Auteurs : Lesuire, Robert-Martin (1736-[1815])

Transcriptions
Il est juste qu’all’ soit servie s’lon son rang.
Cadet
Quien, c’est comme la queue z’au pain ?
Mme Gigomard, avec volubilité.
Et moi j’vous dis qu'il épous’ra Javotte. R’luquez-moi donc c’vieux loup-cervier, ça n’voudrait t’y pas contrecaler mes projets ? Va donc, tapin minable, réveil de corps de garde, limier d’patrouille, tu n’as pas encore un tac assez usité pour susplanter la Gigomard. Et not’descendance n’est pas comme la tienne à prendre ou à laisser. Les Gigomard n’se vendent pas au décalitre comme des p'tits pois.
Jeu pantomime
Ici Labreloque, pour couper court au caquet d’Mam’Gigomard, bat un roulement. Dans l’intervalle, Bambochinet tenant des habits allait rentrer en scène. Apercevant les personnages, il est prêt à se retirer lorsque La Scie qui est tourné vers lui le remarque. Bambochinet lui fait signe. La Scie le suit et ils quittent ensemble la scène sans que les autres personnages y aient fait attention.
Cadet
N’vous disputez pas mon oncle, tout va z’au possible, jai su disposer Bambochinet à la résignation la plus capable. J'hésitions d’vous avouer ça d’vant c't’enfant d’peur d’l'afflictionner.
Labreloque
Eh qu’y a-t-il de chagrinant ?
Cadet
Ouh ! ouh ! rien ! c’est qui n’voulait pas en démordre, l’ostiné ! Mais j'l’y ai seulement marqué une deux dans l'z’arrondissement, et y s’est toléré, à la force des reins. Gnia qu’un p’tit malheur : c’est qu'il a laissé ses réverbères sur l’champ d’bataille pour être les témoins éternels de sa défaite.
Mme Gigomard
Quoi, maudit bâtonniste[1], t’aurais fait z’un coup com’ça ?
Citronnette
C’est ben l’pus pire à présent. Faudra donc qu’j'eusse d’l’hyménée avec un mari z’éborgné.
Labreloque
La vengeance est un peu forte, mon n’veu.
Cadet
C’est z’un rien et pis t’nez :
AIR Je suis le maître de choisir
En contraignant le suborneur
À s’marier z’avec vot’fille,
J'étais poussé du point d’honneur
C’est le tic de notre famille.
Pardonnez-moi si le malheur
M’a fait trop venger cette injure
Dans l’moment j'étais confiseur.
Et j'en ai fait, et j'en ai fait.
Labreloque
Quoi qu’t’en a fait donc ?
Cadet
Et j’en ai fait des confitures.
[1] Attesté plus tardivement (1820, selon le Dictionnaire historique de la langue française, dir. A. Rey), le terme désigne une personne habile à manier le bâton comme une arme ou pour des tours d’adresse.
Informations sur cette page
- Obitz-Lumbroso, Bénédicte (responsable scientifique)
- Walter, Richard (édition numérique)