une femme capable d’un si noble emploi, car ma mère était trop malade et trop faible pour pouvoir remplir cette tâche.

     Il s’en présentait beaucoup qui voulaient à l’envi les unes des autres briguer cet honneur. Mais mon père en homme de talent et en connaisseur les examinait toutes ; il les faisait venir dans son cabinet les unes après les autres, là il s’y enfermait, puis les interrogeait d'abord sur leurs qualités morales et lorsqu’elles n’avaient pas toutes les vertus et les talens qu’il désirait trouver en elles, il leur ouvrait complaisamment sa porte et les priant de sortir, il leur disait : « Vous n’êtes pas faites pour avoir l’honneur d’élever mon enfant. Mon Aldric en suçant votre lait sucerait aussi votre ignorance et vos impuretés roturières. De même un fleuve roulant avec lui des matières fangeuses, les dépose, à mesure qu’il coule, sur les bords de son lit, ainsi le lait qu’il sucerait de vos mamelles déposerait dans son corps les germes de l’ignorance et des vices qui abondent en vous. Ces germes se développeraient à mesure qu’il avancerait en âge et vous seriez la cause qu’il se rendrait indigne de l’honorable et illustre famille dont il doit être le régénérateur. »

     Ainsi par ce bref compliment il en renvoyait beaucoup, mais celles qui avaient le bonheur de lui plaire, quant aux qualités morales, n’avaient pas encore passé par toutes les étamines et les filières que