoup désiré causer avec vous avant le débat. Lady Palmerston lui a écrit deux autres lettres, bien aigres & bien inquiètes, il raconte cela fort drôlement.
Je ne suis pas contente de moi. Le malaise continue. Il faut que ce soit dans l'air, car Dieu sait que je me ménage. Le temps est froid. Le vent a soufflé cette nuit. Vous concevez que je n’ai pas dormi, je vous voyais malade en mer.

Midi.
Vous voilà donc en France ! Que c'est loin de moi. Je suis charmée de connaître le Val Richer. Je saurai où vous chercher. Vous aurez un grand plaisir à vous retrouver là, à retrouver vos arbres, votre pelouse, Vos sentiers. Tout cela reposera votre âme. Vous avez là tout le contentement intérieur, de la famille, de la propriété. Je vous manquerai c'est vrai, et je crois que je vous manquerai beaucoup, mais vous avez mille plaisirs que je n’ai pas. Et certes dans cette séparation je suis plus à plaindre que vous. Vous le sentez. Je voudrais me mieux porter et j'y prendrai de la peine, pour vous faire plaisir.
La Reine ayant décidé qu’elle ne viendrait plus à Londres, a reçu hier l’ambassadeur de France à Osborne. Simple présentation, après quoi il est revenu à Londres avec lord Palmerston. La reine a gardé quelques ministres à dîner, elle avait tenu conseil. Elle ne prorogera pas le parlement en personne. Son départ pour l’Irlande est fixé au 2 ou 3 août. Hier encore il m’a été dit de bien bonne source qu’elle est plus que jamais mécontente de Lord Palmerston et qu’elle le lui montre. Adieu. Adieu, mille fois. J’espère une lettre du Havre Samedi. Adieu encore & toujours.

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Bruxelles Mardi le 2 juillet 1850
8 h. du soir.

Ah quelle fatigue ! Levée à 4 h. du matin, un accident de route & arrivée ici éreintée. Avant de me coucher je veux vous dire un mot. Neumann est accouru chez moi. Il paraît que le roi ne comprendrait pas que je ne l’allasse pas voir. Cependant je suis si lasse, et si pressée d’arriver à Ems. Hier soir Molé est venu causer avec moi il avait passé quelques jours à la campagne. Il a retrouvé dit-il de l'anarchie dans l’assemblée. ne s’y préoccupait hier beaucoup de l’article du Constitutionnel qui annonce un avènement. Tout le monde croit que l’époque de la prorogation de l’Assemblée sera mise à profit pour tenter quelques chose. Je ne crois pas. mais il faut que Changarnier se tienne bien car on pourrait alors essayer de se débarasser de lui. J’ai bien du regret, il a paru chez moi hier deux fois, & je n'y étais pas. Molé me dit de lui que ses propos sont les mêmes.

Mercredi le 3 juillet onze heures.
La fatigue m’a rendue malade. Mon estomac bouleversé. Il me faut du repos, cependant je veux partir demain. Je déteste de traîner en route. L’accident arrivé à Peel est très grave. On m'écrit de Lundi qu’on doutait qu'il ne revienne. La chute était dit-on une apoplexie. S’il venait à mourir ce serait bien gros ? D'un côté rien ne ferait plus obstacle à l’union des partis, de l’autre si l'Angleterre est menacée d'une crise elle perdrait en Peel le seul homme capable de régler ce mouvement. Quelle destinée ! Nous verrons. Mes correspondants, Greville & Ellice ne me parlent que de cela. Ellice comme d'un great loss for the government. Je sais que la reine déteste plus que jamais lord Palmerston. L'exposition des industries anglaises et étrangères est près de faire naufrage. Le Prince Albert est furieux contre Brougham qui a soulevé à la Chambre des Lords la question du bâtiment à Hyde Park. Adieu. Je ferme ma lettre, voilà l'heure de la poste. J’ai eu la vôtre de Lundi ce matin à mon réveil. Adieu. Adieu. Adieu.

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17 Bruxelles Mercredi 15 juin 1853

Je suis restée hier encore pour Hélène. Et me voilà ici. Cologne jeudi le 16. Je ne sais plus quand je vous ai écrit & quoi. Je rabâcherais peut-être. Le roi restait inquiet sur l’Orient, très occupé & utilement en Angleterre.
Excellent pour nous. Excellent pour la France. Pleine de sagesse, d’équité. Vraiment un homme remarquable.
Vous ai-je dit que Menchikoff a le commandement en chef de l’armée de terre & de mer dans le Sud que l’Empereur a été vif contre Nesselrode dans le premier moment. L’accusant d'avoir emmené tout cela par sa politique molle depuis longtemps. Que [?] n’a pas l'ordre de mission. Je l’ai vu à Paris, il est venu chercher sa femme dont il est séparé depuis 2 années. Homme d'esprit. J’espère le voir à Ems.
Adieu. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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18 Ems Samedi le 18 juin 1853

Je suis arrivée très fatiguée, et je ne me repose pas encore. Demain je commence les bains. Il n'y a à Ems personne, jolie perspective. Mon fils meurt d'ennui. Il y a de quoi, il me quittera demain probablement et je ne pourrai pas lui en vouloir.
Nous nous nourissons des journaux. Je ne sais que penser de la grande affaire. Où va-t-elle nous mener tous, l'Europe entière. Il est parfaitement clair que c'est au fond rien ou peu de chose & que Lord Redcliffe seul lui a donné le caractère & les proportions que nous voyons. Je suis comme vous, je ne crois pas à la guerre. & cependant je ne comprends pas comment on pourra se tirer de là sans y recourir. Marion est très shy avec Paul. C'est étonnant comme il lui impose, et il est cependant charmant, & gai & amical. Pas de nouvelles de Constantin.
La Reine Amélie ne viendra pas à Bruxelles pour le mariage du duc de Brabant Elle n'y vient pas non plus pour la confirmation de la princesse Charlotte. Je tiens tout ceci du roi, qui met le plus grand soin à éviter tout ce que pourrait donner ombrage ou déplaire, & qui regrette seulement qu'on se livre à son égard et à l’égard des autres aussi à des soupçons parfaitement injustes, car bien certainement il y a bienveillance pour le gouvernement de France actuel, à Bruxelles à Vienne, à Berlin, à Pétersbourg. Partout la méfiance est très mal placée. Et peut entraver le bien. Adieu. Adieu, envoyez moi des nouvelles et des commentaires.
(Greville me mande que Walewski montre la plus grande joie. Quoiqu’il arrive la bonne entente est rétablie entre la France & l'Angleterre. Les partis orléanistes et légitimistes se montrent très contrariés de cela. L'Emp. de Russie qui ne voyait pas ce rapprochement possible aura été très contrarié en l’apprenant. En [Angleterre]. personne ne croit à la guerre. Mais on trouve la situation de l'Emp. difficile & on cherchera à l’en faire sortir sans trop déroger. Adieu.)

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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Me voici arrivée. J'ai hâte de vous voir, de vous regarder et de vous dire adieu. Dites moi où vous voulez que cela soit. Je puis aller chez vous de suite ou à telle heure de la matinée que vous fixerez. Rien ne me gêne. Et, il faut que je vous voie ce matin parce que comme mon fils dînera avec moi, je ne pourrais pas me débarrasser de lui à temps pour vous aller voir ce soir. Je vous préviens qu’il ne fait pas chaud chez moi ; on n’allume le feu que dans cet instant. Ainsi il vaut sans doute mieux que j’aille chez vous. Commandez que je vous remercie de vos deux lettres. Adieu. Adieu.

Dimanche 29. à 1 heure.

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3. Saverne Samedi 3 août 1844
6 h. du matin

Je veux encore vous dire adieu sur terre de France. Je serai triste en passant le Rhin ! Hier n’a pas été si bien que les autres journées. Un accident ; le postillon sous les chevaux... La voiture presque renversée. Mon Constantin a sauté dehors avec une prestesse de cosaque. Il a tout fait, coupé les traits, relevé le postillon. Enfin nous nous sommes remis de la frayeur et de l’accident. Cela a fait un délai d'une heure. Le pauvre postillon y perdra un doigt.
Je vais donc revoir mon frère aujourd’hui. Je commence à y penser. J’aurai un peu de plaisir, et quelques conversations curieuses. A propos, si l’envie de voir Strasbourg lui venait, s’il était curieux (ce qu'il sera) d’un exercice des chasseurs d’Orléans, Hennequin serait-il homme à l’orienter pour le jour où cela pourrait se rencontrer ? Ou bien pourriez-vous lui faire tenir quelque autorisation auprès du Chef militaire pour cela ? Cela serait de la bien bonne grâce. Je vous dis ceci en l'air, mais Constantin croit que son oncle serait le plus heureux du monde de voir pareille fête.
Les visiteurs de Bade arrivent à Strasbourg sans passeports. Au reste je vous reparlerai de cela encore quand je l’aurai vu. Je vais déjeuner et partir. Je soutiens bien le voyage. Constantin est tout étonné du peu d'embarras que je lui donne, mais cela vient de ce qu’il est là et que je ne m’inquiète pas de mille détails du voyage. Ma santé va assez bien. Adieu. Adieu. Ecrivez-moi, soignez-vous. God bless you dearest.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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33 Schlangenbad dimanche 17 juillet 1853

Je suis arrivée fatiguée. Je trouve ici la température de la Sibérie, beaucoup de monde, pas une connaissance, ma nièce qui a ici ses parents, le Roi de Wurtemberg arrivé hier aussi. Comme on ne dispose pas des rois, je ne sais trop s'il me fera une ressource. Les journaux et les lettres arrivent ici tard, je serai bien arrivée, et vous êtes plus loin que jamais. Votre dernière lettre est du 11. Au fond l'été est ma plus mauvaise saison. Je ne sais jamais l'employer. On dit qu’on va me regretter à Ems. J'y avais un vrai salon. Les princes de Prusse et [Panin] & Platen étaient le fond, cela avait fini par être agréable, après avoir bien mal commencé. Il fait très froid ici, froid comme en octobre. J’attends la porte, si elle m’apporte quelque chose, j’ajouterai, si non et en tous cas. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
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36. Schlangenbad samedi 23 juillet 1853

Je n’ai rien au monde à vous dire, mais je suis curieuse de savoir ce que vous avez dit de la circulaire de Drouyn de Lhuys. Moi je l’ai trouvé très bien faite simple, claire, et sans réplique. Très supérieur à Nesselrode. Est-ce de la rédaction de Thomanel ou du chef ?
Le roi de [Wurtemberg] a passé ici deux jours en courses pour faire visite à ses filles. Je ne l’ai pas vu. Mon fils Alexandre a été malade à Naples. Cela retarde son arrivée. Il ne sera à Paris que la semaine prochaine, & ici sans doute quand je voudrai. Ce sera alors que je déciderai où aller. Je n’ai pas grande envie de me remuer pour autre chose que pour rentrer dans mon home. Je ne crois pas qu’à tout prendre mon voyage n’aura fait beaucoup de bien ; il me donne avant tout le goût du repos. Adieu, voici une pauvre lettre. Du Val Richer il y a au moins les commentaires, mais que voulez vous qui vienne de Schlangenbad. Adieu. Adieu.
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